vendredi 17 avril 2020

Instruction sur la Prière




INSTRUCTION


Prière


La prière est une élévation de notre âme vers Dieu, pour lui rendre nos hommages et lui demander nos besoins. Une âme qui se dispose à prier se transporte par la pensée jusqu'au pied du trône de la souveraine majesté de Dieu, ou dans le ciel qui est le séjour de sa gloire, ou sur la terre qu'il remplit de sa présence, ou dans notre propre cœur qui est le temple de Dieu ; l'âme, ainsi en présence du Seigneur, l'adore, le loue, le remercie, l'invoque et s'offre à lui avec tout ce qui dépend d'elle : ce qui se fait intérieurement ou extérieurement, en public ou en particulier. La prière seulement intérieure, appelée méditation ou oraison mentale, se fait de cœur et sans parler ; la prière vocale joint le son de la voix au langage du cœur. La prière publique est celle qui est établie par l'autorité de l'Église, et que des ministres députés par elle font au nom de toute la société catholique.
Le sacrifice de la messe est la plus excellente des prières publiques.

On nomme oraison jaculatoire, celle qui consiste en un simple mouvement de cœur vers Dieu, soit qu'on le manifeste par des paroles courtes, soit qu'on ne l'exprime pas. Ces sortes d'aspirations, dit saint Augustin, étaient très en usage parmi les anciens solitaires d'Égypte, et leur servaient admirablement pour tenir leur âme recueillie en Dieu. C'est pourquoi S. François de Sales conseillait de faire souvent dans le jour ces sortes de prières. Ce qui peut faciliter cette pratique si salutaire, c'est que toutes les créatures, tous les événements, considérés des yeux de la foi, en fournissent l'occasion. S. François de Sales recommandait surtout de s'y appliquer, lorsque la multiplicité des affaires aurait empêché de faire la méditation le matin. Non-seulement ces sortes d'aspirations peuvent remplacer la prière vocale, quand on est trop pressé ; mais lorsqu'on les fait habituellement et avec piété, elles deviennent quelquefois plus utiles et plus agréables à Dieu que les plus longues prières.


Nécessité de la Prière


1. Parce que J.-C. nous en a fait un précepte : « Veillez et priez. — Il faut toujours prier. — Priez sans cesse. — Veillez donc, priant en tout temps, — priant nuit et jour. » Voilà un commandement formel aussi indispensable que celui d'aimer Dieu ; commandement important, puisqu'il nous est si souvent et si fortement inculqué ; commandement fondé, comme on va le voir, sur les plus justes motifs.
2. Parce qu'il est un hommage que nous devons à Dieu. Il nous gouverne par son infinie sagesse ; il prend soin de nous par sa providence ; il nous pardonne par sa miséricorde ; il nous comble de bienfaits et de grâces par son amour et par sa bonté. Pourrons-nous vivre sans adorer notre souverain maître, sans le remercier de ses faveurs, sans en solliciter de nouvelles, sans lui demander pardon de nos fautes ? C'est par la prière qu'on s'acquitte de tous ces devoirs.
3. Un autre motif de la prière se tire de nos propres besoins. Nous avons de puissants ennemis à combattre, le monde et l'enfer même, nos propres passions ; des devoirs difficiles et nombreux à remplir, des vertus à acquérir, le ciel à mériter, etc. Or, il est de foi que, sans la grâce, nous ne pouvons faire aucune œuvre méritoire du ciel ; mais la prière est le moyen par lequel Dieu nous la communique ordinairement. N'est-ce pas ce que le divin maître a voulu enseigner, lorsqu'il dit que nous recevons les grâces, quand nous les demandons ; que nous les trouverons, lorsque nous les chercherons ; qu'on nous ouvrira, quand nous frapperons à la porte ? C'est d'après tous ces motifs que les saints inculquent si fortement la nécessité de la prière. Elle est à une âme chrétienne, dit saint Chrysostôme, ce que sont les remparts à une ville. Les premiers fidèles la connaissaient, eux dont il est écrit qu'ils persévéraient dans l'oraison.

