jeudi 15 septembre 2016

Deux principes fondamentaux touchant la conformité à la volonté de Dieu


Retable de San Zeno à Vérone (Andrea Mantegna)



Abrégé de la pratique de la perfection chrétienne du R.P. Alphonse Rodriguez, Extrait :



Deux principes fondamentaux touchant la conformité à la volonté de Dieu.


Qu'il soit fait, Seigneur (Matth. 26. v. 39), non pas comme je le veux, mais comme vous le voulez. Le Fils de Dieu, disent les saints Pères, est descendu du Ciel, et s'est revêtu de notre chair pour deux raisons : l'une, pour nous racheter par son sang ; l'autre, pour nous enseigner par sa doctrine la voie qui conduit au Ciel, et nous instruire par son exemple.
Or, entre plusieurs leçons qu'il nous a données, une des principales est que nous ayons une entière conformité à la volonté de Dieu. Doctrine céleste qu'il nous a enseignée, et par ses paroles, et par son exemple : par ses paroles, lorsque, nous apprenant à prier, il nous a enjoint de dire au Père éternel (Matt. 6, 10) : Que votre volonté soit faite en la terre comme dans le Ciel ; par son exemple, puisqu'il dit lui-même (Joan. 6, 39) : Je suis descendu du Ciel, non pas pour faire ma volonté, mais pour faire la volonté de celui qui m'a envoyé. C'est conformément à cela que, dans l'oraison que Jésus-Christ fit au jardin, lorsqu'il était sur le point de consommer le grand ouvrage de notre salut, quoiqu'il sentît vivement les horreurs de la mort en tant qu'homme, et que pour faire voir qu'il l'était véritablement, il dit (Matth. 26, 39) : Mon Père, s'il est possible, faites que ce calice passe loin de moi ; sa volonté néanmoins demeura toujours dans une parfaite soumission à celle de son Père ; aussi ajouta-t-il aussitôt après (Ibid.) : Toutefois qu'il soit fait, non pas comme je le veux, mais comme vous le voulez.
Or, pour traiter cette matière à fond, et pour établir solidement la pratique de cette conformité, il faut supposer ceux principes, qui sont comme les fondements de toute cette doctrine. Le premier de ces deux principes est que notre avancement et notre perfection consistent en la conformité à la volonté de Dieu ; et que plus cette conformité sera grande, plus notre perfection le sera aussi. Ce principe est incontestable, et la preuve en est sensible : car il est évident que la perfection consiste essentiellement dans la charité et dans l'amour de Dieu ; et que, plus on aimera Dieu, plus aussi on sera parfait. Cette doctrine est fondée sur les Livres saints : l'Évangile et les Épîtres de Saint Paul en sont remplis ; elle est pareillement confirmée par les écrits des saints Pères. L'amour de Dieu est le plus grand (Matth. 22. 33) et le premier de tous les commandements... La charité (Ad Col. 3. 14. Cor. I. l3. 13.) l'emporte sur tout le reste. Or, comme ce qu'il y a de plus sublime et de plus parfait dans toutes les vertus, c'est d'aimer Dieu ; de même ce qu'il y a de plus noble, de plus pur et de plus exquis dans cet amour, c'est de se conformer absolument à la volonté divine, et de n'avoir en toutes choses d'autre volonté que celle de Dieu.
Le second principe est qu'il ne peut rien arriver dans le monde, si ce n'est par l'ordre et la volonté de Dieu, excepté le péché dont il n'est ni ne saurait être la cause ou l'auteur ; mais je dis que, hors le péché, tout ce qui nous arrive, les maladies, les souffrances, les peines, les afflictions, la perte des biens, les disgrâces, les calamités, tout cela est réglé et arrive par l'ordre et la volonté de Dieu. Ce principe est aussi certain que le premier ; et ce que les païens ont imaginé sur le pouvoir de la fortune dont ils avaient fait une divinité, n'est qu'une chimère. La fortune n'est rien ; ce n'est point elle, par conséquent, qui donne les biens qui s'appellent communément biens de fortune ; c'est Dieu seul qui les dispense à qui il lui plaît, selon les desseins de sa providence. Cette doctrine nous est enseignée par le Saint-Esprit, lorsqu'il nous dit par la bouche du Sage (Eccli. 11. 14) : Que les biens et les maux, la vie et la mort, la pauvreté et les richesses, nous viennent également de Dieu.
