Extrait des "Fioretti ou petites fleurs de Saint François d'Assise", par M. l'Abbé A. Riche :
De la sainte Chasteté
Notre pauvre et misérable chair est semblable à un animal immonde qui se fait un plaisir de se vautrer dans la fange, et qui trouve là sa plus grande satisfaction. Elle se fait le chevalier du démon ; elle combat en résistant à tout ce qui tend à la volonté de Dieu et au salut de notre âme.
Un religieux disait un jour à Frère Égide : « Père, enseignez-moi le moyen de fuir les péchés de la chair. » — « Mon frère, répondit Frère Égide, celui qui veut déplacer un fardeau énorme, une grosse pierre, pour la transporter ailleurs, doit chercher à y parvenir plutôt par l'adresse que par la force. Et nous aussi, si nous voulons triompher des vices de la chair et acquérir la vertu de la chasteté, le meilleur moyen que nous ayons à prendre c'est l'humilité, c'est une direction spirituelle, sage et discrète ; ce moyen nous réussira bien mieux que des austérités présomptueuses et de sévères pénitences que nous pourrions nous imposer de notre propre volonté.
La sainte et resplendissante chasteté est troublée par le moindre vice. Elle est semblable à un miroir brillant, qui ne s'obscurcit pas seulement par le contact des objets malpropres, mais que le moindre souffle peut ternir. Il est impossible que nous puissions jamais parvenir à aucune grâce spirituelle, tant que nous sommes inclinés vers les concupiscences charnelles ; prenons toutes les formes qu'il nous plaira, non, jamais nous n'y arriverons que nous n'ayons auparavant exterminé tous ces péchés honteux. Sachons donc combattre vaillamment contre la sensualité et la fragilité de la chair, de cette ennemie qui ne songe qu'à nous attaquer nuit et jour ; une fois que nous l'aurons vaincue, nous aurons par là même triomphé de nos autres ennemis, et bientôt nous arriverons aux grâces spirituelles, aux vertus et à la perfection.
Frère Égide disait : « De toutes les vertus, la chasteté est celle que je préfère ; car, en elle seule, se trouve déjà une certaine perfection, tandis que, sans elle, il n'est pas de vertu véritablement parfaite. »
Un religieux demandait un jour à Frère Égide : « Mon père, la charité n'est-elle pas une vertu supérieure et préférable à la chasteté ? » — « Dites-moi, mon frère, répondit Frère Égide, est-il au monde une vertu plus pure et plus sainte que la chasteté ? »
Souvent Frère Égide chantait ce sonnet : « O sainte chasteté ! oh ! que tu es excellente ! Vraiment tu es précieuse, et ton odeur est si suave que celui qui ne l'a point goûtée, ne sait rien de toi ; aussi les insensés ne savent pas t'apprécier. »
Un religieux disait à Frère Égide : « Père, vous qui recommandez avec tant d'instance la vertu de chasteté, je vous en prie, dites-moi en quoi elle consiste. » Frère Égide répondit : « Mon frère, je vous le dis, c'est avec justice que l'on définit la chasteté : la gardienne qui veille sans cesse sur les sens corporels et spirituels, et qui les conserve à Dieu purs et sans tache. »
Des Tentations
L'homme ne peut conserver en paix les grâces qu'il a reçues de Dieu ; il faut que bientôt le trouble et l'adversité viennent s'y mêler. D'ailleurs plus on est agréable à Dieu, plus sont violentes les attaques et les luttes que l'on doit soutenir contre les démons. Aussi le fidèle ne doit jamais cesser de combattre, s'il veut conserver la grâce que Dieu lui a départie, et plus sera vive la lutte à laquelle il résistera, plus sera brillante la couronne qu'il remportera après la victoire.
Mais pour nous, les combats, les obstacles et les tentations que nous avons à surmonter sont rares, car nous ne sommes pas ce que nous devrions être dans les voies spirituelles. Il est pourtant vrai que si nous suivions avec sagesse et discrétion les sentiers qui conduisent à Dieu, nous n'éprouverions, dans notre voyage, ni ennui, ni fatigue. Mais, pour ceux qui marchent dans les voies du siècle, ils seront obligés de passer, jusqu'au moment de leur mort, par les fatigues, les ennuis, les angoisses et les tribulations.
