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samedi 21 décembre 2019

Du vrai Religieux, par le R.-P. Jean-Joseph Surin


Extrait du CATÉCHISME SPIRITUEL DE LA PERFECTION CHRÉTIENNE, TOME II, Composé par le R. P. J. J. SURIN, de la Compagnie de Jésus :




Du vrai Religieux



Quels sont les traits qui composent le caractère de l'homme Religieux ?

Il y en a particulièrement trois ; la dévotion, la mortification et la charité fraternelle.


Pour quoi la dévotion convient-elle particulièrement aux personnes Religieuses ?

Parce qu'à raison de leur état elles doivent être continuellement appliquées à la méditation des vérités et des Mystères de la Foi, et demeurer toujours comme prosternées en esprit devant la Majesté de Dieu, pour l'honorer autant qu'elles en sont capables. Un homme fort spirituel a dit, que comme les lampes ne cessent jamais de luire devant l'Autel, les personnes Religieuses ne doivent jamais cesser de vaquer à l'oraison, à la Psalmodie, à l'examen de conscience, aux lectures spirituelles, aux visites du Saint Sacrement, et aux autres saints exercices qui unissent à Dieu, qui donnent et qui entretiennent le goût des choses divines, en quoi on fait consister ordinairement la dévotion.
Conformément à ce principe, les Religieux ne doivent rien tant craindre et tant fuir, que ce qui peut étouffer en eux l'esprit de dévotion. Ce qui peut y nuire le plus, c'est premièrement, la trop grande ardeur pour l'étude, parce qu'en nous remplissant d'une vaine estime pour les sciences humaines, elle diminue la vigueur de l'âme, lui ôte le goût de Dieu et tarit ainsi la source de la dévotion.
Ce qui dessèche encore beaucoup la dévotion, ce sont les grandes occupations extérieures. Parmi les Ordres Religieux, qui ont pour fin d'aider le prochain, il y en a de trois sortes : les uns sont militaires, et destinés à combattre les ennemis de la Foi ; les autres s'emploient au service des malades ; les troisièmes se consacrent à l'instruction et au salut des âmes. Les sujets qui composent ces différents Ordres de l'Église peuvent aisément, s'ils n'y prennent garde, épuiser toutes leurs forces intérieures en vaquant au-dehors à leurs emplois ; et en voulant rendre service à Dieu, oublier le principe qui rend nos services agréables ; je veux dire, la présence de Dieu et l'union avec lui, en quoi consiste la dévotion.
C'est pourquoi ils ne sauraient se rendre trop familier l'usage de l'oraison et des autres saints exercices. La troisième chose qui détruit la dévotion dans les Religieux, c'est l'abondance et les commodités de la vie. Quand le corps est à son aise, la vigueur de l'esprit se perd, et la ferveur se relâche.


Quel est le second trait du caractère du vrai Religieux ?

C'est la mortification, qui consiste premièrement en l'austérité de vie, ou en de grands travaux qui suppléent aux austérités. Nous ne voyons aucune Religion qui ne soit établie sur l'un ou sur l'autre de ces fondements. Il est vrai que le saint Fondateur de l'Ordre de la Visitation a raisonné sur d'autres principes ; mais c'est qu'il veut qu'on reçoive dans son Ordre les personnes infirmes, à qui les austérités et les grands travaux ne conviennent pas. Et ainsi on peut toujours dire que l'austérité est essentielle à la Religion, et qu'être Religieux et mener une vie douce, sont deux choses qui ne sauraient s'accorder.
En second lieu, la mortification consiste à combattre ses passions, à exterminer ses vices, et à tendre à la vertu par le chemin de la croix. C'est pour cette seule raison qu'on appelle ces Communautés Religieuses, des écoles de vertu ; et certainement elles ne mériteraient pas ce nom si on y vivait sans gène et sans contrainte. Il faut qu'il y ait de la dépendance, et des Supérieurs qui règlent, qui déterminent, qui ordonnent, qui corrigent, et qui, avec autant de force que de douceur, portent leurs inférieurs à se raidir contre le torrent de la nature corrompue. Vouloir secouer ce joug, ce serait renoncer à son état ; et lorsqu'on trouve dans la Religion quelqu'un qui croit avoir acquis le droit de n'être plus gouverné et corrigé par autrui, on pourrait lui dire qu'il oublie sa profession, et qu'il n'avait que faire de quitter le monde pour faire sa volonté dans la Religion comme les mondains. Mais celui qui porte constamment le joug de la régularité et de la dépendance, a droit de prétendre aux consolations que Dieu donne à ceux qui n'abandonnent point la croix qu'ils ont une fois embrassée.


