samedi 31 mars 2018

Méditation sur les souffrances de Notre-Seigneur Jésus-Christ : VOILÀ L'HOMME





SEPTIÈME MÉDITATION

Pilate montrant Jésus aux Juifs leur dit : VOILÀ L'HOMME



« Pilate sortit encore une fois et dit aux juifs : le voici ; je vous l'amène afin que vous sachiez que je ne trouve en lui aucun crime. Jésus sortit donc, portant une couronne d'épines et un vêtement de pourpre (il y a lieu de croire qu'il avait aussi conservé le roseau, puisqu'il paraissait comme un roi d'ignominie et de douleur) et Pilate leur dit : voilà l'homme. »



MÉDITATION


Sur ces paroles de Pilate : voilà l'homme.



Premier point. Jamais paroles furent-elles plus capables de réaliser pour l'homme le précepte des anciens sages, et de l'instruire dans la connaissance la plus approfondie de lui-même que ces paroles de Pilate : Voilà l'homme, lorsqu'il amène devant les Juifs, Jésus-Christ, les mains liées, le corps flagellé et le visage couvert de crachats, revêtu d'un manteau de pourpre, portant une couronne d'épines et un roseau pour sceptre. N'est-ce pas, en effet, là, l'homme pécheur, l'homme de la nature dégénérée, l'homme dont les esprits de ténèbres lient et enchaînent la liberté, l'homme dont les prophètes s'écrient qu'il ne reste plus rien de sain en lui depuis le sommet de la tête jusqu'à la plante des pieds, l'homme tout meurtri sous les coups des passions et tout couvert de l'opprobre du vice, l'homme déchu de sa grandeur première, le souverain dérisoire de la nature qui n'a plus conserve d'autre vêtement de gloire que les haillons de sa misère, d'autre diadème que les sollicitudes de la vie, d'autre bâton de commandement qu'un faible roseau, symbole du néant de ses forces.

Second point. Voyez si ce n'est point là, trait pour trait l'image de l'ancien Adam , après sa révolte contre le ciel. Rapprochez ces liens de corde dont les mains de Jésus sont garottées par la malice des Juifs, de ces liens invisibles dont l'ancien Adam est enchaîné par la malice des démons ; rapprochez ces meurtrissures et ces crachats, dont le corps de Jésus est couvert, de la plaie profonde qui ne fait plus du corps de l'ancien Adam qu'un abyme de corruption et de pourriture ; rapprochez ce manteau d'écarlate, symbole d'une royauté dérisoire qui couvre à peine la nudité de Jésus, de ce vêtement non moins dérisoire, le seul, ce semble, que la nature voulut offrir à l'ancien Adam pour lui dérober la honte de sa propre nudité (Genes, c. 2) ; rapprochez cette couronne d'épines qui ceint la tête ensanglantée de Jésus, de ces ronces et de ces épines, l'héritage de l'ancien Adam ; rapprochez enfin ce sceptre de roseau que les juifs mettent dans les mains de leur victime, de la sorte d'empire que le démon et ses anges de ténèbres lèguent à l'ancien Adam, pour prix de sa rébellion envers le Ciel. Et puis, dites-nous si ces traits de ressemblance ne seraient pas seuls suffisants pour établir une conformité d'expiation entre l'ancien, et le nouvel Adam, entre l'homme coupable et l'homme victime. Donc, voilà le genre humain tout entier expiant dans son chef la juste peine de son orgueil.
Et maintenant qu'accablé sous le poids de ses expiations, l'homme satisfait en la personne de Jésus-Christ, à la justice de son père, connaissez, ô chrétien, comment le prix de sa croix est acquis au genre-humain et comment le genre-humain, ce géant de la création, est relevé de la poussière dans laquelle la rage de l'enfer le tenait renversé. C'est en voulant usurper le souverain domaine de Dieu que l'homme était tombé de la hauteur du ciel ; c'est en prenant la forme de l'homme dans l'état d'anéantissement où le péché l'avait réduit que le fils de Dieu change le sort du genre humain et lui mérite le pardon et la miséricorde.
C'est en unissant en lui les deux natures divine et humaine pour n'en plus taire qu'un seul et même Christ, qu'il trompe l'envie des démons qu'il leur persuade que le Messie si longtemps attendu par les patriarches, ou prédit par les prophètes n'est que l'homme Adam dont ils ont tenté la faiblesse, dont ils ont vaincu la résistance, dont ils ont aboli la souveraineté, dont ils ont fait la victime de l'éternelle mort, et ils ne voient pas, sous la ressemblance de cet HOMME PÉCHEUR, L'HOMME DIEU communiquer à chacune de ses souffrances, une telle vertu divine, que ses liens font tomber ceux qui rendaient notre nature captive de la mort et de l'enfer, que ses meurtrissures guérissent celles que le péché nous avait faites, que le manteau dérisoire dont il est revêtu couvre la nudité de nos âmes, que sa couronne d'épines se change pour le genre humain en une couronne de gloire, et que son sceptre de roseau devient dans ses mains un sceptre de miséricorde pour les bons, qui relève leur éternel empire, et un sceptre de justice pour les méchants qui brise à jamais toutes leurs espérances.

Troisième point. C'est à la porte du Prétoire, lorsque Jésus-Christ s'y montre sous ces mémorables rapports, que je dois venir apprendre à me connaître moi-même. Que sont tous les livres des philosophes, devant l'instruction que Jésus-Christ nous donne lorsque Pilate le mène devant les Juifs ainsi revêtu des marques d'une royauté dérisoire ? VOILÀ L'HOMME PÉCHEUR, sans distinction d'état, de fortune, de crédit ou de savoir. Je serais assis sur le trône du monde, je commanderais à tous ses habitants d'un signe de tête, que je n'en serais pas moins, en qualité d'homme pécheur, esclave de la mort et de l'enfer, qu'un vêtement de dérision siérait bien à mon état de déchéance morale, qu'une couronne d'épines et un roseau pour sceptre, conviendraient à ma royauté d'un jour, mêlée de chagrin et de servitude ; sans consolation et sans espérance.
Je réunirais les richesses des deux mondes et tout l'or enfoui dans les entrailles de la' terre, que dans l'état de péché, je ne serais que le possesseur dérisoire de richesses factices et d'un héritage de néant. Je multiplierais en vain les diamants autour de ma tête, je m'appuierais en vain sur la solidité de ma fortune ; que dans l'état de péché, les diamants auraient pour moi le piquant des épines, et ma fortune ne serait qu'un faible roseau capable, tout au plus, de percer la main qui voudrait en faire son appui. J'aurais enfin tout le savoir des plus illustres génies, je n'ignorerais aucune des lois ou des phénomènes de la nature ; comme Salomon, je pourrais disputer de la cause et des effets de tous les êtres créés depuis le cèdre du Liban jusqu'à l'hysope, je joindrais à cette nomenclature celle de toutes les autres connaissances humaines, que dans l'état de péché, je n'en serais pas moins couvert du manteau d'une science dérisoire ; toutes les couronnes de lauriers ne me sauveraient pas des épines de la vie et tout mon savoir n'aurait pas même la solidité d'un roseau pour me soutenir contre la violence de mes propres passions.


