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lundi 5 août 2019

Le Saint Curé d'Ars dans sa conversation : Aimables reparties de M. Vianney



Extrait de "Esprit du Curé d'Ars, M. Vianney dans ses catéchismes, ses homélies et sa conversation" (1864) :


C'est une des grandes erreurs de notre temps de se figurer que la piété nuit, dans l'homme, au développement régulier de ses qualités naturelles ; qu'elle comprime et étouffe l'essor de la pensée ; qu'elle est incompatible avec une certaine étendue d'esprit, une certaine élévation de caractère et une certaine chaleur de sentiments. Personne qui n'ait entendu répéter ce paradoxe ; personne parmi les chrétiens faibles qui ne l'ait cru, et parmi les chrétiens forts qui ne s'en soit affligé !
On a peine à imaginer le son désagréable que rendent à l'oreille de la plupart des gens du monde, les mots de dévot et de dévotion. Comme si les plus nobles et les plus belles facultés de l'homme perdaient à être soumises à la discipline chrétienne, et s'agrandissaient en se désordonnant ! C'est l'opposé de tout cela qui est la vérité.
L'union habituelle avec Dieu par la prière et par l'amour, cette victoire continuelle de l'ange sur la bête, ce triomphe permanent du bien sur le mal, que nous appelons l'état de grâce, a d'admirables contre-coups et des effets sensibles dans la partie intelligente de notre être, aussi bien et mieux encore que dans la partie inférieure. Il est la santé de l'âme, et, en la mettant en possession de son objet, qui est Dieu, l'Infini, il lui restitue sa beauté, sa grandeur, sa force et sa dignité.
Mais, dira-t-on, le sacrifice qui est le fond de la morale chrétienne et le dernier mot de l'Évangile ? — Le sacrifice est précisément la loi du progrès intellectuel et moral que l'homme réalise en lui, lorsqu'il se fait saint : c'est le mouvement d'une âme qui se développe dans le sens de ses plus nobles attributs et de ses plus éminentes fonctions, d'une âme qui s'étend et se dégage, qui aspire à la glorieuse liberté des enfants de Dieu, et qui passe pour y arriver par-dessus tout ce que les choses visibles peuvent mettre à l'encontre de sa route, par-dessus toutes les limites et toutes les barrières, par-dessus tout ce qui arrête, comprime et étouffe. C'est le passage de la mort à la vie, des ténèbres à la lumière, de la servitude à la liberté.
Jusqu'à ce que nous ayons, par une application sincère de la doctrine du sacrifice, renoncé de franc cœur à tout objet créé, la liberté de l'âme n'est qu'un mot. Nous sommes libres comme l'oiseau retenu par un fil : tant qu'il n'essaye pas de voler, il peut se croire libre ; mais veut-il franchir le cercle inexorable que lui a tracé une volonté étrangère, plus forte que lui ? il s'aperçoit qu'il est prisonnier. Telle est la liberté que nous laissent les créatures et l'attachement que nous avons pour elles. « Nous serons vraiment libres, quand l'amour du Christ, Notre-Seigneur, nous aura délivrés (S. Jean, VIII, 36). »
Cet amour ne dévaste pas un cœur comme font les passions ; il ne supprime rien de ce qui a le droit d'y vivre. Voyez ce rayon de soleil qui, passant à travers l'émail des splendides verrières, inonde une cathédrale : il éclaire, il colore, il embellit tout ; il ne détruit et ne déplace rien. L'amour de Jésus-Christ dans le cœur de l'homme est le rayon de soleil dans le saint lieu... Il y a un charme singulier à retrouver, dans une âme apaisée et satisfaite par cet amour, le plus doux et le plus fort qui se puisse concevoir, le feu caché sous les cendres et devenu en se consacrant plus lumineux et plus pur.
On ne suppose pas qu'il puisse y avoir chez les personnes vouées à Dieu une intelligence élevée, un cœur noble et généreux. Quelle singulière distraction ! Comme si l'idéal de la beauté des sentiments humains ne se formait pas de leur lutte contre eux-mêmes, en présence du devoir qui les exalte et les domine ! comme si la sainteté, en renversant la borne qui rétrécit l'horizon d'une âme et la retient captive dans les ombres du temps, pour la laisser libre de s'unir à l'objet éternel de son amour, ne lui faisait pas un sort meilleur !
Le retranchement de tout lien et l'éloignement de tout obstacle ne veut pas dire le retranchement de tout amour et la suppression de toute liberté. Ce n'est pas tarir les sources que de les sanctifier. La sainteté ne déflore pas ce qu'elle touche ; elle l'élève et le purifie. Elle ajoute aux heureuses dispositions, qui sont en nous l'œuvre de la nature, un surcroît de force et de sagesse qui est l'œuvre de l'Esprit-Saint.
Ce perfectionnement intellectuel et moral, cet agrandissement des facultés humaines, sublimisées par la grâce, était frappant chez M. Vianney.
Nous ne faisons aucune difficulté d'avouer qu'il n'avait pas des connaissances humaines variées et étendues. Ou, quand et comment les aurait-il acquises ? Mais il avait, ce qui supplée le savoir et au besoin l'expérience, la foi qui a tout prévu et qui sait tout. Il avait une grande sagesse pratique, un sens profond des voies de Dieu et des misères de l'homme, une sagacité admirable, un coup d'œil sûr et prompt, un esprit fin, judicieux, pénétrant. Il était, en outre, doué d'une mémoire surnaturelle, d'un tact exquis et d'une faculté d'observation qui aurait pu devenir redoutable aux personnes qui l'approchaient, si sa grande charité n'avait pas été là pour imprimer à tous ses jugements le cachet de l'indulgence.
De petit coin de terre ignoré où la Providence l'avait placé, plutôt sous le boisseau que sur le chandelier, il n'a pas laissé que de briller sur le monde d'un incomparable éclat ; il a montré en lui-même une triple représentation de Notre-Seigneur, en portant devant les âmes, avec la bonté qui captive et la vertu qui édifie, la vérité qui éclaire.
« Il y a de la sainteté dans le Curé d'Ars, disait-on devant un savant professeur de philosophie, mais il n'y a que de la sainteté.
— Il y a, répondit-il, des lumières, de grandes lumières... Il en jaillit de ses entretiens, sur toute espèce de sujet, sur Dieu et sur le monde, sur les hommes et sur les choses, sur le présent et sur l'avenir... Oh ! que l'on voit clair et que l'on voit beau, quand on voit par le Saint-Esprit ! À quelle hauteur de sens et de raison la foi nous élève ! »
Au sortir d'une entrevue avec M. Vianney, un homme d'une grande distinction écrivait : « Nous avons été dans l'admiration de l'esprit progressif de votre Saint. Rien de tel que la sainteté pour élever très-haut les idées du plus humble des hommes ! »
Bien qu'absorbé par les fonctions de son ministère de prière, d'enseignement et de direction, le Curé d'Ars ne restait indifférent à aucune des questions extérieures qui intéressent soit directement, soit indirectement, l'ordre religieux et l'ordre social. Il avait des aperçus très-nets sur une multitude de questions, indécises souvent pour les plus habiles, qui se résolvaient toujours, dans sa pensée, au point de vue de la gloire de Dieu et du salut des âmes.
Le monde dira peut-être encore : Mais cet homme, qui s'est sevré de toutes les jouissances humaines, qui n'a jamais connu les douceurs de la vie sociale, qui n'a jamais goûté les bienfaits de la vie civilisée, qui a observé d'une manière si constante et si absolue la pratique du renoncement ; cet homme, dont l'existence s'est écoulée tout entière dans l'obscure cloison d'un confessionnal, devait considérer toute choses d'un regard étroit et sévère ; et l'austérité dans son âme ne laissait point de place ni à l'indulgence, ni à la bonté ? Autre erreur.
Cet homme, si dur à lui-même, qui portait sur toute sa personne les traces des plus effroyables pénitences, était aimable ; il savait sourire ; il avait des paroles gracieuses, des à-propos charmants, des reparties fines et spirituelles. La séduction la plus douce reposait sur ses lèvres, en même temps que la vérité et la consolation s'en échappaient.

