Extrait de "L'Homme de Dieu, en la personne du R.-P. Jean-Joseph Surin" par H.-M. Boudon :
R.-P. Jean-Joseph Surin |
La voix du Père Éternel se fait entendre sur cette sainte montagne, qui le déclare son Fils bien-aimé ; et au lieu de s'entretenir des grandeurs infinies que cette qualité lui donne, s'il fait entendre sa voix, c'est pour parler des tourments de sa mort, la même voix du Père Éternel déclare, qu'il l'a glorifié, et qu'il le glorifiera encore, et en présence de tout le Peuple qui est venu au-devant de lui, sur le bruit de la résurrection du Lazare, Jésus commence un discours où il parle de sa mort. Nous lisons en Saint Luc, qu'une grande foule de peuple s'étant assemblée autour de lui, en sorte qu'ils marchaient les uns sur les autres ; ayant commencé un long discours, tout à coup il s'écrie en interrompant la suite ; il y a un Baptême duquel je dois être baptisé ! Ô qu'il me tarde qu'il ne s'accomplisse. C'est qu'en ne soupirant et ne respirant qu'après les souffrances, il ne pensait et ne s'entretenait d'autre chose ; et il en était si fortement occupé et avec l'excès d'un amour si ravissant, que ses transports étaient admirables ; c'est une chose étonnante, mais qui fait toujours bien voir la pente incompréhensible qu'il avait pour les Croix. Cet aimable Sauveur parlant à ses disciples, selon ses inclinations ordinaires, des tourments du Calvaire, et Saint Pierre par un amour de tendresse lui ayant dit, à Dieu ne plaise Seigneur, cela ne vous arrivera point ; il s'en fâcha de telle manière qu'il l'appela : scandaleux et Satan, parce qu'il n'entrait pas dans sa plus pressante inclination ; il traite de la sorte son cher disciple, parce qu'il résiste à sa passion, et il ne laisse pas de l'aimer lorsqu'il blasphème et qu'il le renie. Ô mon âme ! il n'est pas possible de passer outre sans nous laisser aller à un amour si touchant. Arrêtons-nous ici par un amour capable d'arrêter tous les cœurs, et de les enlever entièrement, ô mon Sauveur ! c'est de la sorte que vous aimez les Croix ; mais c'est pour moi, c'est pour le reste des hommes que vous aimez à souffrir en cette manière. Ô Chrétien ! pourras-tu après cela te persuader que tu es uni à Jésus ; sans être uni à ses plus fortes inclinations ; sans avoir de l'amour pour les souffrances. Je vois bien (mon adorable Maître) la nécessité de la loi que vous imposez à tous ceux de votre suite, qui est de porter sa croix. Le Père Surin dans son union intime avec ce divin Chef, ne pouvait pas qu'il n'eût de grands mouvements pour les peines. Nous avons écrit dans notre livre des saintes voies de la Croix, qu'il fallait souffrir avec joie, avec étonnement, avec actions de grâces. Écrivons-en présentement la pratique dans le fidèle serviteur d'un Dieu crucifié.
Mais remarquons auparavant que si les ardents désirs d'une chose, en marquent le grand amour, il faut dire qu'il a bien aimé les souffrances, puisqu'il les a souhaitées avec tant d'ardeur. Il ne faut pas conseiller de les demander à Dieu dans les voies ordinaires, à cause de la faiblesse de la créature ; il suffit de les laisser entièrement entre les mains de la divine providence, pour souffrir sans réserve toutes les Croix qu'il lui plaira d'envoyer ; car il est infiniment juste que Dieu soit le maître absolu de toutes ses conduites, et la créature doit toujours être prête de s'y soumettre sans aucune exception. Mais il y a des âmes généreuses qui par des instincts particuliers du Saint-Esprit, désirent et demandent à Dieu avec instance la grâce et l'honneur des souffrances. (Je parle de la sorte, car en vérité c'est un honneur incomparable) Le Père Surin avait raison de dire, qu'il ne pouvait faire de prières pour la délivrance des ses maux ; mais qu'il en pouvait bien faire, et qu'il en faisait effectivement pour en obtenir de la bonté miséricordieuse de Dieu. Il les appelait les biens de la vie, et les consolations que l'on y peut goûter. C'est pourquoi il priait notre Seigneur de l'élever à la haute fortune de ses favoris, c'est-à-dire à tout ce qu'il y a de plus affligeant à la nature.