Un religieux disait un jour à Frère Égide : ce Mon père, il me semble que vous avancez deux choses qui se contredisent : vous dites que plus on est vertueux et agréable devant Dieu, plus les luttes que l'on doit soutenir dans la vie spirituelle sont fréquentes ; et vous ajoutez ensuite, que celui qui suivrait avec sagesse et discrétion la voie qui conduit à Dieu, n'éprouverait, dans son voyage, ni ennui, ni fatigue. » Alors Frère Égide lui expliqua cette apparente contradiction, et lui dit : « Mon frère, il est certain que les démons tentent beaucoup plus violemment les hommes de bonne volonté, selon Dieu, que ceux qui suivent une route opposée ; mais, pour celui qui marche avec discrétion et ferveur dans les voies de Dieu, quel ennui, quel dommage pourraient lui causer soit les démons, soit toutes les adversités de ce monde ? Ne sait-il pas, ne voit-il pas que ce trompeur vend sa marchandise mille fois plus qu'elle ne vaut ? Je vous le dis avec certitude : quand une fois on est embrasé de l'amour divin, plus on est combattu par les vices, plus on les a en horreur et en abomination. Les cruels démons choisissent ordinairement, pour tenter l'homme, le moment où son corps est dans la souffrance ; ainsi quand il souffre le froid, le chaud, la faim, la soif ; ou bien encore quand l'injure et le mépris tombent sur lui, ou qu'il éprouve quelque autre dommage, soit spirituel, soit temporel ; oui, car ils savent qu'alors il est plus disposé à recevoir leurs tentations. Mais, je vous le dis, à chaque tentation et à chaque vice dont vous triompherez, vous acquerrez une vertu ; et la victoire que vous aurez remportée sur le péché sera suivie d'une grâce plus abondante, d'une couronne plus précieuse. »
Un religieux disait un jour à Frère Égide : « Père , je suis souvent tourmenté par une tentation mauvaise ; j'ai beaucoup prié Dieu pour qu'il daignât m'en délivrer, et mes prières n'ont pas été exaucées ; dites-moi, mon père, que dois-je faire ? » — « Mon frère, répondit Frère Égide, plus les armes qu'un prince donne à ses chevaliers sont belles et fortes, plus il a droit d'attendre que la lutte qu'ils vont opposer à ses ennemis sera constante et vigoureuse. »
Un autre frère lui demandait : « Père, que dois-je faire pour aller à l'oraison plus volontiers et avec plus de ferveur ? Jusqu'à présent je m'y suis trouvé sec, aride, négligent et sans piété. » Frère Égide lui répondit : « Un roi a deux serviteurs ; l'un est armé de pied en cap, l'autre est sans défense, et tous deux doivent entrer dans la lutte et combattre pour lui. Celui qui est armé se présente avec assurance ; mais l'autre dit à son prince : Maître, vous le voyez, je suis nu et sans armes, cependant, pour vous prouver mon attachement, je marcherai au combat et je lutterai tel que je suis. Alors le bon roi, voyant le dévouement de son fidèle sujet, dit à ses ministres : Allez avec ce zélé serviteur, donnez-lui toutes les armes nécessaires pour qu'il puisse, en sûreté, s'avancer au combat ; et puis, je veux qu'il soit reconnu comme un de mes braves chevaliers, c'est pourquoi j'ordonne que mon sceau royal soit imprimé sur ses armes. Voilà ce que nous éprouvons souvent lorsque nous nous rendons à l'oraison ; nous nous trouvons dépouillés de tout, sans piété, indolents et arides ; efforçons-nous cependant, pour l'amour de Notre-Seigneur, d'entrer dans la lutte de la prière ; alors notre roi bienfaisant,
voyant les efforts de ses chevaliers, leur donnera, par les mains des Anges ses ministres, la dévotion, la ferveur et la bonne volonté. »