Quand il se trouvait avec des prêtres ou des chrétiens qu'il connaissait et qu'il aimait, il s'ouvrait volontiers. il apportait dans ce commerce intime une aisance parfaite, une gaîté de bon goût, un tour naïf, une ingénuité pleine de grâce, le don heureux de raconter en souriant, en s'attendrissant, ces vives saillies, ces mots bienvenus, qui vont au cœur de tous et qui font le charme de la conversation du monde, avec la raillerie de moins, et de plus, la tendre effusion de la charité.
Il y aurait ici un livre admirable et doux à faire. Que de traits ravissants ! que de délicieuses paroles à enregistrer ! que de parcelles d'or à recueillir ? Malheureusement, il nous manque beaucoup de détails qui porteraient la lumière jusque dans les derniers replis de cette belle et sainte intelligence. Eussions-nous tous ces détails, la tâche resterait encore au-dessus de nos forces. Le sourire ne se raconte pas, et les conversations du Curé d'Ars étaient comme le sourire de son âme. Il ne riait jamais, sinon de ce sourire de l'âme, qui quittait rarement ses lèvres, encourageant la gaîté, inspirant la confiance et provoquant l'abandon. L'esprit de Dieu qui était en lui donnait à ses moindres paroles une justesse, une simplicité et une opportunité incomparables. Les morts heureux viennent du cœur. Comme le cœur de M. Vianney était doué d'une sensibilité exquise, cette sensibilité se faisait jour à travers l'expression, elle l'animait, l'échauffait, la colorait. On ferait un recueil de ses mots.
Ainsi, le bon Curé pleura longtemps mademoiselle d'Ars. Il lui garda toujours un souvenir plein de tendresse et de vénération. Lorsqu'il fit sa première visite aux nouveaux habitants du château, il se laissa aller devant eux à toute la vivacité de ses regrets, disant : « Pauvre demoiselle ! que c'est triste de ne plus la voir à l'église, dans son pauvre banc !... » Puis, craignant d'avoir manqué de délicatesse envers les héritiers de sa bienfaitrice, il se reprocha tout à coup sa sensibilité et ses larmes, ajoutant avec un tact suprême : « Et cependant !... nous avons tort de nous plaindre. Le bon Dieu nous traite comme il a traité son peuple, en lui retirant Moïse, il lui laissa Caleb et Josué. » Peu de temps après, répondant à des souhaits de nouvel an, il disait encore à la famille qui allait bientôt prendre place dans son cœur à côté de mademoiselle d'Ars : « Je voudrais être saint Pierre ; je vous donnerais pour étrennes les clefs du paradis. » Ses bien-aimés paroissiens lui ayant présenté un jour une portion de leur nombreuse parenté en lui demandant pour elle une bénédiction spéciale, le saint Curé la donna gracieusement, disant : « Oh ! les cousines de M. des Garets sont déjà bénies ! »

