Summis desiderantes affectibus
Bulle apostolique de Sa Sainteté le Pape Innocent VIII,
Contre l'hérésie des sorcières
(5 décembre 1484)
Bulle à l'origine de la création de l'Inquisition
Innocent, évêque, serviteur des serviteurs de Dieu, en perpétuelle mémoire de la chose : Désirant de tout cœur, comme le requiert la sollicitude de Notre Charge Pastorale, que la foi s'accroisse et s'épanouisse partout et au-dessus de tout en notre temps, et que toute perversion hérétique soit expulsée loin des frontières des fidèles, nous manifestons volontiers notre pieux et saint désir et nous accordons de nouveau les moyens de le mettre à exécution. Afin que toutes erreurs ayant été arrachées par l'action de notre ministère comme par la houe d'un ouvrier consciencieux, le zèle de la même foi et de sa pratique régulière soit plus fortement imprimé dans les cœurs des fidèles.
Récemment, en effet, il est parvenu à nos oreilles, non sans nous causer grande peine, que, en certaines régions de la Germanie supérieure tout comme dans les provinces, cités, territoires, districts et diocèses de Mayence, Cologne, Trèves, Salzbourg et Brême, maintes personnes de l'un et l'autre sexe, oublieuses de leur propre salut, et déviant de la foi catholique, se sont livrées elles-mêmes aux démons incubes et succubes : par des incantations, des charmes, des conjurations, d'autres infamies superstitieuses et des excès magiques, elles font dépérir, s'étouffer et s'éteindre la progéniture des femmes, les petits des animaux, les moissons de la terre, les raisins des vignes et les fruits des arbres. Aussi bien que les hommes eux-mêmes, les femmes, le petit et le gros bétail, et autres animaux de toutes espèces, les vignobles, les vergers, les prairies, les pâturages, les blés, les grains et plantes légumineuses. Elles affligent et torturent les hommes, les femmes, les bêtes de somme, les troupeaux de petit et gros bétail, par des maux et des tourments cruels, internes et externes. Elles empêchent ces mêmes hommes de féconder, ces mêmes femmes de concevoir ; les époux de rendre à leurs épouses et les épouses de rendre à leurs époux les actes conjugaux. Et la foi elle-même, qu'elles ont reçue en recevant le saint baptême, elles la renient d'une bouche sacrilège. Elles ne craignent pas de commettre encore et de perpétrer nombre d'autres crimes et excès infâmes, à l'instigation de l'ennemi du genre humain, pour la mise en péril de leurs âmes, l'offense de la majesté divine et le scandale d'un exemple pernicieux pour beaucoup.
Bien que nos chers fils — Henry Institoris et Jacques Sprenger —, de l'Ordre des Prêcheurs et professeurs de théologie, aient été déjà et demeurent délégués par lettre apostolique comme Inquisiteurs de la perversion hérétique — Henry pour la région susdite de la Germanie supérieure où se trouvent les provinces, cités, districts, diocèses et autres localités ci-dessus mentionnés ; Jacques pour certains territoires de la rive du Rhin — : cependant plus d'un clerc et d'un laïc de ces régions, cherchant à en savoir plus qu'il ne faut (Romains, 12, 3), arguant de ce que dans nos lettres de délégation ni les provinces, cités, diocèses, districts et autres localités : ni les délégués eux-mêmes ni les excès visés n'étaient nommément indiqués et spécifiés, (ils) ne rougissent pas d'affirmer obstinément que pareils excès n'existent pas dans leurs régions et donc qu'il n'est pas licite à nos délégués de remplir le ministère d'Inquisition dans les province, cités, diocèses, districts et autres localités, et qu'ils ne doivent pas être autorisés à punir, incarcérer et corriger les personnes en cause pour les excès et crimes susdits. Et c'est pourquoi dans ces provinces, cités, diocèses, districts et localités, les excès et crimes de ce genre demeurent impunis, non sans danger évident pour les âmes et risque de leur éternelle perdition.
Nous donc, désirant comme il incombe à Notre Charge écarter du milieu (du chemin) tous les obstacles quels qu'ils soient qui pourraient retarder de quelque manière l'exercice de la charge des Inquisiteurs eux-mêmes et pourvoir par les remèdes opportuns à ce que la souillure de la perversion hérétique et autres excès de ce genre ne diffusent pas leur venin pour la perte des autres innocents : le zèle de la foi nous y poussant au plus haut point, afin de ne pas voir les provinces, cités, diocèses, districts et localités susdits de la région de Germanie supérieure manquer du nécessaire ministère de l'Inquisition : en vertu de Notre Autorité Apostolique, par les présentes (lettres), nous établissons qu'il est licite aux mêmes Inquisiteurs d'exercer le ministère de l'Inquisition et qu'il faut les admettre pour la correction, l'incarcération, la punition des personnes inculpées des excès et crimes susdits ; exactement en tout et partout comme si dans nos lettres précitées les provinces, cités, diocèses, districts et localités, ainsi que personnes et excès de cette espèce avaient été nommément spécifiés. Et pour une sécurité plus grande, nous étendons les lettres susdites et la délégation des Inquisiteurs susnommés aux provinces, cités, diocèses, localités, personnes et crimes ci-dessus mentionnés ; de manière que tous deux ou l'un d'entre eux, s'étant adjoint notre bien-aimé fils — Jean Gremper — Clerc du diocèse de Constance, maître-ès-arts modernes, ou tout autre notaire public mandaté par tous les deux ou l'un d'entre eux pour un temps, ils exercent leur ministère d'Inquisition dans les provinces, cités, diocèses, districts et localités susdits, contre toutes personnes de quelque condition et de quelque état que ce soit ; et que ces personnes reconnues coupables des crimes de ce genre, selon leurs démérites ils les corrigent, incarcèrent, punissent et châtient.
De plus, de par la même Autorité, nous leur concédons la faculté entière et libre, de proposer et de prêcher la Parole de Dieu au peuple fidèle dans toutes les églises paroissiales de ces provinces, autant de fois qu'il sera opportun et qu'il leur semblera bon, comme d'accomplir librement et licitement aux mêmes endroits et d'exécuter toutes autres choses et chacune qui en ce domaine leur sembleraient nécessaires et opportunes.
Néanmoins, à notre vénérable frère l'évêque de Strasbourg, par Lettre Apostolique, nous donnons mandat de faire lui-même, par lui-même, par un autre ou par d'autres, la promulgation solennelle de ces décisions, où, quand, et autant de fois qu'il le jugera opportun et qu'il en sera légitiment prié par les deux Inquisiteurs ou l'un d'entre eux. Et qu'il ne permette pas, à qui que ce soit et quelle que soit son autorité, contre la teneur des présentes lettres et des précédentes, de les attaquer à ce sujet ou de leur faire obstacle, de quelque façon que ce soit. Et pour ce faire, leurs persécuteurs, opposants, contradicteurs quels qu'ils soient et rebelles de tout ordre, état, position, primauté, dignité, condition, de quelque privilège d'exemption qu'ils soient munis : qu'il les accable par des condamnations, censures et peines d'excommunication, suspense et interdit ou autre plus redoutables (dont il est juge), tout droit d'appel leur ayant été enlevé. Et même qu'il prenne soin, dans les procès justement menés par lui en ce domaine, autant que ce sera nécessaire, de par Notre Autorité Suprême, d'aggraver et aggraver encore les justes condamnations, en appelant si besoin est au secours du bras séculier.
Nonobstant tous précédents, constitutions et ordinations apostoliques contraires... Que personne... Et si quelqu'un osait le faire, ce qu'à Dieu ne plaise, qu'il sache que sur lui tombera le châtiment du Dieu tout-puissant et des saints apôtres Pierre et Paul.
Donné à Rome près saint Pierre, l'année quatorze cent quatre-vingt-quatre de l'Incarnation du Seigneur, le cinq décembre, de notre pontificat la première.
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Le Marteau des Sorcières, Malleus Maleficarum
(ou Bréviaire des Inquisiteurs)
par Henry Institoris et Jacques Sprenger
(Extraits)
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Parce que plusieurs pasteurs d'âmes et prédicateurs de la parole de Dieu, dans leurs sermons au peuple ne craignent pas de dire et d'affirmer que les sorcières n'existent pas, ou qu'elles ne peuvent en rien nuire aux créatures ; parce que, comme suite à ces sermons imprudents, parfois l'autorité est enlevée au bras séculier pour punir de telles sorcières, tout cela tournant à la multiplication maximale des sorcières et au renforcement de cette hérésie : en conséquence les susdits Inquisiteurs, voulant de toutes leurs forces parer à tous les périls et assauts, ont collationné non tant par goût que par devoir, un traité où ils se sont efforcés moins de chasser l'ignorance de ces prédicateurs pour la conservation de la foi que de fournir aux juges la méthode de jugement et de punition requise pour l'extermination des dites sorcières, selon la teneur de la Bulle et les dispositions des saints canons.
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Après cela, une seconde signature a été apposée contre des prédicateurs imprudents, spécialement pour les articles suivants : Primo, les maîtres en sacrée théologie dont les noms suivent recommandent les Inquisiteurs de la perversion hérétique, canoniquement délégués par l'autorité du Siège Apostolique et exhortent à les aider avec zèle dans la poursuite de leur ministère. Secundo, que des maléfices puissent exister, Dieu le permettant, le diable y coopérant, par l'action des sorciers et des sorcières, voilà qui n'est pas contraire à la foi catholique, mais conforme aux paroles de l'Écriture sainte ; et même il est nécessaire, selon l'opinion des saints docteurs, d'admettre que quelquefois ils puissent se produire. Tertio, il est erroné de prêcher que les maléfices ne peuvent se produire ; car ceux qui prêchent ainsi gênent pour leur part l'œuvre pieuse des Inquisiteurs au préjudice du salut des âmes ; encore parfois des secrets qui parviennent aux Inquisiteurs ne soient pas à révéler à tous. Enfin, tous les princes et tous les catholiques doivent être exhortés à porter assistance aux entreprises si pieuses des Inquisiteurs pour la défense de la sainte foi catholique.
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Au milieu des calamités d'un siècle qui s'écroule — nous ne le savons pas tant par les livres que par expérience répétée —, le vieil Orient, déchu sous la sentence irrémédiable de sa ruine, depuis l'origine n'a cessé d'infecter de la peste des diverses hérésies l'Église que le nouvel Orient, l'Homme Christ Jésus, a fécondée par la rosée de son sang ; il s'y emploie cependant surtout aujourd'hui où, le monde sur le soir descendant vers son déclin et la malice des hommes grandissant, il sait dans sa rage, comme en témoigne Jean en l'Apocalypse, qu'il n'a plus que peu de temps. Pour cela, il a fait pousser dans le champ du Seigneur une perversion hérétique surprenante, je veux dire l'Hérésie des Sorcières, ainsi caractérisée par le sexe où on la voit surtout sévir. Attaquant par d'innombrables assauts, elle réalise en chacune de ses œuvres — c'est effroyable à penser, abominable aux yeux de Dieu et détestable pour tous les fidèles du Christ — son incarnation totale. À cause en effet d'un pacte avec l'enfer et d'une alliance avec la mort, pour réaliser leurs desseins dépravés, ces femmes se soumettent à la plus honteuse servitude ; et s'y ajoutent des maux quotidiens qui atteignent, avec la permission de Dieu et par la puissance du diable, hommes, bêtes et fruits de la terre.
