Les années suivantes passent dans une activité incessante. En été de 1872, don Bosco fonde la société des Filles de Marie Auxiliatrice, appelées plus tard Salésiennes, destinées à accomplir pour les jeunes filles le même travail que les Salésiens pour les garçons. Marie-Dominique Mazzarello est leur première supérieure générale.
Don Bosco de nouveau à Rome y consacre toute son influence à créer des rapports convenables entre le Saint-Siège et le gouvernement italien. Beaucoup lui en savent mauvais gré. Les feuilles libérales daubent sur lui. Bismarck s'étonne de voir le gouvernement italien s'entretenir avec un prêtre. Quant à l'empereur, il fulmine sa plus formelle désapprobation, complétée de menaces dans le cas où ces tentatives d'entente se poursuivraient.
« Qu'allons-nous faire ? se demande le ministre Vigliani, avec qui don Bosco a de fréquents entretiens. Notre destin est entre les mains de la Prusse. »
Si la réconciliation escomptée n'a pas lieu, on arrive toutefois à s'entendre sur certains points essentiels. À combien de critiques et d'humiliations don Bosco a-t-il été en butte pour parvenir à ce résultat, Dieu seul le sait !
Don Bosco a réalisé de grandes choses durant ses trente-quatre années d'apostolat, mais il aspire à beaucoup plus. Son horizon ne se limite pas à Turin et au petit Piémont ; il embrasse le monde entier.
Souvent dans le silence du soir, don Bosco reste penché sur une grande mappemonde, tel un général qui rêve de nouvelles conquêtes. Il se remémore avec une douce mélancolie ses premières années de sacerdoce, ses rêves de vie missionnaire. Dieu lui ayant confié un autre poste, il voudrait envoyer ses fils accomplir la tâche qui lui a été refusée. La pensée d'une mission en terre païenne lui hante l'esprit ; elle le poursuit jusque dans son sommeil.
— La nuit dernière, raconte-t-il un soir à des familiers, j'ai eu un drôle de rêve. Je me trouvais dans un pays étranger. Je me voyais au milieu d'une steppe gigantesque, limitée à l'occident par des montagnes tragiques. Des hommes au teint bronzé, avec une longue chevelure en désordre, une peau d'animal jetée sur les épaules et, aux mains, comme armes, une lance et un lasso, sillonnaient cette immensité. Soudain la terre trembla d'une farouche mêlée. Je vis un massacre épouvantable ; la terre était trempée de sang ; l'air vibrait de clameurs belliqueuses et de cris mortels. Puis, tout à coup parut une troupe d'hommes, qu'à leur costume je reconnus aussitôt pour des missionnaires. Ils approchaient de ces malheureux d'un air souriant et se mettaient en devoir de leur prêcher l'Évangile, mais ils furent bientôt attaqués par les sauvages et affreusement mis à mort.
— Quel pays était-ce ? demande don Cagliero.
— Je n'en sais rien ; mais écoutez la suite, mon rêve n'est pas fini. Je vis un nouveau groupe avancer sur la steppe et je reconnus, à mon grand effroi, quelques visages qui m'étaient chers et familiers, oui, quelques-uns d'entre vous, mes fils. Je tremblais en les voyant avancer vers une mort certaine. Je voulais leur ordonner de faire demi-tour, mais ils ne semblaient pas me remarquer. Or, voici que les cannibales déposent leurs armes, et c'est avec les signes de la plus vive sympathie qu'ils accueillent les nouveaux missionnaires. Ces apôtres dressent la Croix parmi eux et se mettent à les instruire. Finalement un des Salésiens entonna un cantique à la Sainte Vierge et les sauvages s'y unirent d'un tel cœur et d'un tel souffle que je me réveillai, trempé de sueur.
— Un drôle de rêve ! dit Dominique Tomatis... et qui doit sûrement avoir un sens.
— Je n'en doute pas, répond don Bosco.
Quel pays a-t-il vu en songe ? Don Bosco ne cesse de se le demander. Il pense à l'Éthiopie, puis à la Chine, à l'Australie, finalement aux Indes. Sur sa table s'amassent quantité de livres empruntés à la bibliothèque de la ville, mais plus il étudie de pays étrangers, plus il sent qu'il s'égare.
Alors, dans les derniers jours de 1874, lui parvient une lettre de l'archevêque de Buenos Aires, le priant d'envoyer quelques-uns de ses fils en Argentine. Cet appel est pour lui une révélation. Fort tard dans la nuit, plongé dans l'étude de cette région, il reconnaît enfin ce qu'il a vu : les pampas de Patagonie, à l'extrême sud de l'Amérique.
Dès lors, don Bosco n'a de cesse qu'il n'ait obtenu de Pie IX l'autorisation d'envoyer ses fils en Patagonie. Le 12 mai, il annonce à tout l'oratoire réuni que la Mission est chose décidée : « La réponse définitive m'est arrivée aujourd'hui, dit-il. Que les volontaires se préparent ! »
Le jour de la Toussaint 1875, les dix premiers missionnaires salésiens s'agenouillent aux pieds de Pie IX pour recevoir sa bénédiction avant leur départ. Le chef de l'expédition est Jean Cagliero ; ses compagnons sont les prêtres Joseph Fagnanon, Valentin Cassini, Dominique Tomatis, Jean Baccino, Jacques Allavena, et les frères lais Barthélemy Scavini, menuisier de son métier, Barthélemy Molinari, maître de musique, Vincent Gioia, cuisinier et cordonnier, et le jeune Étienne Belmonte.
Don Bosco accompagne ses missionnaires sur le bateau dans le port de Gênes ; il ne les quitte que lorsque sonne le départ. Il sait qu'il n'en reverra plus certains.
Pendant plusieurs mois, il attend impatiemment des nouvelles du lointain pays. Finalement, la voici la lettre désirée, dans laquelle don Cagliero lui donne des détails consolants sur son apostolat parmi les « slums » de Buenos Aires.
« Mon Dieu, soupire don Bosco en déposant la feuille, protégez mes fils, qui sont si loin de moi. Qu'ils récoltent dans l'allégresse ce qu'ils sèment dans les larmes ! »
En Europe, son œuvre est en plein essor. L'oratoire compte maintenant huit cents enfants. Don Bosco a ouvert neuf maisons nouvelles en Italie. Celle de Nice est la première en France. En 1876, il fonde l'Œuvre de Notre-Dame Auxiliatrice pour les vocations tardives et l'Union des Coopérateurs Salésiens, sorte de tiers-ordre qui assure à l'entreprise l'appui moral et financier de plusieurs milliers de laïques.
En novembre, il envoie un second contingent de missionnaires en Argentine. Pie IX lui a fait parvenir cinq mille lires pour les frais du voyage. Au commencement de la nouvelle année, départ d'une troisième escouade de missionnaires, parmi lesquels les six premières Filles de Marie Auxiliatrice, selon le plus ardent désir de don Cagliero.
Le jour du premier de l'an 1878, don Bosco prononce ces paroles prophétiques : « Bientôt vont survenir de graves événements qui frapperont l'attention de l'univers. » Le 8 janvier, c'est déjà la mort du roi Victor-Emmanuel. Le 7 février, c'est le grand pape Pie IX qui s'éteint.
Durant le convoi funèbre au Campo Verano, la haine de ses ennemis se déchaîne encore une fois contre l'infortuné pontife. « À bas le pape ! Au Tibre la charogne ! » Des pierres volent contre le corbillard ; c'est tout juste si on ne précipite pas le cercueil dans le fleuve.
Pie IX a demandé une sépulture sans faste, mais on lui érige, avec les offrandes qui affluent de toute la chrétienté, un magnifique mausolée, un chef-d'œuvre de l'art chrétien, le plus beau du siècle.
Les cardinaux prient don Bosco d'entrer en relation avec le gouvernement italien au sujet du prochain conclave. Le simple prêtre turinois se rend immédiatement chez le ministre de l'Intérieur, Crispi, pour lui exposer les désirs du Sacré Collège.
— Bien, répond le puissant homme d'État, vous pouvez assurer aux cardinaux que le gouvernement respectera et fera respecter la liberté du conclave et que rien ne viendra troubler l'ordre public.
— Je vous remercie, Excellence.
— De grâce, non ! C'est plutôt à moi de vous remercier. Les cardinaux ne pouvaient me députer meilleur messager que vous. Vous rappelez-vous notre première rencontre à Turin ?
— Vous ne l'avez pas oubliée, Excellence ?
— Comment ne m'en souviendrais-je pas ! Vous fûtes mon sauveur. J'étais jeune encore. Je flânais dans le plus absolu dénuement à travers les rues de Turin, quand je vous vis arriver, entouré d'une grande troupe de pauvres garçons. Vous vîntes à moi et me demandâtes s'il me manquait quelque chose, si vous pouviez faire quelque chose pour moi.
— Je voyais que vous aviez faim, Excellence.
— Vous ne vous trompiez pas. Je vous ai avoué que je n'avais rien mangé depuis plusieurs jours. Vous m'avez accueilli à votre oratoire. Six semaines durant j'y fus votre hôte, moi, le révolutionnaire sans foyer ; je pris part à vos repas avec vous, avec maman Bosco et vos enfants. Finalement, vous m'avez aidé à trouver une mansarde, près de l'église de la Consolata, et vous ne m'y avez pas oublié. Vous m'y avez envoyé plusieurs fois de l'argent et même une paire de souliers neufs. Je suis allé plusieurs fois à confesse à vous ; vous en souvenez-vous ?
— Ce qui se passe au confessionnal, je l'oublie immédiatement. Mais si vous désirez le même service, je suis toujours à votre disposition.
— On n'est pas toujours préparé à pareille chose, dit le ministre en souriant. Puis, il demande à don Bosco des renseignements sur son oratoire et sur l'ensemble de ses œuvres. « Vous êtes dans la bonne voie, et vous pourrez toujours compter sur mon appui ».
En revenant au Vatican, don Bosco rencontre le cardinal Joachim Pecci, camerlingue de la sainte Église. Il se présente à lui avec une respectueuse simplicité enfantine :
— Que votre Éminence me permette de lui baiser la main !
— Qui êtes-vous ?
— Un pauvre prêtre qui, aujourd'hui, baise la main de Votre Éminence ; à peu de jours d'ici, il espère bien lui baiser les pieds.
— Je vous défends bien de prier pour cela.
— Vous ne pouvez me défendre de demander à Dieu l'accomplissement de sa volonté.
— Mais quel est votre nom ?
— Je suis don Bosco.
— De grâce, ne faites pas ce à quoi vous songez !
Néanmoins, le désir de don Bosco se réalise quelques jours plus tard. Le cardinal Pecci, archevêque de Pérouse, est élu pape et prend le nom de Léon XIII.
Le 16 mars, il reçoit don Bosco en audience privée, et lui donne sa bénédiction, pour lui et pour tous ses fils d'Italie et d'ailleurs. « Votre œuvre est l'œuvre de Dieu, lui dit-il en terminant. N'ayez donc aucune crainte. Bon courage ! »
Don Bosco quitte, heureux, le Vatican et retourne à Turin. Ses enfants l'attendent.
(Don Bosco, l'Apôtre des Jeunes, G. Hünermann)
Reportez-vous à Quand Léon XIII confie à Don Bosco la construction de l'église du Sacré-Cœur à Rome, Lutte pour l'approbation de la Société Salésienne, Perquisition et interrogatoires à l'oratoire de Don Bosco, Pie IX et Don Bosco, Audiences pontificales pour la fondation de la Société Salésienne, La sainte mort de Dominique Savio, Mort de maman Marguerite, Mère de Saint Jean Bosco, Le songe de Don Bosco, Don Bosco rencontre Dominique Savio, Don Bosco et le Grigio, Don Bosco et le jeune condamné à la potence, La sainte amitié qui amena Jean Bosco séminariste, à la perfection chrétienne.
mardi 25 janvier 2022
Les rêves de vie missionnaire de don Bosco, la mort de Pie IX, Rencontre avec le cardinal Pecci
lundi 24 janvier 2022
Lutte pour l'approbation de la Société Salésienne
Le 1er janvier 1869, don Bosco prend le train pour Rome. Il manque toujours à la Société salésienne, l'approbation finale. En vain don Bosco s'efforce-t-il de l'obtenir de la congrégation compétente ; cette fois, il la lui faut à tout prix.