Quel est le troisième trait qui forme le caractère du vrai Religieux ?

C'est la charité fraternelle : car comme les Religieux vivent en Communauté, leur perfection dépend en partie de l'union qu'ils ont ensemble ; et ils doivent prendre pour eux ces paroles de Notre-Seigneur : la marque à quoi tout le monde connaîtra que vous êtes mes Disciples, c'est si vous vous entr'aimez.
Cette charité a trois principales fonctions ; la première est de conserver la paix entr'eux, d'éviter les divisions et les disputes, de combattre l'envie, l'ambition, l'attache à son propre sens, et les autres passions qui ont coutume de troubler la paix.
La seconde fonction de la charité, c'est de s'entr'aimer véritablement d'un amour effectif, comme étant tous frères, tous incorporés en Jésus-Christ, et nourris de la même viande, qui est le Corps et le Sang de ce Dieu-homme, comme portant tous en eux-mêmes l'image de Dieu, et aspirant à la même récompense, qui est la gloire éternelle. Ces grands motifs, outre l'union et la tendresse, doivent produire la candeur et la sincérité. Il serait bien étrange que les hommes unis ensemble par les liens de la Religion, cherchassent à se tromper les uns les autres, et qu'ils oubliassent ces belles paroles de S. Paul : Que chacun parle à son prochain dans la vérité, parce que nous sommes membres les uns des autres. Jamais un membre d'un même corps n'a manqué à l'égard de l'autre ; l'œil guide fidèlement le pied, et la main s'emploie à bander la plaie qui est à la jambe ; à combien plus forte raison l'excellence de la charité doit produire la simplicité et la franchise parmi les gens de même profession, qui portent un même habit, qui habitent sous un même toit, qui vivent selon les mêmes règles, qui usent des mêmes biens et des mêmes avantages. N'ont-ils pas les mêmes secours que les premiers Chrétiens, pour ne faire qu'un cœur, et qu'une âme? Et s'ils manquent à ce devoir, comment représenteront-ils la primitive Église, conformément à l'intention de leurs Fondateurs ?
La troisième fonction de la charité, qui doit régner parmi les personnes Religieuses, c'est de se secourir les unes les autres dans le besoin ; ce qui ne doit pas seulement s'entendre des nécessités de la vie, de l'affliction et de la maladie, mais encore des faiblesses et des imperfections qu'il faut supporter et guérir si on peut, comme ayant â en rendre compte au Seigneur : afin que la première de toutes les lois, qui est de traiter autrui comme soi-même, soit parfaitement accomplie ; qu'on se
prévienne mutuellement par de bons offices, comme il convient à des personnes qui vivent ensemble ; et que chacun se comporte de telle manière, que ni dans ses actions, ni dans ses paroles, ni dans, ses pensées, il n'y ait rien dont les autres puissent être légitimement offensés.
Pour en venir là, il n'y a qu'à faire réflexion que c'est un devoir prescrit par la nature ; que dans les sociétés les moins parfaites, les membres s'entr'aident les uns les autres, et ne manquent point de se secourir, quand ils sont attaqués ; que dans les Religions il y a une communauté de mérite dont chaque particulier, profite, et que chaque particulier a intérêt à maintenir une société si avantageuse, qui ne peut subsister que par l'amour et la condescendance que chaque membre a pour les autres. Enfin, on doit considérer que N.-S. tient pour fait à soi-même, ce qu'on fait au moindre des siens ; et que la marque la moins équivoque, et le premier effet de l'amour qu'on a pour Dieu, c'est d'aimer son frère ; Or le moyen de connaître si nous avons la charité fraternelle dans le cœur, c'est de voir si quand nos frères souffrent, nous sommes touchés de leurs souffrances. Car si dans ces occasions nous ne voyons en nous qu'insensibilité ou indifférence, c'est une marque que nous n'avons pas ces entrailles de miséricorde dont il est si souvent parlé dans l'Évangile, et que la charité ne manque jamais de donner à ceux en qui elle habite. Puisque cette vertu est un don surnaturel, et le plus grand de tous les dons, oserait-on lui refuser ce qu'on accorde à la naissance selon la chair ? Ne doit-elle pas faire dans l'ordre de la grâce, ce que fait le sang dans l'ordre de la nature, où nous voyons qu'un frère est touché des misères de son frère, et une mère de celles de son enfant ?



