dimanche 17 avril 2022

Des sentiments de reconnaissance envers Dieu



Le quatrième effet que doit produire en nous la méditation des mystères de la Passion et des souffrances du Fils de Dieu, est d'être pénétré des plus vifs sentiments de reconnaissance pour un bienfaiteur de qui nous avons tant reçus. « Notre esprit peut-il penser, dit Saint Augustin, notre bouche peut-elle exprimer, notre plume peut elle écrire quelque chose de meilleur que ces paroles : Grâces soient rendues à Dieu. » On ne peut ni dire de plus court, ni rien entendre de plus agréable, ni rien concevoir de plus élevé, ni rien faire de plus utile. Dieu lui-même a toujours pris tant de plaisir à la reconnaissance et aux actions de grâces que lui rendent les hommes, que dès qu'il avait accordé quelque faveur extraordinaire à son peuple, il voulait qu'on lui en témoignât aussitôt la reconnaissance, en chantant des Cantiques de louanges : Immolez à Dieu un sacrifice de louanges. S. Augustin, parlant des dix Lépreux que le Fils de Dieu guérit, remarque que le Sauveur du monde loua la reconnaissance de celui qui vint seul le remercier de sa guérison, et qu'il blâma l'ingratitude des neuf autres : N'y en a-t-il pas eu dix de guéris, dit-il ? Où sont donc les neuf autres ? Il ne s'est trouvé que cet étranger qui est revenu pour rendre gloire à Dieu. Gardons-nous de tomber dans une pareille ingratitude pour les bienfaits que nous avons reçus de la main libérale de Dieu, et moins encore au plus grand de ses bienfaits, lorsqu'il s'est fait homme, et qu'il a bien voulu mourir pour nous sur la Croix. « N'oubliez jamais, dit le sage, la grâce que vous a faite celui qui a répondu pour vous et qui s'est rendu votre caution ; car il a donné pour vous sa propre vie. »
J. C. a répondu et payé pour nous, il lui en a coûté la vie ; il est bien juste que nous ayons la plus vive et la plus sincère reconnaissance d'un aussi grand bienfait, et que nous n'en perdions jamais le souvenir.
S. Thomas, parlant de la gratitude, dit qu'elle opère de trois manières, ou qu'elle produit trois effets sensibles dans une âme qui en est pénétrée. Le premier consiste à concevoir dans le fond de son cœur toute l'estime que mérite le bienfait qu'on a reçu, et à en conserver précieusement le souvenir ; le second consiste à remercier le bienfaiteur par des louanges qui répondent à la grandeur du bienfait ; le troisième c'est de répondre aux bienfaits reçus par des bienfaits réciproques, ou au moins par le bon usage que l'on en fait : voilà, selon S. Thomas, ce que nous devons faire pour marquer à Dieu, comme nous le devons, notre reconnaissance. Exerçons-nous, en méditant sur tous les mystères de la Passion, à former en nous ces trois actes de reconnaissance. Appliquons-nous premièrement à concevoir dans notre cœur de grands sentiments d'estime pour tant de bienfaits que renferme chacun de ces mystères et après avoir examiné en détail toutes les grâces que nous en avons reçues et que nous en devons recevoir, excitons-nous, par cette considération, à ressentir plus vivement l'obligation où elles nous mettent de nous attacher à Dieu sans interruption, sans partage et sans réserve.
Occupons-nous ensuite à le louer et à le glorifier de bouche, selon ces paroles de S. Paul : « Offrons donc toujours à Dieu par lui une hostie de louange, c'est-à-dire, le fruit des lèvres qui rendent gloire à son nom ; invitons toutes les créatures à se joindre à nous pour lui rendre un si juste tribut de louanges ; efforçons-nous enfin de répondre par nos actions à tant de bienfaits, et pour cela abandonnons-nous entièrement à lui, comme nous l'avons dit dans le précédent article, et offrons-lui tout ce que nous sommes. Hélas ! que nous sommes éloignés de connaître ce que Dieu a fait pour nous ! En effet, ô mon Dieu ! si je concevais bien vivement que vous vous êtes fait homme, et que vous êtes mort sur une croix pour l'amour de mois, il ne me faudrait point d'autre considération pour vous donner entièrement mon cœur, et pour m'abîmer dans votre amour : ce serait-là véritablement un juste tribut, tel qu'un vrai Chrétien le doit rendre à son Dieu.
Jésus-Christ n'aurait pas refusé, dit Saint Chrysostôme, de faire pour un seul ce qu'il a fait pour tous les hommes ensemble. Il y a plus : c'est que Dieu s'est souvenu particulièrement de moi, qu'il m'a eu présent devant les yeux en se faisant homme et en mourant sur la Croix ; Qu'il m'a aimé avec une charité perpétuelle, comme il dit lui-même par la bouche de Jérémie : et qu'enfin il s'est livré volontairement à la mort pour me procurer la vie. Chaque Chrétien doit donc regarder les bienfaits de Dieu comme si Dieu n'avait rien fait que pour lui, et envisager l'amour dont ils procèdent, comme si Dieu n'avait aimé que lui seul : et s'écrier avec Saint Paul : Il m'a aimé, et il s'est livré à la mort pour moi. Quand on fera toutes ces considérations avec une sérieuse attention, il sera impossible de ne se pas sentir excité à former les plus vifs sentiments de reconnaissance et d'amour envers ce Dieu-Sauveur, qui nous a toujours aimés avec une charité perpétuelle.

(Abrégé de la Pratique de la Perfection Chrétienne)


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