dimanche 24 mars 2019

Tendresse de saint Joseph pour Jésus



Extrait de "Pouvoir de Saint Joseph", par le R. P. Huguet, Mariste :


Les deux Trinités (Murillo)



Dieu a donné à Joseph l'affection, le soin paternel et l'autorité d'un père sur son Fils. (S. Jean Damascène)


Lorsque Dieu éleva Salomon sur le trône, il lui donna un cœur d'une grandeur surprenante, parce qu'il fallait un grand cœur pour gouverner un grand royaume. Ainsi, le Seigneur en choisissant Joseph pour être le père nourricier du Sauveur devait le pourvoir d'un grand cœur, ou plutôt lui donner une si vaste étendue de cœur, qu'il pût aimer en père et en père du Fils unique de Dieu. Et c'est, selon le sentiment d'un saint docteur, ce que le Père Éternel a fait en associant Joseph, non-seulement à sa dignité, mais aussi à son affection de père ; soit qu'il formât en lui un cœur tout nouveau, soit qu'il rendît plus tendre celui que ce grand Saint avait déjà reçu ; il est du moins certain qu'il l'a rempli de l'amour le plus pur et le plus fort qu'un père puisse avoir ; et s'il n'en avait pas usé de la sorte, il aurait renversé l'ordre qu'il a établi lui-même. La nature en rendant un homme père l'embrase d'un amour si ardent, que mille soins, mille fatigues et surtout mille ingratitudes ne peuvent l'éteindre. Ne devons-nous pas dire aussi que Dieu, voulant qu'un homme soit père, lui inspire un amour d'autant plus ardent et plus agissant, que les ouvrages de Dieu sont plus excellents que ceux des créatures, et que la grâce opère plus efficacement que la nature. Si vous ajoutez que Dieu, par son propre choix, a destiné un homme non-seulement à être père de la manière que nous avons dite ; mais encore le père d'un Fils le plus parfait et le plus aimable qui fût jamais, et que l'on puisse imaginer ; vous devez conclure qu'il était de la sagesse de Dieu et de sa bonté, d'allumer dans le cœur de cet heureux père des brasiers d'amour proportionnés en quelque manière aux perfections de cet adorable Fils qu'il devait aimer mille fois plus que lui-même.
« Le Père Éternel verse par torrents dans le grand cœur de Joseph la pure et sainte fécondité de son adorable paternité, les virginales et intimes communications de la société incompréhensible des trois personnes divines ; afin que, dit un pieux évêque, parle plus grand des prodiges, la virginité de saint Joseph devienne féconde, que son ineffable pureté soit la gardienne de la pureté même, et qu'il soit l'époux de Marie et le père de Jésus (S. Augustin). »
La grâce, dit un pieux auteur, rendit Joseph tout cœur pour n'aimer que Jésus, tout esprit pour ne penser qu'à Jésus, tout œil pour prévoir ses besoins, tout main pour y pourvoir, tout pied pour le suivre et le conduire partout, tout aile pour voler à l'exécution de ses volontés, tout en toutes choses pour Celui qui était son tout.
L'amour naturel que les mères et les pères ont pour leurs enfants, celui dont s'aiment deux vrais amis, bien qu'il puisse devenir très ardent et très-sensible, il ne saurait néanmoins parvenir au dernier degré ; des limites et des termes le distinguent de l'amour divin et de la vraie charité. Lorsque l'amour de Dieu augmente, l'amour naturel diminue, et si l'amour de la créature s'accroît, celui du Seigneur s'affaiblit. Mais dans l'amour de Joseph pour Jésus, il n'y a point de division, rien ne peut y mettre des bornes ; l'amour naturel et l'amour divin, l'amour d'un Fils et l'amour d'un Dieu, n'ont qu'un seul et même objet.
Saint Joseph aimait en la personne de Jésus, ce qu'il ne pouvait, sans pécher, ne pas aimer. Il trouvait dans le seul objet de son amour de quoi satisfaire la nature et la grâce, ses plus douces et ses plus saintes inclinations.
C'est une des principales prérogatives de saint Joseph. Il ne saurait y avoir ni excès ni abus dans son amour pour Jésus. La nature et la grâce, la raison et la foi se trouvent confondues ensemble. L'empressement est pour lui une ferveur de piété. Toutes les puissances de son âme se rapportent à Jésus-Christ. Il n'est pas sujet à cette funeste division de cœur qui est inévitable en ce monde, parce qu'il n'a qu'un seul objet et que toutes ses passions sont saintes. S'il craint, c'est pour la personne de Jésus-Christ ; s'il désire, c'est pour ses besoins ; s'il souffre, c'est de la douleur de le voir souffrir. Toutes les demandes qu'il lui fait sont des oraisons et des prières ; et tous les