On lit dans Saint Bernard que dans l'exercice de la mortification, il faut avoir toujours la serpe à la main, parce qu'il n'y a personne, quelque mortifié qu'il puisse être, qui n'ait toujours besoin de couper et de retrancher quelque chose : « Croyez-moi, dit cet admirable Écrivain, ce qui a été coupé, repousse ; ce qui a été chassé, revient ; ce qui a été éteint, se rallume ; et enfin ce qui paraissait assoupi, revient tout à coup à se réveiller. Il ne suffit donc pas, poursuit ce saint Abbé, d'avoir coupé une fois, il faut revenir souvent à la charge, et ne jamais cesser, s'il se peut, de continuer les mêmes opérations ; car si vous ne voulez point vous tromper vous trouverez toujours de quoi couper, et de quoi retrancher en vous. Quelque progrès que vous ayez pu faire dans la vertu, vous vous trompez si vous croyez avoir entièrement étouffé les vices en vous ; vous ne les avez qu'assujettis : Quelques efforts que vous opposiez, Le Jébuséen demeurera toujours avec vous ; c'est un ennemi que vous pouvez vaincre, mais que vous ne pourrez jamais exterminer. » Je sais, dit Saint Paul, qu'il n'y a rien de bon en moi, c'est-à-dire, dans ma chair. Le même saint Docteur expliquant ces paroles, fait cette judicieuse réflexion. L'Apôtre, dit-il, n'en aurait pas assez dit, s'il n'avait ajouté aussitôt après, que le péché faisait sa demeure en lui : « Car, reprend Saint Paul, je ne fais pas le bien que je veux, mais je fais le mal que je ne veux pas ; ce n'est donc plus moi qui le fais, mais c'est le péché qui habite en moi. » Il faut après un pareil aveu, poursuit Saint Bernard, ou que vous osiez vous préférer à l'Apôtre, ou que vous reconnaissiez avec lui que vous n'êtes pas exempt de vices. »
Comme les meilleures terres deviennent stériles et ingrates, si on néglige de les cultiver, et que d'elles-mêmes elles ne produisent que des chardons et des épines ; de même aussi quelque parfait que soit un Chrétien, si cette perfection n'est cultivée en lui par l'exercice continuel de la mortification et de la pénitence, son cœur ne sera bientôt plus qu'un champ aride et infructueux pour le Ciel, plein de ronces et d'épines, c'est-à-dire, rempli de mauvaises pensées, et d'une vaine et dangereuse confiance de lui-même. Il n'est donc personne qui n'ait besoin d'user de mortification ; ceux qui ont des inclinations corrompues, comme ceux qui n'en ont que de bonnes ; ceux qui sont encore imparfaits, et qui ne font que de commencer, comme ceux qui sont les plus avancés dans les voies de la perfection, enfin ceux qui ont péché, comme ceux qui ont conservé leur innocence ; tous généralement ont besoin de se mortifier ; les uns pour acquérir les vertus qui leur manquent, les autres pour conserver celles qu'ils ont acquises.
Si quelqu'un veut me suivre, dit le Sauveur du monde, qu'il renonce à soi-même, et qu'il porte tous les jours sa croix. C'est-à-dire, que nous ne devons passer aucun jour sans mortifier notre volonté en quelque chose. Que si vous y manquez, dit Saint Jean Climaque, croyez que c'est une grande perte pour vous ; et comptez que c'est un jour perdu.
(Abrégé de la pratique de la perfection chrétienne)
Reportez-vous à De plusieurs moyens qui nous faciliteront la pratique de la mortification, Avis importants sur la pratique de la Mortification, Qu'il faut se mortifier surtout dans le vice, ou dans la passion dominante, sans toutefois négliger les petites mortifications, Exercices de Mortification, Qu'il en coûte beaucoup moins à se mortifier, qu'à ne se mortifier pas, Ce n'est pas mener la vie d'un Chrétien, ni même d'un homme, que de ne se point mortifier, De deux sortes de Mortifications, Que de la pratique de la mortification dépend absolument notre avancement, De la violence qu'il faut se faire à soi-même, De la haine de soi-même, et de l'Esprit de Mortification qui en est inséparable, Un
des plus grands châtiments que Dieu puisse exercer contre l'homme,
c'est de l'abandonner à ses passions, et aux désirs déréglés de son cœur, De la nécessité de la Mortification : En quoi elle consiste, De l'union étroite qui doit être entre la Mortification et l'Oraison, De la Mortification, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De la nourriture du corps, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Méditation sur le combat de la chair contre l'esprit, Moyens pour persévérer dans la sobriété et dans l'abstinence, De l'anéantissement, Méditation sur le Carême : Jésus ayant jeûné quarante jours et quarante nuits, il eut faim ensuite, Instruction sur le Carême, Méditation sur le véritable jeûne, Méditation sur la Loi du jeûne, Catéchisme spirituel de la Perfection Chrétienne, par le R.P. Jean-Joseph Surin, Prière pour demander la victoire sur ses passions, De l'activité naturelle, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, et Sur la vaine curiosité.