L'apôtre saint Paul, en plusieurs de ses lettres, disait aux premiers chrétiens que par le baptême ils étaient morts et ensevelis avec Jésus-Christ ; qu'en sortant des fonts baptismaux ils étaient ressuscités avec lui et obligés à mener une vie nouvelle sur le modèle de sa glorieuse résurrection. C'est ce qu'on prêche à son exemple aux fidèles dans la solennité de Pâques.
Comme j'écris ici pour des âmes non seulement mortes au péché, mais déterminées à vivre d'une vie toute de grâce, je leur propose la résurrection du Sauveur, non comme le modèle, mais comme le terme de cette vie toute sainte qu'elles ont embrassée ; et je leur dis que, pour ressusciter comme Jésus-Christ, il faut qu'elles meurent comme lui. Or, la vie de Jésus-Christ a été une mort continuelle, j'entends une mort mystique, dont le dernier acte et la consommation a été sa mort naturelle sur la croix.
Ainsi la vie nouvelle qu'elles doivent mener en Jésus-Christ, n'est autre chose qu'une mort continuelle à elles-mêmes ; mort aux péchés les plus légers et aux moindres imperfections ; mort au monde et à toutes les choses extérieures ; mort au sens et aux soins immodérés du corps ; mort au caractère et aux défauts naturels ; mort à la volonté propre ; mort à l'estime et à l'amour de nous-mêmes ; mort aux consolations spirituelles ; mort aux appuis et aux assurances par rapport à l'état de notre âme ; enfin, mort à toutes les propriétés dans les choses qui concernent la sainteté. C'est par ces divers degrés de mort que la vie mystique de Jésus-Christ s'établit en nous, et, lorsque le dernier coup de la mort est porté, Jésus-Christ nous ressuscite et nous communique les qualités de sa vie glorieuse, même dès ici-bas, du moins quant à l'âme, et autant qu'elle en est susceptible en ce monde. Parcourons en peu de mots ces différents degrés de mort.
Mort aux péchés les plus légers et aux moindres imperfections. La première résolution que doit former une âme qui veut être tout à fait à Dieu, est de ne jamais commettre aucune faute avec vue et de propos délibéré ; de ne jamais agir en quoi que ce soit contre sa conscience ; de ne jamais rien refuser à Dieu de ce qu'il lui demande ; de ne jamais dire : C'est peu de chose, Dieu me passera cette bagatelle. Cette résolution est essentielle, et il faut s'y maintenir avec une fidélité inviolable. Ce n'est pas qu'il n'échappe des fautes de premier mouvement, d'inadvertance, de fragilité ; mais ces fautes ne nous arrêtent point dans la voie de la perfection, parce qu'elles ne sont ni prévues, ni réfléchies.
Mort au monde et à toutes les choses extérieures, c'est-à-dire, qu'il ne faut plus aimer le monde, ni le chercher ; mais ne lui accorder que ce qu'on ne peut lui refuser selon son état, et ce que Dieu même veut qu'on lui accorde, et qu'il faut aller jusqu'à souffrir et gémir dans son cœur du commerce indispensable qu'on a avec lui ; c'est-à-dire qu'il ne faut plus respecter le monde, ni avoir égard à ses jugements, ni craindre ses mépris, ses railleries, ses persécutions, ni avoir honte devant lui de ses devoirs et de la pratique de l'Évangile, ni se détourner en rien de ce que nous dictent Dieu et la conscience, dans l'appréhension de ce que le monde en pourra dire et penser. Dans un siècle aussi corrompu que le nôtre, il y a bien des combats à soutenir, bien des obstacles à vaincre, bien des usages à mépriser, bien des préjugés à fouler aux pieds, pour triompher pleinement du respect humain. C'est un des articles sur lesquels il faut s'examiner avec le plus de rigueur, et ne se faire aucune grâce.
Mort aux sens et aux soins immodérés du corps. Être en garde contre la mollesse, l'amour des aises, la sensualité ; ne donner au corps que ce qui lui est nécessaire pour la nourriture, le sommeil, les vêtements ; le mortifier de temps en temps par des privations ; et, si la santé le permet, si Dieu l'inspire, si le confesseur le trouve bon, lui imposer quelques peines afflictives. Ne rien donner surtout aux yeux et aux oreilles, et éviter tout ce qui peut vivement affecter l'âme.