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Trois erreurs hérétiques sont à détruire dont la réfutation fera apparaître la vérité. Certains en effet, rapporte saint Thomas dans le Commentaire sur le Livre des Sentences, ont tenté de prouver qu'il n'y a pas de maléfice au monde, sauf dans l'imagination des gens qui attribuent au maléfice des effets naturels de caractère occulte. D'autres concèdent l'existence des sorciers, mais affirment que ceux-ci ne peuvent que se figurer concourir à des effets maléfiques. Les troisièmes déclarent que les maléfices sont purement imaginaires et fantasmatiques, bien que le diable soit réellement complice de la sorcière.
L'exposé et la réfutation de ces erreurs se font comme suit : La première est absolument qualifiée d'hérésie par les docteurs et surtout saint Thomas : « Pareille opinion est radicalement contraire aux opinions des saints et provient d'un manque de foi à la racine. » En effet l'autorité de l'Écriture sainte dit que les démons ont pouvoir sur les corps et les imaginations des hommes, quand ils en ont la permission de Dieu : on le voit en plusieurs endroits de l'Écriture. Par conséquent ceux qui disent que le maléfice n'existe au monde que dans l'imagination des gens, ceux-là ne croient pas non plus à l'existence des démons, sinon dans l'esprit du peuple.
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La punition de la superstition nuisible a bien des formes ; par exemple : si la faute est notoire, que l'on refuse l'Eucharistie ; si elle est occulte, que l'on impose une pénitence de quarante jours. S'il s'agit d'un clerc, qu'on le dépose et qu'on l'enferme dans un monastère ; si c'est un laïc, qu'on l'excommunie. Que pareils gens soient tenus pour infâmes, eux et leurs complices, et qu'ils ne puissent même pas être admis à la pénitence publique.
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Les sorciers usent de certaines images et amulettes. Ils les déposent parfois sous le seuil des portes de maison ou dans certains prés où se rassemblent les troupeaux et les hommes, lesquels se trouvent ensorcelés et quelquefois en meurent. Or les effets de ce genre peuvent provenir de ces images, parce qu'elles ont reçu certaines influences des corps célestes. La preuve : de même que les corps terrestres sont soumis aux corps célestes, de même aussi les instruments faits de main d'homme. Les corps naturels peuvent recevoir quelques vertus occultes, les instruments aussi. D'où leurs œuvres pourraient être réalisées en vertu d'influences pareilles et non de par les démons. Encore : des choses vraiment merveilleuses peuvent être faites par la puissance de la nature là où elle opère ; de même aussi des choses extraordinaires, horribles et stupéfiantes. La preuve chez saint Grégoire : Les saints font des miracles tantôt par la prière, tantôt par le commandement. Exemple des deux : Pierre en priant ressuscite Talitha morte ; sans prière, par une réprimande, il livre à la mort Ananie et Sapphyra menteurs (Dialogues II, 30). Donc un homme peut par la puissance de son âme changer la matière corporelle en une autre, comme faire passer de la santé à la maladie ou vice versa.
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Des propriétés leur sont reconnues (aux démons) par les théologiens, celles d'esprits impurs, mais non corrompus par nature. Car en eux existent selon Denys la fureur naturelle, la convoitise folle, l'imagination effrontée, comprenons dans l'ordre des péchés spirituels : l'orgueil, l'envie, la colère. D'où ils sont des ennemis du genre humain, esprits logiques, mais saisissant les choses sans raisonnement, subtils dans leur méchanceté, passionnés de nuire, toujours prêts à une ruse nouvelle. Ils trompent les sens, ils souillent les cœurs. Ils nous dérangent quand nous veillons, ils nous perturbent par des rêves quand nous dormons. Ils apportent des maladies ; ils suscitent des tempêtes, ils se transforment en anges de lumière, ils portent toujours l'enfer avec eux. Par le fait des sorciers, ils accaparent pour eux le culte divin ; ils opèrent dans les arts de la magie ; ils tendent à dominer les bons, ils empoisonnent tout au maximum ; ils existent pour éprouver les élus ; ils en veulent au bonheur de l'homme (Commentaire sur les Sentences II, 5-8). Ils ont mille moyens et artifices pour nuire, comme par exemple tenter, depuis leur chute, de déchirer l'unité de l’Église, blesser la charité, empoisonner du fiel de l'envie la douceur de l'œuvre des saints, troubler à tout prix et bouleverser le genre humain. Et pourtant selon Job : sa puissance est dans ses reins et sa vigueur dans les muscles de son ventre. C'est par la puissance de la chair qu'ils dominent fortement les hommes...
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Et qu'il y ait un ordre entre eux, même pour les tâches extérieures d'attaque, leurs noms eux-mêmes le démontrent. En effet, le seul et même nom — diable — se trouve exprimé dans l'Écriture de multiples façons, cela en raison de la diversité des propriétés des démons. Pourtant l'Écriture rapporte qu'un seul exerce la présidence de ces œuvres immondes et de certains autres vices l'usage de l'Écriture et de la prédication, c'est de nommer diable tout esprit impur : de dia qui signifie deux et bolus qui signifie morceau, car il tue deux (réalités) le corps et l'âme. Selon l'étymologie : en grec diable signifie « enfermé dans l'ergastule » : ce qui convient, car il ne lui est pas permis de nuire autant qu'il voudrait. Ou encore diable signifie « celui qui descend » parce qu'il est dégringolé et s'est effondré, et selon son être et selon son lieu. On le nomme aussi démon, c'est-à-dire « celui qui aime le sang » (ou le sanguinaire), à cause du péché dont il a soif et qu'il cause par la triple science dont il dispose : la subtilité de sa nature, l'expérience, et la révélation des bons anges. On l'appelle Bélial : ce qui signifie « sans joug » ou sans maître, car de toutes ses forces il lutte contre celui à qui il devrait être soumis. On l'appelle aussi Beelzéboul, ce qui signifie « l'homme-aux-mouches », c'est-à-dire des âmes pécheresses qui ont abandonné le véritable Époux : le Christ. Ou encore : Satan, c'est-à-dire « l'adversaire ». Aussi Pierre écrit-il dans une Lettre : votre adversaire rôde... De même Béhémoth, c'est-à-dire la bête qui rend les hommes bestiaux. Cependant le démon même de la fornication et le prince de cette ordure s'appelle Asmodée, ce qui signifie « fabrique de jugement » : à cause de ce vice il y eut un jugement terrible sur Sodome et sur quatre autres villes. De la même manière, le démon de l'orgueil s'appelle Léviathan, ce qui signifie leur « exaltation » : Lucifer en effet tentant les premiers parents d'orgueil leur promit un surcroît de divinité. Au sujet de quoi le Seigneur dit par Isaïe : je rendrai visite à Léviathan, serpent antique et retors... Le démon de l'avarice et des richesses s'appelle Mammon, que le Christ dans l'Évangile a démasqué : vous ne pouvez pas servir Dieu et Mammon (nommer ainsi le diable, c'est déjà le maîtriser symboliquement).
Aux objections : À la première on répond : le bien peut se trouver sans le mal ; mais le mal ne peut jamais se trouver sans le bien, puisqu'il s'appuie sur la créature qui est bonne. D'où les démons, en tant qu'ils ont une nature bonne, connaissent un ordre et dans leur être et dans leurs actions ; et Job le dit (Job 1-2). À la seconde objection, on peut dire que les démons envoyés en opération ne sont plus en enfer, mais dans notre atmosphère ténébreuse. D'où ils ont ici-bas entre eux un ordre qu'ils n'auront plus en enfer. D'où on peut dire aussi qu'a disparu en eux toute ordination à l'obtention de la béatitude, car ils sont déchus de cet ordre irrémédiablement. On peut dire encore que même en enfer il demeure pour eux un certain ordre de puissance et d'action punitive, dans la mesure où certains sont députés pour le châtiment des âmes et d'autres pas ; mais cet ordre proviendra davantage de Dieu que d'eux-mêmes, comme d'ailleurs également leurs tourments. À la troisième objection, selon laquelle les anges supérieurs ayant péché davantage sont davantage punis et sont davantage impliqués dans ces actes immondes, nous répondons : La faute dit relation à la peine et non à l'acte et à l'opération de la nature. D'où s'ils ne sont pas impliqués dans ces actes impurs, c'est eu égard à la noblesse de leur nature et non en conséquence de leur faute et de leur peine. Et bien que tous soient des esprits impurs et passionnés de nuire, cependant l'un (l'est) plus que l'autre dans la mesure où la ténèbre a envahi des natures plus hautes. À la quatrième objection, on répond : Il y a un accord entre les démons, non pas d'amitié, mais de cette malice avec laquelle ils haïssent les hommes et s'opposent tant qu'ils peuvent à la justice de Dieu. En effet pareil accord, on le détecte entre les impies qu'ils s'adjoignent et se soumettent afin d'exercer leur propre malice : (ils) choisissent les plus forts. À la cinquième : Bien que leur servitude de prisonniers soit égale chez tous, maintenant dans les airs et plus tard en enfer, il ne s'ensuit pas cependant que par nature, ils soient ordonnés à des peines égales et à des tâches égales. Au contraire, plus ils sont nobles par nature et puissants par fonction, plus leur torture sera sévère. « Les puissants seront châtiés puissamment », dit la Sagesse (Sagesse 6, 6).
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Pour ce qui est des ecclésiastiques, c'est-à-dire des clercs et religieux de l'un et l'autre sexe : Il y a Chrysostome disant sur le texte (Il chassa les vendeurs et acheteurs du temple) : De même que tout bien vient du sacerdoce, de même aussi tout mal. Puis Jérôme écrit dans une Lettre à Népotien : Le clerc trafiquant, passé du dénuement à la richesse et de la honte à la gloire, fuis-le comme une peste. Et le bienheureux Bernard dans ses Homélies sur le Cantique : S'il se levait un hérétique déclaré, on le jetterait dehors et il sécherait ; si c'était un ennemi violent, les bons peut-être se cacheraient de lui. Mais aujourd'hui comment expulser, comment se cacher ? Tous sont des amis et pourtant tous des ennemis ; tous des familiers et nul ne veut la paix ; tous sont des proches et tous cherchent leur intérêt. (Et d'ailleurs : Nos prélats sont devenus des Pilates ; nos pasteurs sont devenus des tondeurs. (Et il parle encore) des prélats des religieux qui imposent de lourdes charges aux inférieurs et n'y touchent même pas du petit doigt. Et Grégoire dans sa Règle pastorale dit : Personne ne fait plus de mal à l'Église que celui qui ayant nom et rang de sainteté agit de manière perverse ; car nul n'ose reprendre ce coupable et la faute se développe comme un puissant exemple, du fait que le pêcheur est honoré au titre de son rang. Au sujet des religieux, le bienheureux Augustin écrit à Vincent le donatiste : Je confesse simplement à votre charité devant le Seigneur notre Dieu, qui est témoin de ma conscience depuis que j'ai commencé à la servir : je crois d'expérience que l'on peut difficilement trouver meilleur ou pire que ceux qui grandissent ou dégénèrent dans les monastères.
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Saint Thomas, traitant de l'empêchement maléfique (au mariage), donne les raisons pour lesquelles Dieu permet au diable un plus grand pouvoir maléfique sur les actes vénériens de l'homme que sur les autres ; il faut dire pareillement que ces femmes sont les plus infectées qui se livrent le plus à ces actes. En effet il dit que la corruption première du péché par laquelle l'homme est devenu esclave du diable nous atteint par la voie de l'acte génital. D'où Dieu permet au diable d'exercer un pouvoir maléfique plus fort sur ces actes que sur les autres. De même d'ailleurs, sur les serpents ce pouvoir des sorciers est plus grand que sur les autres animaux, car c'est par le serpent comme instrument que le diable a tenté la femme. D'où aussi il ajoute : Bien que le mariage soit oeuvre de Dieu parce qu'institué par lui, il est encore parfois détruit par l'action du diable. Non pas de force, car le démon serait ainsi censé plus fort que Dieu ; mais avec la permission de Dieu en posant un empêchement à l'acte conjugal, soit temporaire, soit perpétuel (Commentaire sur les Sentences IV, 34, I, 3).