Il nommait les Croix le festin délicieux où étaient introduits ceux qui sont de la plus grande faveur auprès de l'adorable crucifié. Il a écrit que dans cet heureux état de souffrances, les sentiments du divin amour l'absorbaient comme dans un Océan de biens ineffables. Ce qui lui semblait une félicité commencée. Il souffrait dans des joies qui tenaient quelque chose de celles du Paradis. Il écrit ailleurs : Encore que la langue et la plus ne puissent expliquer les délicieux plaisirs que les peines lui donnent ; la béatitude de cet état est un bien si ravissant, que si Dieu ne le bornait, l'âme s'y trouverait comme perdue et abîmée : c'est ce qui lui fait encore écrire, qu'il ne peut représenter combien est suave l'état de son âme quoiqu'il soit combattu par les hommes, par les infirmités de la vie, par la privation des appuis que l'on y peut avoir, et des consolations que l'on y peut goûter ; qu'il souffrait non seulement en patience non seulement avec joie, mais dans une surabondance de joie. Ce fut dans le temps de ses plus grandes peines, qu'il composa ses Cantiques Spirituels, et lorsque le Démon tourmentait plus cruellement, durant les intervalles où il avait quelque liberté ; il en chantait de conformes à ses inclinations pour les souffrances, et qui marquaient admirablement bien les désirs véhéments d'endurer pour son Dieu.
Mais il faut remarquer, que la joie qui coulait quelquefois à torrents sur sa partie inférieure, et par rapport à l'état de son divin Maître sur le Thabor, était ordinairement renfermée comme celle de cet aimable Rédempteur, dans la partie suprême de son âme, et que même il ne l'y apercevait pas, comme il sera aisé de le voir en la troisième partie de cet ouvrage, où nous traiterons de ses peines. Ce qui lui a fait écrire que l'intérieur de l'homme est si éloigné de l'extérieur qu'à peine peut-il venir des nouvelles de l'un à l'autre, ainsi la joie ou la divine parole nous exhorte ; même dans les souffrances, et qui selon l'Apôtre, doit être une joie continuelle, c'est-à-dire qui ne nous quitte jamais, en quelque état pénible que nous puissions être, n'est nullement une joie sensible, mais une joie qui réside dans la cime de l'âme, et qui compatit avec toutes les plus grandes peines de la partie inférieure, non seulement sensitive : mais encore raisonnable, comme il se voit manifestement en notre adorable Sauveur ; à l'imitation duquel notre âme dans sa partie supérieure doit toujours être contente, quelque peine qu'elle souffre en sa partie inférieure : au reste la divine parole nous enseignant en l'Épître de Saint Jacques qui se nomme Catholique, c'est-à-dire générale pour tous les Chrétiens ; et non seulement pour quelques personnes d'un certain Pays ou de certaines conditions, qu'il faut tenir pour un sujet de très-grande joie, les différentes afflictions qui nous arrivent. Le Chrétien n'a donc plus à douter sur ce sujet, et il doit savoir qu'un des principes de sa créance, est que beaucoup de peines sont la matière de beaucoup de joie. N'est-ce pas encore dans le même sens que parle notre Maître en Saint Luc, lorsqu'entretenant ses Disciples de tout ce qu'il y a de plus affligeant dans la vie, comme d'y être haï, chassé, injurié, et d'y être même en abomination, il leur dit : Réjouissez-vous en ce jour-là, et soyez transportés de joie. En vérité ce divin Maître nous recommandant d'avoir une si grande joie dans des maux si sensibles, il nous fait bien voir que c'est un incomparable bonheur. Ô Chrétien ! où est votre foi ? où est votre Religion ? vous qui croyez si peu les vérités, et qui les pratiquez encore moins.
La vive foi du Père Surin lui causait la joie dont il a été parlé et en même temps une paix divine, qui selon la Doctrine de Saint Paul, surpasse tout sentiment ; aussi dans la meilleure partie de sa vie, les sens n'y ont eu aucune part. Il a dit que la paix qu'il avait dans son fond, était merveilleuse ; et il le fallait bien, puisque dans tous les changements de ses états extérieurs et intérieurs, elle ne la jamais quitté ; puisqu'il y a toujours été content ; qu'il y a toujours été dans une entière indifférence, ne voulant que la volonté de Dieu, et demeurant dans un entier assujettissement à sa grâce. C'était une de ses grandes maximes ; qu'il fallait venir au point ou rien de tous les accidents de la vie ne nous pût donner de l'émotion, par notre établissement en Dieu : il assurait aussi, qu'il ne s'était pas inquiété (il faut l'entendre dans son fond) de tous les tourments que les Diables lui avaient fait souffrir ; que quelquefois, même au milieu des troubles et d'une extrême tristesse qu'ils lui causaient, il expérimentait une grande douceur ; qu'il n'a trouvé l'oraison gère plus facile, que dans le temps ou les Démons l'agitaient, et lui roulaient le corps sur la terre : et que pendant même qu'il a souffert le plus par les impressions malignes d'infidélité, de désespoir, et de réprobation, qu'ils lui faisaient porter, il a toujours conservé cette paix qui surpasse tout sentiment.
