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vendredi 25 octobre 2019

Visions de Sainte Hildegarde sur l'avenir de l'Eglise et la fin des temps


Sainte Hildegarde recevant l'inspiration divine, manuscrit médiéval



Extrait de "Histoire de Sainte Hildegarde, sa vie, ses œuvres et ses révélations", par le R.P. Jacques RENARD :


Des pensées si élevées, un enseignement si sûr des choses divines, sont surprenants dans une humble religieuse illettrée et étrangère à toute science humainement acquise.

Les trois ou quatre dernières visions sont seules par leur objet véritablement prophétiques, puisqu'elles regardent l'avenir de l'Église et la fin des temps. Voici la substance de la vision onzième du troisième livre du Scivias :

« Dieu a mis six jours à faire ses œuvres, et il s'est reposé le septième jour. Ces six jours représentent les six premiers âges du monde. Dieu a montré au monde de nouveaux prodiges dans le sixième âge, de même qu'il a couronné ses œuvres dans le sixième jour de la création.
Maintenant, le monde se trouve au septième âge, qui sera suivi des derniers jours. Les prophètes ont parlé, et leurs oracles ont eu leur accomplissement. Mon fils a exécuté mes volontés dans le monde, et l'Évangile a été prêché à tous les hommes. À présent, la foi des peuples s'affaiblit, les hommes pratiquent mal l'Évangile. On s'ennuie de la lecture des grands ouvrages, fruits de longs travaux des plus saints docteurs, et on a du dégoût pour la nourriture vivifiante des saintes Écritures.
Relevez-vous avec énergie, ô mes élus ; faites en sorte de ne vous pas laisser tomber dans les pièges de la mort. Levez haut l'étendard victorieux de mes enseignements. Suivez les traces de celui qui vous a montré les voies de la vérité ; qui, après s'être fait homme, s'est manifesté au monde dans une grande humilité.
La tête ne doit pas être sans corps et sans membres. La tête de l'Église, c'est le Fils de Dieu. Le corps et les membres, c'est l'Église et ses enfants. L'Église n'est pas encore, quant à ses enfants, arrivée au dernier degré de sa plénitude. Elle y parviendra quand le nombre des élus sera complet, ce qui aura lieu aux derniers jours.
Ce n'est qu'après les cinq premiers âges du monde que j'ai fait voir aux hommes des prodiges célestes ; de même que, dans les cinq premiers jours de la création, j'ai fait toutes les créatures soumises à l'homme, avant l'homme que j'ai créé le sixième jour.
Mon Fils est venu au monde, quand le jour de la durée des temps se trouvait au moment correspondant au temps qui s'écoule depuis l'heure de none jusqu'à celle de vêpres (depuis trois heures du soir jusqu'à six heures), c'est-à-dire lorsqu'à la chaleur du jour commence à succéder la fraîcheur de la nuit. En un mot, mon Fils a paru dans le monde après les cinq premiers âges, et lorsque le monde était déjà presque vers son déclin.
Le fils de perdition (l'Antéchrist), qui régnera très-peu de temps, viendra à la fin du jour de la durée du monde, au temps correspondant à ce moment où le soleil a déjà disparu de l'horizon, c'est-à-dire qu'il viendra dans les derniers jours.
Cette révélation, ô mes fidèles serviteurs, mérite votre attention. Vos intérêts vous font un devoir de chercher à la bien comprendre, afin que le grand séducteur ne vous entraîne pas dans la perdition, pour ainsi dire, sans que vous le sachiez. Armez-vous à l'avance, et préparez-vous au plus redoutable de tous les combats.
Après avoir passé une jeunesse licencieuse au milieu d'hommes très-pervers, et dans un désert où elle aura été conduite par un démon déguisé en ange de lumière, la mère du fils de perdition le concevra et l'enfantera sans en connaître le père. D'un autre côté, elle fera croire aux hommes que son enfantement a quelque chose de miraculeux, vu qu'elle n'a point d'époux, et qu'elle ignore, dira-t-elle, comment l'enfant qu'elle a mis au monde a été formé dans son sein, et le peuple la regardera comme une sainte et la qualifiera de ce titre.