À son arrivée à Rome, le carrosse du cardinal Berardi l'attend.
— Je suis chargé de vous conduire à votre logement, lui annonce le cocher. En outre, une voiture de son Éminence sera à votre disposition pendant tout votre séjour à Rome.
— Bien ! Conduisez-moi chez le chevalier Marietti. Au reste, je n'ai pas besoin de carrosse. Je ne suis pas habitué à pareil luxe. Puis-je vous demander ce qui me vaut tant de prévenance de la part du cardinal ?
— C'est, voyez-vous, que son neveu est gravement malade. Son Éminence vous prie d'aller le voir le plus tôt possible.
— J'irai. Veuillez transmettre à Son Éminence l'expression de ma profonde gratitude.
Quelques jours plus tard, don Bosco va rendre visite au cardinal en son palais. Berardi l'accueille fort aimablement, mais le presse aussitôt d'aller voir son neveu malade.
— Je suis venu, Éminence, pour vous parler au sujet de l'approbation de la Société salésienne.
— Je sais, je sais ! Votre cause n'est malheureusement pas bonne. La Congrégation des religieux ne veut pas entendre parler d'une nouvelle fondation. Les temps sont difficiles. Vous n'aboutirez à rien. Je ne puis vous donner absolument aucun espoir.
— Je suis pourtant plein de confiance, Éminence.
— Curieux ! Très curieux ! Sur quoi fondez-vous cette confiance ?
— Sur la Sainte Vierge ; sur mes enfants de l'oratoire et de mes deux petits séminaires, qui récitent tous les soirs un Notre Père pour l'heureuse issue de mon voyage. Finalement je compte aussi sur l'appui de votre Éminence.
— Sur moi ? Je n'ai rien à voir en cette affaire. Elle n'est pas de mon ressort.
— Vous pourriez néanmoins en toucher un mot au Saint-Père en ma faveur.
Après un instant d'hésitation :
— Eh bien, dit le prélat, ainsi ferai-je, si vous guérissez mon neveu.
— Je vous en prie, conduisez-moi près de lui.
Don Bosco trouve un garçonnet de onze ans atteint d'une grave typhoïde. L'enfant demande péniblement :
— C'est vous, don Bosco ?
— Oui, mon petit.
— C'est bien.
Et il laisse retomber sa tête sur l'oreiller.
— Le médecin l'a abandonné, chuchote la maman à l'oreille du prêtre. Si vous n'intervenez pas, il va mourir.
— Mettez toute votre confiance en Notre-Dame Auxiliatrice. Commencez une neuvaine. Comptez aussi sur mes prières.
Don Bosco bénit l'enfant et s'en va.
— Pensez aussi à la société de saint François de Sales, Éminence ! ajoute-t-il sortant.
Trois jours après, don Bosco trouve l'enfant assis sur son lit :
— Je n'ai plus de fièvre, dit le petit.
— C'est très bien. Confiance ! La Sainte Vierge te guérira.
Lorsque don Bosco revient au palais le dernier jour de la neuvaine, l'enfant court vers lui en sautant joyeusement.
— Demandez-moi ce que vous voudrez, dit le cardinal épanoui. Vous n'avez qu'à commander !
— Éminence, vous connaissez mon désir. Parlez au Saint-Père !
— Oui, demain, dès demain j'irai le voir. Mais vous feriez bien de soumettre votre affaire au cardinal secrétaire d'État.
Le cardinal Antonelli repose sur un canapé, lorsque don Bosco se présente chez lui.
— Approchez, approchez, don Bosco. Je ne puis malheureusement pas me lever. Je souffre horriblement de la goutte.
— Éminence, veuillez m'aider, et je vous assure que vous irez mieux.
— Que désirez-vous ?
— Je vous en prie, votre appui pour obtenir enfin l'approbation de ma Société.
— Très difficile ! Extraordinaire difficile ! La Congrégation des religieux ne veut rien savoir de nouvelles sociétés. Je vous promets pourtant d'en parler au Saint-Père, dès que je pourrai me rendre à l'audience. Mais, vous le voyez vous-même, ce ne peut être qu'en quelques semaines.
— Je ne peux pas attendre si longtemps. Allez-y demain !
— Dès demain ! Inutile d'y songer !
— Ce sera possible ! Il vous suffit d'avoir confiance ne Notre-Dame Auxiliatrice. Vous verrez que demain vous serez debout !
— Soit ! J'irai voir le Saint-Père demain si j'en suis vraiment capable.
Le lendemain matin toutes ses souffrances ont disparu. Antonelli se rend chez le Saint-Père, lui raconte sa guérison et lui recommande les affaires de don Bosco.
À quelques jours de là, Pie IX convoque celui-ci en audience et l'envoie même chercher avec son carrosse.
— À peine êtes-vous arrivé à Rome que vous faites des miracles, mon cher don Bosco, lui dit-il en le voyant.
— Saint-Père, je ne fais pas de miracles ! Je demande seulement à la Sainte Vierge de m'aider. Elle ne m'a encore jamais laissé dans l'embarras.
— C'est quand même étonnant ce que Berardi et Antonelli m'ont raconté. La Sainte Vierge doit certainement beaucoup vous aimer.
— Je l'aime aussi et je me fie en elle de tout cœur, c'est tout.
— Vous venez au sujet de l'approbation. Je la désire très sincèrement, mais vous savez que pour des décisions de ce genre je dépends des Congrégations. C'est ainsi et je dois malheureusement vous dire que la Congrégation des religieux n'est aucunement favorable à l'approbation de votre société. Il faudra encore un miracle de la Sainte Vierge, je crois. Ce serait une excellente chose que vous alliez voir Mgr Svegliati, secrétaire de la Congrégation. C'est de lui que vous viennent les plus grandes difficultés. J'ai malheureusement appris qu'il est gravement malade.
— Il est malade ? Très bien ! Je suis sûr d'obtenir ce que je veux.
Il est difficile d'accéder jusqu'à Mgr Svegliati qui est alité. Mais comment résister à don Bosco ? Don Bosco arrive donc au chevet du prélat impotent.
— Est-ce vous don Bosco ? gémit celui-ci. Vous voyez combien je suis mal. Une fluxion de poitrine, d'après le médecin. Je ne puis vraiment pas m'occuper de votre affaire. Venez à mon secrétariat lorsque je serai remis.
— Je regrette sincèrement de vous voir ainsi souffrant, dit don Bosco, mais votre appui m'est nécessaire. Allez trouver le Saint-Père pour lui recommander l'approbation de ma Société.
— Mais, don Bosco, les choses ne sont pas si simples que cela. Il s'agit d'une affaire délicate. En eussé-je le désir, je ne pourrais me rendre à l'audience en pareil état.
— Je vous le demande quand même, allez-y !
— Vous voyez pourtant bien comment je suis ! Peut-être pourrai-je m'occuper de la question qui vous intéresse avec le Saint-Père dans une semaine.
— Allez-y dès demain. Recommandez-vous à la Sainte Vierge, et vous verrez que demain vous serez guéri !
— Il se répète des choses extraordinaires sur votre compte, don Bosco... Eh bien, j'agirai suivant votre désir. Si je suis rétabli demain, j'en conclurai que la Sainte Vierge veut que je vous aide. J'irai voir le Saint-Père et lui recommanderai votre affaire.
Le lendemain matin, Mgr Svegliati est complètement guéri. Il part pour le Vatican et raconte son aventure au pape.
— Je n'ai plus aucune objection contre l'approbation, car j'ai éprouvé directement que telle est la volonté de Dieu.
— C'est aussi mon impression, dit le pape en souriant.
Le 19 février, Pie IX accorde à don Bosco une nouvelle audience.
— Heureuse journée ! dit l'apôtre de Turin en ployant le genou. Mes jeunes gens passent toute cette journée en prière devant le Saint Sacrement pour que le bon Dieu me vienne en aide.
— La prière de vos fils est déjà exaucée, répond le pape, dont les yeux se mouillent de larmes. Vous avez l'approbation. Toutes les difficultés ont été écartées par la Sainte Vierge.
— Je savais qu'elle exaucerait la prière de mes enfants et la mienne, répond don Bosco triomphant.
Le 1er mars, il reçoit le décret si longtemps désiré, et il retourne dès le lendemain à Turin. La joie est indescriptible à l'oratoire. Le bon vieux don Borel arrive péniblement, appuyé sur sa canne :
— Est-ce vrai, ce que j'ai appris ?
— Oui, mon cher don Borel ! Voici l'approbation !
— Deo gratias ! Oui, je vais donc mourir content !
Le lendemain, don Bosco chante avec ses religieux et tous ses enfants de l'oratoire un Te Deum solennel dans l'église de Marie Auxiliatrice.
(Don Bosco, l'Apôtre des Jeunes, G. Hünermann)
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samedi 22 janvier 2022
Pie IX et Don Bosco, Audiences pontificales pour la fondation de la Société Salésienne
L'œuvre de don Bosco se développe toujours. Le grand établissement, à la fois internat et externat, héberge deux cents enfants. Au collège, fondé depuis quelques années, vient s'ajouter une école primaire. Il existe des cours pour les jeunes artisans et commerçants, des ateliers de tous genres, un asile pour les sans-travail.
Tout cela entraîne bien des tracas et des soucis, tout cela coûte cher, très cher. Mais la Providence n'abandonne pas son serviteur, certainement assisté du haut du ciel par sa sainte mère et son angélique disciple. De temps en temps on organise une grande tombola pour laquelle les commerçants de Turin fournissent des lots importants. Le roi Victor-Emmanuel lui-même souscrit pour cinq cents billets. La tsarine, de passage à Turin, y consacre une somme considérable. Ainsi pare-t-on aux nécessités croissantes.
L'avenir de son œuvre inquiète beaucoup plus don Bosco que les difficultés présentes. Qu'arrivera-t-il lorsqu'il aura disparu ? Ses fondations, qui les maintiendra, qui les achèvera après sa mort ?
Don Bosco s'entretient souvent de ce sujet avec ses fils, surtout ses nombreux clercs, les futurs prêtres.
Il décide avec eux de créer une société qui portera le nom de Salésiens.
Mgr Fransoni, en exile, l'approuve. Don Cafasso l'encourage, et le ministre Rattazzi lui-même, le promoteur de la "loi des couvents", admet l'éventualité désirable d'une nouvelle société religieuse.
Un jour il fait venir don Bosco.
— Mon cher don Bosco, lui dit-il, je n'ai pas toujours été votre ami. J'avoue que je me suis longtemps défié de vous, mais j'ai constaté que vous faites beaucoup de bien et que vous méritez d'être aidé. Je vous souhaite de vivre longtemps, très longtemps, pour l'instruction et l'éducation de tant de pauvres enfants. Mais vous n'êtes pas immortel. Que deviendra votre œuvre après vous ? Y avez-vous songé ?
— Certainement, Excellence. J'y pense tous les jours.
— À mon avis, vous devriez choisir quelques laïques, quelques ecclésiastiques, de votre entourage, les grouper en une société bien définie, leur inculquer enfin votre esprit et vos méthodes d'éducation, de façon à en faire non pas de simples auxiliaires, mais les continuateurs de votre œuvre.
— Je m'étonne que ce soit vous, Excellence, qui m'encouragiez à fonder une société religieuse.
— Je sais, je sais ! Vous pensez à la suppression de nombreuses maisons religieuses dans le royaume, vous pensez à la loi qui porte mon nom, mais tranquillisez-vous, la société que je préconise ne contredirait aucunement la législation en cours.
— Comment cela ?
— Fondez une société non pas de mainmorte, mais de vivants. Chaque membre y conserverait ses droits civiques. En un mot vote société ne devrait être aux yeux de la loi qu'une simple association de libres citoyens travaillant de concert à la réalisation d'un idéal de bienfaisance.
— Et votre Excellence me garantirait l'autorisation du gouvernement !
— Aucun gouvernement régulier et sérieux ne fera jamais obstacle à la fondation et au développement d'une telle société. Toute association de libres citoyens est autorisée, tant que son but et ses activités ne s'opposent pas aux lois de l'État. Fondez donc cette société et soyez sûr de l'approbation et de l'appui absolu du roi.