Considérations.
Considérez 1°. Que l'homme, dans l'état de péché, n'a plus rien qui commande le respect et la vénération du ciel et de la terre, qu'il n'est plus qu'un souverain dépossédé de son empire.
Considérez 2°. Que si le fils de Dieu s'est soumis comme victime de nos péchés à n'offrir plus au monde que l'image d'une grandeur dont se jouent, à l'envi, l'enfer et les méchants, il n'est pas d'empire ni de grandeur véritable, qui puisse s'allier dans l'homme avec l'état de péché.
Considérez 3°. Qu'il ne peut donc exister de salut, de perfection et de bonheur pour l'homme de la nature, que dans son union avec l'homme de la grâce, l'homme-Dieu, victime d'expiation pour les péchés du monde.


Résolutions et Prière. C'en est donc fait, ô mon divin Jésus, vous m'instruisez suffisamment sur la vraie science de l'homme. Je n'en veux pas d'autre, celle-là me suffit. Elle m'apprend tout ce qu'il faut que je sache pour bien juger de la vie présente dans ses rapports avec la vie future. Quoi ! vous le fils de Dieu, en vous unissant au fils d'Adam pour ne plus faire des deux natures divine et humaine, qu'un seul et même Christ, vous n'avez vu dans l'homme qu'un roi détrôné dont vous ne pouviez relever la grandeur et la gloire que par le mérite de vos souffrances et de votre croix, et je voudrais me réhabiliter dans tous les droits de ma vocation première, sans peine, sans travaux, sans épreuves ; et je placerais, un seul instant, l'estime de moi-même dans les biens extérieurs que le monde préconise, mais qui ne sont pas moi...., mais qui n'ont rien de commun avec moi ?... Non, mon divin Jésus, quelque coupable que je sois d'ailleurs à vos yeux, je ne tomberai pas du moins dans cet excès de démence, de prendre, par exemple, l'ornement extérieur de l'homme pour l'homme même, la recherche de sa parure pour la droiture de sa raison, l'éclat de son costume pour celui de sa sagesse, la magnificence de sa maison pour la sublimité de son âme, le nombre de ses serviteurs pour celui de ses vertus, la somme de ses richesses pour celle de ses bonnes œuvres ; je ne tomberai pas non plus dans cet excès d'ingratitude, de traiter en moi l'homme fait à votre image et à votre ressemblance immortelle, l'homme que vous avez racheté à un si haut prix, l'homme dont vous avez à ce point honoré la nature, que vous l'avez éternellement unie en vous à celle du fils de Dieu, je ne tomberai pas non plus, dis-je, dans cet excès d'ingratitude de traiter en moi cet homme, comme font les enfants irraisonnables ces figures qu'ils s'étudient à décorer sans cesse de puériles atours. Ah ! vous m'apprenez que j'existe pour une plus noble vocation. Que tous mes vœux, Seigneur, soient de la remplir fidèlement.





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jeudi 22 mars 2018

Méditation sur les souffrances de Notre-Seigneur Jésus-Christ : Jésus-Christ couronné d'épines









SIXIÈME MÉDITATION


Jésus-Christ couronné d'épines



« Les soldats du gouverneur ayant amené Jésus dans la cour du Prétoire, assemblèrent là autour de lui toute la compagnie, lui ôtèrent ses habits et le revêtirent d'un manteau d'écarlate. Puis ayant fait une couronne d'épines entrelassées, ils la lui mirent sur la tête, avec un roseau à la main droite ; et s'agenouillant devant lui, ils se moquaient de lui, et ils commencèrent à le saluer en venant à lui, et lui disant : Salut au Roi des Juifs, et ils lui donnaient des soufflets, lui frappaient la tête avec un roseau, lui crachaient au visage, et se mettant à genoux devant lui, il l'adoraient ».


MÉDITATION

Sur Jésus-Christ couronné d'épines,

objet des vœux à la fois dérisoires et homicides de ses ennemis



1er Point.
Une grande vérité morale, trop oubliée des enfants des hommes, et qui suffirait seule pour nous faire connaître toute la malice du péché, nous est rendue manifeste par l'histoire des divers genres d'outrages faits à Jésus-Christ dans le cours de sa Passion. Remarquez que si tous les crimes s'y trouvent réunis, il en est deux qui dominent sur tous les autres, l'oppression et la soif du sang, jointe à la dérision et au mépris de l'innocence opprimée.
Rien en apparence ne parait moins fait l'un pour l'autre, que le rire des impies et leurs poignards, et cependant tous les deux s'accordent si bien ensemble, qu'on ne cesse de les trouver réunis dans l'histoire des impies de tous les âges, chez qui, se jouer des principes de l'homme religieux ou de ses droits les plus sacrés, le tourner en dérision et en mépris dans sa personne, ou le perdre dans sa fortune, dans son honneur et dans sa vie, ne sont que les actes d'une même volonté coupable, modifiée selon les circonstances. Ainsi voit-on les impies du temps des prophètes se rire d'abord de l'austérité des mœurs de ces oracles de la divine Sagesse, se moquer ensuite de leurs discours, voner leurs exemples au ridicule, les accuser successivement d'orgueil et de bassesse, d'esprit de révolte et d'esprit de servitude, de fanatisme et de superstition, et après avoir en vain épuisé contr'eux les railleries et les sarcasmes sans avoir pu les faire faiblir dans leur zèle pour la Religion, les impies recourent aux injures, aux insultes et aux outrages, ils excitent contre les prophètes la jalousie des Gouvernements, ils les déclarent suspects à l’État, et s'ils en ont le pouvoir, ils les font bannir avec Élie, ou jeter dans la fosse aux lions avec Daniel, ou scier en deux par le milieu du corps avec Isaïe. Ainsi voit-on, après Jésus-Christ et dès les premiers siècles du Christianisme, ce que l'on verra sur la terre jusqu'à la fin des siècles, les impies toujours prêts à se moquer de la simplicité des justes, à les opprimer s'ils persévèrent, à les immoler, enfin, s'ils gênent leur impiété. De-là l'ordre de ce cruel tyran qui faisait enduire les chrétiens de suif, de poix, et de diverses matières inflammables pour que, cloués et brûlés vifs au coin des rues, ces enfants de lumière servissent dérisoirement à éclairer les passants pendant la nuit...
Mais d'où vient cette persécution continuelle des méchants contre les bons, des impies contre les hommes craignant Dieu, si ce n'est de l'enfer et des esprits de ténèbres qui l'habitent ? C'est aux démons que le pouvoir est donné de tenter les justes et de séduire, s'il était possible, les élus même de Dieu ; de détruire dans le genre humain tout ce qu'ils ne sauraient y corrompre, pour n'avoir plus parmi les hommes que des complices ou des victimes ; tel est le vœu des démons, et tel doit être celui des impies qui ne forment avec eux qu'un seul et même esprit: et lorsque de la réunion de tant de volontés dépravées il n'en sort pas la destruction de tous les justes, c'est que la même Providence qui met des bornes à la fureur de flots, en met à celle des méchants, et qu'ils ne sauraient non plus franchir, que la mer ses barrières ; car si leurs moyens égalaient leurs désirs, ah ! depuis long-temps la religion serait exilée de la terre, le nom de Dieu proscrit de l'univers et la race des justes anéantie.