Mort au caractère et aux défauts naturels. Ce n'est pas une petite chose de réformer tellement son caractère, qu'on ne conserve que ce qu'il a de bon, et qu'on corrige ce qu'il a de défectueux. Bien des Saints que l'Église révère, n'étaient pas morts entièrement sur cet article. Tous n'ont pas été des Augustin et des François de Sales, en qui le caractère était parfaitement dompté et soumis à la grâce. Le grand moyen d'y parvenir, sans tant d'étude ni de réflexion, est de veiller à la garde de son cœur, d'arrêter les premiers mouvements, de ne point agir et de ne point parler par humeur, par saillie, par impétuosité, de se maintenir toujours en paix et dans la possession de soi-même. Pourquoi ne ferait-on pas pour Dieu et avec le secours de sa grâce, ce que tant de gens font dans le monde pour l'intérêt de leur fortune ?
Mort à la volonté propre et au propre esprit. Ce point est d'une grande étendue et d'une pratique difficile. D'abord, dans les choses ordinaires, il faut s'étudier à soumettre son esprit et sa volonté à la raison, à ne point se laisser aller aux caprices, aux fantaisies ; à ne point s'aheurter à son sentiment, à écouter les raisons des autres et à y déférer, si elles nous paraissent bonnes ; à céder volontiers à l'avis et au désir des autres dans les choses indifférentes ; en ce qui regarde notre conduite spirituelle, à recevoir simplement ce que Dieu nous donne, et à rester comme il nous met, sans désirer autre chose ; à ne point juger ni de son état, ni des opérations de la grâce, à pratiquer, à l'égard du directeur, l'obéissance du jugement et de la volonté ; à réprimer l'activité de l'esprit, et à le tenir toujours dans la dépendance de Dieu, ainsi que la volonté ; à ne point réfléchir sur soi, à ne point raisonner, et à se conduire par l'instinct divin, bien supérieur à nos raisonnements et à nos lumières ; à ne rien donner dans ses lectures à la curiosité de l'esprit, cherchant simplement à nourrir le cœur, et ne faisant point d'efforts pour tout approfondir et tout entendre dans les livres spirituels ; chose dangereuse qui aboutirait à nous remplir de fausses idées, à nous rendre présomptueux, et à nous exposer aux illusions. Croyons que Dieu nous donnera à mesure les lumières qui nous sont nécessaires, et ne cherchons point à aller au delà, mais recevons-les humblement et appliquons-les à la pratique. En général, tenons toujours notre esprit et notre cœur dans un certain vide, afin que Dieu puisse y mettre à son gré ce qu'il voudra.
Mort à l'estime et à l'amour de nous-mêmes. Cette mort, comme on le voit, devient toujours de plus en plus intime ; car, s'il est quelque chose de profondément enraciné en nous, c'est l'orgueil, c'est l'amour-propre. Ce sont là les deux grands ennemis de Dieu, et par conséquent les nôtres. Dieu les attaque et les poursuit sans relâche dans une âme qui s'est donnée à lui. Elle n'a qu'à le laisser faire, et à le seconder dans l'occasion.
Mort aux consolations spirituelles. Un temps vient où Dieu en sèvre l'âme. Plus de goût à rien : tout lui pèse, tout l'ennuie, tout la fatigue ; elle ne sent plus la présence de Dieu en elle ; elle a la paix, mais elle ne s'en aperçoit pas ; elle ne croit pas même l'avoir, et le reste que j'ai exposé ailleurs. Il faut que l'âme soit généreuse, qu'elle consente à ces privations, qu'elle s'accoutume à ne se rechercher en rien, à aimer Dieu purement, et à le servir pour lui-même et à ses dépens. Alors, comme de raison, le service de Dieu coûte beaucoup à la nature : elle crie, elle se plaint, elle enrage, elle se désespère ; il faut la laisser crier, et être plus fidèle que jamais ; il faut traîner la victime au sacrifice, et n'avoir aucun égard à ses répugnances.