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(Au sujet du péché des anges) : S'il n'y avait pas eu péché en acte, mais aussitôt confirmation (dans le bien), alors on aurait toujours ignoré ce qui chez les bons est dû à la grâce de Dieu, ce qu'aurait pu faire la puissance du péché et plusieurs autres choses, qui supprimées enlèveraient beaucoup à l'univers. Il convenait aussi que le démon péchât sans suggestion extérieure, prenant l'occasion du péché en lui-même : ce qu'il fit en voulant s'égaler à Dieu. Ce qu'il faut comprendre d'ailleurs non pas d'une égalisation par similitude absolue directe ou indirecte, mais seulement relative ; et ce que l'on affirme sur l'autorité d'Isaïe : Je monterai sur les plus hautes nues, je deviendrai l'égal du Très-Haut (Is. 14, 14). Non pas absolument et directement : en ce cas en effet il aurait eu l'esprit borné et erroné, désirant quelque chose qui lui était impossible. Il se savait une créature, créée par Dieu ; il savait donc que devenir égale à Dieu, ce lui était impossible. Ni même non plus d'une égalité absolue indirecte : le bien de l'ange et de la créature en effet est de dépendre de Dieu, comme toute la clarté de l'air lui vient de son exposition aux rayons du soleil. Donc cela l'ange ne pouvait non plus le désirer, car il aurait été ainsi contre le bien de sa nature. Mais il désira une égalité relative avec Dieu, ainsi comprise : Dieu par nature possède d'une part le bonheur et la bonté, d'autre part le fait que de lui découlent le bonheur et la bonté de toute créature. L'ange voyant donc la dignité de sa nature, supérieure à celle de toutes les autres créatures, voulut et désira que de lui dérivassent sur les inférieurs le bonheur et la bonté. En cela de par sa nature même, de façon à ce qu'il possède tout, le premier par nature et que toutes les autres créatures le reçoivent de sa haute nature. Mais son désir était de rester aussi soumis à Dieu, pourvu que le reste lui fût accordé. D'où il ne voulut pas s'égaler à Dieu absolument, mais relativement. Il faut noter encore que son désir il tenta de le faire passer à l'acte. Aussi tout de suite il exposa son désir aux autres ; et aussitôt également il y eut vision de ce désir chez les autres anges, et consentement pervers à ce désir. Voilà pourquoi le désir du premier ange dépassa et précéda le péché des autres, par l'ampleur de la faute, sa puissance de causalité, mais non par la durée. D'où l'Apocalypse : Le dragon (tombant du ciel) balayait de queue le tiers des étoiles (Apocalypse 12, 4). C'est lui que l'on rencontre sous la forme de Léviathan ; il est roi de tous les fils d'orgueil, selon le Philosophe roi se disant du principe, dans la mesure où il meut par son vouloir et son commandement ceux qui lui sont soumis (Job 41, 25 ; Métaphysique V. Cf. Somme de Théologie I, 63, 3 ; I, 63, 8). D'où son péché fut l'occasion du péché des autres, si bien que lui qui ne fut tenté par personne fut la tentation extrinsèque des autres. Que toutes ces choses sensibles : ont lieu en effet en même temps l'illumination de l'air, la vision de la couleur et la perception de la chose. J'ai développé ce sujet longuement. Une fois considérée en effet cette étonnante permission divine concernant les plus nobles créatures à partir d'un seul péché d'ambition, comment ne pas admettre des permissions particulières dans le cas des œuvres des sorcières, qui en raison de certaines circonstances sont de plus grands péchés ! Les péchés des sorcières en effet en certaines circonstances dépassent le péché des anges et des premiers parents, comme on va le voir encore dans la seconde partie de cette question.
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Bien que toute peine pour le péché soit infligée par Dieu, cependant les maléfices n'atteignent pas toujours les plus grands pécheurs. Soit parce que le diable ne veut pas affliger et tenter ceux qu'il voit lui appartenir à juste titre ; soit parce qu'il ne veut pas qu'ils se rapprochent de Dieu, selon la parole du psaume : Leurs douleurs se sont multipliées et après ils ont accéléré (leur fuite). Mais que toute peine soit infligée par Dieu à cause du péché, on le verra ci-après : en effet, dit Jérôme, tout ce que nous souffrons, nous le méritons par nos péchés.
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Donc à côté de cela il a pu agir très souvent pour punir des pécheurs, en suscitant des épidémies (mortelles) et autres, comme lorsque, en dehors de l'influence des corps célestes pour punir le péché d'orgueil de David cherchant à compter son peuple (il envoya) un fléau mortel sur le peuple. Ensuite cela convient tout à fait à la sagesse divine, qui gouverne les choses de manière à ce qu'elles suivent leurs propres mouvements. D'où il ne convient pas d'empêcher totalement la malice du démon ; il convient plutôt de lui permettre d'agir pour autant que son action peut contribuer au bien de l'univers ; tout en la réfrénant aussi en permanence par les bons anges, afin qu'il ne nuise pas autant qu'on le voudrait. De même d'ailleurs qu'il ne convient pas de réfréner la malice des hommes dans les choses qui relèvent de la liberté de choix, comme de renier la foi, de se vouer au démon, qui sont au pouvoir de la volonté humaine, mais par lesquelles Dieu est grandement offensé. De là aussi on conclut à la juste permission des choses que désire la sorcière pour lesquelles elle renie la foi et auxquelles s'étend le pouvoir du diable, comme de pouvoir nuire aux hommes, aux bêtes et aux fruits de la terre. Enfin, c'est avec justice que Dieu permet les maux, par lesquels aussi le diable subit indirectement le plus grand tourment et le plus grand déplaisir. Or par ces maux que les sorcières causent de par la puissance du démon, celui-ci se trouve indirectement très torturé, puisque contre sa volonté Dieu utilise tous ces maux pour la gloire de son nom, pour l'affermissement de la foi, pour la purification des élus et l'augmentation de leurs mérites. Il est certain en effet que parmi tous les déplaisirs que le diable peut subir dans son orgueil toujours dressé contre Dieu (selon le mot de l'Écriture : l'orgueil de ceux qui le haïssent monte toujours) ; celui-là est le principal, car il lui déplaît que Dieu tourne à sa gloire, etc. tous ses stratagèmes. C'est donc justement que Dieu permet tous ces fléaux (Psaume 73, 23).
Face au second argument : Plus haut on a déjà répondu, mais on doit répondre encore à deux choses incluses dans l'argument. D'abord on ne dit pas que le diable est plus fort que Dieu et sa création ; on reconnaît même qu'il est d'une puissance minime puisqu'il ne peut rien sans la permission divine. D'où sa puissance peut être dite minime comparée à la permission divine, bien qu'elle soit grande en comparaison des forces des corps qu'elle surpasse en nature, selon ce mot souvent allégué : il n'a pas son pareil sur la terre (Job 41, 25). L'autre point, c'est : pourquoi Dieu permet-il davantage de maléfices sur la puissance de génération que sur toutes les autres puissances de l'homme ? On a déjà touché ce sujet pour ce qui est de la permission divine, sous le titre : comment les sorcières peuvent-elles mettre obstacle à la puissance génésique et à l'acte vénérien ? C'est en raison du caractère honteux de cet acte ; et parce que la tache originelle infligée à cause du péché des premiers parents est transmise par cet acte. Et puis on a le symbole du serpent qui fut le premier instrument du diable.
Au troisième argument il faut dire ceci : l'intention et le désir du diable sont plus grands de tenter les bons que les mauvais, bien que de fait la tentation porte davantage sur les mauvais que sur les bons ; la disposition à admettre la tentation étant plus grande chez les mauvais que chez les bons. De même il préfère blesser les bons que les mauvais, bien qu'il y ait plus de disposition à la blessure chez les mauvais que chez les bons. La raison de cela, c'est selon Grégoire, que plus quelqu'un se soumet fréquemment au diable, plus difficile lui devient la lutte contre lui. Or les mauvais se soumettent plus souvent au diable ; d'où la tentation leur devient plus lourde et fréquente, car ils n'ont plus le bouclier de la foi pour se défendre (cf. le texte de l'Apôtre aux Éphésiens « Tenez surtout le bouclier de la foi où viendront s'éteindre tous les traits enflammés du Malins »). D'un autre côté pourtant, il assaille et attaque plus vigoureusement les bons que les méchants. La raison, c'est que déjà les mauvais sont à lui et non les justes qu'il n'a pas encore en son domaine que les pécheurs qu'il possède déjà. De même qu'un prince de la terre résiste davantage à celui qui usurpe davantage de ses droits et nuit davantage à son empire qu'à ceux qui ne se dressent pas contre lui.
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Quant à la question : comment discerner l'une de l'autre des misères, dont l'une est maléfique et l'autre naturelle, c'est-à-dire provenant d'un défaut naturel, on répond qu'il y a plusieurs moyens : Premièrement, par le jugement des médecins, selon ce que dit Gratien qui cite des paroles d'Augustin dans le livre de la doctrine chrétienne : À cette catégorie de superstition... appartiennent les amulettes, les remèdes réprouvés même par la science médicale, et qui consistent soit dans des incantations soit dans des tatouages. Les médecins peuvent, par les circonstances, l'âge du patient, sa santé subitement chargée comme en un clin d'œil, percevoir que l'infirmité ne provient pas d'une déficience du sang, de l'estomac ou d'une maladie ; ils diront alors qu'elle provient non d'un défaut de la nature, mais d'un agent externe. Et cette cause externe, si ce n'est pas une infection venimeuse qui remplirait le sang et l'estomac de mauvaises humeurs, ils jugent alors par élimination suffisante que l'effet est maléfique. Deuxièmement, quand le mal apparaît incurable au point que le patient ne puisse être relevé par aucun médicament, mais voie plutôt son mal empirer. Troisièmement, quand le mal vient si vite sur quelqu'un que le diagnostic s'oriente vers cela (le maléfice).
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Quelqu'un peut-il être à ce point béni des bons anges qu'il ne puisse être atteint par les sorciers (...) ? Il semble que non : en effet on a vu dans les pages de la première partie que même des gens sans reproche, des innocents, des justes ont été souvent affligés par les démons, comme Job ; maints enfants innocents, tout comme beaucoup d'autres justes, apparaissent ensorcelés. Même si ce n'est pas à l'égal des pécheurs, puisqu'ils ne sont pas affligés pour la perte de leurs âmes, mais seulement dans leurs biens temporels et dans leur corps. Pourtant en sens contraire il y a l'aveu des sorcières, qui disent ne pas pouvoir porter atteinte à tous, mais seulement à ceux qui sur information diabolique leur apparaissent privés du secours divin. D'où la réponse : il y a trois classes d'hommes bénis de Dieu, auxquels cette détestable race ne peut pas nuire par des maléfices. Les premiers sont ceux qui exercent contre elles la justice publique ou leur font la chasse dans un poste public officiel. Les seconds, ce sont ceux qui se munissent des rites conservés et vénérés par l'Église, comme l'aspersion d'eau bénite, l'usage du sel consacré, le cierge du jour de la Purification, l'usage licite des branchages consacrés au jour des Rameaux, puisque c'est pour réduire les forces du démon que l'Église les exorcise. Les troisièmes, ce sont ceux qui sous des formes multiples et infinies sont bénis des saints anges.