De ce côté, la voie est libre. Don Bosco rédige une règle pour la soumettre au Saint-Père. Le 18 février 1858, il part pour Rome avec Michel Rua. Le 9 mars, Pie IX leur accorde une audience.
Le pape reçoit fort aimablement don Bosco. Il le presse de questions sur son œuvre et sur ses travaux :
— Que faites-vous maintenant à l'oratoire ?
— Un peu de tout, Saint-Père. Je célèbre la messe, je prêche, je confesse, je fais la classe, parfois la cuisine, ou je balaie l'église.
— Des occupations très variées ! constate le pape.
Puis s'adressant à Michel Rua :
— Êtes-vous prêtre ?
— Non, très Saint-Père. Je n'ai encore reçu que les ordres mineurs.
— Eh bien, mon fils, il ne vous sera pas difficile avec un pareil maître, de vous préparer au sacerdoce.
Le pape réfléchit un instant, puis il ajoute :
— Je me souviens de vos enfants, don Bosco, des trente-trois lires qu'ils m'ont envoyées, lorsque j'étais en exil. J'ai été très touché de cette générosité.
— Oh, un rien ! Mais nous étions peu nombreux encore, et si pauvres !
— J'ai été d'autant plus sensible à ce témoignage de filial attachement. Mais, dites-moi, mon fils, qu'est-ce que deviendra votre communauté lorsque vous ne serez plus ?
Don Bosco explique au Saint-Père son projet de fondation et lui présente une lettre de recommandation de Mgr Fransoni.
— Je vois que nous sommes tous trois du même avis, repartit le pape. Votre conception répond exactement aux besoins de notre triste époque. Cette société comporterait naturellement des vœux, condition indispensable pour maintenir l'unité de l'esprit et des œuvres. Puis, des règles appropriées et précises, ni trop austères ni trop faciles. Avec un costume discret. Les confrères de votre société doivent être des religieux aux yeux de l'Église, mais de simples citoyens aux yeux de la société civile et de l'État. Rédigez une Règle conforme à ces directives et apportez-la-nous.
Don Bosco remet alors au Saint-Père un volume des Lectures catholiques, relié en cuir blanc et orné des armoiries pontificales gravées en or.
— C'est un cadeau de mes jeunes gens, fabriqué par eux dans notre atelier.
Le pape, extrêmement touché de cette délicate attention, remet à don bosco une médaille de l'Immaculée pour chacun des quinze relieurs.
Il le reçoit deux autres fois. Il approuve les statuts de sa Société et lui concède des privilèges importants. Mais, dès qu'il lui parle de l'élever à la dignité de camérier secret, don Bosco se récrie :
— Oh, Saint-Père, de grâce, gardez cet honneur pour de plus dignes. La belle figure que je ferais au milieu de mes gamins avec du violet à ma soutane ! Ces pauvres petits ne me reconnaîtraient plus ; j'y perdrais toute leur confiance. Et puis les bienfaiteurs de mon œuvre me croiraient devenu riche ; je n'aurais plus le courage d'aller leur tendre la main pour mes enfants. Non, Saint-Père, vraiment, renoncez à votre idée. Laissez-moi demeurer le pauvre don Bosco !
— Cela fait bien des raisons, répond le pape. Alors, soit ! nous les admettons. Mais peut-être auriez-vous un autre désir à nous exprimer ? Une petite surprise pour vos enfants à votre retour ne vous serait-elle pas agréable ?
— Oh, si ! Très Saint-Père !
— Alors, attendez.
Le pape tire de son bureau un rouleau de pièces de monnaie :
— Voici pour donner une bonne collation à vos enfants.
Quel bonheur cela va être ! Rien que d'y penser, don Bosco en a les larmes aux yeux.
Don Bosco profite de son voyage à Rome pour en visiter les sanctuaires et les monuments témoins du glorieux passé de la Ville éternelle. Tous les jours il est en route. Il va de Saint-Pierre à Saint-Paul-hors-les-Murs, du Colisée aux Catacombes, pèlerin intrépide que le pauvre Michel s'évertue à suivre.
Naturellement, don Bosco visite aussi les oratoires romains du temps de saint Philippe de Néri. Il en étudie avec beaucoup d'intérêt les institutions, en particulier les méthodes d'éducation. D'ailleurs, sans tout approuver.
Le second dimanche après Pâques, il est de retour à Turin :
— Que nous sommes contents de vous voir revenu, lui disent ses enfants. Nous avons prié pour vous tous les jours. N'allez pas repartir tout de suite !
— Je resterai avec vous le plus longtemps possible. C'est promis !
(Don Bosco, l'Apôtre des Jeunes, G. Hünermann)
Reportez-vous à Perquisition et interrogatoires à l'oratoire de Don Bosco, La sainte mort de Dominique Savio, Mort de maman Marguerite, Mère de Saint Jean Bosco, Le songe de Don Bosco, Don Bosco rencontre Dominique Savio, Don Bosco et le Grigio, Don Bosco et le jeune condamné à la potence, La sainte amitié qui amena Jean Bosco séminariste, à la perfection chrétienne.
mardi 16 février 2021
Je Suis l'Immaculée Conception !
Bernadette ne sentait plus l’irrésistible appel qui la poussait naguère à la Grotte. Elle y allait cependant tous les jours, par amour et par reconnaissance ; elle y priait avec ferveur, continuant les ablutions, autrefois prescrites, dans cette eau limpide qu’elle avait livrée à la dévotion des malheureux.
Son regard errait, de temps en temps, à la place de la « ronce », dépouillée par la foi populaire : la niche était vide. La Dame ne se montrait plus ; elle vivait dans son cœur par le plus délicieux souvenir.
Le 25 mars, dès le matin, l’attrait connu inonda la petite fille. La fête solennelle du jour consacré à l’Annonciation, et qui donna à Marie son plus beau titre de Gloire, portant dans tous les cœurs la douce espérance, avait attiré, à Massabielle, une foule énorme ; et lorsqu’on vit Bernadette prendre la direction du sentier, on se précipita sur ses pas.
L’appel divin n’était pas trompeur. L’enfant tombait à genoux, et à l’instant un tressaillement, bien connu par la transfiguration de son visage, annonça que la « Dame » était là. Elle était l‘a, en effet, radieuse et resplendissante, souriant à ce cher objet de sa prédilection ; elle était là pour lui apprendre son nom.
On s’en souvient, Bernadette, sous l’inspiration d’ordres vénérés, le lui avait souvent inutilement demandé pendant la quinzaine des merveilles.
La Dame avait toujours répondu par un gracieux sourire, qui semblait dire : pas encore. Cette fois, Bernadette revint à la charge, avec une insistance que tout le monde comprit, mais dont personne n’entendit le premier mot. À trois reprises différentes, elle avait dit sans se déconcerter : Ô ma Dame, voulez-vous avoir la bonté de me dire qui vous êtes ? Un sourire, toujours bienveillant, avait accueilli ses questions, qui devenaient presque importunes.
Enfin, à la troisième fois, la bouche virginale de la Vision s’anima d’une douceur inconnue, ses regards s’abaissèrent sur l’enfant qui répétait, en ce moment, les paroles de l’ange : Je vous salue, Marie pleine de grâce.
Puis, elle les éleva avec amour vers les régions immortelles d’où elle venait de descendre. Ses mains jointes, dans l’attitude de l’adoration, se séparèrent alors avec aisance, laissant glisser, sous le bras droit, le chapelet à grains de perles ; elles montèrent doucement, doucement vers le ciel, redescendirent plus doucement encore, en s'étendant sur tous les malheureux de cette terre, qu’elles semblaient vouloir étreindre d’un immense embrassement, et, rejoignant avec tendresse ces augustes mains pures devant son cœur maternel, elle dit d’une voix harmonieuse :
Je Suis l’Immaculée Conception !
À ces mots, elle disparut dans un nuage de gloire, laissant Bernadette, abîmée dans la contemplation de cette image et de ce nom.
Bernadette s’empressa d’apporter ce nom si désiré au vénérable pasteur de Lourdes ; la pauvre bergère, ignorante, était bien loin d‘en comprendre la signification. Elle courait, répétant à chaque instant, par crainte de les oublier, ces deux mots magiques : Immaculée Conception, à ce moment, parfaitement inintelligibles pour elle, ils restèrent sur ses lèvres avec leur suave parfum, et furent donnés comme une odorante primeur à M. le curé de Lourdes. Si la messagère ne comprenait pas, le prêtre comprit ; les chrétiens comprirent aussi.
On ne s’était pas abusé, c’était bien Elle. C’était Marie, la mère immaculée de Dieu ; c’était Marie, ratifiant, après quatre ans d’attente, la grande parole de Pie IX.
Les événements de ce monde, quelque petits qu’ils paraissent, ont tous une raison d‘être. Ils ne sont pas amenés par des combinaisons fortuites que le vulgaire ignorant appelle le hasard. Ils sont toujours prévus dans les éternels décrets ; et Dieu, par sa Providence, les coordonne, les lie et les enchaîne, afin de faciliter ici-bas, en manifestant sa gloire, le salut de l’humanité.
À chaque siècle, à côté du mal qui le dévore, apparaît le remède divin ; et dans le nôtre, au milieu d’un monde malade d’orgueil et de sensualisme, Dieu a conduit par la main sur le trône infaillible de Pierre, le Pontife de la Chasteté, auquel il a révélé l’antidote divin. Pie IX l’annonçait à la terre par ces deux mots immortels : Immaculée Conception.
Et le monde tressaillait d’allégresse à ce triomphe de la Pureté ; lorsque Marie, laissant les sublimes demeures qu’elle habite, demandait ici-bas, par l’entremise d’une pure enfant, l’érection d’un monument commémoratif, témoin immobile et toujours proclamant l‘antidote réparateur : l’Immaculée Conception !
Pie IX sur la chaire indéfectible de Pierre ; Marie sur le roc inébranlable de Massabielle, devant ce dix-neuvième siècle, absorbé par les intérêts de la matière, et haletant, de toutes parts, sous le ravage de l’ambition et de la volupté, poussent, à quatre ans d’intervalle, le même cri régénérateur :
L'IMMACULÉE CONCEPTION !
L’impression profonde que laissa dans les souvenirs de Bernadette la dernière scène de l’apparition ne s’effaça jamais de sa mémoire. Elle en retraçait souvent la pose animée devant les personnes de tout rang qui lui demandèrent de la reproduire.
L’enfant se recueillait en disant : Elle faisait comme ça ; et alors tous ses mouvements imitaient tous les mouvements de la Vierge, tournant comme elle vers le ciel ses grands yeux bleus et sympathiques, et arrachant aux assistants des larmes de tendresse, tant elle portait avec elle des marques de sincérité.
Un grand personnage, riche et puissant, fut tellement impressionné devant cette mimique de l’enfant, qu’il s’écria : Pour moi, cela suffit, je crois, cette enfant a vu ce qu’elle rapporte, elle n’aurait jamais inventé seule ce qu’elle vient de faire devant moi. Ce que cette petite fille a vu n’appartient pas à ce monde.
Une nouvelle faveur fut accordée à Bernadette, le 5 avril, lendemain du jour de Pâques.
L’impulsion invincible l’avait attirée, elle l’avait écoutée et, à peine rendue à la Grotte, la Pure Vierge lui était apparue, toujours rayonnante, et donnait aux nombreux spectateurs accourus une nouvelle preuve de sa puissance.
Bernadette, avant d’être ravie par l’extase, soutenait, en l’appuyant à terre, un long cierge allumé ; au moment de la transformation produite par la grâce, ses bras s’élevèrent et portèrent insensiblement ses mains jointes jusqu’à la flamme qui les atteignit bientôt, léchant les chairs et les préservant de toute brûlure ; la lumière inondait ses doigts sans lui faire éprouver la moindre douleur. Bernadette, complètement insensible, avait toujours l’œil fixé vers « sa ronce. »
— « Mais elle se brûle, s’écrie tout ce peuple témoin de ce prodige. » Laissez faire, n’approchez pas, répondit un médecin qui se trouvait présent, observant l’enfant impassible, en une circonstance qui eût dû lui occasionner une intolérable torture. Miracle ! Miracle ! tel fut le cri qui sortit de toutes les poitrines, à la vue de ce spectacle inouï.
