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dimanche 13 février 2022

Comment saint François, cheminant avec Frère Léon, lui exposa les choses dans lesquelles consiste la joie parfaite



C'était pendant l'hiver ; un jour que saint François se rendait de Pérouse à Sainte-Marie-des-Anges par un froid très-rigoureux, il appela Frère Léon* qui se trouvait à quelques pas devant lui, et lui dit : « Ô Frère Léon ! plaise à Dieu que les Frères Mineurs donnent à toute la terre un grand exemple de sainteté ; néanmoins fais bien attention et note soigneusement que là n'est pas la joie parfaite. » Un peu plus loin, il reprit : « Ô Frère Léon ! quand les Frères rendraient la vue aux aveugles, chasseraient les démons, feraient parler les muets et ressusciteraient les morts de quatre jours, fais bien attention que là n'est pas la joie parfaite. » Et un peu plus loin encore : « Ô Frère Léon! dit-il, si les Frères Mineurs savaient toutes les langues et toutes les sciences, s'ils avaient le don de prophétie et celui du discernement des cœurs, fais bien attention que là n'est pas la joie parfaite. » Et un peu plus loin : « Ô Frère Léon ! chère petite brebis de Dieu, si les Frères Mineurs parlaient la langue des anges, s'ils connaissaient le cours des astres, la vertu des plantes, les secrets de la terre et la nature des oiseaux, des poissons, des hommes et de tous les animaux, des arbres, des pierres et de l'eau, fais bien attention que là n'est pas la joie parfaite. » Et un peu plus loin : « Ô Frère Léon ! quand les Frères Mineurs convertiraient, par leurs prédications, tous les peuples infidèles à la foi du Christ, fais bien attention que là n'est pas la joie parfaite. » Et il continua à parler ainsi l'espace de plusieurs milles. Enfin, Frère Léon, étonné, lui de manda : « Ô Père ! je t'en prie au nom de Dieu, dis-moi en quoi consiste la joie parfaite. » Saint François répondit : « Quand nous arriverons à Sainte-Marie-des-Anges, bien mouillés, bien crottés, transis de froid, mourants de faim, et que nous frapperons à la porte, le portier nous dira : « Qui êtes-vous ? » — Nous répondrons : « Nous sommes deux de vos frères. » — « Vous mentez, » dira-t-il ; « vous êtes deux vagabonds qui courez le monde et enlevez les aumônes aux véritables pauvres ; partez d'ici. » Et il refusera de nous ouvrir, et il nous laissera à la porte pendant la nuit, exposés à la neige, au froid et mourants de faim. Si nous souffrons ce traitement avec patience, sans trouble et sans murmure ; si même nous pensons humblement et charitablement que le portier nous connaît bien pour ce que nous sommes, et que c'est par la permission de Dieu qu'il parle ainsi contre nous, ô Frère Léon ! crois bien que c'est en cela que consiste la joie parfaite. Si nous continuons de frapper à la porte, et que le portier courroucé nous chasse comme des fainéants importuns, nous accable d'injures, de soufflets, et qu'il nous dise : « Partirez-vous d'ici, misérables filous ? allez à l'hôpital : il n'y a rien à manger ici pour vous. » Si nous supportons ces mauvais traitements avec joie et avec amour, ô Frère Léon ! crois-le bien, c'est en cela que consiste la joie parfaite. Si enfin, dans cette extrémité, la faim, le froid, la nuit nous contraignent de faire instance avec des larmes et des cris pour entrer dans le couvent, et que le portier, irrité, sorte avec un gros bâton noueux, nous tire par le capuchon, nous jette dans la neige et nous donne tant de coups qu'il nous couvre de plaies ; si nous supportons toutes ces choses avec joie, dans la pensée que nous devons participer aux souffrances de notre béni Seigneur Jésus-Christ, ô Frère Léon ! crois-le bien, c'est là que se trouve la joie parfaite. Et maintenant écoute la conclusion, Frère Léon : de tous les dons du Saint-Esprit que le Christ a daigné répandre sur ses serviteurs, le plus considérable est de se vaincre soi-même et de souffrir volontiers, pour l'amour de Jésus, les peines, les injures, les opprobres et les plus pressants besoins ; oui, car nous ne pouvons pas nous glorifier de tous les autres dons, puisqu'ils ne viennent pas de nous ; et l'Apôtre a dit : « Qu'avez-vous que vous n'ayez reçu de Dieu ? que si vous tenez tout de lui, pourquoi vous en glorifier, comme si tout venait de vous ? » Mais dans la croix de la tribulation et de l'affliction, nous pouvons nous glorifier juste ment : car, comme le dit encore l'Apôtre : « A Dieu ne plaise que je me glorifie en autre chose que dans la croix de Notre-Seigneur Jésus-Christ. »