C'est ce qui faisait qu'il ne se plaignait jamais ni de tout ce qui lui arrivait à l'extérieur, ni de tout ce qu'il souffrait dans l'intérieur ; dans tous les traitements qu'on lui a faits, sois pour l'éprouver, soit parce qu'on l'en jugeait digne, soit qu'ils lui soient arrivés par la malice des Hommes ou des démons ; jamais il n'a eu la moindre aigreur contre personne ; jamais il n'a fait paraître aucun mécontentement quand il a été libre, car quelques fois les Démons lui faisaient dire et faire plusieurs choses extérieurement, où il n'avait aucune liberté ; mais au contraire son esprit et son cœur ont toujours été remplis d'une douceur, et d'une charité incroyable pour toutes sortes de personnes (quoiqu'il s'aperçût très bien de tout ce qu'on lui faisait) son intérieur demeurant libre encore qu'il ne le parut pas, il y en à plusieurs exemples dignes d'une grande admiration. Entre ce grand nombre nous en rapporterons un bien surprenant et qui fera voir évidemment son extrême douceur et sa profonde paix dans tout ce qu'il y a de plus capable de donner de l'aigreur et du trouble. Comme ses peines ont duré bien des années et à l'égard de l'esprit et à l'égard du corps, il s'est trouvé en plusieurs endroits différents, et quelquefois chez des personnes de piété et de confiance ; ainsi, quoi que pour l'ordinaire il demeurât toujours dans les maisons de son Ordre (comme il était bien raisonnable) cependant on lui permettait en quelques occasions à cause des infirmités de son corps qui étaient extrêmes de prendre l'air dans quelque maison de personnes amies et pieuses. Or il arriva qu'étant dans un de ces lieux, ses infirmités ne lui permettant en aucune façon ni de marcher ni de se remuer, on fût obligé de lui donner une personne pour le servir dans ses besoins : et cette personne poussée par l'esprit du Démon, comme il a bien de l'apparence, entra dans une telle aigreur contre le Père, quoiqu'il ne lui en donnât pas le moindre sujet, que non seulement elle le maltraitait de paroles, mais encore d'effet, avec une cruauté qui donne de l'horreur, car c'était for ordinaire de la battre à coup de poing, et de le souffleter impitoyablement, y ajoutant souvent des coups de bâtons qu'elle lui déchargeait avec furie sur la tête et sur le visage ; on ne peut nier que ce procédé ne soit tout-à-fait extraordinaire, car a-t-on jamais ouïe dire qu'un pauvre malade dans une chambre sans pouvoir se remuer, au lieu d'être servi et assisté dans ses besoins, par une personne destinée à son service, en soit traitée cruellement ? Ce serait encore une assez grande inhumanité que d'abandonner un pauvre infirme sans aucun secours, particulièrement quand il est incapable de s'en procurer par soi-même ; mais de le battre, et d'une manière cruelle, je ne sais pas où l'on pourra trouver une chose semblable.