Au sujet des premiers, la raison est donnée et se prend à partir des faits et gestes divers. En effet, selon l'Apôtre, tout pouvoir vient de Dieu, et il tient le glaive pour la vengeance contre les méchants et la récompense des bons (Romains 13, 4). Alors rien d'étonnant si les démons sont écartés par la puissance des anges, quand ces magistrats exercent la justice contre cet horrible crime. Dans le même sens, les Docteurs notent qu'il y a cinq manières dont la puissance du diable rencontre un empêchement total ou partiel. D'abord une limite peut être posée par Dieu à son pouvoir. On en a un exemple dans Job, et un autre exemple encore dans un cas rapporté par Jean Nider. Quelqu'un avoue au juge qu'il a invoqué le diable pour qu'il l'aide à tuer son ennemi ou à le blesser ou pour qu'il soit frappé par la foudre. Il m'a répondu, dit-il, qu'il ne pouvait rien de tout cela : parce que cet homme était d'une grande foi et se protégeait assidûment par le signe de la croix ; il ne pouvait donc pas lui nuire dans son corps. Toutefois, s'il le voulait, il pouvait détruire la onzième partie de sa récolte dans les champs (Job 1-2 ; J. Nider, Fourmilière V, 4). Deuxièmement, le diable est empêché par l'intervention d'une force extérieure : ainsi dans le cas de l'ânesse de Balaam (Nombres 22, 22). Troisièmement, par un miracle de puissance extérieurement réalisée, dont certains bénéficient par un singulier privilège (cf. ci-après la troisième classe des hommes qui ne peuvent être ensorcelés). Quatrièmement, par la providence de Dieu plaçant un bon ange comme obstacle : ainsi devant Asmodée, qui ne put tuer Tobie après avoir tué les sept époux de la Vierge Sara. Cinquièmement, le diable est parfois retenu par sa prudence même : il se garde de blesser pour que la situation empire. Ainsi il pourrait molester les excommuniés, comme il le fit dans le cas du Corinthien excommunié par Paul : il ne le fait pas pour énerver la foi de l'Église dans le pouvoir des clefs (1 Corinthiens 5, 5). Donc nous pouvons dire de même qu'au moment où la justice publique s'exerce, les diables souvent retirent leur protection aux sorcières, soit parce qu'ils craignent leur conversion soit parce qu'ils veulent accélérer leur damnation.
Faits et gestes sont là comme preuve : le Docteur susdit (Nider) rapporte que les sorciers ont témoigné en paroles et en actes que, du simple fait qu'ils sont arrêtés par les officiers de justice publique, aussitôt toute leur puissance est brisée. D'où quand un certain juge nommé Pierre, déjà mentionné, avait voulu arrêter par ses hommes un sorcier nommé Städlin, leurs mains se mirent à trembler si fort, une telle puanteur monta à leurs narines, qu'ils désespéraient presque d'oser saisir le sorcier. Le juge le leur commandait, disant : Vous pouvez arrêter ce misérable en toute sécurité, car sitôt touché par la main de la justice publique il perdra toute sa force de nuire. Et l'événement confirma sa parole.
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Que dire enfin de cet homme qui à Ratisbonne était l'objet de sollicitation charnelle de la part du diable sous forme de femme ? Très anxieux de ce que le diable ne voulait pas lâcher prise, il lui vint à l'esprit, à lui pauvre homme, qu'il devait se défendre en prenant du sel comme on le lui avait dit dans la prédication. Il prit un peu de sel en entrant dans l'étuve du bain public. La femme alors le regarda d'un œil torve et (quel diable le lui avait appris ?) disparut en l'injuriant. Où l'on voit que le diable peut avec la permission de Dieu se rendre présent, soit sous la forme d'une sorcière fantasmatique, soit en prenant possession d'une sorcière corporellement présente : il peut faire l'un ou l'autre... Et le cas de ces trois compagnons qui cheminaient sur la route. Deux d'entre eux furent frappés par la foudre et le troisième fut effrayé d'entendre des voix dans les airs : Frappons-le lui aussi ; mais une autre répondait : nous ne pouvons pas, car il a entendu (l'Évangile) « Le Verbe s'est fait chair ». Il comprit alors qu'il avait été sauvé parce que ce jour-là il avait entendu la messe et à la fin de la messe l'évangile de saint Jean : Au commencement était le Verbe...
Même les paroles sacrées portées sur le corps sont d'admirables moyens de protection, pourvu que l'on observe sept conditions. Mais l'on parlera de ceci dans la deuxième question de cette deuxième partie, où l'on traite des remèdes de guérison ; ces paroles ainsi portées en effet ne sont pas seulement moyens de préservation, elles sont aussi moyens de guérison pour les ensorcelés. La plus sûre protection cependant pour les lieux, les hommes et les bêtes, ce sont les mots du titre glorieux de notre Sauveur inscrit aux quatre angles de la maison en forme de croix : Jésus + Nazaréen + Roi + des Juifs +. On peut d'ailleurs y adjoindre le nom de la vierge Marie, des Évangélistes ou les paroles de Jean : le Verbe s'est fait chair.
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La forme du serment sacrilège pour le pacte exprès de fidélité au démon varie en fonction de la diversité des pratiques auxquelles les sorcières elles-mêmes s'adonnent. Pour le comprendre, il faut d'abord remarquer que, comme on l'a noté dans la première partie de ce traité, il y a trois espèces de sorcières : celles qui blessent, mais ne peuvent guérir ; celles qui guérissent, mais en vertu d'un pacte avec le démon ne peuvent blesser ; et celles qui à la fois blessent et guérissent. Toutefois parmi celles qui blessent, il y a une catégorie qui émerge : celles qui en font partie peuvent réaliser la somme de toutes les espèces de maléfices que les autres réalisent chacune pour sa part.
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Dans le diocèse de Bâle, une ville appelée Oberwill, située sur le Rhin, il y avait un curé honorable de moeurs, mais tenant de cette opinion (ou plutôt de cette erreur) que le maléfice n'est rien dans la réalité, mais seulement dans l'esprit des hommes qui mettent ces choses sur le compte des femmes. Or Dieu voulut le purger de son erreur, au point de lui faire voir les pratiques des démons pour fixer le terme de la vie des sorcières. En effet, un jour où, pour expédier une affaire, il voulait traverser le pont, il rencontra une vieille femme ; dans sa hâte il ne lui céda pas le passage à l'entrée du pont et même maladroitement il la fit tomber dans la boue. Alors, indignée, elle explosa en paroles injurieuses disant : Curé, tu ne traverseras pas impunément... Lui ne fit pas grande attention à ces paroles. Mais la nuit suivante, quand il voulut se lever, il se sentit ensorcelé en dessous de la ceinture, au point d'avoir besoin en permanence du soutien des bras des autres quand il voulait aller à son église. Et il resta ainsi trois ans sous la garde de sa propre mère. Au bout de ce temps, tomba malade la vieille femme qu'il avait toujours soupçonnée de l'avoir ensorcelé par les morts dont elle l'avait menacé. Il arriva pourtant qu'elle l'envoyât chercher pour l'entendre en confession. Le prêtre importuné (commença par) dire : qu'elle se confesse au diable ; puis sur l'instance de sa mère, s'appuyant sur les bras de deux villageois, il s'en alla à la maison (de la femme) et il s'assit à la tête du lit où elle était couchée. Les deux villageois, du dehors à côté de la fenêtre (la chambre était située au rez-de-chaussée), voulaient prêter l'oreille pour savoir si elle confesserait le maléfice jeté sur le curé. Or il arriva que, bien que dans la confession elle ne fit pas mention de maléfice, après la confession elle dit : Sais-tu, toi, curé, qui t'a ensorcelé ? Comme il répondait gentiment qu'il ne le savait pas, elle ajouta : Tu me soupçonnes, et c'est vrai, je l'ai fait pour telle raison (cf. plus haut). Lui insistait pour être délivré ; elle lui dit : Le temps fixé est venu, je vais mourir, mais je dispose tout pour que peu de jours après ma mort tu sois guéri. Et c'est ce qui se passa : elle mourut au temps fixé par le diable ; et moins de trente jours après, une nuit le prêtre se trouva complètement guéri.
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Quand il est dit dans l'Écriture : « Le fils ne portera pas l'iniquité du père... », il faut l'entendre de la peine éternelle ; souvent au contraire dans la peine temporelle les innocents sont punis de fléaux à cause des crimes des autres. D'où d'ailleurs le Seigneur s'écrie : « Moi, Dieu fort et jaloux, je châtie les péchés des parents sur la troisième ou la quatrième génération (Exode, 20, 5 ; 34, 7). » Pareille punition éclata sur les fils des Sodomites à cause des crimes de leurs pères.
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Le repos festif est davantage rompu par les péchés mortels que par des œuvres serviles (mécaniques), selon Augustin (Sermon IX). Or la superstition, avec ces maléfices qui sont les plus grandes œuvres serviles, puisqu'ils sont œuvre du démon, est contre la révérence due à Dieu. D'où, comme on l'a dit, le diable fait ainsi tomber plus bas les hommes, et le créateur en est davantage offensé. Au sujet du Nouvel An, nous pouvons dire avec Isidore ceci : Janus de qui le mois tire son nom et qui commence au jour de la circoncision, (Janus) fut une idole à double face. L'une, comme s'il était la fin de l'année précédente et l'autre comme s'il était le commencement de la nouvelle, son protecteur et l'auteur de sa fortune (Origines VIII, II). Aussi en son honneur, ou plutôt en l'honneur du démon présent dans cette idole, les païens faisaient-ils des « chahuts » variés, débauchés et bruyants ; ils se livraient à des jeux ; ils organisaient des danses et des festins. (Voir la mention qu'en fait Augustin en de nombreux endroits et que l'on répète presque partout — Gratien le répète. Décret II, 26, 16-17). Or de même que les mauvais chrétiens imitent déjà ces bacchanales — bien que pour les débauches ils les aient transférées au temps de carnaval, lorsqu'ils déambulent avec des masques, des plaisanteries et autres « superstitions » — ; de même aussi maintenant les sorcières par ces inventions du diable exercent leurs maléfices pour leur propre avantage autour de la nouvelle année (durant l'office et le culte), autour de la Saint-André et autour de la Naissance du Christ.
