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mercredi 29 mars 2017

Dévotion aux Saints Anges : Les saints anges font tout ce qui se peut faire pour le bien des hommes




Extrait de "La Dévotion aux neuf Chœurs des Saints Anges" de M. Boudon :




Saint Raphaël (Murillo)
L'ange qui servit de domestique à ce jeune homme dont il est parlé en l'histoire de l'ordre de Saint-Dominique, fait bien voir cette vérité.
Une sainte dame ayant été avertie sur le tard qu'une pauvre femme était dans une extrême nécessité, qui demeurait dans les faubourgs de la ville où elle résidait pour lors, tous ses domestiques étant dehors, elle y envoya son fils, qui était encore fort jeune. Mais comme cet enfant avait peur, allant dans les ténèbres en un lieu éloigné de son logis, un page passa devant la porte, qui le conduisit avec un flambeau jusqu'à la maison de cette femme ; et étant obligé de s'en retourner, un homme parut encore, qui le ramena jusque chez sa mère, qui ne douta pas que ce ne fût son bon ange qui lui eût rendu ce charitable office. À la vérité, c'est beaucoup faire pour les hommes que de les garder si amoureusement ; mais c'est faire davantage que de prendre leur forme, et de paraître visiblement comme eux, ce qui leur est arrivé tant de fois. Et le savant interprète de l'Écriture, Corneille de la Pierre, estime qu'après la résurrection, ils formeront quelquefois des corps d'une incroyable beauté pour contenter nos sens extérieurs ; mais ce qui est bien encore plus surprenant, c'est de les voir en toute sorte de posture pour nous rendre service. Ils prennent la forme de pauvres, de mendiants, de malades, de lépreux ; il n'y a rien qu'ils ne fassent pour les hommes, qui ne font presque rien pour reconnaître tous leurs bienfaits.
Encore si ce n'était qu'en de certaines occasions qu'ils rendissent ces assistances à de si viles et chétives créatures ; mais de nous obliger autant de fois que nous vivons de moments, et en la manière qu'ils le font, c'est ce qui est inconcevable. Nous avons dit bien des fois que les anges nous gardaient ; vous l'avez dit, vous qui lisez ceci : mais avons-nous jamais bien pensé à une grâce si rare et si étonnante ? Un prince du sang royal qui viendrait dans un méchant village, pour y passer quelque temps service d'un pauvre paysan, dans un chétif taudis, ne ferait-il pas l'étonnement de tout l'univers ? Et si ce paysan était son ennemi, qui le maltraitât sans cesse, et dont le prince ne pût rien attendre pour ses propres intérêts, sans doute c'est ce qui augmenterait beaucoup l'admiration de tout le monde ; mais enfin, si ce prince non seulement passait quelques mois, quelques années auprès de ce misérable, mais s'il ne le quittait pas jusqu'au dernier soupir de sa vie, qu'il ne le perdit jamais de vue, qu'il fût toujours auprès de cet homme, non seulement ingrat, non seulement méchant, mais encore tout brutal, tout plein de maladies puantes, d'ulcères effroyables, de vermines, de gale, et de tout ce qu'il y a de plus infect, où en seraient les esprits des hommes ?
Cependant, ô mon âme, c'est de cette manière que ton bon ange te garde ; c'est de la sorte, vous à qui je parle par cet écrit, que votre saint ange vous garde, et vous rend une protection continuelle. Oui, cet aimable prince du paradis ne nous quitte jamais en cette vallée de misères et de larmes. Les anges, dit saint Augustin, entrent et sortent avec nous, ayant toujours les yeux arrêtés sur nous, et sur tout ce que nous faisons. Si nous demeurons en un lieu, ils s'y arrêtent ; si nous allons à la promenade, ils nous accompagnent ; si nous changeons de pays, ils nous suivent ; allons en quelque lieu qu'il nous plaira, sur la terre, sur la mer, ils sont toujours avec nous. Qu'un solitaire se renferme dans un ermitage, son bon ange y demeure avec lui ; qu'un voyageur change de pays continuellement, son bon ange le suit de toutes parts. Ô excessive bonté ! pendant même que nous dormons, ils veillent auprès de nous, ils sont toujours à nos côtés, nous qui sommes des pécheurs, et par suite leurs ennemis ; nous qui sommes l'horreur même, par le péché ; nous qui ne pourrions pas nous supporter nous-mêmes, si nous connaissions notre laideur et sentions notre puanteur ; nous qui sommes l'ingratitude même ; nous qui passons la plupart de notre vie dans des actions criminelles, soit par le péché mortel, soit par le péché véniel, ou dans des occupations viles et basses, qui assurément font grande pitié à ces esprits éclairés, qui en découvrent pleinement la sottise et la vanité ; nous qui dans les bonnes actions que nous faisons y mêlons quantité de défauts ; avec tout cela, ils ne se lassent jamais d'être auprès de nous, et durant tout le long des jours et des