À Mgr de Langalerie qui, dans une de ses fréquentes visites, lui dit avec cette bonne grâce, qui relève les plus petites choses ! « Mon bon Curé, vous me permettrez bien de célébrer la sainte messe dans votre église ? » il répondit aimablement : « Monseigneur, je regrette que ce ne soit pas Noël pour que vous puissiez en dire trois. »

Lorsque le P. Hermann parut à Ars pour la première fois, on voulait le faire prêcher. Le bon Curé lui offrit de catéchiser la foule à sa place. Le R. Père se garda bien d'accepter ; il consentit seulement (C'était déjà beaucoup pour son humilité) à dire quelques mots, après que le serviteur de Dieu aurait parlé. M. Vianney fit son instruction comme à l'ordinaire, et la termina ainsi : « Mes enfants, il y avait une fois un bon saint qui aurait bien voulu entendre chanter la sainte Vierge. Notre-Seigneur, qui prend plaisir à faire la volonté de ceux qui l'aiment, daigna lui accorder cette faveur. Il vit alors une belle dame qui se mit à chanter devant lui. Il n'avait jamais entendu une si douce voix. Il était dans le ravissement, et il s'écria : “C'est assez ! c'est assez ! Si vous continuez je vais mourir !...” La belle dame lui dit : “Ne te presse pas d'admirer mon chant, car ce que tu as entendu n'est rien. Je ne suis que la vierge Catherine, et tu vas entendre la Mère de Dieu...” En effet la sainte Vierge chanta à son tour. Et ce chant était si beau, si beau ! que le saint s'évanouit et tomba mort de plaisir..., noyé dans le baume de l'amour !... Eh bien ! mes enfants, ce sera la même chose aujourd'hui... Vous venez d'entendre sainte Catherine ; vous allez entendre la sainte Vierge. »