Maintenant (comment ils exercent) leurs maléfices d'abord par les sacrements puis par les sacramentaux, nous le montrons par quelques faits récents et rencontrés par nous durant l'Inquisition : Dans une ville qu'il est mieux de ne pas nommer, pour obéir à la charité et à la raison, une sorcière reçut le corps du Christ ; puis se défilant tout de suite selon la détestable manière de faire des femmes, elle mit son voile devant sa bouche et extrayant le corps du Christ elle le déposa dans un linge. Selon l'indication du démon, elle le jeta dans une marmite où il y avait un crapaud ; elle cacha le tout en terre dans l'étable près du grenier, avec des tas d'autres choses dont elle se servait pour ses maléfices. Or par la miséricorde de Dieu, un tel crime fut découvert et mis en lumière : le jour suivant, un ouvrier passait près de l'étable pour son travail ; il entendit une voix comme la voix d'un enfant qui criait ; lorsqu'il parvint plus près jusqu'à la pierre sous laquelle la marmite était cachée, il entendit plus clairement. Alors pensant que quelqu'un était enterré là par une femme, il s'en vint trouver le maire ou le premier magistrat et lui raconta ce qui avait été commis, pensait-il, par une infanticide. Aussitôt le maire envoya ses hommes ; et il se trouva que la situation était telle que l'autre l'avait dite. Pourtant ils ne voulaient pas exhumer l'enfant ; pensant qu'il était plus sage de placer une garde pour voir si une femme viendrait près de cet endroit. Ils ne savaient pas en effet que c'était le corps du Seigneur qui était caché là. Mais il arriva que la même sorcière vint à cet endroit ; sous les yeux des gardes cachés elle mit la marmite sous son manteau. Alors ils l'arrêtèrent et la questionnèrent : elle révéla son crime, assurant que le corps du Seigneur avait été caché avec un crapaud dans la marmite et qu'avec ces poussières elle pouvait à discrétion causer des dommages aux hommes et autres créatures. Il faut noter en plus que les sorcières, quand elles communient, si elles peuvent le faire sans être remarquées, observent la coutume de recevoir le corps du Seigneur non pas sur, mais sous la langue (autant qu'on puisse en juger, car elles ne veulent jamais recevoir le remède à leur reniement de la foi, ni par la confession ni par la réception de l'Eucharistie) : cela afin de prendre plus facilement de leur bouche le corps du Seigneur, pour s'en servir à leurs usages avec la plus grande offense du Créateur. Voilà pourquoi à tous les recteurs des Églises et à tous ceux qui communient les fidèles, on demande de faire grande diligence, pour que les femmes communient au maximum la bouche ouverte, la langue bien tirée, et le voile écarté. Plus on y met de soin, plus grand est le nombre des sorcières découvertes par ce moyen. Avec les autres sacramentaux, elles pratiquent d'innombrables superstitions.
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Il y avait là une sorcière très connue, qui pouvait à tout moment et d'un seul geste ensorceler les femmes et faire avorter. Or la femme d'un noble était enceinte et pour la garder elle avait pris chez elle une sage-femme ; et celle-ci l'avait avertie de ne pas sortir du château et surtout de veiller à ne pas parler et lier conversation avec ladite sorcière. Au bout de quelques semaines, oubliant la recommandation, elle sortit du château ; elle s'en vint rendre visite à quelques femmes réunies pour un repas. Elle était à peine assise que survint la sorcière, qui comme pour saluer la maîtresse lui posa les deux mains sur le ventre. Aussitôt elle sentit que l'enfant bougeait douloureusement ; affolée elle revint vers les siens et raconta à la sage-femme ce qui s'était passé. Celle-ci s'écria : Vous avez déjà perdu votre enfant. Et en effet dans l'accouchement il arriva comme prévu : elle donna naissance non pas à un fœtus mort complet, mais petit à petit à des morceaux de tête, de pieds et de bras. Toute cette grande peine avec la permission divine pour punir un mari qui aurait dû punir les sorcières et venger les insultes au Créateur.
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On ne peut objecter que deux esprits créés ne peuvent exister en un seul et même endroit. Or l'âme est dans chaque partie du corps, donc... Là-dessus en effet il y a l'autorité du Damascène : l'ange est là où il opère. Il y a la raison donnée par saint Thomas dans les Sentences : Tous les anges bons ou mauvais, de par leur vertu naturelle qui surpasse tout pouvoir corporel, sont capables d'opérer des changements dans nos corps (De la foi orthodoxe I, 13). Et cela est manifestement vrai non seulement de par une supériorité et une noblesse de nature ; mais aussi parce que la machine du monde et la créature corporelle sont administrées par les anges.
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On lit d'un certain saint homme qu'il trouva un jour le démon en train de prêcher dans une église sous la forme (figure) d'un prêtre pieux. Percevant dans l'Esprit que c'était le démon, il nota ses paroles pour voir s'il instruisait bien ou mal le peuple. Comme il le trouvait irréprochable et plutôt dénonciateur des crimes, il s'en alla le voir à la fin du sermon et lui demanda la raison de cette attitude. Le démon répondit : Je prêche la vérité, sachant bien que les hommes entendent la parole, mais ne la mettent pas en pratique ; donc que Dieu est davantage offensé et que mon gain va en augmentant (Cf. Césaire de Heosterbach ou Thomas de Cantimpré).
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Les peines corporelles ne suivant pas toujours la faute, mais tombant parfois sur les pécheurs et parfois sur les non-pécheurs. Voilà pourquoi c'est tantôt chez ceux qui sont dans la grâce et tantôt chez ceux qui sont hors de la grâce que les démons peuvent habiter, selon la profondeur des jugements incompréhensibles de Dieu. Et cette forme de possession, bien qu'elle ne relève pas de notre recherche, est rappelée ici, pour que personne ne juge impossible que des hommes avec la permission de Dieu puissent parfois être substantiellement habités par les démons à la demande des sorcières. Et nous pouvons dire : de même que les démons par eux-mêmes sans les sorcières peuvent blesser et posséder des hommes de cinq manières différentes, de même à la demande des sorcières (ils le peuvent de ces cinq façons), puisqu'alors Dieu étant davantage offensé, plus grande latitude est laissée au diable de nuire aux hommes par les sorcières. Mis à part le fait qu'ils peuvent atteindre quelqu'un dans ses biens extérieurs, on peut dire qu'il y a cinq manières de nuire aux hommes : pour certains ce sera seulement dans leurs corps ; pour d'autres ce sera dans leurs corps et dans leurs puissances internes ; pour d'autres ce sera par tentations internes et externes ; pour d'autres ce sera par la privation temporaire de l'usage de la raison ; pour d'autres ce sera par assimilation à des bêtes irrationnelles. Nous passerons ces diverses formes en revue ; mais il nous faut d'abord dire les cinq raisons pour lesquelles Dieu permet la possession chez les hommes, afin de suivre l'ordre que le sujet exige : Parfois quelqu'un est possédé pour son plus grand mérite ; parfois pour une petite faute d'autrui ; parfois pour un petit péché véniel personnel ; parfois pour un péché grave d'autrui ; parfois pour un crime grave personnel. Toutes ces causes existant, il ne fait pas de doute que Dieu peut permettre au démon de faire ces choses à la demande des sorcières. Et on va le prouver par les Écritures et non seulement par des faits récents, car les faits nouveaux sont renforcés par les exemples anciens.
Quant au premier cas (possession pour mérite), on le trouve dans les Dialogues de Sulpice Sévère, disciple très aimé du bienheureux Martin, là où il raconte ceci : un Père de vie très sainte avait été gratifié d'un tel don de chasser les démons qu'il les mettait en fuite non seulement par ses paroles, mais même par ses lettres et ses cilices. Comme ce Père était devenu célèbre dans le monde entier, il se sentit atteint (de la tentation) de vaine gloire. Bien qu'il eût courageusement résisté, cependant pour s'humilier davantage il pria le Seigneur de tout son cœur de permettre au démon de le posséder durant cinq mois. Ce qui advint. Aussitôt possédé, il fallut l'attacher et lui appliquer le traitement communément appliqué aux démoniaques. Au bout du cinquième mois, il fut libéré de toute vaine gloire et du démon. Notons cependant qu'on ne lit pas (chez les anciens), et qu'on ne dit pas aujourd'hui que dans ce premier cas quelqu'un puisse être possédé par le maléfice d'un autre ; mais, on l'a dit, les jugements de Dieu sont incompréhensibles (Sulpice Sévère, Dialogue, I, 20). Deuxièmement que quelqu'un puisse être possédé à cause d'un petit délit d'autrui, le bienheureux Grégoire dans ses Dialogues en donne un exemple, celui du bienheureux abbé Eleuthère : cet homme très simple passait la nuit près d'un couvent de femmes ; celles-ci sans le lui dire décidèrent de placer près de sa cellule un petit enfant qui chaque nuit était tourmenté par le démon. Or la nuit même l'enfant fut libéré du démon en présence de son père. L'abbé ayant appris la chose, l'enfant fut placé dans le monastère du saint homme. Bien des jours après, celui-ci se réjouissant un peu trop de la libération de l'enfant, se mit à dire à ses confrères : le diable faisait des farces à ces sœurs ; mais depuis que l'enfant est venu chez les serviteurs de Dieu, le démon a cessé de le tourmenter. Et il fallut les larmes et le jeûne du saint homme et de ses confrères pour qu'il fût à grand peine délivré le même jour (Grégoire, Dialogues III, 33). Mais alors si un innocent peut être possédé à cause d'une faute légère d'autrui, il ne faut pas s'étonner si certains sont possédés par les démons à la demande des sorcières à cause du péché véniel personne, à cause de faute grave d'autrui et à cause de faute grave personnelle. Le troisième cas : que cela puisse être pour cause de péché véniel personne, on le voit chez Cassien, dans la première Conférence de l'abbé Sérénus, là où il parle de l'abbé Moïse. Moïse, dit-il, dans le désert était un homme remarquable et incomparable ; mais un jour engagé dans une dispute avec l'abbé Macaire, il alla un peu loin dans la défense de sa propre opinion. Sur-le-champ il fut livré à un terrible démon, qui l'obligea à manger ses propres excréments. Ce châtiment semble lui avoir été envoyé comme purification par le Seigneur, afin que rien ne lui restât de la tache de sa faute passagère. On le vit bien en effet à sa guérison miraculeuse ; car, par l'humble prière continuelle de l'abbé Macaire, l'esprit mauvais fut rapidement chassé et s'éloigna de lui (Conférences VII, 27). Et ce fait ressemble à ce que Grégoire raconte dans ses Dialogues d'une moniale qui se laissa aller à manger une laitue sans avoir d'abord fait le signe de la croix et qui possédée fut libérée par le bienheureux Père Equitius (Dialogues I, 4). Quatrième cas : que quelqu'un puisse être possédé à cause du péché grave d'autrui, le bienheureux Grégoire le dit au même endroit, parlant du bienheureux évêque Fortunat : Il avait chassé le démon d'un possédé. Le soir même ce démon sous la forme d'un pèlerin se mit à crier à travers les places de la ville : Ô saint Homme, cet évêque Fortunat, moi pèlerin, voilà qu'il m'a jeté hors de mon refuge et je ne puis trouver où me reposer. Alors quelqu'un, assis avec sa femme et son fils, invita le pèlerin chez lui ; il s'enquit de la cause de son expulsion et se réjouit du discrédit jeté sur le saint homme, à partir de l'histoire inventée par le pèlerin. Mais là-dessus le diable entra en possession de l'enfant, le jeta dans le feu et lui ôta la vie. Alors enfin le malheureux père comprit à qui il avait donné l'hospitalité (Dialogues I, 10). Cinquième cas : pour cause de crime personnel grave, nous en lisons des exemple aussi bien dans la sainte Écriture que dans les passions des saints. En effet Saül devint possédé du démon pour avoir désobéi à Dieu (I Samuel, 15). Mais nous avons fait allusion à tout cela afin qu'il ne semble à personne impossible que des hommes puissent devenir possédés du démon à cause de leurs crimes, également sur les instances des sorcières. Maintenant nous sommes en état de comprendre les diverses méthodes de possession, avec des faits plus récents :
