lundi 20 avril 2020

Ordre de la vie spirituelle pour les Directeurs, par le R.-P. Jean-Joseph Surin



Extrait du CATÉCHISME SPIRITUEL DE LA PERFECTION CHRÉTIENNE, TOME I, Composé par le R. P. J. J. SURIN, de la Compagnie de Jésus :




Ordre de la vie spirituelle pour les Directeurs



Quel est le commencement de la vie spirituelle ?

C'est la bonne volonté, c'est-à-dire, le désir sincère de servir Dieu.


Comment se forme ce désir dans une âme ?

C'est l'effet d'une grâce spéciale que Dieu donne dans certaines conjonctures ménagées par sa providence, par exemple, à l'occasion d'une sainte lecture, d'un entretien avec quelque personne spirituelle, d'un Sermon entendu en certaines circonstances. Cependant, quoique ce désir soit un don de Dieu, nous pouvons y contribuer, et nous y contribuons en effet par notre fidélité à correspondre à la grâce qui en est le principe.


De quelle manière doit-on mettre ce désir en pratique ?

En commençant par s'éloigner du monde, de ses conversations inutiles, de ses divertissements, et de ses occupations frivoles, pour s'adonner à la pratique du recueillement intérieur, seule capable de soutenir l'homme dans la poursuite du bien. Car comme notre âme perd ses forces en se dissipant dans le commerce du monde ; elle les augmente, en les réunissant par le soin qu'elle a de se recueillir au dedans d'elle-même.


À quoi sert le recueillement ?

À nous rendre attentifs à Dieu et à nous-mêmes.


À quelle marque connait-on que cette bonne volonté dont nous parlons est dans un homme ?

C'est lorsque de l'attention sur soi-même, il passe à une application fervente à mortifier ses passions, à réprimer les mouvements de la nature corrompue, à combattre les inclinations qui portent au mal, et à s'éloigner de ce qui flatte les sens.


Combien de temps faut-il persévérer dans ce recueillement, et dans cette application à s’y mortifier ?

C'est une étude difficile, et qui demande beaucoup de générosité : suivant le cours ordinaire de la grâce, elle doit être continuée pour le moins un an. C'est à un sage Directeur à en régler la durée sur le soin qu'on prend de se vaincre, et sur les succès dont Dieu récompense les efforts que l'on fait.


Quel autre soin faut-il joindre à celui de la mortification ?

Le soin d'embraser le cœur de l'amour de Dieu, par l'assiduité aux exercices extérieurs qui excitent la dévotion ; et surtout à ceux qui regardent le Mystère de la Passion, et qui nous rendent sensibles aux souffrances de Notre Sauveur ; parce que ce sont les plus utiles. Nous en avons parlé au chapitre cinquième de la seconde Partie.


Où est-ce que ces saintes pratiques ont coutume de conduire ?

Après qu'on a travaillé à se vaincre avec le secours ordinaire de la grâce, à former l'habitude du recueillement, et à s'enflammer de l'amour de Dieu, il arrive que le Saint-Esprit se rend maître de l'âme, en faisant cesser son activité. Il se communique à elle d'une manière très-douce, et il la remplit de saints désirs ; de sorte qu'elle ne peut agir que fort peu par elle même, et qu'elle n'a qu'à suivre le Saint-Esprit qui la meut, et qui la guide presqu'en toutes choses, d'une manière occulte. Le devoir de l'âme alors, est de se laisser conduire aux mouvements de ce guide intérieur ; de conserver avec soin la paix et la tranquillité qu'il lui donne, et de marcher avec fidélité dans cette nouvelle voie, beaucoup plus avantageuse, plus douce, et plus relevée que la première.


Est-il ordinaire aux âmes d'entrer dans cette voie ?

Dieu y conduit ordinairement les personnes qui ont bonne volonté : mais c'est par un pur effet de sa miséricorde.


Où est-ce que cette voie va enfin aboutir ?