devoirs paternels qu'il lui rend, sont autant de sacrifices et d'actes d'adoration qu'il fait à ce Fils qui, tout caché qu'il est sous la forme d'un serviteur, est pourtant égal à son Père Éternel, et qui, tout égal qu'il est à son Père, ne laisse pas de se soumettre et d'obéir à Joseph. Joseph, dit un ancien auteur, pénétrait tous les jours davantage dans le cœur de Jésus par ses services continuels et par les soins qu'il lui prodiguait. D'un autre côté, les charmes inexprimables de l'Enfant-Dieu ravissaient toutes les affections de Joseph. Lorsque Jésus, le feu du Ciel descendu sur la terre, se cachait dans le sein de Joseph, de quelles saintes ardeurs ne l'embrasait-il pas ! Lorsque Joseph tenait entre ses bras l'amour des Anges et des hommes, et qu'il appliquait son cœur sur le cœur, ses yeux sur les yeux, et sa  bouche sur la bouche de son Fils, quel amour ne recevait-il pas ?
Nulles délices, nuls contentements ne sauraient se comparer à ceux que goûta Joseph dans les soins qu'il prodiguait à Jésus. S'il le gardait à l'heure du sommeil, il était ravi de voir dormir Celui dont il est écrit qu'il ne dormira point... Celui qui garde Israël, Celui dont le cœur veille toujours. Il le voyait pleurer comme son fils et trôner dans le Ciel comme son Dieu. Quand il l'embrassait, son cœur se dilatait en voyant accompli le désir du genre humain qui avait aspiré si long temps au baiser de sa bouche, à son incarnation. Quand l'Enfant commença à parler, Joseph s'écria : C'est la voix de mon Bien-Aimé qui a créé le Ciel et la terre.
Lorsque Jésus découvrait à Joseph quelques nouveaux traits de ses perfections infinies, ou qu'il témoignait prendre plaisir à ses caresses ; lorsque Joseph s'acquittait de ses devoirs envers Jésus, soit qu'il lui donnât à manger, soit qu'il le menât par la main, soit qu'il entendît donner des bénédictions à l'Enfant, et a celui que l'on croyait en être le vrai père, n'était-ce pas comme de l'huile jetée sur le feu de l'amour qui était déjà dans le cœur de Joseph pour l'enflammer davantage ? Que pensez-vous qu'il eût répondu, si le Sauveur lui eût adressé la question qu'il adressa plus tard à saint Pierre : Joseph, m'aimez-vous ? Il lui eût répété mille fois en le serrant sur sa poitrine : Oui, je vous aime, mon Dieu et mon Fils infiniment aimable ; oui, je vous aime plus que la prunelle de mes yeux, plus que moi-même.
Ah ! si quelques saints, favorisés de sa présence de Jésus dans des visions célestes, ont été embrasés d'un amour si vif que, n'en pouvant plus supporter les ardeurs sans mourir, ils s'écriaient : C'est assez, Seigneur, c'est assez, que doit-on penser de Joseph qui voyait réellement cet aimable Sauveur, qui ne le quittait ni le jour ni la nuit, qui le tenait embrassé aussi longtemps qu'il le voulait, et qui en était caressé à toute heure : Imprimebat illi Christus ineffabiles sensus atque jucunditates de semetipso (S. Bernardin) ? Quelles étaient les émotions et les défaillances de son cœur si aimant, lorsqu'il buvait à longs traits à la divine source de l'amour et qu'il savourait les prémices des grandes joies que le Sauveur devait répandre par tout le monde !
Son cœur eût éclaté en mille pièces par la violence de la dilection, il serait mort d'amour et de joie si Dieu n'eût pas suspendu par quelque vertu secrète l'activité de ces flammes sacrées.
On donne ordinairement deux qualités à l'amour d'un père, la tendresse et la force. Il faut que ce soit un amour généreux, en cela différent de celui des mères qui a beaucoup plus de tendresse que de force. Il faut que ce soit un amour tendre et ardent qui s'intéresse à tout ce qui regarde les enfants et qui ressente vivement toutes leurs nécessités. Saint Joseph a réuni ces deux qualités dans un souverain degré de perfection, et il a éprouvé les sentiments que ces deux amours peuvent produire dans un cœur ; la tendresse qui prend ordinairement sa source dans la nature, dans saint Joseph elle venait de la grâce qui lui inspirait pour cet aimable Fils la plus tendre et la plus vive affection que la charité pouvait faire naître et qui était sans cesse augmentée par l'état où il le voyait, et par la présence continuelle de ce divin objet qu'il avait toujours devant les veux. Car, si les Séraphins étant plus près de Dieu, sont aussi les plus enflammés de son amour : Joseph, qui ne le perdait jamais de vue, ne devait-il pas avoir toujours le cœur embrasé de ce feu sacré ?