Au temps du pape Pie II, le cas suivant arriva à l'un de nous (Inquisiteurs), mais avant qu'il eût reçu cette charge de l'Inquisition (Henri Institoris alla à Rome au temps du pape Pie II (+ 1464)). Un Bohémien de la ville de Dachov amena son fils unique, prêtre séculier, jusqu'à Rome pour obtenir sa délivrance : il était possédé du démon. Par hasard, moi (l'un des Inquisiteurs), je me trouvai descendu à l'hôtellerie pour le repas, quand le prêtre et son père s'en vinrent s'asseoir avec moi à la même table. Nous nous saluâmes et nous engageâmes la conversation comme des étrangers ont coutume de le faire : le père poussait des soupirs, implorant le Dieu Tout-Puissant pour le succès de leur voyage. Compatissant profondément, je commençai à m'enquérir de la cause de ce voyage et de cette tristesse. Lui alors (le fils assis à côté de moi l'entendait) répondit : Hélas ! j'ai un fils possédé du démon ; je l'ai amené jusqu'ici à grand-peine et à grands frais pour sa délivrance. Moi, je demandais où était ce fils, et il montra celui qui était là, près de moi. Un peu effrayé, je le regardais prendre sa nourriture avec grande modestie ; à toutes mes questions, il répondit très pieusement. Je me mis à douter qu'il fût possédé et à objecter qu'une quelconque infirmité était la cause de ce qui était arrivé. Alors le fils lui-même raconta ce qui était arrivé et il indiqua comment et quand il avait été possédé : une femme, dit-il, une sorcière m'a causé ce malheur. Je m'étais disputé avec elle pour une question de discipline dans le régime de ma cure ; je lui avais parlé durement, car elle était dure de caractère. Alors elle me dit que sous quelques jours je verrais ce qui m'arriverait. Depuis, le démon qui m'habite m'a révélé qu'un charme était placé par la sorcière sous un arbre et que tant qu'il n'est pas enlevé je ne pourrais pas être délivré. Mais il ne m'a pas dit quel était cet arbre. Moi, bien sûr, je n'aurais pas accordé la moindre foi à ses dires, si l'expérience ne m'avait pas rapidement instruit. En effet interrogé par moi sur l'intervalle de temps où il pouvait faire usage de sa raison (au-delà du temps normal aux possédés), il répondit : Je suis privé de l'usage de la raison uniquement quand je veux vaquer à la prière ou visiter les lieux saints. Car le démon m'a expressément dit que, comme jusqu'ici c'était dans mes sermons au peuple que je lui avais surtout fait du tort, il ne me permettrait plus de prêcher. (Selon son père, il était un prédicateur plein de charme et aimé de tous.) Moi (Inquisiteur), je voulais m'assurer de tout cela ; et durant une quinzaine et plus je décidai de le conduire aux sanctuaires de plusieurs saints. Surtout à l'église de sainte Praxède vierge, où se trouve une partie de la colonne de marbre à laquelle Notre Sauveur avait été attaché pour sa flagellation, ainsi qu'à l'endroit où Pierre apôtre avait été crucifié. Arrivé en ces lieux, il poussait des cris horribles pendant qu'on l'exorcisait, assurant qu'il voulait s'en aller, mais peu après ne le voulant plus du tout. Comme nous l'avons dit, dans tout son comportement il demeurait un prêtre de bonne allure sans aucune excentricité, sauf pendant les exorcismes. Dès qu'ils étaient finis, et que l'étole lui était enlevée du cou, il ne donnait plus aucun signe de déraison et de malhonnêteté. En dehors de là, traversant un jour une église, il fit la génuflexion pour la salutation de la glorieuse Vierge. Alors le diable lui sortit la langue très longue hors de la bouche. Je lui demandai s'il ne pouvait s'empêcher de le faire ; il me répondit : Je ne peux pas du tout ; car il dispose de tous mes membres et organes, mon cou, ma langue, mes poumons pour parler et crier quand il lui plaît. J'entends sans doute les mots qu'il prononce par moi et mes organes, mais je ne peux absolument pas résister ; et quand plus ardemment je voudrais m'adonner à quelque prière, il m'assaille plus violemment, sortant plus fort ma langue. Dans l'église Saint-Pierre il y avait une colonne du temple de Salomon, par la vertu de laquelle beaucoup de possédés ont été libérés, car le Christ s'appuya sur elle quand il prêchait dans le temple. Notre homme pourtant, par un dessein secret de Dieu, ne put être délivré, le Seigneur se réservant une autre voie de libération. En effet un jour et une nuit il resta enfermé avec la colonne ; le jour suivant après divers exorcismes récités sur lui avec un grand concours de peuple, on l'interrogea (pour savoir) sur quelle partie de la colonne le Christ s'était appuyé. Alors mordant la colonne avec les dents, il montra l'endroit en hurlant : Ici Il était debout, ici Il était debout ! Pour en finir, il dit cependant : je ne veux pas partir ! Et comme on lui demandait : pourquoi ? Il répondit : à cause des Lombards ! Interrogé encore : pourquoi à cause des Lombards (Avaient-ils une réputation chargée de sodomie comme les hérétiques vaudois ? Cf. Nider, op. cit, II, 6) ? Alors il répondit en langue italienne (or le prêtre malade ignorait cet idiome), disant : Tous font comme ceci et comme cela..., désignant ainsi le pire des péchés de luxure. Après cela, ce prêtre me demanda : Père, que signifient ces mots italiens qui sont sortis de ma bouche ? Quand j'eux expliqué, il répondit : J'ai entendu ces mots, mais je ne les ai pas compris ! Comme la suite des événements le prouva, ce démon était de ceux sont le Sauveur dit dans l'évangile : « Ce genre de démons ne se chasse que par la prière et le jeûne. » Alors un vénérable évêque, expulsé, dit-on, de son siège par les Turcs, le prit en pitié. Pendant tout le temps du Carême, jeûnant au pain et à l'eau, s'abandonnant chaque jour à des oraisons et à des exorcismes, par la grâce de Dieu il finit par le délivrer et le renvoyer dans la joie à sa famille.
Personne à coup sûr sans un miracle ne pourrait en toute sa vie suffisamment expliquer par quels et par combien de moyens le démon peut blesser et posséder les hommes. Pourtant nous pouvons dire que, mis à part les torts faits parfois aux biens extérieurs de la fortune, il se sert de cinq moyens : certains sont atteints seulement dans leurs corps ; certains dans leurs corps et leurs puissances internes ; certains seulement dans leurs puissances internes ; certains pour leur punition sont temporairement privés de l'usage de la raison ; certains enfin sont transformés en bêtes sans raison. Le prêtre susdit fut atteint de la possession du quatrième mode : il ne fut atteint ni dans les biens de sa fortune, ni dans son propre corps. Ainsi arriva-t-il au bienheureux Job, là où l'Écriture rapporte que Dieu donna manifestement pouvoir sur lui, disant à Satan : Tout ce qui lui appartient est en ton pouvoir, mais ne porte pas la main sur sa personne (voilà pour les choses extérieures). Sur le corps ensuite : Soit, il est en ton pouvoir, épargne seulement sa vie. On pourrait encore dire que Job a été atteint de la troisième manière, dans ses puissances intérieures en même temps que dans son corps, puisqu'il dit : Si je me dis : Mon lit me soulagera ; ma couche adoucira mes plaintes ; tu me terrifies par des songes, tu m'épouvantes par des visions (Job, I 12 ; 2 ; 7, 13-1). (...)
D'habitude en effet les cauchemars marqués par les cogitations diurnes sont effrayants pour ceux qui dorment : Job à cause de sa maladie en était tourmenté. D'où il se trouvait si privé de tout réconfort qu'il ne voyait d'autre remède ni d'autre issue à ses angoisses que la mort : tu me frappes d'épouvante, dit-il (Cf. l'Exposition sur Job, 3 de saint Thomas ; et de Nicolas de Lyre, la Glose ordinaire sur Job, 7, 13-14). De plus personne ne doute que par tous ces moyens les sorcières ne puissent nuire aux hommes par les démons (on le verra par la suite), suscitant des tempêtes terribles pour leurs biens matériels comme pour les corps des bêtes et des hommes. La troisième manière de faire du mal, c'est de porter atteinte au corps et aux puissances internes sans priver de l'usage de la raison. On l'a déjà vu dans ces opérations où elles enflamment à ce point les cœurs des hommes de passions illicites qu'irrésistiblement ils s'en vont même la nuit par de grandes distances courir vers leurs amantes, trop pris dans le réseau du désir charnel. Et on peut apporter cet exemple que l'on dit être arrivé en Hesse dans le diocèse de Marbourg. Un prêtre se trouvait possédé ; et durant un exorcisme on demandait au diable depuis combien de temps il habitait ce prêtre. On raconte qu'il répondit : sept ans. L'exorciste objecta : Mais il y a à peine trois mois que tu le malmènes ; où étais-tu le reste du temps ? Il répondit : Je me cachais dans son corps. L'exorciste encore : Dans quelle partie du corps ? Surtout dans la tête (dit-il). De nouveau on demanda : Où allais-tu quand il célébrait la messe et recevait le sacrement ? Il dit : Je me cachais sous sa langue. L'autre : Misérable d'avoir été assez téméraire pour ne pas fuir devant ton Créateur ! Alors le démon : Est-ce que quelqu'un ne peut jamais se cacher sous un pont, tant qu'un saint homme passe et ne s'arrête pas ? Avec la grâce de Dieu (cet homme) fut délivré...
(...)
Il n'y a pas d'infirmité corporelle, même pas la lèpre et l'épilepsie, qui ne puisse être causée par les sorcières avec la permission de Dieu. On le prouve par le fait que les docteurs ne font exception pour aucune maladie. (...) Ainsi Nider dans son livre des Préceptes comme dans sa Fourmilière, et il pose la question : est-ce que les sorciers peuvent réellement porter atteinte aux hommes par leurs maléfices ? Sa question ne fait exception pour aucune infirmité, fût-elle la plus incurable (Préceptoire de la loi divine I, 11, 15-16). Et là où il répond que oui, il cherche en conséquence par quels moyens et en quels domaines :
Sur le premier point, il répond comme on l'a vu dans la première question de la première partie du traité. Il prouve sa réponse par (les paroles) d'Isidore, décrivant les opérations des sorciers : On les appelle « malfaiteurs » à cause de la grandeur de leurs crimes. En effet ils bouleversent les éléments, c'est-à-dire par l'action des démons ils suscitent des tempêtes ; ils perturbent les esprits des hommes (à la manière susdite), empêchant complètement l'usage de la raison ou l'obscurcissant grièvement... (Et il ajoute) : sans faire boire aucun poison, par la seule violence de leurs charmes, ils tuent les âmes et enlèvent la vie (Origines VIII, 9). Il prouve aussi par saint Thomas, par exemple dans le Commentaire des Sentences (Sentences II, 7-8 ; IV, 34, 1, 3). En général tous les théologiens écrivent que les sorcières (sorciers) peuvent porter atteinte aux hommes et à leurs biens, avec l'aide du démon partout où le démon à lui seul peut tromper et faire du mal, c'est-à-dire dans les biens, la réputation, le corps, l'usage de la raison, la vie. On veut dire aussi que partout où le démon peut nuire sans la sorcière, il le peut aussi avec la sorcière et même plus facilement, parce que Dieu davantage offensé nous punit ainsi davantage.
(...)
Pour ce qui est de l'atteinte à l'usage de la raison et au tourment des sens internes, on en a la preuve par les histoires évangéliques de possédés. Et pour ce qui est de la mort — que les démons puissent priver quelqu'un de la vie —, on le voit par l'histoire des sept époux de Sara, tués parce qu'indignes du mariage à cause de leur passion luxurieuse et de leur désir effréné à l'égard de cette vierge Sara. En conclusion, ce que le démon peut par lui-même, il le peut davantage encore par les sorcières : ils peuvent nuire aux hommes en tout sans exception.
