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dimanche 7 juillet 2019

De la manière dont saint François bénit le saint Frère Bernard ; et comment il le laissa son vicaire au moment de sa mort



Extrait des "Fioretti ou petites fleurs de Saint François d'Assise", par M. l'Abbé A. Riche :


Mort et Ascension de Saint François (Giotto)
L'éminente sainteté de Frère Bernard inspirait à saint François un profond respect, qu'il lui témoignait souvent par les éloges qu'il lui adressait. Un jour, Dieu lui révéla, pendant qu'il était en prière, que ce frère, par une permission divine, devait soutenir de longs et fréquents assauts de la part des démons. Touché de compassion pour celui qu'il aimait comme son fils, dès lors le Saint, pendant plusieurs jours, fit à Dieu pour lui de ferventes prières, et il demandait à Jésus-Christ, avec larmes, qu'il voulût bien lui donner victoire sur l'esprit mauvais. Un jour qu'il priait ainsi, une voix divine lui fit entendre ces paroles : « François, ne crains pas ; toutes les tentations que doit éprouver Frère Bernard sont permises de Dieu pour exercer sa vertu et couronner ses mérites ; il finira par triompher de tous ses ennemis, car il est un des prédestinés au royaume des cieux. » Cette réponse remplit le Saint d'une grande joie, et dès ce moment, il eut pour Frère Bernard un attachement encore plus vif et une vénération plus profonde ; il lui en donna des preuves pendant sa vie et même après sa mort.
Se sentant près de terminer sa carrière ; voyant, comme un autre saint patriarche Jacob, ses enfants dévoués entourer son lit, baignés de larmes et accablés de tristesse, à la pensée du père tendrement aimé qui allait les quitter, le Saint demanda : « Où est mon fils premier-né ? venez, mon fils, que mon âme vous bénisse avant de quitter la terre. » Frère Bernard, n'osant croire que c'était à lui que ces paroles s'adressaient, dit tout bas à Frère Élie, vicaire de l'Ordre : « Père, présentez-vous à la droite du Saint pour qu'il vous bénisse. » Et Frère Élie s'étant approché, saint François, qui avait perdu la vue à force de pleurer, posa la main droite sur sa tête, et dit : « Cette tête n'est pas celle de mon fils premier-né. » Alors Frère Bernard se présentant à la gauche du Saint, celui-ci étendit les bras en forme de croix ; puis, posant la main droite sur la tête de Frère Bernard et la gauche sur celle de Frère Élie, il dit au premier : « Que Dieu le Père répande sur vous, par la vertu du Christ, ses bénédictions spirituelles et célestes ; vous êtes le premier-né, le premier élu de ce saint Ordre ; c'était à vous à donner l'exemple et à suivre le premier Jésus-Christ dans sa pauvreté évangélique ; aussi, non-seulement vous avez donné libéralement et sans réserve, pour son amour, tout ce que vous possédiez, mais vous-même, vous vous êtes offert à Dieu, dans cet Ordre, en sacrifice agréable. Daigne donc Notre-Seigneur Jésus-Christ vous combler de ses éternelles bénédictions ; recevez aussi celles de son pauvre petit serviteur, et que toutes, elles vous accompagnent partout et toujours. Que celui qui vous bénira soit lui-même rempli de bénédictions, et que celui qui vous aura maudit n'échappe jamais au châtiment. Soyez le premier parmi vos frères, et que tous vous obéissent. Recevez le pouvoir d'admettre dans l'Ordre ceux que vous en jugerez dignes ; qu'aucun frère n'ait la supériorité sur vous, et qu'il vous soit permis d'aller ou de demeurer partout où il vous plaira. »
Les frères n'oublièrent pas ces paroles de saint François ; après sa mort, ils aimèrent et respectèrent Frère Bernard comme leur vénérable père. Lorsqu'il fut lui-même sur le point de mourir, une foule d'entre eux se rendit à son couvent, et du nombre se trouvait le divin Frère Égide. Dès qu'il aperçut Frère Bernard, ce bon frère s'écria, plein d'allégresse : « Sursum corda ! Frère Bernard, Sursum corda ! » Aussitôt Frère Bernard ordonna à l'un des religieux qui se trouvaient près de lui de disposer, pour Frère Égide, un endroit propre à la contemplation, et il fut obéi. Lorsqu'il vit approcher sa dernière heure, il se leva, et, se faisant soutenir par quelques-uns des frères, il dit à ceux qui l'entouraient : « Ô mes bien-aimés Frères ! je n'aurai pas la force de vous parler longtemps ; considérez seulement que cet état de religion dans lequel j'ai vécu, vous y vivez aussi, et que ce bonheur que je ressens maintenant, vous aussi vous pouvez l'éprouver. Oui, mon âme est si heureuse en ce moment, que je ne voudrais pas, au prix de mille mondes comme celui où nous vivons, avoir servi un autre maître que Notre-Seigneur Jésus-Christ. Maintenant je m'accuse, en présence du Sauveur Jésus et devant vous, de toutes les fautes que je pourrais avoir commises. Ô mes très-chers Frères ! je vous en conjure, aimez-vous les uns les autres. » Après ces paroles et quelques autres pieuses exhortations, Frère Bernard se fit replacer sur son lit ; alors son visage devint si resplendissant et rayonnant d'une joie si vive, que tous les frères en étaient dans l'admiration. C'est dans l'ivresse de cette félicité que la très-sainte âme de Frère Bernard passa, couronnée de gloire, de la vie présente à la vie bienheureuse des anges.



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