Un jour, on présentait à M. Vianney un missionnaire nouvellement entré dans la Société, et on lui faisait remarquer qu'il était le plus jeune de tous. « Vous êtes bien heureux, mon ami, lui dit-il en l'embrassant, vous servirez plus longtemps le cher Maître. Dans le collège des Apôtres, Notre-Seigneur avait une tendre prédilection pour saint Jacques le Mineur, parce qu'il était le plus jeune. »
Le même missionnaire étant allé assister aux processions de la Fête-Dieu à Lyon, M. le Curé lui dit à son retour : « Il y avait une fois un saint qui disparaissait la veille de toutes les grandes fêtes. On ne le revoyait plus que le lendemain. Il allait célébrer la fête en paradis... Je pense, mon cher camarade, que vous faites comme lui... »
Voulant témoigner à ses compagnons de travail l'estime qu'il faisait de leurs services, il disait : « Le bon Dieu me fait manger mon pain blanc à la fin de mes jours. Il sait qu'il faut de la mie aux pauvres vieux... Il me traite comme Notre-Seigneur a traité les époux aux noces de Cana ; il me sert le bon vin le dernier. »
M. Vianney voulut faire la dépense des croix que les missionnaires reçoivent le jour où ils prononcent leurs vœux : « Laissez-moi faire, dit-il, j'ai tant de croix, que j'en puis faire part à mes amis. »
Après un sermon dont il avait été content, il disait au prédicateur, en prenant affectueusement ses deux mains dans les siennes : « Ah ! nos vases étaient trop petits pour recevoir et contenir de si belles choses ! »

Un Lazariste de Valfleury demandait au Curé d'Ars si un de leurs pères, récemment atteint de paralysie, pourrait encore prêcher. « Oui, mon ami, répondit-il, il prêchera toujours. La prédication des saints, ce sont leurs exemples. »

On rappelait à M. Vianney le mot d'un Parisien : « Sœur Rosalie était ma mère, et le Curé d'Ars est mon père. — Hélas ! pauvre orphelin ! dit-il en soupirant, jamais le père ne remplacera la mère. »

Revoyant son missionnaire, qui avait fait une absence prolongée, et lui ouvrant ses bras : « Ah ! mon ami, s'écriait-il, vous voilà ! quel bonheur ! J'ai pensé souvent que les réprouvés doivent être bien malheureux d'être séparés du bon Dieu, puisque déjà on souffre tant en l'absence de ceux qu'on aime ! »

Un ecclésiastique s'excusait de n'avoir pas pris un surplis pour assister à la grand'messe du dimanche ; M. Vianney le rassura en lui disant : « Oh ! soyez tranquille. Vous le portez sur votre cœur, par la blancheur de votre âme. »

Une charmante enfant lui présentait un bouquet le jour de sa fête : « Ma petite, lui dit-il en souriant gracieusement, votre bouquet est bien beau, mais votre âme est encore plus belle. »

Un jour d'octave de la Fête-Dieu, le saint Curé étant allé visiter les apprêts du magnifique reposoir qu'on avait coutume d'élever au château, on se prit à regretter devant lui que le vent, qui régnait depuis quelques heures, fût venu déranger un beau projet d'illumination formé la veille. Le saint Curé dit en montrant la jeune famille qui entourait les degrés du trône préparé à Notre-Seigneur : « Voilà des flambeaux ardents et luisants que le vent n'éteindra pas. » En s'en allant, après avoir réjoui tous les cœurs par sa présence, il ajoutait : « Cette maison change d'habitants ; les générations s'y succèdent. Mais c'est toujours la maison du bon Dieu. » Au retour de la procession, qui avait été très-longue, on voulait lui faire prendre des rafraîchissements : il les refusa, disant : « C'est inutile : je n'ai besoin de rien. Comment serais-je fatigué ? Je portais celui qui me porte. »

Pendant les inondations du mois de mai 1856, il se trouva qu'une nuit les pèlerins qui attendaient dans l'église, avaient tiré sur eux le verrou de la porte. À une heure du matin, M. le Curé se présente et heure doucement : on ne l'entend pas. Il heurte encore. La pluie tombait par torrents : il la reçoit pendant quelques minutes, et se met au confessionnal sans s'inquiéter davantage des suites de sa mésaventure. À l'heure de la messe, quand il vient à la sacristie pour revêtir les ornements sacrés, on s'aperçoit que sa soutane est ruisselante. On le presse de se changer ; on lui fait mille questions. Il se contente de répondre gaîment : « Laissez, laissez donc ! ce n'est rien... Cela prouve que je ne suis pas de sucre. »