* Frère Léon a quelque chose du caractère de saint Jean. Il était le confesseur, l'ami intime de saint François ; ils ne se quittaient pas, voyageaient ensemble, pleuraient ensemble : ils ont toujours vécu appuyés l'un sur l'autre. Saint François appelait très-amoureusement Léon la petite brebis de Dieu, la pecorella di Dio. Léon ne fut pas séparé de François, même dans la mort : son corps fut déposé au pied de l'autel de son ami, canonisé et glorifié ; Voyez M. Chavin de Malan, c. III.

(Les Fioretti)


Reportez-vous à Saint François d'Assise : Qu'il faut traiter le corps avec ménagement pour lui enlever tout prétexte à murmurer, Prière à Saint François d'Assise, pour demander le mépris du monde et un ardent amour pour Jésus-Christ, ou une grâce quelconque, Prière d'une âme qui veut se détacher des vaines affections, Paraphrase de l'Oraison Dominicale, par saint François d'Assise, Saint François d'Assise et le combat spirituel, Cantique des créatures ou Cantique de frère soleil, Méditation pour la Fête de Notre-Dame des Anges, Élan d'amour, Prière de Saint François d'Assise, Un saint Frère franciscain reconnaît, dans une étonnante vision, un de ses compagnons mort quelque temps auparavant, Doctrine et paroles remarquables du bienheureux Frère Égide, compagnon de Saint François d'Assise : Sur les Vices et les Vertus, la Crainte de Dieu, la Patience, l'Oisiveté, et le dégoût des choses temporelles, Doctrine et paroles remarquables du bienheureux Frère Égide, compagnon de Saint François d'Assise : Sur la Chasteté, les Tentations et l'Oraison, Comment un noble chevalier fut assuré de la mort et des sacrés et saints Stigmates de saint François, pour lequel il avait une grande dévotion, Exemple de la grande puissance de Frère Junipère contre les démons, Comment un saint Frère, après avoir lu, dans la légende de saint François, le chapitre des sacrés et saints Stigmates, pria Dieu avec tant de ferveur de lui faire connaître les paroles secrètes du Séraphin, que le Saint vint enfin les lui-même, La Couronne franciscaine, Comment saint François commanda à Frère Léon de laver une pierre, Auspicato Concessum, Lettre encyclique de Sa Sainteté le Pape Léon XIII, sur le Tiers-Ordre de Saint François, De la terrible vision que Frère Léon eut en songe, Comment saint François guérit un lépreux de l'âme et du corps ; parole que l'âme de ce lépreux lui adressa en montant au Ciel, Comment le Frère Pacifique fut ravi en extase et vit dans le ciel le trône de Lucifer réservé à Saint François, Comment Saint François voulait que le Serviteur de Dieu montrât toujours un visage joyeux, De la merveilleuse humilité du séraphique saint François, Méditation pour la Fête de Saint François d'Assise, Comment saint François commandait aux animaux et en était obéi, Sacra propediem du Pape Benoît XV, au sujet du septième centenaire de la fondation du Tiers-Ordre franciscain, L'esprit du Tiers-Ordre de Saint François d'Assise, Des trois grandes promesses faites par Notre-Seigneur à Saint-François, Récit des Stigmates de Saint François d'Assise, Vie de Saint François d'Assise, Litanies de Notre Saint Père Saint François (Petit manuel du Tiers-Ordre), Saint François et le Chapitre de la Saint-Michel, Rite expiatis, Lettre encyclique de Sa Sainteté le Pape Pie XI, à l'occasion du septième centenaire de la mort de Saint François d'Assise, et Litanie de Saint François d'Assise.