Reportez-vous à Sur les trois mots qui furent dits à saint Arsène : Fuyez, taisez-vous, reposez-vousDe la vie Apostolique, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De l'homme intérieur, par le R.-P. Jean-Joseph SurinCe qui s'est observé dans un Ordre Religieux durant le premier siècle depuis son établissement, doit être regardé comme meilleur que tout ce qu'on peut inventer dans la suite, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De la vie mixte, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Méditation sur le détachement des biens de ce mondeQu'il est très-utile d'ajouter quelques pénitences à l'examen particulierPasser de l'attrait du laid à l'attrait du beau, Méditation sur le renoncement au monde, Du Recueillement, par le R.-P. Jean-Joseph SurinDe la présence de Dieu, par le R.-P. Jean-Joseph SurinDu renouvellement de l'esprit, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De la vie parfaite, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De l'activité naturelle, par le R.-P. Jean-Joseph SurinN'embrassez un état que par des motifs dignes d'une Chrétienne, Saint Joseph patron et modèle des religieux, En quelque état que vous soyez, rendez respectable, par vos sentiments et votre conduite, votre titre de Chrétienne, De la vie intérieure, et de la familiarité avec Jésus-Christ, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De l'activité naturelle, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Méditation sur les règles que l'on doit suivre dans l'usage des divertissements permis, Méditation sur les divertissements du monde, VIE CHRÉTIENNE : Repas, Récréations, Conversations et Visites, Des amitiés, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De la conversation, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Des Vertus, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De l'étude des Lettres, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Des Habits, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De la nourriture du corps, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Méditation sur la connaissance des vertus et des vices, VIE CHRÉTIENNE : Conduite pour sanctifier les Dimanches et Fêtes de l'année, VIE CHRÉTIENNE : La prière du Matin, la Bonne Pensée, la Méditation, et la Lecture Spirituelle, Catéchisme spirituel de la Perfection Chrétienne, par le R.P. Jean-Joseph Surin (1), Catéchisme spirituel de la Perfection Chrétienne, par le R.P. Jean-Joseph Surin (2), De la vie illuminative, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De la réformation de la mémoire, par Le R.-P. Jean-Joseph Surin, Instruction pour les personnes qui entrent dans la voie d'Oraison, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Que les âmes lâches fassent tous leurs efforts pour acquérir la bonne volonté qui leur manque, De l'Oraison et de la Contemplation, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Simple et courte méthode d'oraison mentale, De l'Oraison, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De la Pénitence et de l'Oraison, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Pour bien faire l'oraison et pour en tirer le fruit qu'on a lieu d'en attendre, De la contemplation, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De quelques moyens de bien faire l'oraison mentale, Degrés des vertus qu'on se propose d'acquérir, Combien sont mal fondées les plaintes de ceux qui se disent incapables de méditer, En quoi consiste l'exercice de la présence de Dieu, Les voies du salut, De l'amour du Père Surin pour l'humilité, dans l'union avec Notre-Seigneur Jésus-Christ, De l'amour étonnant du Père Surin pour l'abjection, dans l'union avec Notre-Seigneur Jésus-Christ, De l'amour admirable du Père Surin pour les souffrances, dans l'union avec Notre-Seigneur Jésus-Christ, De l'imagination de l'homme, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De la réformation de l'entendement, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De la réformation de la colère, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De la vie Purgative, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De la Mortification, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, En quoi consiste la perfection chrétienne : pour l'acquérir il faut combattre, et pour sortir victorieux de ce combat, quatre choses sont nécessaires, De la sècheresse dans l'oraison, Du devoir des Veuves, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Ce qu'est l'oraison mentale, par le R.P. D. Laurent Scupoli, Clerc Régulier Théatin, Méditation sur la nécessité des progrès dans la vertu, De la Réduction des Hérétiques, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De la réformation de l'Amour, de la Haine, du Désir et de l'Aversion, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De quelques moyens de bien faire l'oraison mentale, Pour la direction et la progression spirituelles : Quel chrétien êtes-vous ?, Le souvenir de nos péchés est un moyen propre pour nous aider à supporter avec résignation, toutes les afflictions que Dieu nous envoie, Avis pour la lecture spirituelle, Histoire de la possession des Ursulines de Loudun, et des peines du Père Surin (1/4), Histoire de la possession des Ursulines de Loudun, et des peines du Père Surin (2/4), Histoire de la possession des Ursulines de Loudun, et des peines du Père Surin (3/4), et Histoire de la possession des Ursulines de Loudun, et des peines du Père Surin (4/4).