Voilà l'état où était réduit ce bon Père ; et qu'avec tout cela portait alors des peines intérieures épouvantables, comme nous le dirons avec le secours divin voilà une croix incomparable, il est vrai que le Saint Homme Job miroir de patience, était moqué de sa femme et des ses amis au milieu de toutes ses peines ; mais nous ne lisons pas qu'il en fût battu. Nous lisons bien du Job de nos derniers siècles, le Bienheureux Jean de la Croix (car c'est ainsi qu'i a été appelé avec grande justice) que la Divine Providence en disposant de la sorte, permit que ceux qui l'assistaient dans sa dernière maladie, le traitèrent d'une manière très rude et très affligeante, mais non pas qu'ils l'aient jamais frappé, ni à coups de main ni à coups de bâton. Ô fidèle serviteur de Dieu ! vous pouviez bien dire pour lors avec le Prophète : Les méchants m'ont imprimé des coups sur le dos, ils y ont tiré de longs sillons ; je payais ce que je ne devais pas, mais c'est pour l'amour de vous que j'ai souffert cet opprobre et que j'ai le visage couvert de contusion. Ajoutez-y : des meurtrissures sanglantes. Les Maîtres s'apercevaient bien de ces meurtrissures. Mais Dieu qui en voulait faire un spectacle d'admiration à ses Anges qui en étaient les seuls témoins, permettait qu'on crût que par quelque accident, soit de chute ou autrement, le Père se les eût faites lui-même ; après tout, il n'avait qu'à dire une seule parole, qui eut découvert la vérité des choses, pour être aussitôt délivré d'un martyre si sensible, et qui a duré si longtemps ; mais cet homme de douleurs à l'imitation de son bon Maître, se taisait, et comme un innocent Agneau qu'on mène à la boucherie, il n'ouvrit pas la bouche pour crier ou se plaindre des mauvais traitements de ce cruel serviteur, qui très assurément aurait souffert, si le Père en eût fait connaître la moindre chose. Jamais il n'en dit rien ; jamais il ne lui en fit plus mauvais visage. Ô patience achevée et tout-à-fait admirable ! ah ! qu'il faut bien dire que son amour pour les souffrances était inépuisable ! Mais quelle douceur. Quelle charité. Cependant Dieu qui souffre qu'on maltraite ses saints pour un temps, en sait bien faire la justice lui-même ; car ce serviteur qui avait fait souffrir tant de douleurs à la tête du Père, par les coups qu'il lui donnait, mourut d'un furieux mal de tête, sans aucune fièvre, ni aucun indice d'autre maladie.
C'est ainsi que le Père Surin possédait son âme en patience, dans l'ardent amour qu'il avait pour les souffrances, et qui lui venait de la haute estime qu'il en faisait. Voici ses sentiments sur ce sujet : Il se plait dans une lettre, de ce qu'il ne trouve point de terme qui puisse expliquer l'estime qu'il a pour les croix, et les hautes idées qu'il a conçues des trésors qui sont renfermés dans les peines : Il proteste que tout ce qu'il en dit est bien au-dessous de ce qu'il en connaît, et qu'après en avoir dit tout ce qu'il en peut dire, il n'est pas encore satisfait. Il assure que les actions des saints le consolent beaucoup ; mais surtout, celles de saint François d'Assise et de sainte Thérèse (qu'il lisait en particulier) parce qu'elles expriment bien mieux que toutes ses paroles, l'estime et l'amour qu'ils ont eus pour les souffrances, et les goûts délicieux qu'ils y trouvaient ; que ces goûts ne sont pas des consolations sensibles, des élévations extraordinaires, ou des grâces gratuites ; mais des grâces qui portent à Dieu et qui séparent de la créature. Toutes mes peines, disait-il, sont un effet des plus grandes grâces et des plus grandes obligations que j'ai à la bonté de Dieu ; ce qui m'éloigne bien des sentiments de ceux qui me portent compassion ; il assurait que l'assortiment parfait de toutes les grâces est quand notre Seigneur permet pour ornement, que l'ont ait part à ses croix ; et que l'âme parmi toutes les richesses de la grâce, soit assez heureuse, d'avoir la croix d'une fausse réputation, qui la rende méprisable devant les hommes ; mais que si elle arrive au point d'être suspecte, et d'être tenue pour méchante et abominable, on peut bien dire alors, que sa bonne fortune est jusqu'à son comble.
Quel sujet de bénédiction pour moi, s'écrit-il, de me voir je jouet des Hommes et des Diables. Je vois combien les voies de Dieu sont différentes des nôtres ; le commun des hommes qui me voient, regardent mon emploi de Loudun comme un malheur ; pour avoir été le sujet du mal qui m'a tant tourmenté, et moi tout au contraire ; je vois et j'expérimente manifestement que tout le mal qui en est venu est extérieur, mais que le bien qui m'en est arrivé et qui ne se voit pas, est plus grand que l'on ne peut penser. Je ne voudrais pas changer ma fortune avec une autre, ayant une forme persuasions qu'il n'y a rien de meilleur, que d'être réduit à de grandes extrémités, et qu'à proportion des humiliations, des rebuts, des délaissements et autres souffrances, les bénédictions et les trésors de grâces donnent abondamment. C'est pourquoi quand on lui parlait des Personnes qui avaient de grandes croix, il disait : C'est ce qui me fait espérer qu'il leur arrivera des grands biens de grâces. Un de ses souhaits était que ceux qui ont à souffrir, connussent le trésor des croix ; qu'ils sussent que c'est avoir Jésus dans le sein ; que se propres douleurs qui ont été si précieuses à la divine Majesté leur sont appliquées, et comme imprimées. Il remarquait que pour bien avoir ces vues il ne fallait pas regarder les causes secondes qui nous font souffrir, mais Jésus seul, et il soupirait de ce que la doctrine de la croix (qui est la première leçon que notre divin Maître nous fait) est la dernière que nous apprenons. Le grand Apôtre l'entendait parfaitement dit un ancien, puisqu'il fait de ses croix le premier caractère de son Apostolat, et qu'il le met auparavant les signes et les miracles. Les preuves de mon Apostolat, écrit cet homme Apostolique aux Corinthiens, ont paru par une continuelle patience. Le Père Surin avait grande raison d'appeler les souffrances sa bonne fortune ; puisque le même Apôtre y met toute sa gloire ; parlant de ceux qui travaillent dans des pareilles fonctions que les siennes ; il dit, sont-ils ministres de Jésus-Christ ; je le suis aussi, et pour parler comme un insensé, je le suis plus qu'eux ; j'ai supporté plus de travaux ; j'ai été plus souvent en prison, j'ai reçu beaucoup plus de blessures.