2e point. Faut-il donc s'étonner qu'en ayant reçu le pouvoir du fils de Dieu même, les démons et les hommes animés de leur esprit, aient réuni contre lui dans sa Passion tous les efforts de leur malice pour le tourner en dérision, l'avilir et le perdre. C'est ce que les prophètes avoient annoncé depuis plusieurs siècles, et il n'eût tenu qu'aux Juifs d'ouvrir le livre de leurs oracles pour y lire l'histoire de leur aveuglement et de leurs complots, celle de leur déicide et de leur réprobation... Écoutez les paroles du livre de la Sagesse, chap. II. « Les méchants ont dit dans l'égarement de leurs pensées : (c'est le prophète qui rapporte leur langage insensé) Le  temps de notre vie est court et fâcheux. L'homme n'a point de remèdes contre le coup de la mort, et on ne sait personne qui soit revenu du fond du tombeau. Nous sommes nés comme à l'aventure, et après la mort nous serons comme si nous n'avions jamais été ». — Doctrine du néant prêchée par les impies de tous les pays et de tous les âges ; il n'est point d'âme corrompue qui ne doive s'en accommoder puisqu'il n'en est pas de plus accommodante pour le vice. Loin donc de s'en affliger comme du plus grand des maux qui pût accabler la nature humaine. — « Venez donc, ajoutent les méchants, jouissons des biens présents, hâtons-nous d'user des créatures pendant que nous sommes jeunes, enivrons-nous des vins les plus exquis, couronnons-nous de roses avant qu'elles se flétrissent ; laissons partout, sur les traces de nos pas, le souvenir de nos voluptés, parce que jouir des plaisirs des sens est nôtre sort et notre partage (Livre de la sagesse, chap. II. Toutes les paroles de l'Écriture que nous citons dans le second point, sont tirées du même chapitre). » — C'est-à-dire que selon ces impies si fréquents de nos jours, l'homme n'a point d'autre bonheur à prétendre que celui des sens, ni d'autre vocation à remplir sur la terre que celle de la brute. Mais dès-lors que l'amour et la crainte de Dieu n'existent plus pour eux, dès-lors qu'ils font de ces principes la base de leur croyance, pour quoi se gêneraient-ils dans les penchants de leur nature corrompue ? Pourquoi, encore, se défendraient-ils d'une injustice, s'ils y trouvent l'intérêt de leur fortune ou celui de leurs vices ? Or, le premier de leurs intérêts, celui du moins que l'enfer leur rend le plus désirable, serait d'asservir le genre humain à leur impiété. — « Que nul ne se dispense, disent-ils, de prendre part à notre débauche. »  leur résiste : — Et si le juste leur résiste : — « Opprimons le juste, s'écrient-ils, que notre force soit la loi de la justice, car ce qui est faible n'est bon à rien » ; En quoi, certes, leurs actions sont conformes à leurs principes. Mais si ces impies rencontrent sur leurs pas le Juste par excellence, le chef de tous les justes, le fils de Dieu et le fils de l'homme, que feront-ils à cette vue ? Le même prophète nous en instruit. « Faisons tomber le juste dans nos pièges, diront-ils, parce qu'il nous est incommode, qu'il nous reproche la violation de la Loi, et qu'il nous déshonore en décriant les fautes de notre conduite. Il assure qu'il possède la science de Dieu et il s'appelle le fils de Dieu. Il est devenu le censeur de nos pensées mêmes. Sa seule vue nous est insupportable, parce que sa vie n'est point semblable à celle des autres hommes et qu'il suit une conduite toute différente. Il nous considère comme des gens qui s'occupent à de vains et périssables objets. Il s'abstient de notre manière de vie comme d'une chose impure. Il préfère ce que les justes attendent à la mort, et il se glorifie d'avoir Dieu pour père » — Ainsi les méchants haïssent en Jésus-Christ et en ses saints, ce que l'enfer y déteste, l'homme grand par sa vertu, grand par sa foi, grand par son union avec Dieu, l'homme héritier des promesses éternelles. De-là l'envie des méchants, de-là leur jalousie suscitée par celle des démons, et qui leur fait concevoir le projet d'anéantir en la personne du juste par excellence tout espoir pour les justes en général, soit d'une protection présente, soit d'une récompense future : « Voyons, disent-ils, si les paroles du juste sont véritables, éprouvons ce qui lui arrivera et nous verrons qu'elle sera sa fin. » Ce qui nous atteste que les méchants n'ont, au fond, rien d'assuré dans leurs voies et qu'ils ignorent eux-mêmes si le juste ne sera pas sauvé tôt ou tard de leurs coups. C'est un essai redoutable qu'il veulent faire de leurs forces contre celles du Ciel. « S'il est véritablement le fils de Dieu, continuent-ils, Dieu prendra sa défense et il le délivrera des mains de ses ennemis. Examinons-le par les outrages et par les tourments, afin que nous connaissions quelle est sa douceur, et que nous fassions l'épreuve de sa patience. » — Malheureux qui ne se reconnaissent pas eux-mêmes, dans ce dessein de leur malice, comme les instruments d'une Providence qui veut, en effet, éprouver en ce monde la douceur et la patience des bons, par la fureur et la violence des méchants ; ce qui fait que ceux-ci ne s'arrêtent point dans la carrière de leurs crimes et que prenant l'impassible constance du juste pour le plus sensible des affronts, ils ne gardent plus de mesure pour le perdre, « Condamnons-le à la mort, s'écrient-ils, et à la mort la plus infâme. » — Voilà le cri de la colère et de la rage ; voici derechef le langage du doute et de l'incertitude, peut-être celui de l'athéisme et du blasphème : « Si ses paroles sont vraies, Dieu prendra soin de le délivrer ». De telle sorte que s'il entre dans les vues de la Providence, ce qui tient évidemment à la fin même de la régénération évangélique, d'éprouver dans cette vie la constance du juste par le triomphe des méchants ; ceux-ci croiront avoir, seuls, raison et contre Dieu et contre le juste: « ils ont eu ces pensées, dit le prophète, parce que leur propre malice les a aveuglés ».