Après un quart d‘heure d’attente, la Vierge disparut, et le docteur Dozous s’empressa d'examiner, avec le plus grand soin, les mains de l’Extatique. Pas de brûlure, pas de trace de l’action du feu. Pendant cet examen minutieux, un inconnu approcha la flamme d’un cierge des extrémités de l’enfant. — « Vous me brûlez, monsieur », dit-elle, en se retirant vivement.
Ce fut la le dernier et visible prodige accompli par cette heureuse créature, choisie pour être la, messagère de la Reine du ciel.
Sa mission était maintenant accomplie ; sa belle Dame qui lui était 17 fois apparue, lui avait donné des consolations qui, jusqu’ici, avaient adouci bien des amertumes. Il lui restait encore à boire la lie du calice. Mais elle avait confiance ; une Mère, aujourd’hui connue, la couvrait de son égide, elle allait affronter les frémissements de l’orage et la colère des Libres Penseurs.
(Notre-Dame de Lourdes et ses miracles récents, par l'Abbé A.-M. FILHOL)
Reportez-vous à Un signe des temps : Le siècle de Saint Vincent Ferrier et Notre-Dame de Lourdes, Miracles
de Notre-Dame de Lourdes : Ô Mère de mon Dieu, c'est une mère qui vous
demande la résurrection de son fils et le changement de son cœur, Prière à l'Immaculée Conception, Homélie prononcée par le Cardinal Pie dans la solennité du couronnement de Notre-Dame de Lourdes et Par quelles armes battre le Tentateur ?.
dimanche 26 avril 2020
Origine de la dévotion à Notre-Dame de Bon-Conseil
L’Église honore la Mère de Dieu sous le titre de N.-D. de Bon-Conseil et lui applique dans son office ces paroles de l‘Écriture : « J’habite dans le conseil de Dieu ; j'étais dans sa pensée quand il organisait le monde. C’est moi qui ai fait naître dans les Cieux une Lumière qui ne s’éteindra jamais ; le conseil et la prudence me sont propres. »
Dans les Litanies, elle décerne à Marie les beaux titres de Vierge très prudente, de Siège de la divine Sagesse.
En effet, Marie a donné au monde Celui qui est la Lumière éternelle. Le verbe divin, la sagesse incréée a daigné habiter en elle ; il a conversé avec elle pendant trente ans.
Qui pourrait dire dans quelle mesure Marie a reçu de Dieu les dons de conseil et de sagesse ?
Aussi Notre-Seigneur lui-même a honoré Marie comme Dame du Bon-Conseil. N’a-t-il pas consulté en tout sa sainte Mère, pendant les trente années qu’il a passées avec Elle à Nazareth ? L’Évangile en fait foi, quand il nous dit que « Jésus était soumis. » Sans doute Celui qui était la Sagesse même pouvait se passer des conseils de Marie ; mais parce qu'il voulait nous servir en tout de modèle, en fils respectueux et obéissant, il n’a rien fait d‘important sans consulter sa Mère.
Marie a donc été la conseillère de Jésus. Elle a été la conseillère des apôtres et de l’Église naissante. Après l‘Ascension de son divin Fils. C’est à Elle que les apôtres et les premiers disciples recouraient dans leurs difficultés. Marie résolvait leurs doutes, les éclairait sur la doctrine du divin Maître.
Et depuis lors Elle a continué du haut du Ciel à être la conseillère de l’Église. Déjà au concile d'Éphèse en 430, S. Cyrille qui présidait cette assemblée proclame Marie « la très-sage conseillère de l’Église. »
Les Docteurs et les Saints Pères l'appellent tantôt la Conseillère des Apôtres, tantôt la Conseillère des ignorants, la Conseillère Universelle, la Conseillère capable de nous aider dans toutes les nécessités.
Le saint Pontife Pie IX a une confiance particulière dans l’intercession de N.-D. DE BON-CONSEIL. Plusieurs fois dans le cours de son Pontificat si agité, il a fait le pèlerinage de Genazzano, pour aller s'agenouiller aux pieds de la madone de Bon-Conseil qu'on vénère dans cette église.
Un grand nombre de saints ont professé une dévotion spéciale envers N.-D. de Bon-Conseil. Saint Alphonse de Liguori s’est distingué entre tous. Il ne laissait passer aucun jour sans prier N.-D. de Bon-Conseil. L’historien de sa vie raconte qu'il avait toujours dans sa cellule une de ses images qu’il plaçait devant lui sur sa table, afin de l’avoir constamment sous les yeux. C’était à N.-D. de Bon-Conseil qu’il s‘adressait la suppliant de l’aider dans toutes ses entreprises et de le soutenir dans tous ses travaux. Jamais il ne fut trompé dans son attente. « Elle me donnait conseil en toutes choses », dit-il lui-même. Les disciples de St-Alphonse, marchant sur les traces de leur saint fondateur, propagent partout la dévotion envers N.-D. de Bon-Conseil.
À l'exemple de l’Église et des saints, les fidèles doivent prendre Marie pour Conseillère ; ils doivent l’invoquer dans leurs doutes, leurs incertitudes, leurs difficultés. Quel est l’homme qui n'ait pas besoin de conseil ? que de fois dans la vie on hésite ne sachant quel est le meilleur parti à prendre ?
L’Esprit-Saint lui-même nous avertit qu'il ne faut rien faire d’important sans prendre conseil « fili, sine consilio nihil facias. » (Eccl. xxxii). Combien se sont égarés pour avoir voulu se guider eux-mêmes !
Dans le choix d’un état de vie, dans les devoirs d'état, dans les entreprises même et dans les maladies, recourez sans doute aux conseils des hommes sages, surtout de ceux que Dieu vous a donnés pour guides ; mais ne négligez pas de consulter Marie, la Mère du Bon-Conseil, et vous éprouverez la vérité de cette parole des Livres saints : « Consilium illius sicut fons vitæ permanet. Son conseil donne à tous la vie, la grâce et le salut. » (Eccl. xxi)
(Notice de l'Antique pèlerinage de Notre-Dame de Bon-Conseil)
Reportez-vous à HISTOIRE DE LA MADONE DE GENAZZANO DITE NOTRE-DAME DU BON CONSEIL, Prière à Notre-Dame de Bon Conseil de Sa Sainteté le Pape Léon XIII, PRIÈRE À NOTRE-DAME DE BON CONSEIL POUR DEMANDER LA GRÂCE DE CONNAITRE SA VOCATION, Neuvaine en l'honneur de Notre-Dame de Bon Conseil, Litanies de Notre-Dame de Bon-Conseil, ACTE DE CONSÉCRATION À NOTRE-DAME DE BON-CONSEIL et CANTATE DE NOTRE-DAME DE BON CONSEIL.
mercredi 7 août 2019
PRIÈRE À MARIE DÉSOLÉE
Je vous salue, Marie pleine de douleurs ; le Dieu crucifié est avec vous ; vous êtes vraiment digne de compassion entre toutes les femmes, et Jésus, le fruit de vos entrailles en est digne avec vous. Sainte Marie, mère du Sauveur crucifié, donnez des larmes aux malheureux bourreaux de votre Fils, afin que nous les répandions maintenant et à l'heure de notre mort. Ainsi soit-il.
Indulgence de cent jours applicable aux âmes du purgatoire chaque fois qu'on récitera avec un cœur contrit la prière ci-dessus à l'honneur de la très sainte Vierge désolée. (Pie IX, 23 décembre 1847)
Reportez-vous à Méditation pour la Fête de Notre-Dame des Sept Douleurs, Litanies des douleurs de la Sainte Vierge, Petit chapelet des sept douleurs de Marie, Prière d'un enfant de Marie, et Discours sur les douleurs de Marie.
samedi 23 mars 2019
LES SEPT DIMANCHES DE SAINT JOSEPH
DÉVOTION DES SEPT DIMANCHES
Consacrés à honorer
les Sept Allégresses et les Sept Douleurs de saint Joseph
(Avec indulgence plénière)
Depuis que le Ciel a révélé à la terre la gloire de saint Joseph si peu connu dans les premiers siècles, on a pu lui appliquer à bien plus juste titre qu'à Mardochée ces paroles d'Assuérus : « Ainsi doit être honoré celui que le Roi juge à propos d'élever au faîte des honneurs. »
Notre siècle, dit le savant et pieux Évêque de Luçon, semble avoir recueilli plus spécialement cette parole prophétique : Allez à Joseph et faites tout ce qu'il vous dira (Gen., XLI). Déjà l'héroïque confesseur, Pie VII de sainte mémoire, avait ouvert libéralement les trésors de l'Église en faveur de ceux qui invoquent cet illustre Patriarche. Le souverain pontife Pie IX, qui occupe si glorieusement la chaire de Pierre, voulant, dans son amour si tendre et si ardent pour Marie, répandre partout la dévotion à son chaste Époux, a étendu à toute l'Église la touchante solennité du Patronage de saint Joseph qui se célèbre le troisième dimanche après Pâques. Pour ranimer la confiance des âmes pieuses pour celui que l'on invoque comme le patron et le modèle de la vie intérieure, il a ajouté du nouvelles et de bien grandes indulgences à celles que ses prédécesseurs avaient accordées aux pratiques en l'honneur de saint Joseph.
On gagnait 300 jours d'indulgence, chaque fois, d'après une concession de SS. Grégoire XVI, en date du 22 janvier 1836, en récitant, pendant sept dimanches consécutifs, dans le courant de l'année, au choix des fidèles, la prière connue sous le nom des Sept Allégresses et des Sept Douleurs de saint Joseph, et le septième dimanche une indulgence plénière ; SS. Pie IX, le 1er février 1847, a ajouté de plus une indulgence plénière, à chaque dimanche, applicable aux âmes du purgatoire; et le 22 mars de la même année, Sa Sainteté a étendu ces mêmes indulgences à tous ceux qui, ne sachant point lire ou n'ayant pas la prière susdite, réciteraient, ces mêmes dimanches, sept Pater, Ave, Gloria, etc., en y ajoutant les conditions d'usage.
Les fidèles serviteurs de saint Joseph ont répondu à cette pieuse invitation du Vicaire de Jésus-Christ, en adoptant avec empressement la salutaire pratique des Sept dimanches consacrés à honorer le glorieux Époux de Marie. Les grâces précieuses qu'ils ont obtenues, les miracles que le Seigneur a opérés en faveur de ceux qui l'ont faite avec confiance et avec piété, ont contribué puissamment, dans ces derniers temps, à augmenter la dévotion à saint Joseph ; c'est pour aider, dans la mesure de nos forces, les âmes pieuses à se bien acquitter de ces saints exercices que nous leur offrons une méditation pour chacun des sept dimanches consacrés aux allégresses et aux douleurs de notre saint Patriarche ; afin que, s'adressant à lui avec plus d'amour et de ferveur, elles obtiennent tout ce qu'elles demanderont en son nom pour elles et pour tous ceux auxquels elles s'intéressent dans ce monde et dans l'autre.
Quoiqu'il n'y ait aucune époque fixée pour gagner les indulgences plénières attachées à cette sainte pratique, nous croyons cependant que l'on pourrait choisir préférablement les dimanches qui précèdent les fêtes de saint Joseph, ou bien quelques circonstances particulières, dans lesquelles on a besoin de grâces plus abondantes pour connaître sa vocation, par exemple, et pour obtenir la conversion d'un pécheur, et le succès d'une affaire qui intéresse la gloire de Dieu. On devra, après chacune de ces sept méditations, réciter les douleurs et les allégresses de saint Joseph, seules prescrites pour gagner les indulgences.