Pour recueillir le fruit en son temps, il est quelquefois nécessaire de commencer par un travail très-pénible, comme de couper le bois, de labourer la terre, de cultiver la vigne. Mais plusieurs s'arrêtent fatigués et découragés, et ils se repentent de s'être mis à l'œuvre. Pour ceux qui s'efforceront de travailler jusqu'à la récolte, ils oublieront ensuite toutes leurs peines, et ils se trouveront consolés et joyeux en voyant les fruits dont ils pourront jouir. Ainsi celui qui persévérera, malgré les tentations, finira par goûter d'abondantes consolations ; car, après les tribulations, dit l'Apôtre, viennent les consolations et les couronnes de la vie éternelle. Et, ceux qui auront résisté aux tentations ne seront pas seulement récompensés dans le ciel, ils le seront dès cette vie même, suivant ce que dit le Psalmiste : « Seigneur, vos consolations viendront réjouir mon âme selon la multitude des tentations et des douleurs que j'ai éprouvées. » Ainsi, plus la tentation et la lutte auront été violentes, plus la couronne sera glorieuse. »
Un religieux consultait Frère Égide au sujet des tentations, et il lui disait : « Mon père, je suis tourmenté par deux tentations : quand je fais quelque chose de bien, aussitôt se présente à mon esprit une pensée de vaine gloire ; et puis, lorsqu'il m'est arrivé de tomber dans une faute, j'éprouve ensuite une grande tristesse et une nonchalance qui me conduit presque au découragement. » Frère Égide répondit : « Mon frère, vous avez raison de vous plaindre de votre faiblesse et de vos péchés, mais il faut que vos plaintes soient discrètes et modérées, et vous devez vous rappeler que la miséricorde de Dieu surpasse infiniment toutes vos fautes. Que si la divine clémence reçoit à la pénitence le plus grand pécheur dont le crime a été volontaire, et qui se repent, croyez-vous qu'elle abandonné celui dont le péché est involontaire et qui est déjà contrit et repentant ? Je vous conseille aussi de ne jamais cesser de faire le bien, par la crainte de la vaine gloire. Si le laboureur, au moment de semer, se disait : Je ne veux pas jeter mon grain, car peut-être les oiseaux viendraient et le mangeraient ; si, dis-je, il s'en tenait là, certainement il ne recueillerait aucun fruit aux jours de la moisson. Mais s'il sème son grain, quoiqu'il puisse se faire, en effet, que les oiseaux en mangent un peu, il pourra néanmoins en recueillir la plus grande partie. Ainsi, quand vous serez tenté de vaine gloire, ne faites jamais le bien en vue de vous la procurer ; combattez-la au contraire ; et alors, je vous le dis, malgré vos tentations, vous ne perdrez pas le mérite des bonnes œuvres que vous aurez pratiquées. »
Un religieux disait un jour à Frère Égide : « Père, on raconte que saint Bernard récita une fois les sept Psaumes de la Pénitence avec un si grand calme d'esprit et une telle dévotion, qu'il n'eut pas la moindre distraction. » — « Mon frère, répondit Frère Égide, je suppose deux hommes, dont l'un est à la garde d'un château qu'il défend contre les assauts de l'ennemi, en combattant avec valeur, tandis que l'autre se tient en paix, sans que rien vienne le troubler ; eh bien, j'estime qu'il y a plus de mérite dans le premier que dans le second. »
De la sainte Oraison
L'oraison est le principe, le milieu et la fin de tout bien. C'est elle qui éclaire l'âme et qui lui fait discerner le bien d'avec le mal. Tout pécheur devrait chaque jour prier Dieu avec ferveur et humilité de lui faire connaître sa propre misère, ses péchés, et les bienfaits qu'il a reçus et qu'il reçoit encore à chaque instant de sa divine bonté. Mais comment pourra-t-il connaître Dieu, celui qui ne sait pas prier ? Ceux qui veulent le salut de leur âme doivent, s'ils comprennent bien leurs intérêts, diriger tous leurs efforts vers la sainte oraison.