3e point. Mais si les méchants sont ainsi les ennemis des bons, ne nous est-il pas glorieux d'avoir à souffrir de leur impiété ce que Jésus-Christ et tous les saints en ont souffert ? ne savons-nous pas qu'en qualité, surtout, de chrétiens, nous avons un droit particulier à leur dérision et à leurs outrages ; et que la même couronne d'épines qu'ils ont mise sur la tête du Saint des saints, ils nous la destinent, si nous voulons être ses disciples ? Mais quoi ! ne vaut-il pas mieux porter avec Jésus-Christ cette couronne d'épines qui promet l'immortalité des justes et qui ceint nos têtes d'un diadème de vertus, que cette couronne de roses, qui se flétrit du matin au soir sur la tête des pécheurs, et qui ne leur promet que la flétrissure du vice ? Quoi ! ne vaut-il pas mieux n'avoir point avec Jésus-Christ l'opinion des mondains pour soi, que d'en être l'idole, sans avoir pour soi Jésus-Christ ? Mais les mondains se riront de mes principes, ils se moqueront de ma simplicité. » S'ils vous traitent comme ils ont fait Jésus-Christ, qu'avez-vous à vous plaindre ? Leur désolante morale balancerait-elle dans votre esprit celle de l'Évangile ? Le néant de leurs espérances futures qui ne vous offrent d'autre sort au-delà du tombeau que celui de la brute, l'emporterait-il dans votre cœur sur les espérances à venir que le fils de Dieu vous a conquises par ses souffrances et par sa croix, et qui vous assurent après la vie la communion des Anges et des saints, et Dieu même, pour héritage ?


Considération. Considérez, 1°. Combien les ris insensés des impies doivent vous faire horreur, puisqu'ils se trouvent mêlés aux injures et aux outrages sanglants dont Jésus-Christ est accablé dans sa Passion.
Considérez, 2°. Que l'impiété se ressemblant à elle-même dans tous les temps, elle doit être de nos jours, la même institutrice de matérialisme et d'athéisme que du temps de Salomon et des prophètes ; elle doit persécuter de même Jésus-Christ jusqu'à la fin des siècles, soit dans sa personne soit dans son Église. S'il en était autrement, et si les prêtres ou les disciples fidèles pouvaient ne rien craindre de la part des impies ; les oracles sacrés ne seraient point véritables, lorsqu'ils nous assurent que les bons ne cesseront d'avoir à souffrir sur la terre de la malice des méchants jusqu'au grand jour du Seigneur.
Considérez 3°. Combien il vaut mieux, ainsi que nous l'avons dit, porter avec Jésus-Christ cette couronne d'épines qui promet l'immortalité des justes, et qui ceint nos têtes d'un diadème de vertus que cette couronne de roses qui se flétrit du matin au soir sur la tête des pécheurs et qui ne leur promet que la flétrissure du vice.


Résolutions et prière. Ô mon divin Sauveur pourrais-je donc hésiter entre ces deux couronnes ? C'en est fait. Votre loi l'emporte dans mon cœur, sur toutes les dérisions des mondains ; et votre exemple m'entraîne sur la trace de vos pas. Maintenant que je connais le vœu d'extermination des impies, contre ceux qui vous sont acquis par le mérite de vos souffrances et de votre croix, je saurai l'estime que je dois faire de leurs suffrages ; je saurai ce que valent leurs applaudissements et leurs mépris. Les applaudissements de ceux qui vous blasphèment! Ah ! défendez-moi, Seigneur, d'une telle honte. Le mépris de ceux qui vous méprisent ! C'est là ce qui sied bien à vos disciples. C'est là ce que mon cœur préfère. Fortifiez-moi dans ces généreuses résolutions, ô mon divin Jésus, afin que sous un chef couronné d'épines, dont le corps est rempli de meurtrissures et le visage rougi de sang pour l'expiation de mes péchés, je ne craigne d'autre mal des impies que de les avoir pour approbateurs, je ne rougisse devant le monde que de ses propres scandales, et je n'ambitionne d'autre bonheur que celui de pouvoir annoncer dans toute ma conduite, la vertu des souffrances et de la croix de Jésus. Ainsi-soit-il.





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jeudi 15 mars 2018

Méditation pour le Jeudi de la quatrième semaine de Carême : Jour de mort








LE JEUDI DE LA QUATRIÈME SEMAINE DE CARÊME

Jour de mort


PRATIQUE

Commencez la journée par la pensée de la mort, avec ses plus tristes et ses plus affreuses circonstances, et faites en sorte que cette pensée ne soit pas stérile. Vous avez dû hier, en vous mettant au lit, penser que vous entriez dans le tombeau ; sortez-en aujourd'hui comme si vous ressuscitiez pour aller entendre l'arrêt irrévocable d'une vie ou d'une mort éternelle. Faites toutes vos actions comme vous voudriez les avoir faites à ce moment redoutable.