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De même quand un sorcier fabrique une statue de cire ou chose semblable, afin d'ensorceler quelqu'un ; ou bien quand au cours du maléfice l'image de quelqu'un apparaît sur le plomb fondu versé dans l'eau ; tout ce qui est fait comme mal à cette image, pour qu'il atteigne l'original c'est-à-dire l'homme ensorcelé — une piqûre ou une blessure étant réellement infligée à l'image par la sorcière ou un autre et le démon de la même blessure atteignant invisiblement la personne « maléficiée » — ; il faut effectivement l'imputer à la sorcière, car sans elle Dieu ne permettrait jamais au diable de porter pareille blessure et le diable ne tenterait pas d'aller par lui-même jusque-là.
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Il y a des sorcières qui peuvent ensorceler les juges rien que par leur regard et un éclair de leurs yeux. Elles se vantent d'ailleurs publiquement de ce qu'ils ne peuvent leur faire aucun mal.
(...)
Au diocèse de Strasbourg, dans la ville de Saverne, il y a une femme honorable très dévouée à la Vierge Marie, qui raconte cette histoire (...) : J'étais enceinte, dit-elle, de mon mari légitime aujourd'hui défunt, et le temps de l'accouchement approchait. Or une sage-femme vint me prier instamment d'accepter son assistance pour la naissance de mon enfant. Moi sachant sa mauvaise réputation, j'avais décidé d'en prendre une autre ; mais par des paroles conciliantes, je feignis d'agréer sa demande. Arriva l'heure de la délivrance. Comme j'avais appelé l'autre sage-femme, la première fut indignée et, à peine huit jours après, elle entra dans ma chambre avec deux autres femmes et s'approcha de mon lit. Mon mari dormait dans une autre chambre ; quand je voulus l'appeler, je me sentis incapable de me mouvoir et même de parler, gardant seulement la vue et l'ouïe. Alors la sorcière, debout entre les deux autres femmes, prononça ces paroles : Voilà cette odieuse femme, qui n'a pas voulu de moi pour son accouchement ; elle ne restera pas impunie. Comme les deux assistantes la suppliaient, disant : Elle n'a jamais fait de mal à quelqu'un d'entre nous ; elle ajouta : Parce qu'elle m'a fait cet affront, je lui mets quelque chose dans les entrailles. Pour vous faire plaisir cependant, elle ne sentira rien avant six mois ; après par contre elle sera plutôt malade. Elle me toucha le ventre et il me sembla que m'arrachant les entrailles elle y introduisait des choses que je ne pouvais pas voir. Les femmes s'en allèrent et je récupérai la force de parler. Aussitôt j'appelai mon mari à qui je racontai la chose. Lui voulait expliquer tout cela par les fièvres de l'accouchement et me dit : vous les femmes en couches, vous êtes sujettes aux illusions et aux fantasmes. Il ne voulut rien croire de ce que je lui dis ; mais j'ajoutai : elle m'a donné six mois de répit ; si au bout de ce délai je ne souffre de rien, j'ajouterai foi à tes paroles. Cette femme dit la même chose à son fils prêtre, venu la visiter le même jour et qui était alors archidiacre rural. Et qu'arriva-t-il ? Six mois après exactement, elle fut prise subitement de tels maux d'entrailles que ni jour ni nuit elle ne pouvait s'empêcher de troubler tout le monde par ses cris. Mais, nous l'avons dit, elle était très dévote à la Vierge Reine de miséricorde : chaque samedi elle jeûnait au pain et à l'eau. C'est aux prières de la Vierge qu'elle attribuait sa délivrance. Un jour où elle satisfaisait un besoin naturel, toutes ces immondices sortirent de son corps. Elle appela son mari et son fils : Est-ce que tout cela, c'est de l'imagination ? Ne vous ai-je pas dit qu'au bout de six mois la vérité serait connue ? Qui m'a jamais vue manger des épines, des ossements et autres morceaux de bois ? Il y avait en effet des épines de rosier de la longueur d'une palme, mélangées à d'innombrables choses diverses. Rappelons encore ce qui apparut dans les aveux de cette servante passée en jugement à Brisach : « Ce sont les sages-femmes qui causent les plus grands torts à la foi. » (...) Dès que l'enfant est né, si la mère n'est pas elle-même sorcière, la sage-femme porte l'enfant hors de la chambre sous prétexte de le réchauffer ; puis l'élevant dans ses bras, elle l'offre au prince des démons Lucifer et aux autres démons ; tout cela dans la cuisine au-dessus du feu.
(...)
« Moi, le Seigneur je suis un Dieu jaloux, qui punis l'iniquité des pères dans les enfants jusqu'à la troisième et la quatrième génération (Exode, 20, 4) ». (...) (Ce) second texte s'entend de ceux qui imitent le péché de leurs pères, comme le montre Gratien ; et là il donne aussi d'autres explications : comment selon le jugement de Dieu divers châtiments sont infligés à un homme, non seulement pour la faute commise ou à commettre (pour qu'il ne la commette pas), mais pour la faute d'autrui. Et on ne peut objecter que dans ce cas quelqu'un est puni sans cause et sans faute (cause de la peine). En effet selon la Règle du droit « personne ne doit être puni sans faute, sauf s'il y a une autre raison en dessous ». Or on doit dire qu'il y a toujours une raison très juste, même si elle est inconnue de nous : si devant une action concrète nous ne pouvons pénétrer la profondeur des jugements de Dieu, nous savons pourtant que ce qu'il dit est vrai et que ce qu'il fait est juste (Somme de Théologie II-II, 108, 4). Il y a toutefois une distinction à faire au sujet de ces enfants : certains sont innocents en ce sens qu'ils ne sont pas offerts aux démons par des mères sorcières, mais par des accoucheuses qui les arrachent secrètement aux bras et au sein d'une mère honorable. Pareils innocents, nous pouvons pieusement croire que l'offrande ne suffira pas à en faire des imitateurs de semblables crimes plutôt que des vertus de leurs parents. (...) On cite souvent l'histoire (et même les histoires) des enfants offerts au démon subitement par leurs mères dans un moment de passion et de trouble mental même dès le sein maternel ; et qui à l'âge adulte n'ont pu être arrachés à cette juridiction usurpée par le démon avec la permission de Dieu. On connaît le Livre des exemples de la bienheureuse Vierge Marie : spécialement l'exemple de cet homme qui ne pouvait pas être libéré par le Souverain Pontife des vexations du démon. Envoyé enfin vers un saint homme qui vivait en Orient, par l'intercession de la glorieuse Vierge, mais avec une grande difficulté encore, il fut libéré de cette tyrannie. (...) (Selon) saint Thomas dans la Somme de Théologie, à propos de la punition temporelle qui atteint certains à cause de la faute d'autrui : Il est dit, en effet, que les enfants étant selon le corps comme des choses du père, les domestiques et animaux des choses du maître, puisque quelqu'un peut être puni dans ses biens, (il se trouve) aussi que les fils souvent pâtissent à cause des pères. Mais cette raison est très différente de ce que l'on a dit plus haut des péchés des pères (pour lesquels) Dieu châtie les fils jusqu'à la troisième et la quatrième génération. Plus haut il s'agissait de ceux qui imitent les crimes des pères ; ici il s'agit de la punition de fils qui n'ont pas imité des crimes des pères par des actes mauvais, mais héritent seulement des résultats de leurs œuvres. Ainsi mourut prématurément le fils né de l'adultère de David ; ainsi durent être tués les animaux des Amalécites ; même s'il y a aussi en ces cas une raison mystique (2 Samuel, 15, 18 ; I Rois, 15, 2-3).
(...)
Mais l'expérience, elle, nous apprend que toujours les filles des sorcières sont soupçonnées de pratiques du même genre, comme imitatrices des crimes maternels ; et en vérité c'est toute la progéniture qui est infectée. La raison de cela et de tout ce qui précède, c'est qu'en vertu du pacte avec le démon elles doivent tout faire pour assurer une survivance et l'augmentation de leur (troupe) perfide. Comment en effet pourrait-il se faire, comme on le voit trop souvent, que des filles impubères de huit à dix ans soulèvent des tempêtes et des orages, sinon pour avoir été consacrées tout enfant au diable par leur mère dans une offrande sacrilège ? Des enfants ne pourraient pas faire d'elles-mêmes ces choses, qui supposent un reniement de la foi comme chez les sorcières adultes : elles n'ont peut-être pas encore la connaissance d'un seul article de la foi. Voici un exemple parmi les faits de ce genre : dans le duché de Souabe, un homme de la campagne avait décidé d'aller aux champs avec sa petite fille à peine âgée de huit ans afin de voir les moissons ; et devant la sécheresse de la terre, en lui-même, il commençait à souhaiter la pluie, disant : Hélas ! quand viendra cette pluie ! La petite fille entendant les paroles du père lui dit avec toute la simplicité de son cœur : père, si tu veux de la pluie, je vais faire qu'elle vienne tout de suite. Mais le père : Comment ? Tu sais faire venir la pluie ? La fille répondit : Mais oui ! je sais non seulement faire venir la pluie, mais aussi la grêle et la tempête ! Le père demanda : Qui t'a appris ? Elle répondit : Ma mère ; et elle m'ordonna de ne le dire à personne. Le père demanda encore : Et comment elle te l'a appris ? Réponse : Elle me conduisit à un maître qui à toute heure est là pour répondre à toutes mes demandes. (...) Le père à nouveau terrifié demanda si elle pouvait à cette heure soulever une tempête. La petite : Oui, je le ferai si j'ai un petit peu d'eau. Alors le père conduisit sa fille par la main vers le torrent : Vas-y, dit-il, mais seulement sur notre champ. La petite alors mit la main dans l'eau et au nom de son maître, selon l'enseignement de sa mère, elle la remua. Et voilà que la pluie se mit à tomber seulement sur le champ. (...) Quand la fille l'eut fait à nouveau, le père convaincu par expérience, s'en fut accuser sa femme devant le juge. La femme fut arrêtée (...) ; La petite fut réconciliée, consacrée à Dieu et par la suite elle fut incapable de refaire pareilles choses.
(...)
Jamais personne ne peut se servir de l'appui du diable (...) sans lui faire appel et ce faisant (demandant son secours), il agit comme un apostat de la foi. C'est la réponse du Docteur (Thomas) à la difficulté : Est-ce que se servir du secours du démon, c'est une apostasie de la foi (Sentences II, 7, 3, 2) ? Bien qu'Albert le Grand soit d'accord avec les autres docteurs, il dit cependant plus expressément qu'il y a toujours en ces cas apostasie de la foi soit en paroles, soit en actes. Si on utilise des invocations, conjurations, fumigations, adorations, alors il y a pacte exprès avec le démon, même sans don de soi corps et âme, ni reniement de la foi en tout ou en partie ; car par le fait qu'il y a invocation du diable, il y a ouvertement apostasie en paroles. S'il n'y a pas invocation verbale, mais seulement accomplissement d'une œuvre qui ne peut aboutir que par le secours du démon — soit qu'on la commence au nom du diable ou autres paroles inconnues, soit sans paroles, mais avec intention — ; alors, ajoute Albert, il y a apostasie en action puisqu'on attend ce résultat du démon. Attendre en effet quelque chose du démon ou recevoir quelque chose de lui, c'est toujours un mépris de la foi et donc une apostasie (Sentences II, 7, 12).
(...)
En cas de peste ou autre maladie accidentelle, les bêtes meurent non pas subitement mais petit à petit et successivement. Le maléfice au contraire enlève toute force d'un seul coup (...).
(...)
