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dimanche 31 janvier 2021

Le Crucifix



L'image adorable de Jésus-Christ crucifié doit être pour vous l'objet d'une tendre et solide dévotion. « La pensée du Crucifix, dit un pieux auteur, est le fléau des démons, le remède contre les tentations, la mort de la nature, le canal de la grâce et la voie directe du Ciel. »
Ayez un crucifix dans votre chambre et portez-en un sur vous. Quelquefois pressez-le sur votre poitrine, et baisez-le. Faites surtout cet acte de piété le matin à votre réveil, le soir sur le point de vous endormir, et quand vous serez tentées.
Lorsque vous lisez, ou que vous travaillez, ou que vous priez, lancez souvent sur votre crucifix de ces respectueux et tendres regards, qui sont l'expression la plus vive de votre amour. Vous ne fixerez jamais le crucifix pieusement, sans que Jésus-Christ ne vous regarde du haut du ciel avec une affectueuse complaisance, et ne vous comble de quelque nouvelle faveur.
Que l'image de Jésus-Christ crucifié parle sans cesse à vos yeux, à votre esprit et surtout à votre cœur. Le souvenir de vos péchés vous remplit-il de trouble et de crainte ? interrogez votre crucifix ; une voix secrète vous dira : « Rassure-toi, ma fille ; jette dans mon sang tous tes crimes, et je les effacerai. »
Êtes-vous, au contraire, insensible à vos fautes ? regardez votre crucifix, et vous entendrez au fond de votre âme ce reproche qui vous humiliera et vous touchera : « Tes péchés m'ont coûté tout mon sang, et ils ne t'ont pas encore arraché une larme : Mon sang a brisé les portes de l'enfer, et il n'a pu encore briser la dureté de ton cœur ! »
Pendant l'orage de la tentation, votre crucifix vous dira : « Mon enfant, entre dans la plaie de mon côté, et cache-toi dans mon cœur ; tu y seras en sûreté. » Votre croix aussi vous animera dans vos lâchetés et vos tiédeurs ; à cette vue vous vous écrierez : « Et quoi ! une légère infirmité m'arrête, une contradiction m'abat, un peu d'ennui m'accable et me fait regarder en arrière ! Mais, ai-je comme mon Sauveur, résisté jusqu'au sang ? »
Là encore, vous irez vous consoler dans les peines, dans les travaux, dans les disgrâces, dans les humiliations, dans les douleurs ; vous verrez comme Notre-Seigneur a été traité, et cette parole : Le disciple est-il au-dessus du Maître ? vous relèvera, vous soutiendra, vous consolera. Partout et toujours, à sa vue, vous direz avec résignation et même avec joie : Ô mon Dieu, que votre volonté soit faite ! Enfin, lorsque la mort se présentera à vous avec toutes ses horreurs, dans ce moment terrible où tout vous délaissera, Jésus crucifié sera votre dernier ami ; mille fois heureux celui qui aura toujours vénéré l'image de la Croix ! Faites-vous un bonheur et une gloire de porter sur vous le crucifix et de l'avoir dans vos appartements ; gardez-vous d'imiter ces lâches qui en rougissent ou ces impies qui le regardent avec indifférence ; mais plutôt dites avec l'apôtre : À Dieu ne plaise que je me glorifie en autre chose qu'en la croix de mon Sauveur Jésus-Christ !

Le Père Félix disait naguère à Notre-Dame : « Sous chaque toit domestique où l'on n'a pas répudié le ministère de l'Église, il y a, exposée aux regards et à la vénération, la douce et sublime image de Jésus-Christ. Il est là comme le protecteur du foyer et le modèle de la famille. Qu'il est beau de voir celle-ci agenouillée devant le Dieu du Calvaire, devenu le Dieu du foyer !
Voyez l'enfant si sensible à la parole qui se fait entendre aux yeux, découvrant, dans le premier rayon que lui envoie le matin, l'image du Christ suspendue sur sa tête ; le jour, la baisant avec amour, et le soir, la saluant encore de son dernier regard.
Voulez-vous savoir à quoi tient aujourd'hui l'abaissement de tant de générations et la dégradation de tant de familles ? Oserai-je le dire devant les chrétiens ? Il n'y a plus de Christ au foyer. Il n'y a pas de Christ suspendu à la muraille, posé sous les regards, se révélant dans les murs.
Chrétiens, avez-vous un Christ dans votre maison ? L'image du Christ orne-t-elle de sa beauté purifiante le sanctuaire de votre famille ? Et vous voit-on, chaque jour, prosternés devant elle pour recevoir, avec ses bénédictions, ses inspirations efficaces ? Quoi ! vous avez sous vos yeux les portraits de vos grands hommes, et même des divinités païennes, et il n'y a point de place sous votre toit pour l'image du Christ ! Et quand viendra votre dernière heure, quand le prêtre cherchera, pour vous la montrer, cette image qui seule, dans les tristesses et les abattements de la mort, puisse encore parler de bonheur et d'espérance, peut-être on lui répondra : “Il n'y a pas de Christ dans la maison !!!”
Voulez-vous une Pratique de Piété envers Jésus crucifié qui vous demandera peu de temps et vous sera peut-être plus utile que de longues prières ? Tenez votre crucifix à la main et, agenouillée devant cette image de votre Sauveur, baisez pieusement ses plaies sacrées en répétant lentement : Mon Jésus, miséricorde ! »