MÉDITATION

Jésus étant près des portes de la ville de Naïm, il arriva qu'on portait en terre un mort, qui était fils unique de sa mère. (Luc, 7)


1er point. Allez en esprit aux portes de cette ville ; on porte un mort en terre, et Jésus-Christ le ressuscite ; il ménage avec tant de sagesse les mouvements de nos cœurs, qu'après les avoir abattus par la terreur d'une mort certaine, il les relève par l'espérance d'une vie nouvelle. La crainte de la mort et de ses suites terribles nous doit faire entrer dans les frayeurs salutaires de la pénitence ; et l'espérance de la vie et des récompenses éternelles, que Dieu a promises aux justes et aux pénitents, doit nous engager à faire de bonnes œuvres pour les mériter. La mort, qui n'a pas épargné ce fils unique à la fleur de son âge, ne m'épargnera pas aussi. L'incertitude de son heure, le terrible jugement qui la suit, la corruption, les vers, l'éternité bienheureuse ou malheureuse dont cette mort décide, tout me confirme dans la crainte, tout m'engage à y penser sérieusement, et à me préparer tous les jours de ma vie pour mériter une résurrection glorieuse.


Le mort se leva ; il commença à parler, et Jésus le rendit plein de vie à sa mère.


2e point. Voilà les larmes de tristesse changées en larmes de joie, et les gémissements en réjouissances publiques et en actions de grâces. Quand Jésus-Christ s'approche de nous, quand il nous regarde, quand il nous touche, quand il nous parle en souverain et en Dieu, il faut que la mort fuie devant la face de ce vainqueur. Demandez à Jésus-Christ qu'il fasse pour la vie spirituelle de votre âme ce qu'il a fait pour la vie temporelle de ce jeune homme ; demandez-lui qu'il touche votre cœur, où sa grâce est peut-être morte ou languissante. Obéissez, levez-vous, Jésus-Christ vous l'ordonne. Levez-vous de cette nonchalance et de cette pensée qui tient depuis longtemps votre âme assoupie. Levez-vous de cette attache trop sensible à la créature, qui partage votre cœur que vous devez tout à Dieu. Levez-vous de cet amour de vous-même, de cette vanité, de cette vie molle qui vous ôte la pensée de l'autre vie et de la mort qui en est le passage. Vous serez surpris, peut-être bientôt, si vous ne prenez vos précautions.


SENTIMENTS

Je me soumets, ô mon Dieu ! au juste arrêt de mort que vous avez prononcé contre moi ; je le mérite parce que je suis pécheur. Adoucissez-moi les frayeurs excessives de la mort, et faites-moi mériter, par de bonnes œuvres, la mort des justes. Donnez-moi la vie de la grâce ; parlez, Seigneur, à mon âme ; que votre voix de sauveur et d'époux se fasse entendre à mon cœur : commandez-lui de se lever et de ne plus croupir dans l'ordure et dans les ombres delà mort ; mais, en commandant, donnez-moi la force d'exécuter vos ordres, quelque rigoureux qu'ils me paraissent. Faites-moi vouloir efficacement, faites-moi agir comme ce jeune homme, afin que toutes mes actions soient des signes de vie, de vie de la grâce, pour mériter après ma mort la vie de la gloire.


SENTENCES

Vous êtes poussière, et vous retournerez en poussière (Gen. 9).

Dieu nous a caché le jour de notre mort, afin que nous nous y préparions tous les jours. C'est y penser et s'y préparer trop tard que d'attendre à le faire quand on est en péril de mort. (D. Aug. discip. chr.)


RÉFLEXIONS

Sentence de mort contre Jésus-Christ


Pilate voyant que tout ce qu'il avait fait pour délivrer Jésus-Christ était inutile, et entendant les clameurs effroyables du peuple qui demandait sa mort, le leur abandonna en disant qu'il était innocent du sang de ce juste. Que son sang, dirent ces aveugles, retombe sur nous et sur nos enfants ! Injustice atroce et criante ! sentence inique ! arrêt détestable ! Est-il possible, ô mon Dieu ! qu'il sorte d'une bouche que vous avez formée vous-même un arrêt de mort contre vous, qui êtes l'auteur de la vie ? Quel impénétrable mystère de votre providence et de votre amour pour les hommes ! Et quel puissant motif pour nous engagera vous aimer, à souffrir et à répandre jusqu'à la dernière goutte de notre sang pour votre amour.


PRIÈRE

Seigneur, dont les miséricordes sont infinies, nous implorons votre clémence ; répandez vos bénédictions sur la pénitence que nous pratiquons en ce saint temps, afin qu'ayant réprimé tous désirs déréglés qui souillent la pureté de nos cœurs et l'innocence de nos âmes, nous soyons plus capables de nous appliquer aux choses célestes. Nous vous en prions par les mérites de Jésus-Christ, votre fils et notre Seigneur.






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mardi 13 mars 2018

Méditation sur les aumônes des Pécheurs


Baptême de Corneille (Francesco Trevisani)





1er point. Elles ne suffisent pas pour effacer leurs péchés s'ils y persévèrent. Car il ne faut pas s'imaginer qu'un pécheur puisse jamais acheter par ses aumônes le droit de persister dans ses désordres. Si ce trafic avait lieu, il s'ensuivrait que les riches auraient plus de moyens et de facilité pour se sauver que les pauvres.


2e point.
L'aumône a cependant une vertu particulière pour attirer du Ciel les grâces qui sont nécessaires au pécheur pour se convertir ; et c'est en ce sens qu'il est dit : Rachetez vos péchés par vos aumônes.... la charité couvre la multitude des péchés... donnez et l'on vous donnera.... faites l'aumône de votre superflu, et vous serez tout-à-fait purs. Ainsi ce Centurion, dont il est parlé au livre des Actes, obtint du Ciel la grâce de la Foi, parce qu'il faisait beaucoup d'aumônes au peuple, et qu'il priait Dieu continuellement. Il vint un Ange du Ciel qui lui dit : Vos prières et vos aumônes sont montées jusques à Dieu, et il s'en est souvenu. Combien de riches retenus par de criminelles habitudes dans les liens de l'iniquité, pourraient obtenir par les mêmes moyens la grâce de se convertir !




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jeudi 8 mars 2018

Méditation pour le Jeudi de la troisième semaine de Carême : Jour de présence de Dieu







LE JEUDI DE LA TROISIÈME SEMAINE DE CARÊME

Jour de présence de Dieu


PRATIQUE

Dieu vous regarde, et est attentif à tout ce que vous pensez, à tout ce que vous dites et à tout ce que vous faites ; il est plus dans vous que vous-même ; sans ce continuel regard de Dieu sur vous, vous péririez dans le moment, et vous retourneriez dans l'affreux abîme du néant d'où vous êtes sorti. Pénétrez-vous d'un profond respect pour cette divine présence ; et répondez au regard de Dieu sur vous, par un regard d'attention, de reconnaissance, de respect, de tendresse. Dès que vous vous sentirez distrait, rentrez dans cette divine présence, comme dans le centre de vos délices.