La prière étant le désir de notre âme, si ce désir porte à Dieu, s'il n'est jamais interrompu, nous accomplissons à la lettre, dit saint Augustin, le précepte de la prière continuelle, commandée par le Seigneur. Il ne s'est pas contenté de la commander, il l'a pratiquée. Il ne faisait rien d'important sans prier ; il passait même la nuit dans cette sainte occupation. Il priait pour que son Père fût glorifié ; il priait pour lui et pour tout l'univers. Nous devons prier pour honorer Dieu ; nous devons prier pour nous et pour notre prochain. « Priez les uns pour les autres, dit saint Jacques, afin que vous soyez sauvés ; car la prière assidue peut beaucoup. Prions pour tous les hommes, justes ou pécheurs, fidèles ou infidèles ; pour nos ennemis, pour ceux qui sont dans la peine, dans l'erreur, afin que Dieu les en délivre. Nous ne pouvons pourtant nous recommander qu'aux prières des anges, des saints et des fidèles. C'est aux prières des justes qu'est accordée la conversion des pécheurs. Mais tous ne se convertissent pas. Dieu en punit plusieurs, sans avoir égard aux vœux qui lui sont adressés pour leur conversion. Prions pour les âmes du purgatoire. L'Écriture dit que c'est une chose sainte et salutaire, et telle a toujours été la pratique de l'Église. Quand on pense aux besoins continuels, innombrables de l'Église et de ses enfants, peut-on se lasser de prier, si l'on se rappelle que la prière est toute-puissante auprès du Tout-Puissant, pourvu qu'elle soit bien faite.

Lire liv. 3, chap. 53, Imitation de Jésus-Christ.


Qualités de la prière


1. Il faut prier avec attention, pensant à ce qu'on dit et priant de cœur en même temps qu'on prie de bouche ; autrement, comment voulez-vous que Dieu vous écoute, si vous ne vous entendez pas vous-même ? (S. Jean-Chrysostôme) Les distractions peuvent être involontaires, et par conséquent sans péché ; mais combien n'a-t-on pas de distractions volontaires en elles-mêmes ou dans leurs causes ? en elles-mêmes, lorsque, s'apercevant que l'esprit est occupé d'autre chose que de la prière, on continue de s'en occuper ; dans leurs causes, quand on prie sans préparation, dans un temps, dans un lieu et dans des circonstances propres naturellement à donner des distractions. Si c'est donc par négligence qu'on est inattentif dans la prière, loin de servir Dieu, on l'offense. Pour prévenir ces distractions, pour en diminuer le nombre, ou du moins afin qu'elles ne soient point volontaires, il faut avoir soin, avant la prière, de se mettre en présence de Dieu, et de se recueillir un instant au moins avant de commencer. Renouvelons de temps à autre notre attention ; rappelons notre âme à la prière, aussitôt que nous voyons que nous sommes distraits.

2. Il faut prier avec humilité, avec de grands sentiments de notre misère, de notre faiblesse, de nos besoins. « La prière de celui qui s'humilie pénètre les cieux. » Eccl. 35. Dieu qui résiste aux superbes, prend plaisir à donner sa grâce aux humbles. Mais ne pas vouloir se mettre dans l'église à côté d'un pauvre, ne pas se mettre deux genoux en terre, s'y tenir d'une manière peu respectueuse, est-ce là une marque d'humilité ? Il n'est point de loi qui règle la situation du corps dans la prière particulière ; cependant il est bon, à l'exemple de saint Paul, de prier chaque jour à genoux. Imitons le publicain qui mérita par son humilité d'être exaucé de Dieu. Humilions-nous au-dedans de nous-mêmes, humilions-nous au-dehors, humilions-nous de toute manière, puisque c'est le moyen le plus sûr pour obtenir ce que nous demandons.