EXEMPLE
Voici un trait rapporté par des auteurs très graves et dignes de foi (Joann. de Panno, in authen. ord. Francisc. — Gratian. Carmel I. V. de S. Joseph. — Carthac. Moral. — P Jacquinot, P. Patrignani, l. LL, c. 8), qui prouve combien ce pieux exercice en l'honneur de saint Joseph lui est agréable et quelles grâces précieuses il procure à ceux qui le font avec piété : Deux Pères Franciscains naviguaient sur les côtes de Flandre, lorsqu'il s'éleva une affreuse tempête qui submergea le navire avec trois cents passagers qui s'y trouvaient. La divine Providence permit que ces deux Religieux s'emparassent d'une des pièces du navire, sur laquelle ils se soutinrent entre la vie et la mort pendant trois jours, ayant sans cesse sous les yeux l'abîme immense qui menaçait de les engloutir. Fidèles serviteurs de saint Joseph, pleins de confiance en sa toute-puissante protection, ils se recommandèrent à lui comme à leur véritable planche de salut après le naufrage et à la douce étoile qui devait les conduire au port. À peine ont-ils achevé leur prière, qu'elle est exaucée ; l'orage se dissipe, l'air devient serein, la mer s'apaise et l'espérance renaît au fond de leur cœur. Mais ce qui mit le comble à leur joie, c'est la vue d'un jeune homme, plein de grâce et de majesté, qui, après les avoir salués avec bonté, s'offrit à leur servir de guide. Ils avancent déjà, ils voguent heureusement, la mer et les vents rendent obéissance à celui à qui le Dieu de la mer et des vents avait autrefois obéi. Arrivés sur le rivage, les deux Religieux se jettent aux pieds de leur libérateur, qu'ils ne connaissent pas et qu'ils croient être quelque ange : après lui avoir offert les plus vives actions de grâces, ils le prient instamment de vouloir bien leur dire son nom. « Je suis Joseph, leur répondit-il : si vous voulez faire quelque chose qui me soit agréable, ne laissez passer aucun jour sans réciter dévotement sept fois l'Oraison Dominicale et la Salutation Angélique en mémoire des Sept Douleurs dont mon âme fut affligée, et des Sept Allégresses dont mon cœur, fut souverainement consolé pendant les jours que je passai sur la terre dans la compagnie de Jésus et de Marie. » À ces mots, il disparut, les laissant comblés de la joie la plus vive, et pénétrés du désir le plus sincère de l'honorer et de le servir tous les jours de leur vie.
Exercice en l'honneur
des Sept Douleurs et des Sept Allégresses de saint Joseph
Ô très-chaste Époux de Marie, glorieux saint Joseph, autant furent terribles la douleur et l'angoisse de votre cœur, lorsque vous pensiez devoir vous séparer de votre Épouse sans tache, autant fut vive l'allégresse que vous éprouvâtes quand l'Ange vous révéla le mystère de l'incarnation.
Nous vous supplions, par cette douleur et cette allégresse, de daigner consoler nos âmes maintenant et dans nos derniers moments, en nous obtenant la grâce de mener une vie sainte et de mourir d'une mort semblable à la vôtre, entre les bras de Jésus et de Marie.
Pater. Ave. Gloria Patri.
Ô très-heureux Patriarche, glorieux saint Joseph, qui avez été élevé à l'éminente dignité de père putatif du Verbe fait chair, la douleur que vous éprouvâtes en voyant naître l'Enfant-Jésus dans une si grande pauvreté, se changea bientôt en une joie céleste, lorsque vous entendîtes les concerts des Anges, et que vous fûtes témoin des glorieux événements de cette nuit resplendissante.
Nous vous supplions, par cette douleur et cette allégresse, de nous obtenir, après le cours de cette vie, la grâce d'être admis à entendre les sacrés cantiques des Anges, et à jouir de la gloire céleste.
Pater. Ave. Gloria Patri.
Ô modèle parfait de soumissions aux lois divines, glorieux saint Joseph, la vue du sang précieux que le Rédempteur-Enfant répandit dans sa circoncision perça votre cœur de douleur ; mais l'imposition du nom de Jésus le ranima en vous remplissant de consolation.
Obtenez-nous, par cette douleur et cette allégresse, qu'après avoir extirpé tous nos vices pendant la vie, nous puissions mourir avec joie en invoquant de cœur et de bouche le très saint nom de Jésus.
Pater. Ave. Gloria Patri.
Ô saint très-fidèle ! à qui furent communiqués les mystères de notre Rédemption, glorieux saint Joseph, si la prophétie de Siméon vous causa une douleur mortelle, en vous apprenant ce que Jésus et Marie devaient souffrir, elle vous remplit en même temps d'un saint contentement en annonçant que ces souffrances seraient suivies du salut d'une multitude innombrable d'âmes qui ressusciteraient à la vie.
Demandez pour nous, par cette douleur et cette allégresse, que nous soyons du nombre de ceux qui, par les mérites de Jésus-Christ et l'intercession de la Vierge Marie, ressusciteront pour la gloire.
Pater. Ave. Gloria Patri.
Ô très-vigilant Gardien du Fils de Dieu fait homme, glorieux saint Joseph ! combien vous avez souffert pour servir le Fils du Très-Haut et pourvoir à sa subsistance, particulièrement pendant la fuite en Égypte ; mais aussi combien vous dûtes jouir d'avoir toujours avec vous le Fils de Dieu, et de voir tomber, à son arrivée, les idoles des Égyptiens !
Obtenez-nous, par cette douleur et celle allégresse, qu'en tenant toujours le tyran infernal éloigné de nous, surtout par la fuite des occasions dangereuses, nous méritions de voir tomber de nos cœurs toutes les idoles des affections terrestres, et qu'entièrement consacrés au service de Jésus et de Marie, nous ne vivions plus que pour eux, et que nous leur offrions avec joie notre dernier soupir.
Pater. Ave. Gloria Patri.
Ô Ange de la terre, glorieux saint Joseph ! qui avez vu avec admiration le Roi du Ciel soumis à vos ordres, la consolation que vous éprouvâtes en le ramenant d'Égypte fut troublée par la crainte d'Archélaüs ; cependant, rassuré par l'Ange, vous restâtes avec joie à Nazareth, dans la compagnie de Jésus et de Marie.
Obtenez-nous, par cette douleur et cette allégresse, que, dégagés de toutes les craintes qui ne pourraient que nous être nuisibles, nous jouissions de la paix de la conscience, que nous vivions en sécurité dans l'union avec Jésus et Marie, et que ce soit entre leurs mains que nous remettions nos âmes au moment de la mort.
Pater. Ave. Gloria Patri.
Ô modèle de sainteté, glorieux saint Joseph ! qui, ayant perdu l'Enfant-Jésus sans qu'il y eût de votre faute, le cherchâtes pendant trois jours avec une grande douleur, jusqu'au moment où vous éprouvâtes la plus grande joie de votre vie en le retrouvant dans le temple au milieu des Docteurs.
Nous vous supplions du fond du cœur, par cette douleur et cette allégresse, de daigner employer votre crédit auprès de Dieu, afin qu'il ne nous arrive jamais de perdre Jésus par le péché mortel, et que, si ce malheur extrême nous arrivait, nous le cherchions de nouveau avec la plus profonde douleur, jusqu'à ce que nous le retrouvions favorable, surtout au moment de la mort, pour pouvoir ensuite jouir de lui dans le Ciel et bénir avec vous vos infinies miséricordes pendant toute l'éternité.
Pater. Ave. Gloria Patri.
Ant. Jésus commençait sa trentième année lorsqu'on le prenait pour le fils de Joseph.
V/ Priez pour nous, saint Joseph ;
R/ Afin que nous soyons dignes des promesses de Jésus-Christ.
PRIONS
Ô Dieu qui, par une Providence ineffable, avez daigné choisir le bienheureux Joseph pour être l'époux de votre très-sainte Mère ; faites, nous vous en supplions, qu'en le vénérant sur la terre comme notre protecteur, nous méritions de l'avoir pour intercesseur dans les cieux, vous qui, étant Dieu, vivez et régnez, etc. Ainsi soit-il.
Reportez-vous à Miracle de guérison obtenu par Saint Joseph, Prééminence de saint Joseph dans le Ciel, Saint Joseph élevé au-dessus de tous les saints, Pouvoir de Saint Joseph, Confiance de sainte Thérèse d'Avila en saint Joseph, Invocations et prières à Saint Joseph pour chaque jour de la semaine, Saint Joseph à Nazareth, Saint Joseph, patron et modèle des âmes intérieures, Neuvaine à Saint Joseph, pour se préparer à ses Fêtes, et obtenir quelque grâce spéciale pendant la vie et une bonne mort, Neuvaine de prières à Saint Joseph, Tendresse de saint Joseph pour Jésus, Saint Joseph patron et modèle des religieux, Saint Joseph choisi de Dieu pour être le chef de la Sainte-Famille, Excellence du saint nom de Joseph, Prière pour obtenir la pureté, Litanies de la paternelle protection de Saint Joseph, Litanies des souffrances de Saint Joseph, Litanies de Saint Joseph, Prière efficace en l'honneur de Saint Joseph, Courtes prières à Saint Joseph, Chapelet de Saint Joseph, Acte de consécration au glorieux Saint Joseph, Prière de Saint Pie X au glorieux Saint Joseph modèle des travailleurs, Sermon pour la Fête de Saint Joseph, Marie est donnée en mariage à Saint Joseph, Litanies de l'amour de Marie, Supplique à Saint Joseph, Oraison pour présenter son cœur à saint Joseph et Méditations et Exemples pour le Mois de Saint Joseph.
dimanche 17 mars 2019
Prière efficace en l'honneur de Saint Joseph
Ô saint Joseph, père et protecteur des vierges, gardien fidèle à qui Dieu confia Jésus, l'innocence même, et Marie la vierge des vierges ! ah ! je vous en supplie et je vous en conjure par Jésus et Marie, par ce double dépôt qui vous fut si cher, faites que, préservé de toute souillure, pur de cœur et chaste de corps, je serve constamment Jésus et Marie, dans une chasteté parfaite. Ainsi soit-il.
(Pie VII a accordé aux prêtres une année d'indulgence pour chaque récitation, et Pie IX, cent jours à tous les fidèles.)
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mardi 12 mars 2019
AD DIEM ILLUM LAETISSIMUM, Lettre encyclique de Sa Sainteté le Pape Pie X, Sur l'Immaculée Conception de Marie
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Proclamation du Dogme de l'Immaculée Conception |
AD DIEM ILLUM LAETISSIMUM
LETTRE ENCYCLIQUE DE SA SAINTETÉ LE PAPE PIE X
Sur l'Immaculée Conception de Marie
Aux Patriarches, Primats, Archevêques, Évêques et autres ordinaires en paix et en communion avec le Siège Apostolique,
Vénérables Frères,
Salut et Bénédiction Apostolique.
Le cours du temps nous ramènera dans peu de mois à ce jour d'incomparable allégresse où, entouré d'une magnifique couronne de cardinaux et d'évêques — il y a de cela cinquante ans, — Notre prédécesseur Pie IX, pontife de sainte mémoire, déclara et proclama de révélation divine, par l'autorité du magistère apostolique, que Marie a été, dès le premier instant de sa conception, totalement exempte de la tache originelle. Proclamation dont nul n'ignore qu'elle fut accueillie par tous les fidèles de l'univers d'un tel cœur, avec de tels transports de joie et d'enthousiasme, qu'il n'y eut jamais, de mémoire d'homme, manifestation de piété soit à l'égard de l'auguste Mère de Dieu, soit envers le Vicaire de Jésus-Christ, ni si grandiose, ni si unanime.
Aujourd'hui, Vénérables Frères, bien qu'à la distance d'un demi-siècle, ne pouvons-nous espérer que le souvenir ravivé de la Vierge Immaculée provoque en nos âmes comme un écho de ces saintes allégresses et renouvelle les spectacles magnifiques de foi et d'amour envers l'auguste Mère de Dieu, qui se contemplèrent en ce passé déjà lointain ? Ce qui Nous le fait désirer ardemment, c'est un sentiment, que Nous avons toujours nourri en Notre cœur, de piété envers la bienheureuse Vierge aussi bien que de gratitude profonde pour ses bienfaits. Ce qui, d'ailleurs, Nous en donne l'assurance, c'est le zèle des catholiques, perpétuellement en éveil et qui va au-devant de tout nouvel honneur, de tout nouveau témoignage d'amour à rendre à la sublime Vierge. Cependant, Nous ne voulons pas dissimuler qu'une chose avive grandement en Nous ce désir : c'est qu'il Nous semble, à en croire un secret pressentiment de Notre âme, que Nous pouvons nous promettre pour un avenir peu éloigné l'accomplissement des hautes espérances, et assurément non téméraires, que fit concevoir à notre prédécesseur Pie IX et à tout l'Épiscopat catholique la définition solennelle du dogme de l'Immaculée Conception de Marie.
