Extrait de "Esprit pour passer saintement l'Avent, le Carême..." du R.P. Avrillon :
La descente du Saint-Esprit (Le Brun) |
Ce grand jour approche, jour qu'on peut appeler avec les saints pères un jour de lumière, de grâce et d'amour, jour que saint Chrysostome (in Serm.) appelait la métropole de toutes les solennités de la religion chrétienne, la conclusion et la publication d'une paix éternelle entre le ciel et la terre, entre Dieu et les hommes, l'heureux épilogue de tous les grands mystères que Jésus-Christ a accomplis sur la terre.
C'est un Dieu éternel et tout puissant, égal en toutes choses au Père et au Fils, dont il procède par voie d'amour. Le Père engendre son Verbe de toute éternité parla fécondité de son entendement, et ces deux personnes divines s'aimant l'une l'autre d'un amour essentiel, incompréhensible et divin, produisent cette troisième personne que nous connaissons, et que nous adorons sous le nom de Saint-Esprit, qui procède de l'un et de l'autre, et qui est l'amour substantiel du Père et du Fils. Voilà le précis de ce que la foi nous enseigne touchant cet esprit adorable, et cela suffit pour nous engager à lui rendre nos respects, nos hommages et nos adorations, et à l'aimer de tout notre cœur, de toute notre âme et de toutes nos forces, parce qu'il est un Dieu infiniment aimable et infiniment adorable.
Nous allons célébrer une mission visible et une mission invisible de cet adorable Esprit. La première ne s'est passée qu'une fois dans la ville de Jérusalem, et elle ne se réitérera jamais, et elle parut avec un grand bruit, avec beaucoup de splendeur, d'éclat et de pompe. La seconde se peut réitérer tous les jours et en tous les lieux ; elle se passe dans le secret de nos cœurs avec beaucoup de calme et de silence. La première a fait des prédicateurs, des docteurs, des maîtres du monde et des héraults de l'Évangile, pour établir dans toute la terre la religion de Jésus-Christ, pour tenir tête aux tyrans et aux empereurs païens, pour exterminer l'idolâtrie, pour arroser de leur sang le berceau du christianisme, et pour l'établir solidement sur les ruines du paganisme et de l'idolâtrie dans tous les royaumes de la terre.
Il fallait à l'Église naissante un esprit de lumière pour dissiper ses ténèbres, pour l'éclairer et pour l'instruire. La mission et la descente invisible de cet Esprit adorable, à laquelle nous allons nous préparer, et vers laquelle nous devons soupirer sans cesse, fait des pénitents et des justes pour former et pour édifier l'Église, et élève des saints pour remplir un jour dans le ciel les places dont les anges rebelles ont été chassés.
Commencez cette retraite avec autant d'ardeur et d'empressement d'attirer le Saint-Esprit dans votre cœur qu'en avaient les apôtres quand ils sont entrés dans le cénacle avec la sainte Vierge, immédiatement après l'ascension du Sauveur.
Employez les dix jours qui précèdent la fête de la Pentecôte à vous y préparer ; prenez les apôtres pour vos modèles ; étudiez avec application ces premiers saints de l'Église, qui ont eu les prémices de l'Esprit saint ; entrez souvent en esprit dans le cénacle où ils se sont renfermés, pour les considérer et pour les imiter ; soyez comme eux dans une grande attention et dans un grand désir pour observer le bienheureux moment auquel cet esprit de lumière, de grâce et d'amour, pourra descendre en vous.
Vous aurez soin de vous appliquer à correspondre avec une exacte fidélité à ses divines opérations ; vous vous étudierez à le bien connaître, à l'aimer de tout votre cœur, à l'écouter avec toute l'attention, tout le recueillement et tout le respect qu'il mérite ; à suivre les vues et les inspirations dont il vous favorisera ; à répondre avec une grande fidélité aux sentiments et aux saints mouvements qu'il excitera dans votre cœur, et vous puiserez dans cette source de vérité et de bonté toutes les grâces et toute la force dont vous avez besoin pour assurer votre salut, pour marcher à pas de géant dans les voies de la perfection, pour vous servir de règle et de conduite pendant toute votre vie.
Durant tout ce saint temps, vivez dans un grand détachement de toutes les choses de la terre, et surtout dans un grand éloignement de l'esprit du monde, qui est entièrement opposé à l'esprit de Dieu ; évitez la dissipation, les entretiens inutiles, les vaines joies de la terre, les amusements, les pertes de temps, et vivez dans un grand silence et dans un grand recueillement, si vous voulez que cet Esprit de Dieu descende sur le vôtre.