Nous reproduisons ici cette page admirable qu'un âme souffrante a laissé tomber de son cœur :
« Elle est venue, Seigneur, l'heure de la détresse, et mon âme n'a pu en supporter le poids.
J'ai senti toutes mes forces intérieures ployer en même temps sous le fardeau d'une amertume trop grande, un flot de larmes monter tout à coup et jaillir de mes yeux.
Dans cette angoisse dont la violence m'a effrayé, j'ai cherché du secours ; j'ai promené mes regards autour de moi, j'ai cru que tant de souffrances finiraient par évoquer un consolateur ; mais j'étais seul et le consolateur n'a point paru.
Alors j'ai aperçu ton image, ô Jésus-Christ ; l'instinct du salut m'a jeté vers elle ; je l'ai saisie d'une main tremblante, et mon visage, baigné de pleurs, s'est reposé sur elle.
On pleure bien sur ton image, ô divin Crucifié ! Les larmes des hommes la connaissent. Il y a entre ta Croix et les douleurs humaines une éternelle conformité.
À travers mes larmes j'ai regardé tes mains percées pour l'amour des hommes : mes lèvres ont rencontré les clous qui attachent tes pieds, et ma main qui serrait ton image s'est posée sur la plaie de ton cœur.
Qu'ai-je dit ? Qu'ai-je entendu ? Je ne saurais me le répéter à moi-même. Je suis demeuré longtemps dans l'union avec toi, baisant tes plaies serrant dans mes mains ta tête chargée d'épines, m'enivrant de ta Croix.
J'ai longtemps baigné de pleurs cette Croix que tu baignais de ton sang. Je n'ai pas eu la force de prononcer une parole, mais il y avait, dans le fond de mon âme, celle que toi-même, ô Jésus, tu prononças au moment suprême : Père, je remets mon esprit entre vos mains. J'ai suivi dans tous les replis de mon âme, longtemps, et dans des profondeurs inconnues de moi, le retentissement de cette parole.
Alors la paix est venue. Je me suis comme endormi sur ton cœur, et peu à peu l'amour a vaincu la souffrance.
Une consolation étrange, inespérée, que j'ai sentie ne point venir de moi-même, est doucement entrée dans mon esprit, et tandis que je m'étonnais de ce changement soudain, cette douceur a grandi jusqu'à devenir semblable à la joie.
Je pleurais encore, mais c'était presque de bonheur, et au lieu des plaintes irritées qui grondaient tout à l'heure en moi, c'était maintenant le cantique involontaire de l'action de grâces.
Une force calme est venue. J'ai senti que j'étais renouvelé pour le combat, et que ma volonté venait d'être trempée sept fois dans le sang de l'Agneau.
Pourquoi faut-il que de telles extases aient leur réveil ? Pourquoi ceux qui souffrent n'obtiennent-ils pas la grâce de mourir en de tels moments ? Pourquoi, l'heure passée de la crise divine, l'impitoyable uniformité de la vie reprend-elle son cours ?
Ô Croix de Jésus, Consolateur suprême, je n'oublierai jamais ce que tu peux contre les flots soulevés du désespoir, et comment tu sais transformer en paix et en douceur les larmes brûlantes.
Ta puissance m'étonne, mais davantage encore elle me rassure. Évidemment, pour le chrétien qui sait te comprendre, ta seule vue peut soutenir la vie et consoler la mort.
Puis-je obtenir cette grâce de te contempler de mes derniers regards, image sacrée de mon Sauveur ! Puisse une main amie te mettre alors dans mes mains, t'élever devant mes yeux, t'approcher de mes lèvres ! Si les accablements de l'heure solennelle m'empêchent de prier, mes yeux attachés sur toi porteront encore à mon âme le secours de ta présence ; heureux s'il m'est donné de mourir dans ce regard d'amour, comme ce grand religieux qui, sur son lit de mort, ne détachait plus ses yeux du Crucifix : Je ne puis plus prier, murmurait-il encore, mais je le regarde ! » (PEREYVE.)

(Livre de Piété de la Jeune Fille)


Reportez-vous à Dévotion au Crucifix, et Sur le Crucifix.