Ces espérances, à la vérité, il en est peu qui ne se lamentent de ne les avoir point vues jusqu'ici se réaliser, et qui n'empruntent à Jérémie cette parole : « Nous avons attendu la paix, et ce bien n'est pas venu : le temps de la guérison, et voici la terreur » (Jer. VIII, 15). Mais ne faut-il pas taxer de peu de foi des hommes qui négligent ainsi de pénétrer ou de considérer sous leur vrai jour, les œuvres de Dieu ? Qui pourrait compter, en effet, qui pourrait supputer les trésors secrets de grâces que, durant tout ce temps, Dieu a versés dans son Église à la prière de la Vierge ? Et, laissant même cela, que dire de ce Concile du Vatican, si admirable d'opportunité ? et de la définition de l'infaillibilité pontificale, formule si bien à point à l'encontre des erreurs qui allaient sitôt surgir ? et de cet élan de piété, enfin, chose nouvelle et véritablement inouïe, qui fait affluer, depuis longtemps déjà, aux pieds du Vicaire de Jésus-Christ, pour le vénérer face à face, les fidèles de toute langue et de tout climat ? Et n'est-ce pas un admirable effet de la divine Providence que Nos deux prédécesseurs, Pie IX et Léon XIII, aient pu, en des temps si troublés, gouverner saintement l'Église, dans des conditions de durée qui n'avaient été accordées à aucun autre pontificat ? À quoi il faut ajouter que Pie IX n'avait pas plus tôt déclaré de croyance catholique la conception sans tache de Marie que, dans la ville de Lourdes, s'inauguraient de merveilleuses manifestations de la Vierge, et ce fut, on le sait, l'origine de ces temples élevés en l'honneur de l'Immaculée Mère de Dieu, ouvrage de haute magnificence et d'immense travail, où des prodiges quotidiens, dus à son intercession, fournissent de splendides arguments pour confondre l'incrédulité moderne. Tant et de si insignes bienfaits accordés par Dieu sur les pieuses sollicitations de Marie, durant les cinquante années qui vont finir, ne doivent-ils pas nous faire espérer le salut pour un temps plus prochain que nous ne l'avions cru ? Aussi bien est-ce comme une loi de la Providence divine, l'expérience nous l'apprend, que des dernières extrémités du mal à la délivrance il n'y a jamais bien loin. « Son temps est près de venir, et ses jours ne sont pas loin. Car le Seigneur prendra Jacob en pitié, et en Israël encore il aura son élu » (Is.XIV, 1). C'est donc avec une entière confiance que nous pouvons attendre nous-mêmes de nous écrier sous peu : « Le Seigneur a brisé la verge des impies. La terre est dans la paix et le silence ; elle s'est réjouie et elle a exulté » (Is. XIV, 5 et 7).
Mais, si le cinquantième anniversaire de l'acte pontifical par lequel fut déclarée sans souillure la conception de Marie, doit provoquer au sein du peuple chrétien d'enthousiastes élans, la raison en est surtout dans une nécessité qu'ont exposée Nos précédentes Lettres encycliques, Nous voulons dire de tout restaurer en Jésus-Christ. Car, qui ne tient pour établi qu'il n'est route ni plus sûre ni plus facile que Marie par où les hommes puissent arriver jusqu'à Jésus-Christ, et obtenir, moyennant Jésus-Christ, cette parfaite adoption des fils, qui fait saint et sans tache sous le regard de Dieu ?
Certes, s'il a été dit avec vérité à la Vierge : « Bienheureuse qui avez cru, car les choses s'accompliront qui vous ont été dites par le Seigneur » (Luc. I, 45), savoir qu'elle concevrait et enfanterait le Fils de Dieu ; si, conséquemment, elle a accueilli dans son sein celui qui par nature est Vérité, de façon que, « engendré dans un nouvel ordre et par une nouvelle naissance..., invisible en lui-même, il se rendît visible dans notre chair » (S. LEO M., Serm. 2, de Nativ. Domini, c. II) ; du moment que le Fils de Dieu est l'auteur et le consommateur de notre foi, il est de toute nécessité que Marie soit dite participante des divins mystères et en quelque sorte leur gardienne, et que sur elle aussi, comme sur le plus noble fondement après Jésus-Christ, repose la foi de tous les siècles.
Comment en serait-il autrement ? Dieu n'eût-il pu, par une autre voie que Marie, nous octroyer le réparateur de l'humanité et le fondateur de la foi ? Mais, puisqu'il a plu à l'éternelle Providence que l'Homme-Dieu nous fût donné par la Vierge, et puisque celle-ci, l'ayant eu de la féconde vertu du divin Esprit, l'a porté en réalité dans son sein, que reste-t-il si ce n'est que nous recevions Jésus des mains de Marie ?
Aussi, voyons-nous que dans les Saintes Écritures, partout où est prophétisée la grâce qui doit nous advenir, partout aussi, ou peu s'en faut, le Sauveur des hommes y apparaît en compagnie de sa sainte Mère. Il sortira, l'Agneau dominateur de la terre, mais de la pierre du désert ; elle montera, la fleur, mais de la tige de Jessé. À voir, dans l'avenir, Marie écraser la tête du serpent, Adam contient les larmes que la malédiction arrachait à son cœur. Marie occupe la pensée de Noé dans les flancs de l'arche libératrice ; d'Abraham, empêché d'immoler son fils ; de Jacob, contemplant l'échelle où montent et d'où descendent les anges ; de Moïse, en admiration devant le buisson qui brûle sans se consumer ; de David, chantant et sautant en conduisant l'arche divine ; d'Élie, apercevant la petite nuée qui monte de la mer. Et, sans nous étendre davantage, nous trouvons en Marie, après Jésus, la fin de la loi, la vérité des images et des oracles.
Qu'il appartienne à la Vierge, surtout à elle, de conduire à la connaissance de Jésus, c'est de quoi l'on ne peut douter, si l'on considère, entre autres choses, que, seule au monde, elle a eu avec lui, dans une communauté de toit et dans une familiarité intime de trente années, ces relations étroites qui sont de mise entre une mère et son fils. Les admirables mystères de la naissance et de l'enfance de Jésus, ceux notamment qui se rapportent à son incarnation, principe et fondement de notre foi, à qui ont-ils été plus amplement dévoilés qu'à sa Mère ? Elle conservait et repassait dans son cœur ce qu'elle avait vu de ses actes à Bethléem, ce qu'elle en avait vu à Jérusalem dans le temple ; mais initiée encore à ses conseils et aux desseins secrets de sa volonté, elle a vécu, doit-on dire, la vie même de son Fils. Non, personne au monde comme elle n'a connu à fond Jésus ; personne n'est meilleur maître et meilleur guide pour faire connaître Jésus.
Il suit de là, et Nous l'avons déjà insinué, que personne ne la vaut, non plus, pour unir les hommes à Jésus. Si, en effet, selon la doctrine du divin Maître, « la vie éternelle consiste à vous connaître, vous qui êtes le seul vrai Dieu, et celui que vous avez envoyé, Jésus-Christ » (Joan. XVII, 3): comme nous parvenons par Marie à la connaissance de Jésus-Christ, par elle aussi, il nous est plus facile d'acquérir la vie dont il est le principe et la source.
Et maintenant, pour peu que nous considérions combien de motifs et combien pressants invitent cette Mère très sainte à nous donner largement de l'abondance de ces trésors, quels surcroîts n'y puisera pas notre espérance !
Marie n'est-elle pas la Mère de Dieu ? Elle est donc aussi notre Mère.
Car un principe à poser, c'est que Jésus, Verbe fait chair, est en même temps le Sauveur du genre humain. Or, en temps que Dieu-Homme, il a un corps comme les autres hommes ; en tant que Rédempteur de notre race, un corps spirituel, ou, comme on dit, mystique, qui n'est autre que la société des chrétiens liés à lui par la foi. « Nombreux comme nous sommes, nous faisons un seul corps en Jésus-Christ » (Rom. XII, 5). Or, la Vierge n'a pas seulement conçu le Fils de Dieu afin que, recevant d'elle la nature humaine, il devint homme ; mais afin qu'il devint encore, moyennant cette nature reçue d'elle, le Sauveur des hommes. Ce qui explique la parole des anges aux bergers: « Un Sauveur vous est né, qui est le Christ, le Seigneur » (Luc. II, 11).
Aussi, dans le chaste sein de la Vierge, où Jésus a pris une chair mortelle, là même il s'est adjoint un corps spirituel formé de tous ceux qui devaient croire en lui: et l'on peut dire que, tenant Jésus dans son sein, Marie y portait encore tous ceux dont la vie du Sauveur renfermait la vie.
Nous tous donc, qui, unis au Christ, sommes, comme parle l'Apôtre, « les membres de son corps issus de sa chair et de ses os » (Ephes. V, 30), nous devons nous dire originaires du sein de la Vierge, d'où nous sortîmes un jour à l'instar d'un corps attaché à sa tête.
C'est pour cela que nous sommes appelés, en un sens spirituel, à la vérité, et tout mystique, les fils de Marie, et qu'elle est, de son côté, notre Mère à tous. « Mère selon l'esprit, Mère véritable néanmoins des membres de Jésus-Christ, que nous sommes nous-mêmes » (S. AUG., L. de S. Virginitate, c. VI). Si donc la bienheureuse Vierge est tout à la fois Mère de Dieu et des hommes, qui peut douter qu'elle ne s'emploie de toutes ses forces, auprès de son Fils, « tête du corps de l'Église » (Coloss. I, 18), afin qu'il répande sur nous qui sommes ses membres les dons de sa grâce, celui notamment de la connaître et de « vivre par lui » (I Joan. IV, 9) ?
Mais il n'est pas seulement à la louange de la Vierge qu'elle a fourni « la matière de sa chair au Fils unique de Dieu, devant naître avec des membres humains » (S. BED. VEN., l. IV, in Luc. XI), et qu'elle a ainsi préparé une victime pour le salut des hommes ; sa mission fut encore de la garder, cette victime, de la nourrir et de la présenter au jour voulu, à l'autel.
Aussi, entre Marie et Jésus, perpétuelle société de vie et de souffrance, qui fait qu'on peut leur appliquer à égal titre cette parole du Prophète: « Ma vie s'est consumée dans la douleur et mes années dans les gémissements » (Ps. XXX, 11).
Et quand vint pour Jésus l'heure suprême, on vit la Vierge « debout auprès de la croix, saisie sans doute par l'horreur du spectacle, heureuse pourtant de ce que son Fils s'immolait pour le salut du genre humain, et, d'ailleurs, participant tellement à ses douleurs que de prendre sur elle les tourments qu'il endurait lui eût paru, si la chose eût été possible, infiniment préférable » (S. BONAV., I Sent., d. 48, ad Litt., dub. 4).
La conséquence de cette communauté de sentiments et de souffrances entre Marie et Jésus, c'est que Marie « mérita très légitimement de devenir la réparatrice de l'humanité déchue » (EADMERI MON., De Excellentia Virg. Mariæ, c. IX), et, partant, la dispensatrice de tous les trésors que Jésus nous a acquis par sa mort et par son sang.
Certes, l'on ne peut dire que la dispensation de ces trésors ne soit un droit propre et particulier de Jésus-Christ, car ils sont le fruit exclusif de sa mort, et lui-même est, de par sa nature, le médiateur de Dieu et des hommes.
Toutefois, en raison de cette société de douleurs et d'angoisses, déjà mentionnée, entre la Mère et le Fils a été donné à cette auguste Vierge « d'être auprès de son Fils unique la très puissante médiatrice et avocate du monde entier » (PIUS IX, in Bull. Ineffabilis).