M. Vianney faisait un jour sa tournée de malades par un rude soleil du mois de juillet. Le prêtre qui l'accompagnait, lui voyant la tête nue, lui offrit son chapeau. « Vous feriez mieux, mon ami, lui dit le saint Curé, de me donner votre science et vos vertus. » Voilà à quoi on était exposé, lorsqu'on lui faisait des avances de politesse. C'était bien autre chose, quand on y joignait une phrase agréable ou qu'on cherchait à lui tourner un compliment.
« Que vous êtes heureux d'être jeune ! disait-il à quelqu'un. Vous avez, sans compter le reste, tant de force et tant de zèle à dépenser au service du bon Dieu !...
— Monsieur le Curé, répartit son interlocuteur, vous êtes plus jeune que moi.
— Oui, mon ami, en vertu... »
« Monsieur le Curé, lui disait-on une autre fois, puisque vous aimez bien vos missionnaires, c'est à eux que vous laisserez en partant le manteau d'Élie !
— Mon ami, il ne faut pas demander un manteau à celui qui n'a pas même une chemise. »

À propos de ce camail, qui a été une touchante inspiration du cœur de l'Évêque, mais une rude humiliation pour le cœur du bon Curé, quelqu'un crut devoir, en donnant à sa pensée un tour flatteur, lui faire observer qu'il était resté jusque-là le seul chanoine créé par Mgr Chalandon. M. Vianney vit le piège, et repartit aussitôt : « Je le crois bien. Monseigneur a eu la main trop malheureuse... Il a vu qu'il s'était trompé ; il n'ose plus recommencer. »

Un jour, il aperçut un de ses portraits au bas duquel on avait fait figurer maladroitement son camail et sa croix d'honneur. « Pour que ce fût complet, dit-il, il faudrait écrire dessous : vanité, orgueil, néant. »

Une autre fois, on faisait encore allusion à ces différentes dignités. « Oui, répondit-il, je suis chanoine honoraire par la trop grande bonté de Monseigneur, chevalier de la Légion d'honneur par une méprise du gouvernement, et... berger d'un âne et de trois brebis par la volonté de mon père. »

Un jour, le Curé d'Ars vit entrer dans sa sacristie un personnage en qui il était facile, à son air, à sa tenue, à son langage, de reconnaître l'homme du grand monde. L'inconnu s'approche avec respect, et le serviteur de Dieu, croyant deviner son intention, lui montre, de la main, la petite escabelle où avaient coutume de s'agenouiller ses pénitents :
« Monsieur le Curé, se hâte de dire l'homme aux belles manières, qui comprit parfaitement ce que ce geste signifiait, je ne viens pas me confesser ; je viens raisonner avec vous.
— Oh ! mon ami, vous vous adressez bien mal ; je ne sais pas raisonner... mais si vous avez besoin de quelque consolation, mettez-vous là... — son doigt désignait l'inexorable escabelle, — et croyez que bien d'autres s'y sont mis avant vous et ne s'en sont pas repentis.
— Mais, monsieur le Curé, j'ai déjà eu l'honneur de vous dire que je ne venais pas me confesser, et cela par une raison décisive : c'est que je n'ai pas la foi. Je ne crois pas plus à la confession qu'à tout le reste.
— Vous n'avez pas la foi, mon ami ? Oh ! que je vous plains ! Vous vivez dans le brouillard... Un petit enfant en sait plus que vous avec son catéchisme. Je me croyais bien ignorant ; mais vous l'êtes encore plus que moi... Vous n'avez pas la foi ? Eh bien ! tenez : mettez-vous là, et je vais entendre votre confession. Quand vous vous serez confessé, vous croirez tout comme moi.
— Mais, monsieur le Curé, ce n'est ni plus ni moins qu'une comédie que vous me conseillez de jouer avec vous.
— Mettez-vous là, vous dis-je ! »
La persuasion, la douceur, le ton d'autorité tempéré par la grâce, avec lesquels ces mots furent répétés, firent que cet homme se trouva à genoux sans s'en douteur et presque malgré lui. Il fit le signe de la croix qu'il n'avait pas fait depuis longtemps, et commença l'humble aveu de ses fautes. Il se releva non-seulement consolé, mais parfaitement croyant, ayant éprouvé, que pour arriver à la foi le plus court chemin et le plus sûr est d'en faire les œuvres, selon l'éternelle parole du Maître des hommes : « Celui qui fait la vérité vient à la lumière (S. Jean, X, 21). »