MÉDITATION

Jésus étant sorti de la synagogue entra dans la maison de Simon, dont la belle-mère avait une grosse fièvre. Ils le prièrent pour elle, et il la guérit. (Luc, 40)


1er point. Les grâces singulières que Jésus-Christ distribue avec tant d'abondance à ceux qu'il honore de sa divine présence, et les guérisons miraculeuses qu'il opère en faveur de ceux qui implorent son secours, nous montrent que ce Jésus si bienfaisant et si charitable n'est pas seulement le médecin de nos corps, mais encore de nos âmes ; l'un est la figure de l'autre.
Quand Jésus vient en nous par la sainte communion, il veut que nous le priions de guérir nos âmes, qui sont bien plus précieuses que nos corps, et dont les maladies sont bien plus importantes et bien plus dangereuses : alors il agit en sauveur ; il commande en maître ; et il n'est point de maladie si secrète, si invétérée et si opiniâtre, à laquelle ce céleste médecin n'apporte un souverain remède quand nous savons rechercher sa divine présence et mettre à profit les grâces et les bénédictions qu'il communique dans les visites dont il veut bien nous favoriser. — Après cette guérison miraculeuse de la belle-mère de Pierre, tous ceux qui avaient des malades les amenèrent à Jésus ; il leur imposait les mains, et il les guérissait. La présence du Sauveur n'est pas bornée à une seule grâce, ni à guérir un seul malade ; il en sort une vertu divine qui guérit tous ceux qui s'en approchent avec un esprit de foi, quelque maladie qu'ils aient : quel motif de confiance !


Jésus s'en alla ensuite dans un lieu désert, et tout le peuple le vint chercher où il était, et faisait tous ses efforts pour le retenir.


2e point. Jésus-Christ veut que nous le cherchions nous-mêmes avec empressement ; et il semble qu'il se cache exprès, comme il a fait dans l'évangile à l'égard du peuple, afin qu'il le cherchât et qu'il se rendit d'autant plus digne de sa présence et de ses grâces. Il ne suffit pas de chercher Dieu, ni même de le trouver, il faut lui découvrir toutes nos maladies spirituelles, le prier avec ardeur de nous guérir à fond et de nous donner cette grâce de force pour ne pas retomber. Ce n'est pas assez d'avoir obtenu la guérison, il faut le retenir, lui faire violence, comme les disciples d'Emmaüs, pour l'engager à demeurer avec nous. Quand il est avec nous, nous sommes forts et nous possédons le plus précieux trésor. Quand Jésus-Christ nous honore de sa visite dans la sainte communion, profitons avec soin des grâces attachées à la présence intime d'une divinité qui nous touche et nous remplit, et retenons-le par notre amour. Allons encore chercher Jésus-Christ dans le sanctuaire, et ne sortons point d'avec ce Dieu de miséricorde, que nous ne l'ayons contraint amoureusement de guérir nos maux spirituels, et qu'il ne nous ait accordé, comme à Job, sa bénédiction.


SENTIMENTS

Seigneur, favorisez-moi d'un de vos divins regards ; ayez pitié de moi, montrez-moi votre face adorable, et je serai guéri. Vous avez jeté les yeux sur un grand peuple qui vous suivait, et vous avez fait un miracle pour le nourrir. Jetez les yeux sur nos misères ; approchez-vous de moi, ou donnez-moi la force de m'approcher de vous, et je serai fort contre mes ennemis. Ô mon Dieu ! aidez-moi à tourner mes yeux vers vous seul, et à les détourner de toutes les créatures qui pourraient m'empêcher de m'occuper de vous. Soyez toujours présent à mon esprit, et que mon cœur fasse ses délices de vous aimer.


SENTENCES

La méditation de mon cœur sera toujours en votre présence, ô mon Dieu (Psalm. 118) !

L'homme chrétien doit être bien plus confus de commettre une offense en présence de Dieu seul, que de tous les hommes (Div. Bonavent. Serm. 4. Dom. 11).


RÉFLEXIONS

Jésus interrogé par Pilate


Jésus est introduit dans le prétoire où l'on jugeait les criminels ; et le président des Romains lui demande s'il est le roi des Juifs. Le Sauveur lui répond : Mon royaume n'est pas de ce monde. Non, Seigneur, votre royaume n'est pas de ce monde, ni sujet aux vicissitudes temporelles ; mais il est spirituel et éternel tout ensemble, et rien ne pourra jamais l'ébranler. Vous êtes venu pour rendre témoignage à la vérité ; et quoique Pilate ne comprenne pas toute la sublimité de vos réponses, il reconnaît votre innocence et l'envie des Juifs qui veulent vous perdre. Il voudrait vous soustraire à la fureur de vos ennemis ; il découvre leur jalousie, et il la regarde comme la seule cause de votre mort. Est-il bien possible, Seigneur, que vos propres citoyens, que des prêtres, des docteurs éclairés de la vraie religion, vous condamnent, pendant qu'un idolâtre et un étranger vous justifie et veut épargner votre sang. Ah ! je comprends ce mystère d'iniquité. Pilate n'était pas possédé par l'envie ; et les prêtres et les Pharisiens étaient tyrannisés et déchirés par cette indigne passion, qui rend injuste et cruel. D'ailleurs, vous voulez mourir et nous sauver par votre mort ; et cette mort ne pouvait être causée que par l'injustice de vos ennemis, puisque vous étiez innocent ; et il fallait, à quelque prix que ce fût, contenter votre amour.


PRIÈRE

Soyez éternellement glorifié, Seigneur, par tous les saints qui sont dans le ciel ; et délivrez-nous, par votre puissante protection et par leurs mérites, de tous les malheurs corporels et spirituels ; et accordez-nous votre grâce dans le temps, et votre divine présence dans l'éternité bienheureuse. Nous vous en prions par les mérites de Jésus-Christ, votre fils et notre Seigneur.