nuits, et tous les moments de notre vie. Et si nous sommes assez heureux que d'être sauvés après notre mort, ils nous rendront visite dans les prisons du purgatoire, et ne tiendront pas à déshonneur de se rendre au milieu des brasiers et des flammes de ce lieu de souffrance pour nous y consoler. En vérité, n'est-ce pas là être nos serviteurs et nos esclaves, et non seulement nos gardiens ? Il y a plus : trouverait-on, je ne dis pas des princes pour servir de chétives personnes de la sorte ; mais pourrait-on bien trouver des personnes, pour malheureuses qu'elles puissent être, qui voulussent servir des rois à ces conditions, et engager leur liberté jusqu'à ce point ? Commencez donc à bien savoir aujourd'hui, mais souvenez-vous-en bien, que les anges sont nos domestiques et nos esclaves. Ô bonté de Dieu ! des princes du paradis, des rois de gloire être nos valets et nos esclaves ! Le saint homme Vincent Caraffe avait bien raison de dire que la vie d'un Chrétien était une vie d'étonnement et d'admiration.
Ajoutons à ces amours surprenants que les anges ne se contentent pas de garder les hommes de la sorte ; ils vont jusqu'à cet excès, qu'ils gardent les bêtes pour l'amour des hommes, non seulement parce que, quelquefois déguisés eu bergers, ils ont veillé sur des troupeaux de certaines âmes d'élite, comme nous le lisons de saint Félix, qui depuis fut Capucin ; mais parce que, selon Saint Augustin, le monde visible est gouverné par des créatures invisibles, par de purs esprits, et que même il y a des anges qui président à chaque chose visible, à toutes les espèces de créatures qui sont dans le monde, soit qu'elles soient animées, soit qu'elles soient inanimées. Les cieux et les astres ont leurs anges moteurs ; les eaux ont un ange particulier, comme il est rapporté en l'Apocalypse ; l'air a ses anges qui gouvernent les vents, comme il se voit dans le même livre, qui nous apprend de plus que l'élément du feu a aussi les siens : Les royaumes ont leurs anges, comme il se lit en Daniel ; les provinces en ont aussi qui les gardent, comme on le remarque en la Genèse, car les anges qui apparurent à Jacob étaient les gardiens des provinces par où il passait. Jacob, dit saint Augustin, vit deux troupes d'anges, l'une était commandée par l'ange de Mésopotamie qui avait conduit ce saint patriarche avec sa troupe jusqu'aux confins de Chanaan ; là ce saint homme fut reçu par l'ange de Chanaan, accompagné d'une multitude d'anges inférieurs, pour lui servir d'escorte et le défendre de ses ennemis. Chaque pays, selon le sentiment de saint Clément, a un ange qui en prend soin ; les villes et les villages en out aussi, et les familles même particulières, selon le jugement du savant Tostat : à plus forte raison les églises et les autels, comme il a plu à Notre-Seigneur de le révéler à plusieurs de ses saints.
Ainsi tout le monde est plein d'anges, et il semble que la douceur de la divine Providence le demande ; car, s'il est vrai, comme le témoignent quelques-uns, qu'il y a dans l'air un 'si grand nombre de diables que si ces esprits avaient des corps, ils y feraient comme une nuit en plein jour, nous ôtant la vue du soleil : comment les hommes, qui ne sont que faiblesses, pourraient-ils résister à une telle force, s'ils n'étaient secourus par les bons anges ? Or tous ces bons anges ne sont pas dans tout cet univers pour n'y rien faire. Comme toutes les étoiles ont leurs influences particulières, de même tous ces esprits bienheureux produisent des effets avantageux pour le bien des hommes, qui sont propres à un chacun d'eux, et, si nous savions toutes les faveurs que nous en recevons continuellement, il faudrait être plus dur que les pierres pour n'en être pas sensiblement touché. Mais c'est grande pitié que l'homme est tout chair et ne pense guère qu'aux objets qui lui tombent sous les sens. On a beau lui parler des choses spirituelles, ou il ne les entend pas ou il s'en oublie avec facilité. Quoi que le prophète Élisée pût dire à son serviteur de la protection de ces glorieux esprits, ce pauvre homme n'en était pas plus assuré, jusqu'à ce que Dieu, miraculeusement, lui ouvrit les yeux et les lui fit voir sous des formes sensibles. Ô que si Dieu, tout bon, nous faisait la même grâce, que nous découvririons de merveilles ! Ne laissons pourtant pas de bien considérer que toute la commodité et le bien que nous tirons de la terre, de l'air, de l'eau, du feu, des cieux et des animaux, et enfin de toutes les créatures, nous arrive par le ministère des saints anges qui sont les fidèles ministres du seul Dieu que nous adorons, qui est admirable dans tous ses dons, et qui en mérite des louanges immortelles à jamais.





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