3. Il faut prier avec confiance, avec une ferme assurance que Dieu nous exaucera, parce qu'il est bon. Cette confiance peut tout, selon les promesses de J.-C. C'était à elle qu'il attribuait les miracles qu'on obtenait de lui. Votre foi vous a sauvés, disait-il souvent. Si la prière a tant d'empire sur nous, que ne peut-elle pas sur notre Père tout-puissant ? Demandez et vous recevrez, nous dit-il lui-même. L'expérience prouve qu'il va même au-delà de ce qu'il a promis ; il surpasse nos vœux. On obtient toujours l'essentiel d'une demande bien faite, la sanctification, l'avancement dans le bien. Mais Dieu sachant mieux que nous ce qui nous est avantageux, ne nous accorde pas toujours chacune des choses que nous lui demandons. C'est par miséricorde qu'il nous refuse : loin d'en murmurer, il faut l'en remercier. D'ailleurs, si nous ne sommes pas toujours exaucés, c'est souvent parce que nous ne prions pas avec confiance, ci celui qui hésite dans sa prière, dit S. Jacques ; celui qui n'est pas animé de confiance, qui doute si Dieu pourra ou s'il voudra le secourir, celui-là ne doit pas s'attendre à recevoir quelque chose de Dieu. »

4. Il faut prier avec persévérance ; il ne faut point se lasser de demander. Après avoir imploré une grâce, il faut continuer à presser Dieu de nous l'accorder. C'est ce que fit cette Chananéenne que les Pères regardent comme un modèle de prière. Le Sauveur nous a montré l'efficacité de la persévérance, par deux paraboles : celle de cet homme à qui il vient des amis pendant la nuit, et qui, manquant de pain pour le leur donner, va en demander à son ami ; et celle de la femme qui, ayant un procès, alla si souvent solliciter, importuner son juge, qu'il lui accorda ce qu'elle désirait.

Pour rendre nos prières efficaces, outre les quatre dispositions que nous venons d'exposer, il faut encore prier avec une intention pure, rapportant nos souhaits à la gloire de Dieu, à notre salut et à celui de nos frères. Le royaume céleste, et ce qui peut nous y conduire, voilà quel doit être l'unique objet de nos demandes, ou du moins c'est à cela qu'elles doivent toutes se rapporter.

Enfin, il faut prier Dieu au nom de J.-C. C'est le divin Sauveur lui-même qui nous l'a commandé. « Si vous demandez à mon Père quelque chose en mon nom, il vous l'accordera. » Il dit à ses apôtres que, quoiqu'ils eussent demandé plusieurs choses, ils ne les avaient pas obtenues, parce qu'ils ne les avaient pas demandées en son nom. Imitons l'Église, qui conclut ses prières par ces mots : Nous vous en conjurons par notre Seigneur J.-C. « C'est lui, dit saint Jean, qui est notre avocat, et qui parle en notre faveur à son Père. » Notre prière doit s'adresser à Dieu seul, comme à la source même de tous les biens, et à J.-C, l'unique médiateur entre Dieu et les hommes. Nous pouvons, nous devons même prier la Sainte Vierge, les bons Anges et les Saints, comme nos intercesseurs auprès de J.-C.

Remarquons encore qu'afin que nos prières soient récompensées dans les cieux, et pour mériter la vie éternelle, il faut être en état de grâce. Si l'on a perdu ce don de Dieu, on doit en avoir de la douleur et faire tous ses efforts pour sortir du péché. La prière faite dans ces dispositions attire des grâces de conversion. Si l'on est dans l'erreur, comme les hérétiques, les infidèles, et qu'on cherche de bonne foi à s'instruire, la prière est encore nécessaire dans cette position ; et, si on la fait dans de bonnes vues, Dieu l'exaucera. Quant à ceux qui, par un esprit d'orgueil, persistent dans l'erreur contre la vérité connue, leur prière ne peut qu'être fausse. C'est se moquer de Dieu que de lui demander pardon pour des péchés qu'on ne veut pas quitter.


Recommandation de quelques prières


La bénédiction de la table et l'action de grâces après le repas, sont de très-anciennes pratiques de religion. Un vrai chrétien s'acquitte exactement de ce double devoir, que prescrivent le besoin que nous avons des bienfaits et des grâces de Dieu., et la reconnaissance que nous lui devons.


(Instruction tirée de Vie des Bienheureux et des Saints de Bretagne)



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