Le fondateur d'un orphelinat célèbre consultait M. Vianney sur l'opportunité de se concilier, par la voie de la presse, l'attention et les faveurs du public. « Au lieu de faire du bruit dans les journaux, répondit le serviteur de Dieu, faites du bruit à la porte du tabernacle.
— Monsieur le Curé, reprit cet homme de bien, je serais heureux de faire mon noviciat près de vous.
— Soyez tranquille, on vous le fera faire, » répliqua aussitôt M. Vianney par une allusion aux épreuves qui attendaient la fondation naissante.

Une prétendante, qui venait de quitter la congrégation des sœurs de Saint-Vincent de Paul, eut un jour un entretien, à Ars, avec un prêtre qui arrivait de Jérusalem. Ce prêtre disait à M. Vianney qu'il avait conseillé à cette jeune fille d'aller en Orient pour y utiliser ses forces et son zèle. Le bon curé qui connaissait son inconstance répondit : « Envoyez-la en paradis. Au moins, elle n'en sortira plus. »

On voit que M. Vianney ne manquait pas de finesse, et que la repartie ingénieuse et piquante lui venait aisément. Il y mêlait, dans l'occasion, un brin de douce malice.
« M. le Curé, lui disait un personnage, dont la face épanouie et la forte santé offraient un singulier contraste avec la pâleur et l'exténuation du saint vieillard, je compte un peu sur vous pour me faire bien venir là-haut. J'espère que vous n'oubliez pas vos amis, et que vous les mettez de moitié dans le mérite de vos jeûnes et de vos pénitences. Quand vous irez au ciel, je tâcherai de m'accrocher à votre soutane.
— Ô mon ami, gardez-vous-en bien, repartit le bon Curé. L'entrée du ciel est étroite, — et il jetait un petit regard malin sur les larges épaules de son interlocuteur, — nous resterions tous deux à la porte. »
Il craignit ensuite que ces paroles, dites en riant et de la meilleure grâce du monde, n'eussent affecté son visiteur ; il lui en fit ses excuses dans les termes les plus humbles et les plus polis.

Une religieuse lui disait avec bonhomie : « On croit généralement, mon Père, que vous êtes un ignorant. — On ne se trompe pas, ma fille ; mais c'est égal, je vous en dirai encore plus que vous n'en ferez. »
On lui demandait des reliques pour une personne qui en désirait beaucoup. Il répondit en souriant : « Qu'elle en fasse ! »

Une de ses paroissiennes, honnête et excellente fille, pleine de dévouement et de zèle, mais d'un zèle parfois trop amer et trop impétueux, comme était celui des apôtres avant la Pentecôte, voulait lui donner des conseils : « Monsieur le Curé, vous avez tort de faire ceci... Monsieur le Curé, vous devriez faire cela... — Allons, interrompit doucement le saint homme, nous ne sommes pas encore en Angleterre... » faisant allusion à la constitution anglaise, d'après laquelle une femme peut être chef du gouvernement.

M. Vianney avait souvent le mot pour rire.
Au retour d'une course en voiture, le frère Athanase, directeur de l'école d'Ars, racontait que son cheval avait fait un écart et l'avait jeté dans le fossé. Le bon Curé lui fit ses compliments de condoléance, puis il ajouta : « Mon ami, saint Antoine n'est jamais tombé de voiture : il fallait faire comme lui. — Monsieur le curé, comment faisait donc saint Antoine ? — Il allait toujours à pied. »

M. Vianney savait faire à propos des réponses auxquelles on ne résistait pas. Un soi-disant esprit-fort vint lui déclarer un jour qu'il y avait dans la religion des choses auxquelles il lui était impossible de croire.
« Par exemple ? lui dit le bon Curé.
— Par exemple l'éternité des peines.
— Mon ami, je vous conseille de ne jamais parler de religion.
— Et pourquoi n'en parlerais-je pas ?
-Parce qu'il faudrait auparavant apprendre votre catéchisme. Que dit le catéchisme ? Qu'il faut croire à l'Évangile, parce que c'est la parole de Notre-Seigneur. Croyez-vous à l'Évangile ?
— Oui, monsieur le Curé.
— Eh bien ! l'Évangile a dit : “Allez au feu éternel !” Que voulez-vous de plus ? Il me semble que c'est assez clair. »