Enfin l'amour du Père Surin pour les souffrances, l'en rendaient insatiable, à l'exemple de notre Seigneur Jésus-Christ qui après avoir souffert ce qui surpasse toute pensée, en désirait davantage (c'est en ce sens que Saint Bernard explique la soif de notre Sauveur sur la croix) et comme saint François Xavier qui criait dans les consolations, Seigneur c'est assez, et dans les peines, Seigneur encore plus. Le Père disait aux Démons, que les peines qu'ils lui faisaient ne servaient qu'à lui en augmenter le désir. Tous les tourments que tu me fais disait-il à Isacaron, tous ceux qui me menacent, ne font que me donner de nouvelles envies d'endurer et de souffrir, je m'offre à Dieu tout de nouveau ; pour souffrir en toute manière. Au milieu des torrents de peines qui l'inondaient, il demeurait toujours plus animé à porter de nouvelles croix, cet amour pour les peines croissait à mesure qu'elles s'augmentaient, il protestait que ses désirs pour les tourments n'avaient aucune borne ; et il disait que notre Seigneur ne l'avait pas assez consolé sur ce sujet, c'est-à-dire qu'il ne lui avait pas assez fait souffrir de croix ; qu'elles faisaient en lui comme une heureuse antipéristase, qui servait à lui accroître l'ardeur de son amour, par une plus grande abondance de grâce ; qu'il n'y avait que du triomphe à être décrié et maltraité ; que les enfants de Dieu, quoiqu'il les aime beaucoup, ne sentaient jamais le vieux battu (ce sont ces termes) mais qu'ils doivent bien prendre garde que la tiédeur ne s'y glisse, parce qu'elle leur serait une source de grands maux. De vrai quand nous lisons dans l'Apocalypse les menaces que Dieu fait à l'Ange ou l'Évêque d'Éphèse à cause qu'il s'était relâché de sa première ferveur, il faut être bien assuré pour ne pas trembler, si l'on considère que cet Évêque était Saint Timothée, à qui l'Apôtre donne tant d'éloges, et qui effectivement était un grand Saint et un véritable homme Apostolique, on ne peut croire autre chose de cet homme de Dieu, car l'Apôtre le nomme ainsi, sinon que par inadvertance il s'était laissé aller à quelque tiédeur légère, et cependant Dieu le menace fortement de le châtier, s'il ne fait pénitence, et ne rentre dans sa première ferveur, quoiqu'il eut beaucoup souffert pour son nom.
Reportez-vous à Éclaircissement touchant la possession des Religieuses Ursulines, et de quelques autres personnes de la Ville de Loudun, Prière dans l'affliction ou Credo de la douleur, De l'amour du Père Surin pour la pauvreté, dans l'union avec Notre-Seigneur Jésus-Christ, De l'amour étonnant du Père Surin pour l'abjection, dans l'union avec Notre-Seigneur Jésus-Christ, De l'amour du Père Surin pour l'humilité, dans l'union avec Notre-Seigneur Jésus-Christ, Du grand Amour du Père Surin pour les Saints Anges, dans l'union avec notre Seigneur Jésus-Christ, De l'Amour du Père Surin pour tout ce que Notre-Seigneur a aimé, et premièrement de sa grande dévotion à la très-sainte Vierge, De la vie parfaite, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Histoire de la possession des Ursulines de Loudun, et des peines du Père Surin (1/4), De la vie intérieure, et de la familiarité avec Jésus-Christ, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, et Science expérimentale des choses de l'autre vie, acquise par le Père Jean-Joseph Surin.