« Je tiens pour certain, dit le docte et pieux P. Gratien, que si l'on mettait en comparaison tout l'amour que les pères les plus tendres ont eu pour leurs enfants, avec l'amour de Joseph pour Jésus, ce dernier l'emporterait. »
Si le disciple bien-aimé, pour avoir une seule fois reposé sur le cœur sacré du divin Jésus, avait pour lui une telle tendresse d'affection, qu'il ne pouvait parler d'autre chose que de la charité, qui pourra mesurer l'amour de saint Joseph qui n'a pas eu seulement le bonheur de reposer sur le sein de Jésus, mais qui a tenu ce divin Sauveur, pendant son enfance, un million de fois entre ses bras, qui l'a fait reposer sur son cœur et qui l'a couvert de ses caresses ? Les battements du cœur du divin Enfant l'enflammaient d'amour, il considérait ce cœur sacré brûlant du désir de s'ouvrir pour recevoir tous enfants d'Adam.
L'amour de saint Joseph est vigilant et laborieux ; il pourvoit à tous les besoins de Jésus-Christ ; s'il travaille, c'est pour le nourrir ; s'il s'occupe à sa profession dans une pauvre boutique, c'est pour donner à son cher Enfant tous les soulagements qu'il peut lui procurer ; s'il quitte sa patrie pour aller en exil, c'est afin de lui sauver la vie. C'est ainsi que saint Joseph réunissait dans son cœur cet amour fort et généreux pour Jésus-Christ avec cet amour tendre et plein de compassion ; et ces deux amours s'enflammaient mutuellement ; la tendresse lui faisait souhaiter d'employer mille vies pour son Sauveur, et réciproquement les fatigues et les peines qu'il supportait contribuaient à augmenter cette tendresse, parce que nous aimons plus tendrement les choses qui nous ont le plus coûté. Or, que de peines, que de voyages, que de persécutions pour élever cet Enfant, pour le mettre à couvert des poursuites de ses ennemis, pour conserver ce dépôt sacré que le Ciel lui avait confié ! Ô mon Fils ! pouvait-il lui dire, que vous m'êtes précieux puisque vous me coûtez si cher ! Si vous ne m'appartenez pas pour vous avoir donné la vie, vous ne laissez pas d'être à moi à un autre titre ; puisque je sacrifie continuellement la mienne pour sauver la vôtre, je donne à votre conservation ce que je n'ai pas donné à votre naissance. Enfin que dirons-nous de l'accroissement d'amour que les exemples et les prières de la sainte Vierge obtinrent à son chaste Époux ? L'auguste Marie que l'Église appelle Mère du saint amour : Mater pulchroe dilectionis, eût cru n'aimer son fils que de la moitié d'elle-même, si son amour lui eût été commun avec saint Joseph, et l'amour qu'on a pour quelqu'un se mesure sur la douleur qu'on ressent de sa perte, l'affliction du saint Joseph étant, dans l'Évangile, comparée à celle de Marie : Pater tuus et ego, dolentes quoerebamus te, on peut croire que sa tendresse pour Jésus fut en quelque sorte semblable à la sienne. Il se réjouissait du bonheur de le voir ; il s'affligeait du malheur de ne le voir pas ; il l'aimait présent, ses tendresses et ses services empressés nous le prouvent ; il l'aimait absent, sa douleur et son inquiétude nous le démontrent ; tendresses et services, douleurs et inquiétudes, marques indubitables du véritable amour.
Terminons ces touchantes considérations par un passage de saint François de Sales bien propre à exciter dans nos cœurs l'amour de Jésus et de Joseph :
« Oh ! que je voudrais, écrivait-il à sainte Chantal, vous entretenir quelque temps des grandeurs du Saint que notre cœur aime, parce qu'il est le nourricier de l'amour de notre cœur et du Cœur de notre amour ; je me servirais de ces paroles : Seigneur, faites du bien aux bons et à ceux qui ont le cœur droit. Ô grand Dieu ! que ce Saint avait un bon cœur ! qu'il était droit puisque Notre-Seigneur l'a tellement comblé de ses bienfaits, qu'il lui a donné la Mère et le Fils, et en a fait par là un objet d'envie pour le Ciel et pour les Anges ; car, que peut-on trouver parmi les Anges qui soit comparable à la Reine des Anges, et dans Dieu qui soit plus que Dieu ? Prions ce grand Saint qui a si souvent caressé et servi notre Sauveur, qu'il nous fasse part de ses caresses qui sont si propres à faire croître l'amour que nous avons pour ce Sauveur et qu'il nous obtienne par son intercession mille bénédictions qui nous fassent jouir d'une profonde paix intérieure. Vive Jésus ! vive Marie ! vive Joseph qui a été si longtemps le père nourricier de notre Vie ! »