Après avoir longtemps joui de la paix du Saint-Esprit, et de ses communications intérieures, on tombe dans l'aridité, qui sert à épurer notre foi, et à nous faire marcher en esprit. Cet état de sécheresse dure ordinairement six mois, ou un an, et quelquefois davantage, selon qu'il plaît à Dieu d'en ordonner ; pour nous apprendre à nous passer des goûts sensibles, et à nous contenter d'une vie qui se soutienne par la pure foi.


Quelles sont les suites de cette aridité ?

Quelquefois l'âme recouvre son ancienne paix d'une manière avantageuse, avec un goût purement spirituel, et beaucoup plus excellent que le premier. Elle est attachée à Dieu plus solidement; et elle le sert avec tranquillité jusqu'à la mort, sans éprouver de changement notable. Quelquefois aussi Dieu la fait passer par les peines et les tentations extraordinaires, dont nous avons parlé au chapitre 5 de la 4e Partie, après lesquelles elle est enfin élevée à la plus noble et la plus excellente de toutes les vies ; ce qui s'accomplit de deux manières. En quelques personnes, c'est une vicissitude de grands biens et de grands maux, qui se succèdent les uns aux autres. Elles sont dans des peines étranges pendant quelques mois ; et ensuite elles reçoivent de la part de Dieu de grandes faveurs pendant un temps considérable. En d'autres, les peines sont continuelles et sans relâche durant plusieurs années, après quoi elles sont établies dans un état permanent de félicité.
C'est la conduite ordinaire que Dieu garde envers les âmes qui aspirent à la perfection ; ce qui n'empêche pas qu'il n'y en ait plusieurs, qui ne passent point par ces épreuves, soit à cause de leur grande innocence, soit parce qu'il plaît à Dieu qui est le maitre, de les en dispenser.


Quel ordre faut-il garder pour conduire le commun des hommes qui s'adonnent à la vertu ?

Ce que nous avons dit jusqu'à maintenant regarde les âmes généreuses qui se donnent à Dieu sans réserve. Car pour le grand nombre des hommes, en qui la bonne volonté n'est pas entière, qui ne servent Dieu qu'à demi, qui conservent toujours les mêmes attaches, qui se cherchent toujours eux-mêmes ; on ne voit pas quel ordre on pourrait prescrire pour leur conduite, parce qu'ils n'en gardent point eux-mêmes ; leur vie étant un mélange confus de vertus et d'imperfection, de ferveur et de relâchement, qui se succèdent sans cesse.
L'ordre suppose des progrès, et des changements notables, et on n'en voit presque point dans ces personnes. Au bout de vingt ans, leur état est à peu près le même ; elles en sont au même degré d'oraison ; elles ont les mêmes défauts à combattre, parce qu'elles ne font que des efforts médiocres, que leur résolution n'est pas assez généreuse, et qu'elles n'ont pas pris au commencement une assez haute idée de la perfection. Cependant elles ne laissent pas de faire quelque profit à cause des bonnes œuvres qu'elles pratiquent constamment, et de quelque soin qu'elles prennent de se corriger de certains défauts ; et on doit les mettre au rang des enfants de Dieu, non seulement parce que sa grâce habite en elles, mais encore parce qu'elles s'emploient utilement à son service.


À quoi peut-on comparer ces personnes ?

On peut les comparer à ces marchands qui ne font que de petits profits, parce qu'ils n'osent étendre leur commerce. Au lieu que les personnes de bonne volonté ressemblent à ceux, qui d'un petit négoce passent à un plus grand, et vont toujours en augmentant, jusqu'à ce que leur opulence les mette en état de monter à une condition plus relevée. Tout dépend du commence ment, c'est-à-dire, de la première idée qu'on se forme de la perfection, et du premier désir, qui est plus sincère et plus efficace dans les unes que dans les autres.
Ce qu'on doit souhaiter à ces spirituels lâches et timides, c'est que Dieu leur ménage quelque heureuse rencontre, qui leur donne d'autres idées et d'autres désirs, et qui leur fasse prendre la résolution, de tendre à la perfection de toutes leurs forces. Alors ils entreront dans cet ordre admirable, qui fait passer successivement les serviteurs de Dieu, des consolations aux épreuves, et des épreuves aux consolations : jusqu'à ce que la lumière se découvrant à eux, les fasse entrer dans les voies de la parfaite sainteté.



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