Le Curé d'Ars eut un jour une entrevue avec un riche protestant. Le serviteur de Dieu ignorant que l'homme, à qui il venait de parler de Notre-Seigneur et des saints comme il savait en parler, avec la plus cordiale et la plus large effusion, eût le malheur d'appartenir à une secte dissidente, lui mit en finissant une médaille dans la main. Celui-ci dit en la recevant :
« Monsieur le Curé, vous donnez une médaille à un hérétique. Du moins, je ne suis qu'un hérétique à votre point de vue. Malgré la diversité de nos croyances, j'espère qu'un jour nous serons deux au ciel. »
Le bon Curé prit la main de son interlocuteur, et fixant sur lui des yeux dans lesquels se peignait la vivacité de sa foi et l'ardeur de sa charité, il lui dit avec un profond sentiment de tendresse compatissante :
« Hélas ! mon ami, nous ne serons unis là-haut qu'autant que nous aurons commencé à l'être sur la terre ; la mort n'y changera rien. Où l'arbre tombe, il reste.
— Monsieur le Curé, je me fie au Christ qui a dit : “Celui qui croira en moi aura la vie éternelle.”
— Ah ! mon ami, Notre-Seigneur a bien dit autre chose. Il a dit que celui qui n'écoutait pas l'Église devait être regardé comme un païen. Il a dit qu'il ne devait y avoir qu'un troupeau et qu'un pasteur, et il a établi saint Pierre pour être le chef de ce troupeau. » Puis, prenant une voix plus douce et plus insinuante : « Mon ami, il n'y a pas deux manières de servir Notre-Seigneur, il n'y en a qu'une bonne : c'est de le servir comme il veut être servi. »
Là-dessus le bon Curé disparut, laissant cet homme pénétré d'un trouble salutaire, avant-coureur de la grâce divine, dont on nous a dit qu'il fut plus tard l'heureux vaincu.