La source est donc Jésus Christ : « de la plénitude de qui nous avons tout reçu » (Joan. I, 16) ; « par qui tout le corps, lié et rendu compact moyennant les jointures de communication, prend les accroissements propres au corps et s'édifie dans la charité » (Ephes. IV, 16). Mais Marie, comme le remarque justement saint Bernard, est l'« aqueduc » (Serm. de temp., in Nativ. B. V., « De Aquæductu », n. 4) ; ou, si l'on veut, cette partie médiane qui a pour propre de rattacher le corps à la tête et de transmettre au corps les influences et efficacités de la tête, Nous voulons dire le cou. Oui, dit saint Bernardin de Sienne, « elle est le cou de notre chef, moyennant lequel celui-ci communique à son corps mystique tous les dons spirituels » (S. BERNARDIN. SEN., Quadrag. de Evangelio æterno, Serm. X, a. III, c.3). Il s'en faut donc grandement, on le voit, que Nous attribuions à la Mère de Dieu une vertu productrice de la grâce, vertu qui est de Dieu seul. Néanmoins, parce que Marie l'emporte sur tous en sainteté et en union avec Jésus-Christ et qu'elle a été associée par Jésus-Christ à l'œuvre de la rédemption, elle nous mérite de congruo, comme disent les théologiens, ce que Jésus-Christ nous a mérité de condigno, et elle est le ministre suprême de la dispensation des grâces. « Lui, Jésus, siège à la droite de la majesté divine dans la sublimité des cieux » (Hebr. I, 3). Elle, Marie, se tient à la droite de son Fils ; « refuge si assuré et secours si fidèle contre tous les dangers, que l'on n'a rien à craindre, à désespérer de rien sous sa conduite, sous ses auspices, sous son patronage, sous son égide » (PIUS IX, in Bull. Ineffabilis).
Ces principes posés, et pour revenir à notre dessein, qui ne reconnaîtra que c'est à juste titre que Nous avons affirmé de Marie que, compagne assidue de Jésus, de la maison de Nazareth au plateau du Calvaire, initiée plus que tout autre aux secrets de son cœur, dispensatrice, comme de droit maternel, des trésors de ses mérites, elle est, pour toutes ces causes, d'un secours très certain et très efficace pour arriver à la connaissance et à l'amour de Jésus-Christ ? Ces hommes, hélas ! nous en fournissent dans leur conduite une preuve trop péremptoire qui, séduits par les artifices du démon ou trompés par de fausses doctrines, croient pouvoir se passer du secours de la Vierge. Infortunés, qui négligent Marie sous prétexte d'honneur à rendre à Jésus-Christ ! Comme si l'on pouvait trouver l'Enfant autrement qu'avec la Mère !
S'il en est ainsi, Vénérables Frères, c'est à ce but que doivent surtout viser toutes les solennités qui se préparent partout en l'honneur de la Sainte et Immaculée Conception de Marie. Nul hommage, en effet, ne lui est plus agréable, nul ne lui est plus doux, que si nous connaissons et aimons véritablement Jésus-Christ. Que les foules emplissent donc les temples, qu'il se célèbre des fêtes pompeuses, qu'il y ait des réjouissances publiques: ce sont choses éminemment propres à raviver la foi. Mais nous n'aurons là, s'il ne s'y ajoute les sentiments du cœur, que pure forme, que simples apparences de piété. À ce spectacle, la Vierge, empruntant les paroles de Jésus-Christ, nous adressera ce juste reproche: « Ce peuple m'honore des lèvres, mais son cœur est loin de moi » (Matth. XV, 8).
Car enfin, pour être de bon aloi, le culte de la Mère de Dieu doit jaillir du cœur ; les actes du corps n'ont ici utilité ni valeur s'ils sont isolés des actes de l'âme. Or, ceux-ci ne peuvent se rapporter qu'à un seul objet, qui est que nous observions pleinement ce que le divin Fils de Marie commande. Car, si l'amour véritable est celui-là seul qui a la vertu d'unir les volontés, il est de toute nécessité que nous ayons cette même volonté avec Marie de servir Jésus Notre-Seigneur. La recommandation que fit cette Vierge très prudente aux serviteurs des noces de Cana, elle nous l'adresse à nous-mêmes : « Faites tout ce qu'il vous dira » (Joan. II,5). Or, voici la parole de Jésus-Christ : « Si vous voulez entrer dans la vie, observez les commandements » (Matth. XIX, 17).
Que chacun se persuade donc bien de cette vérité que, si sa piété à l'égard de la bienheureuse Vierge ne le retient pas de pécher ou ne lui inspire pas la volonté d'amender une vie coupable, c'est là une piété fallacieuse et mensongère, dépourvue qu'elle est de son effet propre et de son fruit naturel.
Que si quelqu'un désire à ces choses une confirmation, il est facile de la trouver dans le dogme même de la Conception Immaculée de Marie. Car, pour omettre la tradition, source de vérité aussi bien que la Sainte Écriture, comment cette persuasion de l'Immaculée Conception de la Vierge a-t-elle paru de tout temps si conforme au sens catholique, qu'on a pu la tenir comme incorporée et comme innée à l'âme des fidèles ? « Nous avons en horreur de dire de cette femme — c'est la réponse de Denys le Chartreux — que, devant écraser un jour la tête du serpent, elle ait jamais été écrasée par lui, et que, mère de Dieu, elle ait jamais été fille du démon » (III Sent., d. II, q. 1). Non, l'intelligence chrétienne ne pouvait se faire à cette idée que la chair du Christ, sainte, sans tache et innocente, eût pris origine au sein de Marie, d'une chair ayant jamais, ne fût-ce que pour un rapide instant, contracté quelque souillure. Et pourquoi cela, si ce n'est qu'une opposition infinie sépare Dieu du péché ? C'est là, sans contredit, l'origine de cette conviction commune à tous les chrétiens, que Jésus-Christ avant même que, revêtu de la nature humaine, il nous lavât de nos péchés dans son sang, dut accorder à Marie cette grâce et ce privilège spécial d'être préservée et exempte, dès le premier instant de sa conception, de toute contagion de la tache originelle.
Si donc Dieu a en telle horreur le péché que d'avoir voulu affranchir la future Mère de son Fils non seulement de ces taches qui se contractent volontairement, mais, par une faveur spéciale et en prévision des mérites de Jésus-Christ, de cette autre encore dont une sorte de funeste héritage nous transmet à nous tous, les enfants d'Adam, la triste marque, qui peut douter que ce ne soit un devoir pour quiconque prétend à gagner par ses hommages le cœur de Marie, de corriger ce qu'il peut y avoir en lui d'habitudes vicieuses et dépravées, et de dompter les passions qui l'incitent au mal ?
Quiconque veut, en outre — et qui ne doit le vouloir ? — que sa dévotion envers la Vierge soit digne d'elle et parfaite, doit aller plus loin, et tendre, par tous les efforts, à l'imitation de ses exemples. C'est une loi divine, en effet, que ceux-là seuls obtiennent l'éternelle béatitude qui se trouvent avoir reproduit en eux, par une fidèle imitation, la forme de la patience et de la sainteté de Jésus-Christ : « car ceux qu'il a connus dans sa prescience, il les a prédestinés pour être conformes à l'image de son Fils, afin que celui-ci soit l'aîné entre plusieurs frères » (Rom. VIII, 29). Mais telle est généralement notre infirmité, que la sublimité de cet exemplaire aisément nous décourage. Aussi a-ce été, de la part de Dieu, une attention toute providentielle, que de nous en proposer un autre aussi rapproché de Jésus-Christ qu'il est permis à l'humaine nature, et néanmoins merveilleusement accommodé à notre faiblesse. C'est la Mère de Dieu, et nul autre. « Telle fut Marie, dit à ce sujet saint Ambroise, que sa vie, à elle seule, est pour tous un enseignement ». D'où il conclut avec beaucoup de justesse : « Ayez donc sous vos yeux, dépeintes comme dans une image, la virginité et la vie de la bienheureuse Vierge, laquelle réfléchit, ainsi qu'un miroir, l'éclat de la pureté et la forme même de la vertu » (De Virginib., l. II, c. II).
Or, s'il convient à des fils de ne laisser aucune des vertus de cette Mère très sainte sans l'imiter, toutefois désirons-Nous que les fidèles s'appliquent de préférence aux principales et qui sont comme les nerfs et les jointures de la vie chrétienne, Nous voulons dire la foi, l'espérance et la charité à l'égard de Dieu et du prochain. Vertus dont la vie de Marie porte, dans toutes ses phases, la rayonnante empreinte, mais qui atteignirent à leur plus haut degré de splendeur dans le temps qu'elle assista son Fils mourant. Jésus est cloué à la croix, et on lui reproche, en le maudissant, « de s'être fait le Fils de Dieu » (Joan. XIX, 7). Marie, elle, avec une indéfectible constance, reconnaît et adore en lui la divinité. Elle l'ensevelit après sa mort, mais sans douter un seul instant de sa résurrection. Quant à la charité dont elle brille pour Dieu, cette vertu va jusqu'à la rendre participante des tourments de Jésus-Christ et l'associée de sa Passion ; avec lui, d'ailleurs, et comme arrachée au sentiment de sa propre douleur, elle implore pardon pour les bourreaux, malgré ce cri de leur haine : « Que son sang soit sur nous et sur nos enfants » (Matth. XXVII, 25).
Mais, afin que l'on ne croie pas que Nous ayons perdu de vue Notre sujet, qui est le mystère de l'Immaculée Conception, que de secours efficaces n'y trouve-t-on pas, et dans leur propre source, pour conserver ces mêmes vertus et les pratiquer comme il convient ! D'où partent, en réalité, les ennemis de la religion pour semer tant et de si graves erreurs, dont la foi d'un si grand nombre se trouve ébranlée ? Ils commencent par nier la chute primitive de l'homme et sa déchéance. Pures fables, donc, que la tache originelle et tous les maux qui en ont été la suite : les sources de l'humanité viciées, viciant à leur tour toute la race humaine ; conséquemment, le mal introduit parmi les hommes, et entraînant la nécessité d'un rédempteur. Tout cela rejeté, il est aisé de comprendre qu'il ne reste plus de place ni au Christ, ni à l'Église, ni à la grâce, ni à quoi que ce soit qui passe la nature. C'est l'édifice de la foi renversé de fond en comble. Or, que les peuples croient et qu'ils professent que la Vierge Marie a été, dès le premier instant de sa conception, préservée de toute souillure : dès lors, il est nécessaire qu'ils admettent, et la faute originelle, et la réhabilitation de l'humanité par Jésus-Christ, et l'Évangile et l'Église, et enfin la loi de la souffrance : en vertu de quoi tout ce qu'il y a de rationalisme et de matérialisme au monde est arraché par la racine et détruit, et il reste cette gloire à la sagesse chrétienne d'avoir conservé et défendu la vérité. De plus, c'est une perversité commune aux ennemis de la foi, surtout à notre époque, de répudier, et de proclamer qu'il les faut répudier, tout respect et toute obéissance à l'égard de l'autorité de l'Église, voire même de tout pouvoir humain, dans la pensée qu'il leur sera plus facile ensuite de venir à bout de la foi.
C'est ici l'origine de l'anarchisme, doctrine la plus nuisible et la plus pernicieuse qui soit à toute espèce d'ordre, naturel et surnaturel.
Or, une telle peste, également fatale à la société et au nom chrétien, trouve sa ruine dans le dogme de l'Immaculée Conception de Marie, par l'obligation qu'il impose de reconnaître à l'Église un pouvoir, devant lequel non seulement la volonté ait à plier, mais encore l'esprit. Car c'est par l'effet d'une soumission de ce genre que le peuple chrétien adresse cette louange à la Vierge : « Vous êtes toute belle, ô Marie, et la tache originelle n'est point en vous » (Grad. Miss. In festo Imm. Concept.).
Et par là se trouve justifié une fois de plus ce que l'Église affirme d'elle, que, seule, elle a exterminé les hérésies dans le monde entier.
Que si la foi, comme dit l'Apôtre, n'est pas autre chose que « le fondement des choses à espérer » (Hebr. XI, 1), on conviendra aisément que par le fait que l'Immaculée Conception de Marie confirme notre foi, par là aussi elle ravive en nous l'espérance. D'autant plus que si la Vierge a été affranchie de la tache originelle, c'est parce qu'elle devait être la Mère du Christ: or, elle fut Mère du Christ afin que nos âmes pussent revivre à l'espérance.