EXEMPLE

Un Père de la Compagnie de Jésus avait un proche parent qui, depuis plusieurs années, oubliant tous les bons principes qu'il avait reçus, menait une vie scandaleuse. Le zélé religieux, après avoir employé en vain les représentations les plus paternelles et les avertissements les plus charitables, voyant que tous ces moyens étaient inutiles, demanda à Dieu d'envoyer à ce malheureux une maladie grave qui l'obligeât enfin de rentrer en lui-même. Mais pour donner à ce remède toute son efficacité, il s'adressa avec confiance à saint Joseph, et fit faire par ses amis deux neuvaines, l'une de messes et l'autre de communions en son honneur. La grâce sollicitée par tant de peines et de bonnes œuvres fut obtenue. Le pécheur scandaleux tomba sérieusement malade, et se voyant réduit à l'extrémité, il ouvrit les yeux sur les désordres de sa vie et sur le danger où il était de se perdre éternellement ; fidèle à la grâce, il se hâta de purifier sa conscience par le sacrement de pénitence qu'il reçut avec de grands sentiments de piété.
Saint Joseph, qui voulait rendre plus sensible la guérison miraculeuse de cette âme, le délivra en même temps de toutes les infirmités du corps. Le malade, rendu subitement à la santé, prit la ferme résolution de réparer les scandales qu'il avait eu le malheur de donner ; il s'employa depuis avec autant de zèle que de persévérance aux œuvres de piété, et ne respira plus que pour la gloire de Dieu et de saint Joseph, son puissant protecteur. (P. Patrignani)


PRATIQUE

« Je vous dirai ingénument que j'ai souvent eu la dévotion de prier saint Joseph de me donner sa bénédiction avec la petite main de Jésus ; car quand il le porte sur ses bras, il en fait tout ce que bon lui semble. » (Le P. Le Jeune)



Reportez-vous à Litanies de la Sainte Famille, Prééminence de saint Joseph dans le Ciel, Saint Joseph élevé au-dessus de tous les saints, Pouvoir de Saint Joseph, Saint Joseph à Nazareth, Saint Joseph, patron et modèle des âmes intérieures, Saint Joseph choisi de Dieu pour être le chef de la Sainte-Famille, Du Devoir des Pères de famille, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Neuvaine de prières à Saint Joseph, Neuvaine à Saint Joseph, pour se préparer à ses Fêtes, et obtenir quelque grâce spéciale pendant la vie et une bonne mort, Les Sept Dimanches de Saint Joseph, Excellence du saint nom de Joseph, Saint Joseph patron et modèle des religieux, Prière pour obtenir la pureté, Litanies de la paternelle protection de Saint Joseph, Litanies des souffrances de Saint Joseph, Litanies de Saint Joseph, Prière efficace en l'honneur de Saint Joseph, Courtes prières à Saint Joseph, Chapelet de Saint Joseph, Acte de consécration au glorieux Saint Joseph, Prière de Saint Pie X au glorieux Saint Joseph modèle des travailleurs, Sermon pour la Fête de Saint Joseph, Marie est donnée en mariage à Saint Joseph, Litanies de l'amour de Marie, Supplique à Saint Joseph, Oraison pour présenter son cœur à saint Joseph et Méditations et Exemples pour le Mois de Saint Joseph.