Malgré son goût prononcé pour la solitude, M. Vianney avait un esprit ouvert et prodigue d'épanchements. Dans la conversation, il était à la fois abondant et réservé. Pour éviter les remarques dont son humilité aurait eu à souffrir et auxquelles, par expérience, il savait être exposé, il n'interrogeait jamais et ne donnait pas aux questions le temps d'arriver ; il gardait, le plus qu'il pouvait, la parole, et paraissait craindre de fournir la réplique. S'il parlait de lui, ce qui arrivait rarement, l'amour-propre, dont il n'avait plus même le germe, n'embarrassait pas la spontanéité de ces communications, au contraire, c'était de son humilité que provenait en partie son besoin d'épanchement. La liberté de s'ouvrir à quelques-uns lui semblait un appui accordé à sa faiblesse. Ne pouvant pas dire à tout le monde ce qu'il pensait de lui, il se soulageait en le confiant à des cœurs discrets : et la matière de ces confidences était toujours ce qui l'effrayait et l'humiliait le plus. D'ailleurs, il ne se révélait jamais tout entier ; il vous conduisait jusqu'à la porte de son âme et vous arrêtait là.
« Mon Dieu ! qu'on sera bien en Paradis, puisque déjà sur la terre la compagnie des saints est si aimable, leur conversation a tant de charme et de douceur ! » Cette exclamation nous est échappée souvent au sortir de ces entretiens du soir, où, par un privilège insigne, les missionnaires d'Ars furent successivement admis dans l'intimité du serviteur de Dieu. On sentait qu'on épuisait là une des plus rares faveurs de la Providence, et on ne cessait de se le témoigner, tantôt par des paroles, tantôt par des larmes, le plus souvent par un religieux silence, seul applaudissement des impressions vraies et profondes.
À la fin de ces journées lourdes et fatigantes, c'était le moment où le Curé d'Ars se manifestait avec le plus de familiarité, de chaleur et d'abandon. Debout, au coin de la cheminée ou devant sa petite table, suivant le besoin qu'il avait de sentir la flamme du foyer sur ses membres engourdis, le visage rayonnant, le regard dilaté, l'air heureux, l'innocence et la joie de son âme s'épanouissaient en mille jets étincelants, en mille propos pleins d'images et de suavité.
Nous avons remarqué que, suivant le conseil de saint Paul, il évitait les discours vains et profanes, de désobliger l'une des parties. Lorsqu'il en était prié, il intervenait par un mot gracieux et conciliant, ou par un de ces grands principes qu'on ne discute pas, et qui remettent la paix entre les adversaires, en les amenant non sur le terrain qui divise, mais sur celui qui unit et où la lutte n'est plus possible.
Son âme planait toujours comme un être angélique au-dessus de la mêlée des passions et des intérêts vulgaires. Il envisageait tout de ce point de vue, familier aux saints, où réside la lumière sans ombre. La conscience était son seul horizon. Le monde extérieur n'existait pas pour lui.
Il ne trouvait de bon, d'agréable, d'intéressant, que ce qui lui parlait de Dieu. Le cœur est là où est le trésor. Le Souverain Bien l'attirait au point qu'il ne pouvait en détourner sa pensée. Sa conversation était plus divine qu'humaine et tellement dans le ciel qu'elle en exaltait tous les parfums. Il parlait des mystères de l'autre monde comme s'il en fut revenu, et des vanités de celui-ci avec une ironie si douce et si plaisante qu'on ne pouvait s'empêcher d'en rire. À mesure qu'il parlait, l'intimité se faisait plus grande, la chaleur de son âme augmentait, et l'effusion coulait à plein bord.
Si quelque fâcheux, — car il y avait bien des variétés dans l'espèce des pèlerins, qui se faisaient jour jusqu'à M. Vianney, et la variété que nous signalons se glisse partout, — si quelque fâcheux venait à parler des choses humaines, pour sérieuses et importantes qu'elles fussent, le saint Curé ne l'interrompait pas, il était trop honnête et trop condescendant pour cela, mais il souffrait visiblement ; il était mal à l'aise ; il se taisait, et rien ne saurait mieux peindre son état que le dicton populaire du poisson hors de l'eau. Du reste, ces rencontres étaient rares. Il régnait autour de lui je ne sais quelle atmosphère divine, qui ne permettait pas d'y introduire des questions de l'ordre profane, de peur d'en troubler la pureté.
Dans ce siècle de mouvement, de nouveauté et de progrès, en des temps si laborieux et si troublés, le Curé d'Ars ne formait aucun souhait, n'éprouvait aucun désir, ne sentait aucun besoin de rien connaître de ce monde, dont la figure passait autour de lui sans qu'il y fît la moindre attention ; tant il en était venu à user des choses comme n'en usant pas, à jouir comme ne jouissant pas ; tant son esprit, son cœur son âme étaient tendus et appliqués à un autre objet !
« Vous parlez quelquefois de chemin de fer, monsieur le Curé, lui disait-on, savez-vous ce que c'est ?
— Non, ni je n'ai envie de le savoir ; j'en parle parce que j'en entends parler. »
Cet homme, à qui les chemins de fer amenaient tous les jours de deux à trois cents étrangers, est mort sans avoir jamais vu un chemin de fer et sans être à même de s'en faire une idée.

Mais s'il demeurait étranger aux choses du monde matériel, tout ce qui lui venait, au contraire, de cet autre monde divin qui est l'Église de Jésus-Christ, le royaume des âmes acquises et rachetées par son sang, tout ce qui étendait l'honneur et la gloire du Maître, tout ce qui affermissait son règne sur la terre, tout ce qui contribuait à la glorification de son Saint Nom, à la dilatation de sa doctrine, au triomphe de la vérité, toutes les conquêtes de son amour, qui multipliaient le nombre des fidèles destinés à le louer éternellement, lui étaient un sujet d'allégresse et de consolations infinies. Tout, dans cet ordre de faits, l'intéressait, le passionnait, faisait battre son cœur et vibrer les cordes de son âme.
Si sublime que fût l'entretien, le bon Curé y conservait la simplicité qui est le vrai caractère des enfants du Dieu. Tout en parlant des saints, du ciel et des choses divines, il gardait son langage familier et ne connaissait que les comparaisons populaires. Dans ces longs et doux épanchements, les charmes de l'amour divin, les délices eucharistiques, la félicité des bons, le malheur des méchants, l'attente des joies éternelles se mêlaient à de nobles sollicitudes pour l'accroissement du règne de Jésus-Christ, l'exaltation de la sainte Église et le triomphe de la justice et de la vérité dans le monde.



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