Dans ses Postilles sur Job, saint Thomas parle ainsi : Il faut confesser que, avec la permission de Dieu, les démons sont capables de déclencher une perturbation de l'air, de faire se levers les vents et tomber le feu du ciel. En effet, bien que la nature corporelle n'obéisse pas aux anges à discrétion, ni aux bons ni aux mauvais, pour ce qui est de recevoir des formes, mais au seul Créateur ; elle est faite cependant pour obéir à la nature spirituelle, pour ce qui est du mouvement local. On a un indice de cela chez l'homme : au seul commandement de la volonté qui est dans l'âme, les membres se meuvent pour réaliser l'œuvre ordonnée par la volonté. Donc tout ce qui peut se faire par le seul mouvement local, les (anges) bons et même mauvais peuvent le faire par leur vertu naturelle, s'ils n'en sont pas empêchés par Dieu. Or les vents, les pluies et autres perturbations de l'air peuvent être produits par le seul mouvement des vapeurs montant de la terre et de l'eau ; donc pour les susciter la vertu naturelle du démon suffit.
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Au sujet de la foudre qui très souvent consume les hommes seuls ou avec leurs bêtes, leurs maisons, leurs greniers, la cause peut sembler plus cachée et ambiguë. En effet par la permission divine, cela arrive souvent sans la participation des sorcières. Or pourtant comme de leurs passions il ressort qu'elles ont librement confessé avoir fait et causé pareilles choses (et là-dessus outre ce qui a été dit plus haut, on pourrait ajouter maints faits et gestes) ; il est raisonnable de conclure que, aussi facilement qu'elles ont suscité des tempêtes, elles peuvent attirer la foudre et soulever des tempêtes dans la mer.
(...)
Quant à la seconde question principale : Que faire si la grâce de la santé n'est pas obtenue par l'exorcisme ? Réponse : Bien qu'il y ait six causes pour lesquelles la chose puisse arriver, il y en a une septième pour laquelle nous suspendons notre jugement. En effet que quelqu'un ne soit pas délivré, cela peut être : ou bien à cause de la faiblesse de la foi des assistants comme de ceux qui amènent le malade ; ou bien à cause de péchés qui entretiennent le maléfice ; ou bien à cause de la négligence à employer des remèdes faciles ; ou bien à cause d'un vice dans la foi de l'exorcisme ; ou bien (pour conduire) à révérer les vertus d'un autre (exorciste) ; ou bien pour la purification et le mérite de ceux qui souffrent du maléfice. Les évangiles nous parlent des quatre premières causes : En présence du père du fils unique lunatique et des disciples, le Seigneur dit d'abord que la foule manque de foi ; et le père le prie avec larmes : Je crois, Seigneur, mais viens en aide à mon manque de foi. Et Jésus dit à la foule : Génération incrédule et perverse, jusqu'à quand serai-je avec vous (Matthieu, 17, 14 ; Marc, 9, 14 ; avec la Glose) ? (Au sujet de la seconde cause), Jésus parla fortement à celui qui souffrait du démon, c'est-à-dire au fils, parce que (dit Jérôme là-dessus) c'est à cause de ses péchés qu'il était opprimé par le démon. (Au sujet de la troisième cause) — la négligence des remèdes nécessaires — elle apparaît clairement, puisque n'étaient pas là les hommes bons et parfaits, selon la parole de Chrysostome : Les colonnes de la foi, Pierre, Jacques et Jean n'étaient pas là, comme ils assistaient la transfiguration du Christ. N'étaient pas là non plus la prière et le jeûne, sans lesquels, dit le Christ, ce genre de démons ne se chasse pas. D'où dit Origène sur ce passage : S'il faut parfois de la patience dans la prière, ne nous étonnons pas, ne posons pas de question, ne parlons pas comme sous invasion de l'esprit impur : par nos jeûnes et nos prières chassons nous-mêmes nos esprits impurs. Et la Glose : Ce genre de démon, c'est-à-dire cette variabilité de désirs de la chair (à laquelle était poussé cet homme) n'est vaincue que si l'esprit est renforcé par la prière et la chair domptée par le jeûne. Au sujet de la quatrième case — le manque de foi dans l'exorciste —, on le voit chez les disciples du Christ présents : Après, en secret, ses disciples lui demandèrent la raison de leur impuissance ; il répondit : C'est à cause de votre incrédulité. En vérité je vous le dis : si vous aviez la foi comme un grain de sénevé, vous diriez à cette montagne : Va-t-en, jette-toi dans la mer (Marc, 11, 22-23 — avec la Glose)... Sur quoi Hilaire dit : Les apôtres croyaient, mais ils n'étaient pas encore parfaits dans la foi. Le Seigneur étant resté sur la montagne avec les trois, et les autres étant demeurés parmi la foule, une certaine tiédeur avait relâché leur foi. La cinquième cause ressort parfois dans la Vie des Pères où nous lisons que des possédés ne furent pas délivrés par saint Antoine, mais par son disciple Paul. Au sujet de la sixième cause, on a vu plus haut que quelqu'un peut être libéré de la faute sans être libéré de la peine : il reste une peine comme punition et satisfaction du délit précédent.
On parle encore d'un remède — plusieurs auraient été délivrés du maléfice, que l'on aurait rebaptisés sous condition. Là-dessus, comme on l'a dit, nous ne devons rien arrêter ? Néanmoins il est vrai que si quelqu'un n'a pas été exorcisé comme il faut avant son baptême, avec la permission divine le diable garde sur lui un plus grand pouvoir. Et il est prouvé sans ambiguïté qu'il se commet beaucoup de négligences chez des prêtres mal disposés (cela relève de ce que l'on a dit dans la quatrième cause, le défaut chez l'exorciste) ; ou chez de vieilles femmes qui en cas de nécessité s'en tiennent mal à la méthode requise pour le baptême. Je ne veux pas affirmer par là que des sacrements ne puissent être administrés par des méchants ou que quand un mauvais baptise (et confère un sacrement) il ne le fasse pas validement, pourvu qu'il le fasse selon la manière requise (les mots et la matière) et avec l'intention, et qu'il exorcise, pourvu qu'il le fasse comme il faut, sans timidité ni violence. Que quelqu'un ne se mêle pas de ces saints offices sans intention (actuelle ou habituelle) ; ni sans prendre sa respiration et en omettant les mots nécessaires. Réellement puisque pour la confection d'un sacrement quatre choses sont essentielles (matière, forme, intention, ordre) selon les modes susdits et puisque, une des choses manquant, on ne pourra administrer un sacrement : la même chose doit pouvoir être affirmée des exorcismes. L'objection ne vaut pas que dans la primitive Église on était baptisé sans exorcisme ou encore qu'aujourd'hui on peut recevoir le caractère baptismal sans exorcismes. S'il en était ainsi en effet, Grégoire aurait institué les exorcismes pour rien et dans ses cérémonies l'Église ferait plutôt fausse route. C'est la raison pour laquelle je n'ai pas osé blâmer ceux qui sous condition rebaptisent ceux qui sont ensorcelés et « rattrapent » ainsi ce qui peut-être a été négligé. Dans le même sens on raconte aussi de ceux qui la nuit s'en vont durant leurs rêves marcher sur les plus hauts édifices sans se blesser, qu'ils ont besoin des esprits malins pour les conduire ; et que si on les rebaptise ils semblent se trouver mieux. Il est étonnant en tout cas que, si on les appelle par leurs noms, ils tombent aussitôt par terre, comme si ce nom ne leur avait pas été donné comme il faut dans le baptême (Cf. Nider, op. cit., V, 2 ; V, 6).
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Nous, Inquisiteurs, avec de saints Docteurs nous pensons que, dans le cas où remèdes de paroles divines et exorcismes licites ne suffisent pas, cela à cause des empêchements susdits au nombre de six ou sept, il faut exhorter les ensorcelés à la patience et au calme pour supporter les maux de la vie présente afin de se purifier de leurs crimes et ne pas chercher au-delà par tous les moyens des remèdes superstitieux et vains.
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Au sujet du recours aux saints et de la prière fervente : comment par de tels moyens, des gens même fortement possédés ont été délivrés, les légendes que l'on nous rapporte le disent : En effet les mérites des saints, martyrs, confesseurs, vierges exigent que ces esprits impurs (nullement saints) soient vaincus par leur prière et leur intercession maintenant qu'ils sont dans la patrie, tout comme ces saints les ont vaincus quand ils étaient sur terre. Nous lisons aussi que des prières pieuses ont souvent obtenu la libération des possédés. D'où Cassien exhorte à prier pour cela : Si, dit-il, nous avions cette conviction ou plutôt cette foi, dont j'ai parlé plus haut, que tout est fait et dispensé par le Seigneur pour le bien des âmes, non seulement nous ne mépriserions pas ces possédés, mais nous prierions sans cesse pour eux comme pour nos membres (dans le Christ) et nous compatirions à leur misère de toutes nos entrailles et de notre cœur.
(...)
Toutefois celui qui est possédé du démon peut indirectement être soulagé par la vertu d'une mélodie, comme Saül par la cithare de David ; ou par la vertu d'une herbe ou d'une autre chose matérielle ayant certaine vertu naturelle. Voilà pourquoi on peut les utiliser, en s'appuyant sur des autorités et des raisons : En effet Gratien, dans le Décret, dit à celui qui souffre du diable, qu'il peut avoir des herbes (à utiliser), sans incantations ; et il cite les paroles même de Jérôme (Décret II, 26, 7, 18). Le Maître de l'Histoire scolastique (Pierre le Mangeur) glosant Tobie et les paroles de l'Ange : Le cœur et le foie du poisson se brûlent devant un homme ou une femme victimes des attaques du démon ou d'un mauvais esprit, dit ceci : Nous ne devons pas nous étonner de cela, car la fumée d'un arbre brûlé semble avoir la même vertu, bien qu'il y ait ici en plus un sens spirituel pour le futur, celui de l'oraison spirituelle. Dans le même sens nous avons Albert commentant Luc IX ; (nous avons) Nicolas de Lyre commentant le livre des Rois avec Paul de Burgos qui tient pour cette conclusion : Il semble falloir concéder non seulement que par certaines choses sensibles les affligés du démon puissent être soulagés mais même qu'ils puissent être totalement libérés, (comprenons) quand ils ne sont pas trop atrocement affligés. Et il le prouve par cette raison : Les démons ne peuvent à leur guise transformer la matière corporelle, mais seulement par la conjonction voulue des principes actifs et passifs (sic Nicolas). Or de la même manière une chose sensible peut dans le corps humain créer une disposition qui le rend plus apte à recevoir l'action du démon. Par exemple : selon les médecins, la manie est la plus grande disposition à la démence et par conséquent aussi à la possession démoniaque. Donc si en pareil cas on faisait reculer la prédisposition passive, il s'ensuivrait aussi la guérison de l'affliction active par le diable. On peut donc dire la même chose du foie du poisson ; la même chose de la musique de David par laquelle Saül fut d'abord un peu réconforté et se trouva mieux puis totalement délivré, puisque dit la lettre de (l'Écriture) : l'esprit malin s'éloigna de lui. En effet il ne serait pas logique avec la lettre de l'Écriture de dire que cela se faisait à cause du mérite de David et par ses prières ; car il n'est pas vraisemblable que l'Écriture taise sur une chose qui serait notoirement à sa louange.
(...)
Les sorciers s'avouent gênés dans leurs maléfices par la fidélité aux rites vénérés de l’Église : comme l'aspersion d'eau bénite, la prise de sel bénit, le cierge du jour de la Purification, l'usage licite de rameaux consacrés et choses semblables. L’Église en effet exorcise tout cela pour diminuer les forces du démon.
Lire Roumanie, le paradis des sorcières.
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