Frère Égide disait : « Si un homme avait un fils condamné à mort ou au bannissement pour ses crimes, certainement il ne voudrait prendre aucun repos qu'il n'eût obtenu la révocation de la sentence portée contre le coupable ; il emploierait les prières, les supplications, les présents, tout ce qu'il pourrait enfin, par lui-même aussi bien que par ses parents et ses amis. Si donc l'homme prend tant de sollicitude pour son fils, qui, après tout, est sujet à la mort, à combien plus forte raison ne doit-il pas prier Dieu et le faire prier par de pieuses âmes et même par les Saints du paradis, lorsqu'il voit son âme, qui est immortelle, bannie de la cité céleste et vraiment condamnée à mort pour ses péchés ? »
Un religieux disait à Frère Égide : « Mon père, il me semble que l'on devrait être triste et désolé, quand on n'a pas la grâce de la dévotion dans la prière. » — « Mon frère, répondit Frère Égide, je vous conseille d'y aller très-doucement. Si vous aviez, dans un tonneau, une petite quantité de bon vin, sous lequel se trouverait encore la lie, certainement vous ne voudriez pas frapper ni remuer ce tonneau, dans la crainte de tout mêler. Eh bien ! je vous le dis aussi, tant que la prière ne sera pas dégagée de toute concupiscence vicieuse et charnelle, elle ne pourra produire la consolation divine, car alors elle n'est pas pure devant Dieu, elle est mêlée avec la lie de la chair. Il faut donc que nous nous efforcions, le plus que nous le pouvons, de nous dégager de cette concupiscence malheureuse, afin que notre prière soit pure devant Dieu et qu'elle attire sur nous la dévotion et la consolation divine. »
Un religieux demandait un jour à Frère Égide : « Père, comment donc se fait-il que l'esprit soit tenté, combattu et travaillé avec plus de violence pendant l'oraison qu'en tout autre temps ? » Frère Égide répondit : « Quand nous avons quelque affaire à plaider devant un juge, nous allons d'abord lui exposer nos raisons, lui demander ses avis et son assistance ; mais, dès qu'il s'en aperçoit, notre adversaire arrive aussitôt à son tour pour nous contredire et s'opposer à ce que nous réclamons ; et c'est ainsi que, réfutant tout ce que nous disons, il nous présente une forte opposition. Eh bien ! de même aussi, quand nous sommes en prière et que nous demandons aide et secours à Dieu dans notre cause, aussitôt le démon, notre adversaire, arrive avec ses tentations pour nous résister et nous contredire ; il emploie la force, la ruse, l'insinuation pour nous détourner de notre prière, pour l'empêcher de devenir agréable devant Dieu et de nous attirer le mérite et la consolation. C'est là une vérité que nous pouvons connaître par notre propre expérience : n'est-il pas vrai que, quand nous nous entretenons des choses du siècle, ce n'est pas alors que les tentations viennent jeter le trouble dans notre esprit ? Au contraire, allons à l'oraison, et aussitôt elles arriveront en foule, le démon nous les enverra pour nous distraire et empêcher notre âme de goûter les douceurs et les consolations qu'elle attend de son entretien avec Dieu. »
Frère Égide disait que l'homme qui prie doit se comporter comme un brave chevalier au milieu du combat. Arrive-t-il qu'il soit atteint, frappé par l'ennemi, il ne quitte pas pour cela le champ de bataille ; il résiste avec courage pour triompher de son adversaire, et trouver ensuite dans la victoire le bonheur et la consolation. Si, au contraire, il se retirait au premier coup, il n'emporterait, dans sa fuite, que la confusion et l'opprobre. Et nous aussi, que jamais les tentations ne nous fassent abandonner la prière ; sachons, au contraire, leur résister avec courage ; oui, car heureux est celui qui souffre les tentations ! dit l'Apôtre, il recevra, après les avoir surmontées, la couronne de la vie éternelle. Mais si elles nous font renoncer à l'oraison, vaincus alors par le démon, notre ennemi, nous n'emporterons de notre défaite que la confusion et la honte.