Regardez cet Esprit saint et le vôtre, comme ces deux abîmes dont parle le prophète (Psal. 41), et que saint Augustin dit être l'esprit de Dieu et l'esprit de l'homme : le premier abîme est dans le ciel, et le second sur la terre ; l'Esprit de Dieu appelle l'esprit de l'homme pour le détacher, pour l'élever, pour l'éclairer, et pour l'unir à soi par les liens d'amour, quoiqu'il n'en ait pas besoin ; l'esprit de l'homme, cet abîme de la terre, qui sent qu'il ne peut se passer de l'Esprit de Dieu, l'appelle à son secours, et ces deux abîmes veulent s'unir et contracter ensemble une éternelle liaison.
Soupirez pour cette union qui vous est si honorable et si avantageuse, et mettez tout en usage pour vous en rendre digne et pour l'obtenir ; le Saint-Esprit, qui est un esprit de bonté, vous préviendra, vous aidera, et fera plus de la moitié du chemin pour s'unir à vous.
Faites-vous pendant tout ce saint temps une pratique générale de l'avoir toujours présent intimement dans votre esprit et dans votre cœur, et de ne commencer jamais aucune action sans l'avoir consulté et sans la lui avoir offerte ; et pour vous faciliter cette pratique importante, et vous la rendre familière et aisée, élevez souvent votre esprit vers cet esprit de Dieu par des oraisons jaculatoires propres à vous pénétrer de son adorable présence et à l'attirer en vous.
ORAISONS JACULATOIRES
Ô Esprit saint ! créez en moi un cœur nouveau qui soit selon le vôtre, et renouvelez en moi un esprit droit, qui ne s'écarte jamais ni de la vérité ni des sentiers de la justice (psalm., 50).
Ne me rejetez pas de votre face, ô mon Dieu! et ne m'ôtez pas votre Esprit saint, car hélas ! si vous le retirez, je serais privé et de la vie de la grâce et de la vie de la gloire (Ibid).
Envoyez-moi votre Esprit, ô mon Dieu, et toutes choses seront créées, et c'est par lui que vous renouvellerez la face de la terre (Psalm. 32).
Je vous demande, ô Esprit saint ! que vous renouveliez la face de mon âme ; je sens que j'ai besoin d'une seconde création qui répare en moi tous les traits de votre image que j'ai reçue dans la première, et que j'ai tant de fois effacée (Psalm. 103).
PRIÈRE AU SAINT-ESPRIT
Esprit saint et sanctificateur, Dieu tout-puissant, amour essentiel du Père et du Fils, adorable lien de l'auguste Trinité, je vous adore et je vous aime de tout mon cœur. Dieu de bonté et de miséricorde, venez à moi, visitez-moi, remplissez-moi, demeurez en moi ; faites de mon cœur un temple et un sanctuaire animé, où vous receviez mes adorations et mes hommages, et où vous preniez vos délices. Source d'eau vive, qui rejaillissez jusqu'à la vie éternelle, arrosez-moi et désaltérez mon âme, qui a soif de la justice ; feu sacré, purifiez-moi, faites-moi brûler de vos divines flammes, et ne vous éteignez jamais en moi.
Lumière ineffable, éclairez-moi ; Sainteté parfaite, consacrez-moi ; Esprit de vérité, sans vous je suis dans l'erreur ; Esprit d'amour, sans vous je suis tout de glace ; Esprit d'onction, sans vous je suis dans la sécheresse ; Esprit de vie et vivifiant, sans vous je suis dans la mort.
Esprit adorable, guérissez mon orgueil et ma présomption par le don d'une crainte filiale qui ne soit jamais destituée d'amour. Réveillez ma paresse et ma langueur par le don d'une piété ardente et sincère. Instruisez mon ignorance par le don de la science des saints, qui éclaire mon esprit et qui sanctifie mon âme ; soutenez ma faiblesse par le don de la force chrétienne, qui fait le caractère des Élus ; dirigez-moi dans toutes mes voies ; éclaircissez tous mes doutes par le don d'un bon conseil, qui ne peut venir que de vous seul ; dissipez les ténèbres qui m'environnent par le don d'entendement, accompagné d'une vraie docilité d'esprit et de cœur, et couronnez en moi tous ces dons par celui d'une sagesse chrétienne, qui vous connaisse, vous aime, et s'affectionne à toutes les vérités que vous lui enseignerez ; mais surtout, ô Esprit saint ! soyez en moi le gardien de vos dons, de peur que je ne les perde ; faites à mon cœur une douce violence, pour l'engager à vous désirer, à vous cher cher, à vous obéir, à vous aimer et à vous posséder dans le temps et dans l'éternité.
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