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mercredi 7 mars 2018

Méditation pour le Mercredi de la troisième semaine de Carême : Jour de dévotion








LE MERCREDI DE LA TROISIÈME SEMAINE DE CARÊME

Jour de dévotion


PRATIQUE

Marquez en toutes choses votre attachement à Dieu, par une dévotion solide, universelle, constante, et par un vrai recueillement, soit dans vos prières, soit dans vos lectures, soit en entendant la sainte messe. Retranchez de votre dévotion tout ce qui peut déplaire à Dieu et la rendre défectueuse, comme la vanité, l'amour-propre, le respect humain, la lâcheté, en un mot, tout ce qui ne part point d'un cœur véritablement dévot. Efforcez-vous d'être dévot comme vous voudriez l'avoir été au moment de la mort.


MÉDITATION

Hypocrites, dit Jésus-Christ aux scribes et aux pharisiens, Isaïe a bien prophétisé de vous quand il a dit : Ce peuple ne m'honore que des lèvres, et son cœur est éloigné de moi (Matth., 15).


1er point. Le Sauveur parlait ici des faux dévots qui faisaient consister leur dévotion dans une infinité de petites observances, pendant qu'ils négligeaient l'essentiel de la dévotion, qui consiste dans la charité, la pénitence et dans un attachement sincère de l'esprit et du cœur à Dieu. Jésus-Christ leur reproche encore de se scandaliser de tout, et de se permettre tout à eux-mêmes. Ils sont aveugles, dit le Sauveur ; ils ne parlent que de pénitence et de mortification, et ils se révoltent à la moindre souffrance ; ils veulent avoir tout l'honneur de la dévotion sans en avoir la fatigue. Ils sont plus vifs que les autres dans leur colère, plus insupportables dans leur humeur, plus piquants dans leurs paroles, et ils sont assez aveugles pour ne pas s'en apercevoir.
La fausse dévotion vient de la vanité, de l'orgueil et de l'amour-propre : c'est une plante stérile qui n'a que des feuilles, et que le Père céleste n'a pas plantée : aussi, dit Jésus-Christ, elle sera arrachée jusqu'à la racine. Ces dévotions sensibles et de pur tempérament, ces dévotions indiscrètes et superstitieuses, ces dévotions d'intérêt et de parade, ces dévotions irrégulières et capricieuses, ces dévotions douces, extérieures et superficielles, destituées de l'esprit de pénitence, seront comptées pour rien. Examinez les défauts de la vôtre.


Ce qui procède de la bouche vient du cœur, et c'est ce qui est capable de souiller l'homme.


2e point. La véritable dévotion vient du cœur, parce que le cœur est la source de tout le bien que l'homme chrétien puisse pratiquer. La dévotion, selon les saints Pères, est un culte religieux que nous devons à Dieu, comme à notre principe et à notre dernière fin. C'est une volonté soumise, sincère et prompte, qui nous porte avec ardeur à tout ce qui regarde les intérêts et la gloire de Dieu.
Cette volonté, cette ardeur, ne peuvent être que dans le cœur, et du cœur il faut qu'elle se répande sur toutes les actions. Rappelez-vous les paroles du prophète : Seigneur, vous m'avez dilaté le cœur, et j'ai couru dans la voie de vos commandements. Lorsque le cœur n'a pas encore acquis une solide dévotion, il marche à petits pas et en tremblant dans la voie des seuls préceptes ; mais quand sa dévotion est ardente, le cœur se dilate, l'amour succède à la crainte ; il ne marche plus, il court dans la voie des commandements et dans celle des conseils les plus parfaits.
Examinez s'il n'y a rien dans votre cœur qui fasse obstacle à la dévotion ; s'il n'y a point de sentiment imparfait, point d'attache ; car, lorsque Dieu, seul auteur et seul objet de notre dévotion, trouve le cœur partagé, il se retire, et c'est le plus grand de tous les malheurs.


SENTIMENTS

Ah ! Seigneur, ne suis-je point du nombre de ceux qui vous honorent des lèvres, pendant que leur cœur est loin de vous ? Rapprochez-vous donc de moi, Seigneur ; mon cœur mettra tout en usage pour se rapprocher de vous par une dévotion sincère. Percez, pénétrez ce cœur de la flèche choisie de votre divin amour, afin qu'il s'attache, qu'il se dévoue et qu'il se consacre à vous seul jusqu'au dernier soupir de sa vie, sans inconstance, sans partage et sans faiblesse ; et qu'il soit digne d'être l'objet de vos complaisances, le lien de votre repos et de vos délices, et le sanctuaire de votre divinité pendant cette vie, pour se rendre digne de vous posséder éternellement dans le ciel.


SENTENCES

La piété est utile à toutes choses. Dieu lui a promis la vie présente et la vie future. (1 Tim.)

La dévotion est fausse quand elle ne procède pas de l'amour de Dieu (Bern. de perfect. Recth. c.1).


RÉFLEXIONS

Jésus au tribunal de Pilate


Les Juifs, qui ne pouvaient condamner personne à mort, parce que les Romains, qui les avaient assujettis, leur en avaient ôté la puissance, conduisirent Jésus-Christ, avec ses témoins et ses accusateurs, au tribunal de Pilate, président pour l'empereur, et il y fut mené avec la même infamie qu'aux tribunaux précédents. On l'accusa d'avoir voulu révolter le peuple et d'être un séditieux et un perturbateur du repos public.
Vous êtes accusé, ô mon Sauveur ! de séduire le peuple, vous qui n'étiez venu sur la terre, qui ne souffriez et qui ne mourriez que pour le sanctifier et le sauver ! d'empêcher de payer le tribut à César, vous qui aviez dit : Rendez à César ce qui appartient à César ! de vous porter pour roi, et de vouloir usurper la couronne, vous qui aviez fui de peur qu'on ne vous couronnât, et qui aviez dit que vous n'étiez pas venu pour être servi, mais pour servir ! Vous gardez cependant le silence, vous qui êtes innocent, pour m'apprendre à souffrir les persécutions en silence, moi qui suis criminel.


PRIÈRE

Humblement prosterné aux pieds de votre adorable majesté, nous implorons votre clémence, ô Dieu de bonté et de miséricorde ! nous vous prions dans ce saint temps de larmes, de pénitence et de grâce, de nous accorder les grâces qui nous sont nécessaires pour faire jeûner nos passions et nos appétits déréglés, afin de ne plus jamais irriter votre justice ; nous vous en prions par les mérites de Jésus-Christ votre fils, notre Seigneur.





