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vendredi 26 février 2021

De la nécessité de la Mortification : En quoi elle consiste



Pour traiter cette matière à fond, il est nécessaire de supposer d'abord qu'il y a deux parties principales dans notre âme, l'une que les Théologiens appellent supérieure, et l'autre inférieure ; on les comprend ordinairement sous les noms de Raison, d'Appétit sensitif. Avant le péché, et dans le bienheureux état d'innocence et de justice originelle où Dieu avait créé l'homme, la partie inférieure était parfaitement soumise à la supérieure ; mais la raison s'étant par la suite révoltée contre Dieu par le péché, l'Appétit sensitif se révolta aussi contre la Raison ; de sorte que, malgré nous, et contre le consentement de notre volonté, il s'élève quelquefois dans notre Appétit sensitif des mouvements et des affections que nous condamnons, suivant ces paroles de l'Apôtre : Je ne fais pas le bien que je veux, mais je fais le mal que je ne veux pas.
Il faut encore supposer une autre vérité principale, et qui est une suite nécessaire de la première ; savoir, que le dérèglement de notre appétit et la perversité de l'inclination de notre chair, est ce qui forme le plus grand obstacle à notre avancement dans la vertu. De-là vient qu'on dit ordinairement que la chair est notre plus grand ennemi, parce qu'en effet c'est de-là que naissent toutes nos tentations, et qu'elle est le principe ordinaire de nos chutes. D'où proviennent les guerres et les contradictions que vous sentez en vous-même, demande l'Apôtre Saint Jacques ? N'est-ce pas de vos passions, qui combattent dans vos membres ? La sensualité, la concupiscence et le dérèglement de l'amour-propre, sont la cause de toutes nos guerres intestines, de tous les péchés, de toutes les fautes et de toutes les imperfections que nous commettons, et, par conséquent, le plus grand obstacle que nous puissions rencontrer dans le chemin de la perfection.
Cela supposé, il n'est pas difficile de concevoir que la mortification consiste à réparer les désordres de nos passions, c'est-à-dire, à réprimer en nous les mauvaises inclinations et le dérèglement de l'amour-propre. Saint Jérôme écrivant sur ces paroles de Jésus-Christ : « Si quelqu'un veut venir après moi, qu'il renonce à lui-même, et qu'il porte sa croix, et me suive, » dit que celui-là renonce à lui-même, et porte sa croix, qui, d'impudique qu'il était auparavant, devient chaste ; qui d'intempérant, devient sobre ; qui de faible et timide, devient fort et courageux ; c'est renoncer véritablement à soi-même que de devenir tout différent de ce que l'on était auparavant.
Ce qui prouve évidemment la nécessité de la mortification, c'est que le Sauveur, selon la remarque de Saint Basile, dit premièrement, qu'il faut qu'il renonce à soi-même ; et qu'il ajoute ensuite, et qu'il me suive. C'est-à-dire, que si vous ne renoncez premièrement à vous-même, si vous ne vous dépouillez entièrement de votre propre volonté, si vous ne mortifiez vos mauvaises inclinations, vous rencontrerez mille difficultés et mille obstacles qui vous empêcheront de suivre Jésus-Christ. Il faut donc que vous commenciez par vous aplanir à vous-même le chemin par le moyen de la mortification, et c'est pour cela qu'il l'a établie comme le fondement, non seulement de la perfection, mais de toute la vie chrétienne. C'est là cette croix que nous devons toujours porter avec nous, si nous voulons suivre Jésus-Christ : c'est ainsi « que nous devons toujours porter sa mort en notre corps, afin que la pureté de sa vie paraisse aussi dans notre corps... La vie de l'homme sur la terre est une guerre perpétuelle... Car la chair, comme dit Saint Paul, a des désirs opposés à ceux de l'esprit, et l'esprit en a de contraires à ceux de la chaire. »

(Abrégé de la pratique de la perfection chrétienne)


Reportez-vous à Un des plus grands châtiments que Dieu puisse exercer contre l'homme, c'est de l'abandonner à ses passions, et aux désirs déréglés de son cœur, De l'union étroite qui doit être entre la Mortification et l'Oraison, De la Mortification, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De l'Oraison, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De la nourriture du corps, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Méditation sur le combat de la chair contre l'esprit, Moyens pour persévérer dans la sobriété et dans l'abstinence, Des Vertus, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De l'anéantissement, Méditation sur le Carême : Jésus ayant jeûné quarante jours et quarante nuits, il eut faim ensuite, Instruction sur le Carême, Méditation sur le véritable jeûne, Méditation sur la Loi du jeûne, Catéchisme spirituel de la Perfection Chrétienne, par le R.P. Jean-Joseph Surin, Prière pour demander la victoire sur ses passions, De la violence qu'il faut se faire à soi-même, De l'activité naturelle, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, et Sur la vaine curiosité.