Le fils de perdition est cette bête très-méchante (comme saint Jean l'appelle dans l'Apocalypse) qui fera mourir ceux qui refuseront de croire en lui ; qui s'associera les rois, les princes, les grands et les riches ; qui méprisera l'humilité et n'estimera que l'orgueil ; qui enfin subjuguera l'univers entier par des moyens diaboliques.
Il paraîtra agiter l'air, faire descendre le feu du ciel, produire les éclairs, le tonnerre et la grêle, renverser les montagnes, dessécher les fleuves, dépouiller la verdure des arbres, des forêts, et la leur rendre ensuite.
II paraîtra aussi rendre les hommes malades, guérir les infirmes, chasser les démons, et quelquefois ressusciter les morts, faisant qu'un cadavre remue comme s'il était en vie. Cependant cette espèce de résurrection ne durera jamais au-delà d'une petite heure, pour que la gloire de Dieu n'en souffre pas.
Il gagnera beaucoup de peuples en leur disant : Vous pouvez faire tout ce qu'il vous plaira ; renoncez aux jeûnes ; il suffit que vous m'aimiez, moi qui suis votre Dieu.
Il leur montrera des trésors et des richesses, et il leur permettra de se livrer à toutes sortes de festins, comme ils le voudront. Il les obligera de pratiquer la circoncision et plusieurs observances judaïques, et leur dira : Celui qui croit en moi recevra le pardon de ses péchés et vivra avec moi éternellement.
Il rejettera le baptême et l'Évangile, et il tournera en dérision tous les préceptes que l'Église a donnés aux hommes de ma part.
Ensuite il dira à ses partisans : Frappez-moi avec un glaive, et placez mon corps dans un linceul propre, jusqu'au jour de ma résurrection. On croira lui avoir réellement donné la mort, et de son côté il fera semblant de ressusciter. Après quoi, se composant un certain chiffre, qu'il dira être un gage de salut, il le donnera à tous ses serviteurs comme signe de leur foi en lui, et il leur commandera de l'adorer. Quant à ceux qui, par amour pour mon nom, refuseront de rendre cette adoration sacrilège au fils de perdition, il les fera mourir au milieu des plus cruels tourments.
Mais j'enverrai mes deux témoins, Enoch et Élie, que j'ai réservés pour ce temps-là. Leur mission sera de combattre cet homme du mal et de ramener dans la voie de la vérité ceux qu'il aura séduits. Ils auront la vertu d'opérer les miracles les plus éclatants, dans tous les lieux où le fils de perdition aura répandu ses mauvaises doctrines. Cependant je permettrai que ce méchant les fasse mourir ; mais je leur donnerai dans le ciel la récompense de leurs travaux.
Quand le fils de perdition aura accompli tous ses desseins, il rassemblera ses croyants et leur dira qu'il veut monter au ciel. Au moment même de cette ascension, un coup de foudre le terrassera et le fera mourir. D'un autre côté, la montagne où il se sera établi pour opérer son ascension sera à l'instant couverte d'une nuée, qui répandra une odeur de corruption insupportable et vraiment infernale ; ce qui, joint à la vue de son cadavre, couvert de pourriture, ouvrira les yeux à un grand nombre de personnes et leur fera avouer leur misérable erreur.
Après la triste défaite du fils de perdition, l'épouse de mon Fils, qui est l'Église, brillera d'une gloire sans égale, et les victimes de l'erreur s'empresseront de rentrer dans le bercail.
Quant à savoir en quel jour, après la chute de l'Antéchrist, le monde devra finir, l'homme ne doit pas chercher à le connaître : il ne pourrait y parvenir. Le Père s'en est réservé le secret.
Ô hommes, préparez-vous au jugement. »

Dans une autre vision, sainte Hildegarde a contemplé la scène finale de ce monde, le dernier jugement.

