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mardi 11 avril 2017

Méditation pour le Mardi Saint : Jour de souffrance




Jérémie dicte ses prophéties à Baruch (Gustave Doré)



LE MARDI SAINT

Jour de souffrance


PRATIQUE

Prenez la généreuse résolution de souffrir dans un esprit de foi, de pénitence et de conformité, avec Jésus-Christ, toutes les afflictions qu'il lui plaira de vous envoyer ; et de vous mortifier vous-même en toutes choses, quand vous n'aurez pas d'ailleurs l'occasion de souffrir. Ayez toujours devant les yeux ce divin et douloureux modèle, souffrez pour lui, avec lui et comme lui. Faites-vous aujourd'hui une loi inviolable de ne rien accorder à vos sens qui puisse les flatter, et offrez toutes vos mortifications à Jésus souffrant.


MÉDITATION

Pour moi, j'étais comme un agneau plein de douceur qu'on porte pour en faire une victime. (Jerém., 11)


1er point. Voici donc cet agneau si doux et si patient, qui va se laisser porter à la mort parce qu'il nous aime et qu'il est chargé de tous nos péchés pour en porter la peine. Cet agneau, qui est Dieu, va faire sur la croix une union surprenante de deux qualités qui avaient toujours été séparées, c'est-à-dire de victime et de sacrificateur. Comme victime, il va payer toutes nos dettes ; comme sacrificateur, il va offrir le premier sacrifice de notre religion. La croix en sera le premier autel, et le berceau sanglant où tous les fidèles prendront naissance, et le fondement inébranlable qui soutiendra l'édifice du christianisme.
De là vient que le christianisme ne s'est établi dans tout le monde que par les souffrances ; il ne peut aussi s'établir et se soutenir dans nos âmes que par elles, et c'est à nous, dit saint Paul, à voir comment nous édifierons, sur ce fondement, en marchant sur les traces sanglantes de Jésus souffrant (I Cor. 9). C'est par les souffrances que Dieu nous ramène à la religion, que la prospérité nous avait fait oublier : et nous sommes alors forcés de dire avec le prophète : Oh ! Seigneur, je connais que cette disgrâce était un bien pour moi, parce qu'elle m'a fait comprendre que je n'étais pas encore instruit de vos lois ni de ma religion (Ps. 118).


Mettons du bois dans son pain, exterminons-le de la terre, et que son nom soit effacé de la mémoire des hommes. (Jérem. 12)


2e point. Examinez ces paroles, vous y trouverez trois sanglants outrages, qui sont cependant tournés à la gloire de Jésus souffrant. Premièrement, ses ennemis veulent empoisonner son pain avec du bois, et ce sauveur est lui-même le pain vivant qui guérit du poison, et qui donne la vie à tous les hommes. Par ce bois mortel, ils veulent l'exterminer, et c'est par ce même bois que ce roi des rois établira son empire sur la terre. Enfin, ils veulent effacer son nom de la mémoire des hommes ; et c'est par les souffrances que son adorable nom sera respecté du ciel et de la terre, et même des enfers. En un mot, c'est par les souffrances, dit l'apôtre, que Jésus-Christ a acquis sa gloire. Ce n'est par conséquent que par les souffrances que vous mériterez celle qui vous est promise. Recevez-les avec patience, unissez-les à celles de Jésus-Christ. Il les adoucira, et elles vous produiront sûrement un bonheur éternel. Il n'y a que les souffrances des pécheurs impatients qui soient de vraies souffrances. Ils boivent toute l'amertume du calice, parce qu'ils souffrent sans consolation : toutes leurs croix sont sans onction ; ils n'ont garde d'y trouver Dieu, parce qu'ils ne l'y cherchent pas.


SENTIMENTS

Agneau doux et patient, qui vous laissez porter sur l'autel de la croix pour être la victime de mes péchés, je ne puis penser à vos douleurs sans pousser de profonds gémissements sur mes lâchetés, mes délicatesses, et sur le mauvais usage que j'ai fait des souffrances que vous m'avez ménagées pour racheter mes péchés et pour acheter le ciel. Je vous dirai donc avec Augustin pénitent : Brûlez, coupez, Seigneur, pendant que je suis dans ce monde, pourvu que vous m'épargniez dans l'éternité. Humiliez cet esprit d'orgueil qui s'est tant de fois révolté contre vous : privez ce cœur charnel de tout autre plaisir que celui de vous aimer, parce qu'il a trop aimé les plaisirs des sens ; que cette chair pécheresse soit exposée aux douleurs les plus aiguës, pour lui faire expier ses délicatesses, pourvu que vous me donniez votre grâce dans cette vie, et votre gloire dans l'autre.


SENTENCES

C'est par beaucoup de peines et de souffrances que nous devons entrer dans le royaume de Dieu (Act. 14).

Il est beaucoup plus avantageux de parvenir à un bonheur éternel après quelques souffrances, que de descendre dans les enfers après avoir goûté quelques plaisirs (Div. Aug. Serm. de Asc.).


RÉFLEXIONS

Jésus dit qu'il a soif

Jésus-Christ attaché sur la croix et souffrant une soif extrême, dit : J'ai soif. Ses bourreaux, qui n'étaient occupés qu'à inventer de nouveaux supplices pour le faire souffrir, loin de le soulager dans cet extrême besoin, lui donnent, avec une éponge, un cruel breuvage, composé de fiel et de vinaigre, afin que l'intérieur du corps de Jésus souffrît son supplice aussi bien que l'extérieur, et que sa langue, sa bouche, sa gorge, son estomac, et sa poitrine, abreuvés de cette cruelle amertume, rendissent sa passion aussi universelle qu'elle était douloureuse, et que tout souffrit dans sa personne.
Ô mon Dieu, faut-il que Vous, la douceur même, ne soyez rassasié que de fiel, par ceux mêmes à qui vous présentez votre grâce et votre miséricorde, et à qui vous donnez tout votre sang ! Cette soif que vous endurez est moins une soif naturelle qu'une soif ardente du salut de tous les hommes. Vous êtes moins altéré de cette eau qui rafraîchit que de la Conversion des pécheurs. Accordez-moi, Seigneur, la grâce de profiter de cette soif et de cette amertume, de n'avoir dorénavant point de plus violente soif que celle de la justice, de me soumettre aux amertumes des souffrances, et de renoncer aux douceurs empoisonnées de la volupté .


PRIÈRE

Ô mon Dieu, lumière éternelle, embrasez nos cœurs ; protégez-les d'une vraie douleur d'avoir été la cause de tant d'outrages que Jésus, ce fils bien-aimé, a endurés ; faites-leur ressentir par conformité ces douleurs et ces peines souffertes pour notre amour ; attachez-nous, comme l'apôtre, à la croix de Jésus ; appliquez-nous-en les mérites, et que cette passion nous obtienne la rémission de tous nos péchés et la possession de la gloire éternelle.





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