Car encore que toutes ces choses arrivent par le moyen des causes secondes, il est certain néanmoins qu'il ne se fait rien dans toute l'étendue de l'univers, que par l'ordre et la volonté du souverain maître qui le gouverne. Rien ne se fait par hasard à l'égard de Dieu : il a tout réglé, et tout arrêté lui-même de toute éternité ; il a compté tous les cheveux de notre tête, et il ne nous en tombera pas un sans son ordre.
Ce que nous devons inférer de ces deux principes, c'est que, puisque toutes choses nous viennent de la main de Dieu et que toute notre perfection consiste à nous conformer à ce qu'il veut, il faut les recevoir toutes comme venant de lui et nous conformer entièrement en cela à sa divine volonté. N'attribuez rien, dans tout ce qui vous arrive, au hasard ou à la malice des hommes, car c'est là justement ce qui a coutume de faire le plus de peine ; et ne vous imaginez pas que cette disgrâce ou ce revers de fortune vous soit arrivé, parce que quelqu'un s'en est mêlé ; et que si les choses eussent été autrement disposées, cette affaire aurait mieux réussi : ce n'est pas à cela que vous devez vous arrêter ; mais de quelque manière et de quelque part que les choses vous viennent, recevez-les toujours, comme venant de la main de Dieu, puisque c'est lui en effet qui vous les envoie, et que les hommes ne sont que les instruments dont il se sert pour exécuter ses desseins.
Saint Dorothée (Doroth. Doct. 7) dit à ce sujet, en reprenant ceux qui ne reçoivent pas toutes choses comme venant de la main de Dieu : « Lorsque nous entendons dire quelque chose contre nous, nous faisons comme les chiens : quand on jette une pierre contre eux, ils courent après cette pierre pour la mordre, et laissent celui qui la leur a jetée. Il en est de même de nous ; nous laissons Dieu qui nous envoie les mortifications, pour l'expiation de nos péchés ; nous courons à la pierre, c'est-à-dire, nous nous en prenons au prochain, et nous tachons de nous en venger contre lui. »
Saint Augustin fait encore une réflexion très judicieuse. « Job, remarque ce Père (Aug. in Ps. 31), ne dit pas : Le Seigneur me l'a donné, le démon me l'a ôté ; mais persuadé que le démon ne peut  faire aucun mal, qu'autant que Dieu lui en donne le pouvoir, il rapporte tout également à Dieu, et il dit : Le Seigneur me l'a donné (Job. 1. 21), le Seigneur me l'a ôté. Voilà, continue le même saint docteur (Aug. ubi. sup), le modèle que nous devons suivre ; il faut qu'à son exemple nous rapportions à Dieu les maux qui nous arrivent. »
Un des anciens Pères du désert disait ordinairement, qu'un homme, pour s'établir dans un véritable repos, et jouir d'une véritable satisfaction dans la vie, devait se regarder, comme s'il n'y avait que Dieu et lui dans le monde : et Saint Dorothée (Doroth. Doct. 7) rapporte que ces anciens solitaires s'étaient tellement accoutumés à recevoir toutes choses comme venant de la main de Dieu, de quelque nature qu'elles fussent, et de quelque manière qu'elles arrivassent, qu'ils ne trouvaient point de moyen plus efficace pour se maintenir dans une profonde tranquillité d'esprit et s'établir dans un bonheur parfait.




Écouter Faire la volonté de Dieu : pourquoi et comment ? avoir la foi.



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