« Et voici que tous les éléments et toutes les créatures sont ébranlés d'un choc soudain. Le feu, l'air et l'eau se confondent, la terre tremble, la foudre et le tonnerre éclatent, les montagnes et les forêts s'écroulent ; tout ce qui était mortel perd la vie. Tous les éléments sont purifiés, toute souillure disparaît. Et j'entendis une voix criant à la terre : Ô vous, fils des hommes, qui êtes gisants, levez-vous. Et voici que tous les ossements humains se rassemblent et se revêtent de leur chair. Les uns brillent de clarté, et les autres sont enveloppés de ténèbres ; et chacun porte le témoignage de ses œuvres. Les uns ont le signe de la foi, qui illumine leur face comme une auréole ; chez les autres, cette auréole est remplacée par une ombre, qui est comme un signe distinctif. Soudain l'orient s'éclaira d'une lumière splendide, et je vis sur une nuée le Fils de l'homme, paraissant avec le même visage qu'il a eu dans ce monde, et siégeant sur un trône enflammé, mais non ardent, au-dessous duquel le monde achevait de se purifier dans cette tempête effroyable dont j'ai parlé. Et ceux qui étaient signés, étant comme ravis par un tourbillon, se portèrent à sa rencontre dans les airs, vers le point où j'avais vu d'abord cette lumière, qui est le tabernacle de la Divinité. Les bons restèrent séparés des méchants. Et, comme il est écrit dans l'Évangile, le souverain juge, d'un ton plein de douceur, admit les justes au royaume céleste, et d'une voix foudroyante, il précipita les réprouvés dans les flammes éternelles. Il ne se fit aucun autre examen ou interrogatoire sur la vie des hommes, rien de plus que ce que dit l'Évangile, car leurs œuvres bonnes ou mauvaises apparaissaient visiblement dans leurs personnes. Ceux qui n'étaient pas signés se tenaient au loin, du côté de l'aquilon, avec la tourbe infernale, et n'approchaient pas du juge ; mais voyant toutes ces choses comme dans un tourbillon, ils attendaient la fin du jugement et éclataient en sanglots lugubres.
Le jugement terminé, les foudres et les tonnerres, les tempêtes et les ouragans cessèrent, et tout ce qu'il y avait de passager dans les éléments s'évanouit. Puis il se fit un calme profond. Les élus, devenus radieux comme des soleils, s'élevaient pleins d'allégresse vers le ciel avec le Fils de Dieu et les myriades des esprits angéliques, tandis que les réprouvés descendaient en enfer avec le diable et ses anges, en poussant des clameurs lamentables. Et ainsi le ciel reçut des citoyens, et l'enfer engloutit des victimes. Le contraste de ces deux destinées est une chose que la langue humaine ne saurait exprimer.
Et bientôt tous les éléments resplendirent d'une souveraine sérénité, comme s'ils eussent été dépouillés d'une peau noire. Le feu était sans brûlure, l'air sans mélange, l'eau sans agitation, la terre sans oscillations. Le soleil aussi, la lune et les étoiles, et tout ce qui luit au firmament, brillaient d'un grand éclat. Ils demeuraient fixes et immobiles, cessant de produire le jour et la nuit. Et ce fut fini (Sciv., I. III, vis. XII). »

La dernière vision est un hymne triomphal, d'une poésie à la fois pleine d'élévation et de grâce, d'éclat et de fraîcheur. Ce tableau est suivi d'un petit drame charmant, dont les personnages sont les vertus, l'âme fidèle et le tentateur.


SYMPHONIE CÉLESTE

« Je vis ensuite une atmosphère splendide, où se firent entendre, du milieu des allégories précédentes, toutes sortes d'instruments de musique à la louange des citoyens des séjours célestes, et de ceux qui persévèrent avec constance dans la voie de la vérité. Ils redisaient aussi les gémissements des âmes pénitentes, rappelées à la joie par la voix des vertus qui les animent à triompher des embûches du diable. Elles les surmontent heureusement, et ainsi les hommes fidèles passent par la pénitence à l'amour des choses d'en haut. Et ce concert était comme la clameur d'une multitude, harmonieuse symphonie à la louange des sublimes hiérarchies. »



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