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mardi 6 mars 2018

Méditation pour le Mardi de la troisième semaine de Carême : Jour de charité





Mort de Judas (Julius Schnorr von Carolsfeld)



LE MARDI DE LA TROISIÈME SEMAINE DE CARÊME

Jour de charité


PRATIQUE

Demandez à Jésus-Christ cette charité chrétienne qui soit une parfaite image de celle qu'il a eue pour tous les hommes, et pour vous en particulier. Veillez sur vos paroles, vos sentiments et vos pensées, afin que rien en vous ne puisse blesser la charité. Soyez toujours prêt à secourir votre frère, tel qu'il soit, dans ses besoins, à le consoler dans ses peines, à le supporter dans ses défauts et à le reprendre avec prudence et sagesse. Montrez en toutes choses à votre prochain que vous l'aimez sincèrement pour Dieu.


MÉDITATION

Je vous le dis encore, si deux d'entre vous s'unissent ensemble sur la terre, tout ce qu'ils demanderont leur sera accordé par mon Père céleste. (Matth., 16)


1er point. Jésus-Christ dans cet évangile nous fait sentir l'étroite obligation de l'amour du prochain, et combien il importe à notre salut que nous soyons toujours dans une intelligence parfaite avec lui. Il entre dans la pratique de ce précepte, en nous enseignant la manière prudente et secrète de l'avertir de ses défauts pour l'engager à Dieu. Il marque les avantages et les récompenses attachés à la charité, quand il promet à ceux qui la pratiqueront, qu'ils obtiendront du Père céleste tout ce qu'ils demanderont, et qu'il sera lui-même au milieu d'eux. Enfin il répond aux doutes qui pourraient naître dans l'exécution de cette loi d'amour, en disant à Pierre que ce n'est pas assez de pardonner sept fois, mais septante fois sept fois, c'est-à-dire toujours. Cette loi est-elle gravée dans votre cœur telle qu'elle se trouve dans les paroles de Jésus-Christ. L'autorité de Dieu, le sang de Jésus-Christ, doivent l'avoir imprimé profondément chez vous. La grâce vient au secours de la nature, et fortifie la charité ; elle sait bien mieux aimer que la nature, parce qu'elle est plus éclairée, et qu'elle est animée et soutenue du sang de Jésus-Christ, qui facilite et purifie cet amour.


En quelque lieu que se trouvent deux ou trois personnes assemblées en mon nom, je me trouverai au milieu d'elles, dit Jésus-Christ.


2e point. Si vous aimez votre frère pour l'amour de Dieu, si vous vous unissez avec lui pour faire le bien, Jésus-Christ se trouvera avec vous ; quelle délicieuse compagnie ! Mais si vous refusez de l'aimer, le démon, qui est un esprit de discorde, s'y trouvera ; quelle odieuse société ! Il faut que la charité unisse les cœurs : mais il faut qu'elle les unisse au nom de Jésus-Christ. Elle doit être sincère et sage, et elle doit venir d'un cœur pur. Prenez-garde que la vôtre ne soit une charité de pur tempérament, où la grâce n'a point de part. Une prédilection aveugle n'est pas la charité, mais un fantôme ; loin de l'établir, elle le détruit. Ce que l'on donne de trop à son frère soustrait injustement aux autres ce qui leur est dû, et ruine entièrement l'amour de Dieu ; et comme cet amour est toujours aveugle, il mène souvent trop loin ; il produit des attaches vicieuses, qui ont des suites fâcheuses quand on n'est pas sur ses gardes et qu'on s'y livre indiscrètement.


SENTIMENTS

Ô mon adorable Sauveur ! répandez vous-même en moi cette vraie charité qui porte tous les traits de la vôtre ; une charité ardente, sincère, égale, bienfaisante, héroïque et sage. Que la froideur, l'antipathie, l'inconstance, l'humeur, l'envie, la passion, n'en ternissent jamais l'éclat et la pureté. Mais, Seigneur, pour pratiquer une parfaite charité, ouvrez-moi votre cœur, pour y voir et pour y puiser les ardeurs, les motifs et la règle de mon amour pour vous, et pour ceux que vous avez aimés jusqu'à perdre la vie et à répandre votre sang pour leur amour. Je veux de tout mon cœur, de toute mon âme et de toutes mes forces, aimer mes frères comme moi-même, pour l'amour de vous.


SENTENCES

Je vous donne un précepte nouveau, dit Jésus-Christ à ses apôtres : c'est de vous aimer les uns les autres comme je vous ai aimés (Joan. 13).

Celui-là n'aime pas son frère, qui, le voyant dans la nécessité, ne partage pas avec lui, non-seulement son superflu, mais encore une portion de son nécessaire (Div. Gr. hom. 20, in Joan. 20).


RÉFLEXIONS

Désespoir de Judas

Le traître Judas, après avoir livré Jésus-Christ aux Juifs, et en avoir reçu trente pièces d'argent dont il était convenu pour le prix du sang de son maître, de son sauveur et de son Dieu, voyant qu'on allait le faire mourir par le plus honteux de tous les supplices, reconnut l'injustice énorme que son avarice lui avait fait commettre ; il en conçut une vive douleur, et il entra dans des sentiments de pénitence ; mais, hélas ! quelle détestable douleur et quelle monstrueuse pénitence ! Le malheureux se désespéra, au lieu d'avoir recours à la miséricorde de Dieu ; il fut lui-même son propre bourreau, et se pendit. Ah ! Seigneur, si au lieu de se désespérer, il avait fait une sincère pénitence, ce sang qu'il avait trahi et livré aurait encore plaidé sa cause au trône de Dieu, pour lui obtenir miséricorde, et il aurait servi à le retirer de l'enfer, parce qu'il est d'une valeur infinie.
Ô mon Dieu ! je ne désespérerai jamais de votre divine miséricorde, et votre sang fera toujours ma confiance, quoique je lui aie fait une infinité d'outrages : je m'efforcerai de ne plus jamais irriter votre justice, et je lui satisferai par une sincère pénitence.


PRIÈRE

Dieu tout-puissant et tout miséricordieux, qui pardonnez aux pécheurs les plus endurcis, quand ils tous le demandent avec un cœur contrit et humilié, accordez-nous le pardon de nos péchés et embrasez nos cœurs d'une pure et ardente charité, afin que nous vous aimions, premièrement par-dessus toutes choses, et notre prochain comme vous l'avez aimé, et pour l'amour de vous. Nous vous en prions par les mérites de Jésus-Christ votre fils, etc.





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