Et maintenant, pour omettre ici la charité à l'égard de Dieu, qui ne trouverait dans la contemplation de la Vierge immaculée un stimulant à regarder religieusement le précepte de Jésus-Christ, celui qu'il a déclaré sien par excellence, savoir que nous nous aimions les uns les autres, comme il nous a aimés ? « Un grand signe — c'est en ces termes que l'apôtre saint Jean décrit une vision divine — un grand signe est apparu dans le ciel : une femme, revêtue du soleil, ayant sous ses pieds la lune, et, autour de sa tête, une couronne de douze étoiles » (Apoc. XII, 1). Or, nul n'ignore que cette femme signifie la Vierge Marie, qui, sans atteinte pour son intégrité, engendra notre Chef.
Et l'Apôtre de poursuivre : « Ayant un fruit en son sein, l'enfantement lui arrachait de grands cris et lui causait de cruelles douleurs » (Apoc. XII, 2). Saint Jean vit donc la très sainte Mère de Dieu au sein de l'éternelle béatitude et toutefois en travail d'un mystérieux enfantement. Quel enfantement ? Le nôtre assurément, à nous qui, retenus encore dans cet exil, avons besoin d'être engendrés au parfait amour de Dieu et à l'éternelle félicité. Quant aux douleurs de l'enfantement, elles marquent l'ardeur et l'amour avec lesquels Marie veille sur nous du haut du ciel, et travaille, par d'infatigables prières, à porter à sa plénitude le nombre des élus.
C'est notre désir que tous les fidèles s'appliquent à acquérir cette vertu de charité, et profitent surtout pour cela des fêtes extraordinaires qui vont se célébrer en l'honneur de la Conception immaculée de Marie.
Avec quelle rage, avec quelle frénésie n'attaque-t-on pas aujourd'hui Jésus-Christ et la religion qu'il a fondée ! Quel danger donc pour un grand nombre, danger actuel et pressant, de se laisser entraîner aux envahissements de l'erreur et de perdre la foi ! C'est pourquoi « que celui qui pense être debout prenne garde de tomber » (I Cor. X, 12). Mais que tous aussi adressent à Dieu, avec l'appui de la Vierge, d'humbles et instantes prières, afin qu'il ramène au chemin de la vérité ceux qui ont eu le malheur de s'en écarter. Car Nous savons d'expérience que la prière qui jaillit de la charité et qui s'appuie sur l'intercession de Marie n'a jamais été vaine.
Assurément, il n'y a pas à attendre que les attaques contre l'Église cessent jamais: « car il est nécessaire que des hérésies se produisent, afin que les âmes de foi éprouvée soient manifestées parmi vous » (I Cor. XI, 19). Mais la Vierge ne laissera pas, de son côté, de nous soutenir dans nos épreuves, si dures soient-elles, et de poursuivre la lutte qu'elle a engagée dès sa conception, en sorte que quotidiennement nous pourrons répéter cette parole : « Aujourd'hui a été brisée par elle la tête de l'antique serpent » (Off. Imm. Conc. In II Vesp. ad. Magnif.).
Et afin que les trésors des grâces célestes, plus largement ouverts que d'ordinaire, nous aident à joindre l'imitation de la Bienheureuse Vierge aux hommages que nous lui rendrons, plus solennels, durant toute cette année ; et afin que nous arrivions plus facilement ainsi à tout restaurer en Jésus-Christ, conformément à l'exemple de Nos prédécesseurs au début de leur pontificat, nous avons résolu d'accorder à tout l'univers une indulgence extraordinaire, sous forme de jubilé.
C'est pourquoi, Nous appuyant sur la miséricorde du Dieu tout-puissant et sur l'autorité des bienheureux apôtres, Pierre et Paul ; au nom de ce pouvoir de lier et de délier qui Nous a été confié, malgré Notre indignité : à tous et à chacun des fidèles de l'un et de l'autre sexe, résidant dans cette ville de Rome, ou s'y trouvant de passage, qui auront visité trois fois les quatre basiliques patriarcales, à partir du Ier dimanche de la Quadragésime, 21 février, jusqu'au 2 juin inclusivement, jour où se célèbre la solennité du Très Saint-Sacrement, et qui, pendant un certain temps, auront pieusement prié pour la liberté et l'exaltation de l'Église catholique et du Siège apostolique, pour l'extirpation des hérésies et la conversion des pécheurs, pour la concorde de tous les princes chrétiens, pour la paix et l'unité de tout le peuple fidèle, et selon Nos intentions ; qui auront, durant la période indiquée, et hors des jours non compris dans l'indult quadragésimal, jeûné une fois, ne faisant usage que d'aliments maigres ; qui, ayant confessé leurs péchés, auront reçu le sacrement de l'Eucharistie ; de même, à tous les autres, de tout pays, résidant hors de Rome, qui, durant la période susdite, ou dans le cours de trois mois, à déterminer exactement par l'Ordinaire, et même non continus, s'il le juge bon pour la commodité des fidèles, et en tout cas avant le 8 décembre, auront visité trois fois l'église cathédrale, ou, à son défaut l'église paroissiale, ou, à son défaut encore, la principale église du lieu, et qui auront dévotement accompli les autres œuvres ci-dessus indiquées, Nous concédons et accordons l'indulgence plénière de tous leurs péchés ; permettant aussi que cette indulgence, gagnable une seule fois, puisse être appliquée, par manière de suffrage, aux âmes qui ont quitté cette vie en grâce avec Dieu.
Nous accordons en outre que les voyageurs de terre et de mer, en accomplissant, dès leur retour à leur domicile, les œuvres marquées plus haut, puissent gagner la même indulgence.
Aux confesseurs approuvés de fait par leurs propres Ordinaires, Nous donnons la faculté de commuer en d'autres œuvres de piété celles prescrites par Nous, et ce, en faveur des Réguliers de l'un et de l'autre sexe et de toutes les autres personnes, quelles qu'elles soient, qui ne pourraient accomplir ces dernières, avec faculté aussi de dispenser de la communion ceux des enfants qui n'auraient pas encore été admis à la recevoir.
De plus, à tous et à chacun des fidèles, tant laïques qu'ecclésiastiques, soit réguliers, soit séculiers, de quelque Ordre ou Institut que ce soit, y inclus ceux qui demandent une mention spéciale, Nous accordons la permission de se choisir, pour l'effet dont il s'agit, un prêtre quelconque, tant régulier que séculier, entre les prêtres effectivement approuvés (et de cette faculté pourront user encore les religieuses, les novices et autres personnes habitant les monastères cloîtrés, pourvu que le confesseur, dans ce cas, soit approuvé pour les religieuses), lequel prêtre, les personnes susdites se présentant à lui, pendant la période marquée, et lui faisant leur confession avec l'intention de gagner l'indulgence du jubilé et d'accomplir les autres œuvres qui y sont requises, pourra, pour cette fois seulement et uniquement au for de la conscience, les absoudre de toute excommunication, suspense et autres sentences et censures ecclésiastiques, portées et infligées pour quelque cause que ce soit, par la loi ou par le juge, même dans les cas réservés d'une manière spéciale, qu'ils le soient à n'importe qui, fût-ce au Souverain Pontife et au Siège apostolique, ainsi que de tous les péchés ou délits réservés aux Ordinaires et à Nous-même et au Siège apostolique, non toutefois sans avoir enjoint au préalable une pénitence salutaire et tout ce que le droit prescrit qu'il soit enjoint, et s'il s'agit d'hérésie, sans l'abjuration et la rétractation des erreurs exigée par le droit ; de commuer, en outre, toute espèce de vœux, même émis sous serment et réserves au Siège apostolique (exception faite de ceux de chasteté, d'entrée en religion, ou emportant une obligation acceptée par un tiers), de commuer ces vœux, disons-Nous, en d'autres œuvres pieuses et salutaires, et s'il s'agit de pénitents constitués dans les Ordres, et même réguliers, de les dispenser de toute irrégularité contraire à l'exercice de l'Ordre ou à l'avancement à quelque Ordre supérieur, mais contractée seulement pour violation de censure.
Nous n'entendons pas, d'ailleurs, par les présentes, dispenser des autres irrégularités, quelles qu'elles soient et contractées de quelque façon que ce soit, ou par délit ou par défaut, soit publique, soit occulte, ou par chose infamante, ou par quelque autre incapacité ou inhabilité ; comme Nous ne voulons pas non plus déroger à la Constitution promulguée par Benoît XIV, d'heureuse mémoire, laquelle débute par ces mots: Sacramentum pœnitentiæ, avec les déclarations y annexées ; ni enfin que les présentes puissent ou doivent être d'aucune espèce d'utilité à ceux que Nous-même et le Siège apostolique, ou quelque prélat ou juge ecclésiastique aurait nommément excommuniés, suspendus, interdits ou déclarés sous le coup d'autres sentences ou censures, ou qui auraient été publiquement dénoncés, à moins qu'ils n'aient donné satisfaction, durant la période susdite, et qu'ils ne se soient accordés, s'il y avait lieu, avec les parties.
À quoi il Nous plaît d'ajouter que Nous voulons et accordons que, même durant tout ce temps du jubilé, chacun garde intégralement le privilège de gagner, sans en excepter les plénières, toutes les indulgences accordées par Nous ou par Nos prédécesseurs.
Nous mettons fin à ces lettres, Vénérables Frères, en exprimant à nouveau la grande espérance que Nous avons au cœur, qui est que, moyennant les grâces extraordinaires de ce jubilé, accordé par Nous sous les auspices de la Vierge Immaculée, beaucoup qui se sont misérablement séparés de Jésus-Christ reviendront à lui, et que refleurira, dans le peuple chrétien, l'amour des vertus et l'ardeur de la piété. Il y a cinquante ans, quand Pie IX, Notre prédécesseur, déclara que la Conception Immaculée de la bienheureuse Mère de Jésus-Christ devait être tenue de foi catholique, on vit, Nous l'avons rappelé, une abondance incroyable de grâces se répandre sur la terre, et un accroissement d'espérance en la Vierge amener partout un progrès considérable dans l'antique religion des peuples. Qu'est-ce donc qui Nous empêche d'attendre quelque chose de mieux encore pour l'avenir ? Certes, Nous traversons une époque funeste, et Nous avons le droit de pousser cette plainte du Prophète : « Il n'est plus de vérité, il n'est plus de miséricorde, il n'est plus de science sur la terre. La malédiction et le mensonge et l'homicide et le vol et l'adultère débordent partout » (Os. IV, 1-2). Cependant, du milieu de ce qu'on peut appeler un déluge de maux, l'œil contemple, semblable à un arc-en-ciel, la Vierge très clémente, arbitre de paix entre Dieu et les hommes. « Je placerai un arc dans la nue et il sera un signe d'alliance entre moi et la terre » (Gen. IX, 13). Que la tempête se déchaîne donc, et qu'une nuit épaisse enveloppe le ciel: nul ne doit trembler. La vue de Marie apaisera Dieu et il pardonnera. « L'arc-en-ciel sera dans la nue, et à le voir je me souviendrai du pacte éternel » (Gen. IX, 16). « Et il n'y aura plus de déluge pour engloutir toute chair » (Ib., 15). Nul doute que si Nous Nous confions, comme il convient, en Marie, surtout dans le temps que nous célébrerons avec une plus ardente piété son Immaculée Conception, nul doute, disons-Nous, que Nous ne sentions qu'elle est toujours cette Vierge très puissante « qui, de son pied virginal, a brisé la tête du serpent » (Off. Imm. Conc. B. M. V.).
Comme gage de ces grâces, Vénérables Frères, Nous vous accordons dans le Seigneur, avec toute l'effusion de Notre cœur, à vous et à vos peuples, la bénédiction apostolique.
Donné à Rome, auprès de Saint-Pierre, le 2 février 1904, de Notre Pontificat la première année.
Reportez-vous à Ineffabilis Deus, Constitution Apostolique de Sa Sainteté le Pape Pie IX pour la définition et la proclamation du dogme de l'Immaculée Conception et Pastor Aeternus, Seconde constitution dogmatique du Concile Vatican I, sur l'infaillibilité pontificale et la primauté du Pape.