Un religieux disait un jour à Frère Égide : « Père, je connais des personnes auxquelles Dieu accorde le don des larmes dans la prière, et moi j'y demeure tout aride. » — « Mon frère, répondit Frère Égide, je vous conseille de vous appliquer à la prière avec humilité et fidélité ; on ne recueille les fruits de la terre qu'après de longs travaux et beaucoup de fatigue, et même la récolte ne suit pas encore immédiatement ces pénibles labeurs : il faut attendre que le temps en soit venu. Ainsi Dieu ne nous accorde pas toujours ses grâces au moment où nous les lui demandons ; il attend l'instant favorable où notre cœur soit purifié de toute affection charnelle et de tout péché. Appliquez-vous donc humblement à la prière ; Dieu, qui est la bonté et la clémence même, connaît tout et sait ce qui nous est le plus avantageux. Quand le temps delà récolte sera venu, alors ; comme un bon Père, il nous accordera des fruits abondants de consolation. »
Un autre religieux disait à Frère Égide : « Frère Égide, que faites-vous ? Frère Égide, que faites-vous ? » Et il répondit : « Je fais le mal. » — « Et quel mal faites-vous donc ? » demanda le frère. Alors Frère Égide, se tournant vers un autre religieux, lui dit : « Mon frère, croyez-vous que Dieu soit plus disposé à nous accorder sa grâce que nous ne le sommes nous-mêmes à la demander ? » — « Je le crois, » répondit le frère. — « Eh bien, reprit Frère Égide, pouvons-nous dire que nous faisons le bien ? » — « Loin de là, dit le frère, c'est le mal que nous faisons. » — « Vous le voyez donc, mon frère, ajouta Frère Égide, en revenant à celui qui l'avait d'abord interrogé, nous faisons le mal ; et la réponse que je vous donnais était juste. »
Frère Égide disait : « Beaucoup de choses sont louées et recommandées dans la sainte Écriture ; ainsi les œuvres de miséricorde et d'autres bonnes ouvres encore ; mais quand le Seigneur vient à parler de la prière, il dit : Le Père céleste recherche et veut des hommes qui l'adorent sur la terre, en esprit et en vérité. »
Il disait encore que les vrais religieux sont semblables aux loups ; ces animaux ne sortent de leur tanière que quand ils se sentent pressés par une grande nécessité ; et quand ils ont trouvé ce dont ils avaient besoin, ils rentrent aussitôt sans chercher à demeurer parmi les hommes.
Les bonnes œuvres sont autant d'ornements qui embellissent l'âme ; mais l'oraison, plus que toutes les autres, l'embellit et l'éclaire.
Un religieux qui était très-lié avec Frère Égide, lui disait un jour : « Pourquoi donc ne paraissez-vous pas quelquefois en public pour y parler des choses de Dieu, exhorter les fidèles et procurer le salut de leurs âmes ? » — « Mon frère, répondit Frère Égide, je veux remplir mes devoirs envers le prochain avec humilité, mais sans détriment pour mon âme, et par conséquent sans renoncer à l'oraison. » — « Au moins, reprit le frère, au moins devriez-vous visiter quelquefois vos parents. » — « Ne connaissez-vous donc pas, répliqua Frère Égide, ces paroles du Seigneur dans son Évangile : « Celui qui abandonnera son père, sa mère, ses frères, ses sœurs et ses biens pour l'amour de moi, sera récompensé au centuple ? » Puis il ajouta : « Un gentilhomme est entré en religion, laissant dans le monde une fortune de 60,000 livres ; combien donc sera abondante la récompense de ceux qui quittent tout pour l'amour de Dieu, puisqu'ils en auront encore cent fois plus ! Mais, hélas ! que nous sommes aveugles ! quand nous rencontrons une âme vertueuse et en grâce devant Dieu, notre misère et notre défaut d'intelligence nous empêchent de comprendre sa perfection.
L'homme vraiment spirituel ne désire voir et entendre personne que par nécessité ; car, pour lui, il veut être séparé de tout le monde et uniquement uni à Dieu par la contemplation.
Alors Frère Égide dit à un autre religieux : « Père, je désirerais savoir ce que c'est que la contemplation ? » — « Je l'ignore, mon père, » répondit le frère. Et Frère Égide reprit : « Père, je voudrais qu'on le comprît bien ; la contemplation, c'est un feu divin, une onction suave de l'Esprit-Saint, un ravissement, une extase de l'âme enivrée de la douceur ineffable des choses divines ; c'est une satisfaction douce et calme dans laquelle l'esprit est transporté d'admiration à la vue des beautés suprêmes et éternelles ; enfin, c'est un sentiment intérieur et brûlant de la gloire céleste et inénarrable. »
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