Mort aux appuis et aux assurances par rapport à l'état de notre âme. Tant que l'âme, au milieu des tentations et des épreuves, trouve encore quelque appui au fond de sa conscience, quelque soutien dans son directeur, et qu'elle ne se croit pas abandonnée de Dieu, il lui est aisé de porter les plus grandes peines ; mais quand elle se voit suspendue, qu'elle voit l'enfer sous ses pieds, que rien ne la soutient et qu'à chaque instant, elle se croit prête à y tomber ; en un mot, quand elle se persuade que Dieu l'a délaissée, qu'elle est perdue sans ressource, que rien ne la détrompe, et qu'au contraire tout concourt à l'enfoncer dans cette persuasion, c'est alors que ses angoisses sont extrêmes, et qu'elle a besoin d'un courage héroïque pour persévérer, et pour se soumettre à tout ce qu'il plaira à Dieu d'ordonner d'elle pour l'éternité.
Mort à toute propriété en ce qui concerne la sainteté. L'âme s'était approprié les dons de Dieu, les vertus dont il l'avait enrichie, et elle avait une certaine complaisance en sa pureté. Dieu la dépouille de tout, non quant à la réalité, mais quant à l'apparence, et la réduit en une entière nudité : elle ne voit plus en soi ni dons, ni vertus, ni rien de surnaturel. Elle ne sait ni ce qu'elle est, ni ce qu'elle a été, ni ce qu'elle deviendra. Ses péchés, son néant, sa réprobation : voilà tout ce qu'elle aperçoit en elle et dont elle se juge digne. Voilà la consommation de la mort mystique. La résurrection et l'état glorieux viennent après. Laissons à Dieu ses secrets, et n'en disons pas davantage.
(Extrait du Manuel des âmes intérieures)
Reportez-vous à De la violence qu'il faut se faire à soi-même, Sur la sainteté, De la paix du cœur, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Du renouvellement de l'esprit, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De l'activité naturelle, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De la vie parfaite, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De la Mortification, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Remèdes à l'amour-propre, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Des tentations et des illusions, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Sur la vaine curiosité, De la nourriture du corps, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Des Habits, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Des moyens de parvenir à la vraie et solide vertu, Idée de la vraie Vertu, De la vraie et solide dévotion, Degrés des vertus qu'on se propose d'acquérir, Pour bien faire l'oraison et pour en tirer le fruit qu'on a lieu d'en attendre, En quelque état que vous soyez, rendez respectable, par vos sentiments et votre conduite, votre titre de Chrétienne, Qu'il est très-utile d'ajouter quelques pénitences à l'examen particulier, Conseils pour la lecture spirituelle, En quoi consiste l'exercice de la présence de Dieu, De la doctrine de Jésus-Christ, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Instruction sur la Grâce, Des Conseils Évangéliques, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Le Paradis de la Terre, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Ordre de la vie spirituelle pour les Directeurs, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, et Des maladies de l'âme, par le R.-P. Jean-Joseph Surin.
Comme j'écris ici pour des âmes non seulement mortes au péché, mais déterminées à vivre d'une vie toute de grâce, je leur propose la résurrection du Sauveur, non comme le modèle, mais comme le terme de cette vie toute sainte qu'elles ont embrassée ; et je leur dis que, pour ressusciter comme Jésus-Christ, il faut qu'elles meurent comme lui. Or, la vie de Jésus-Christ a été une mort continuelle, j'entends une mort mystique, dont le dernier acte et la consommation a été sa mort naturelle sur la croix.
Ainsi la vie nouvelle qu'elles doivent mener en Jésus-Christ, n'est autre chose qu'une mort continuelle à elles-mêmes ; mort aux péchés les plus légers et aux moindres imperfections ; mort au monde et à toutes les choses extérieures ; mort au sens et aux soins immodérés du corps ; mort au caractère et aux défauts naturels ; mort à la volonté propre ; mort à l'estime et à l'amour de nous-mêmes ; mort aux consolations spirituelles ; mort aux appuis et aux assurances par rapport à l'état de notre âme ; enfin, mort à toutes les propriétés dans les choses qui concernent la sainteté. C'est par ces divers degrés de mort que la vie mystique de Jésus-Christ s'établit en nous, et, lorsque le dernier coup de la mort est porté, Jésus-Christ nous ressuscite et nous communique les qualités de sa vie glorieuse, même dès ici-bas, du moins quant à l'âme, et autant qu'elle en est susceptible en ce monde. Parcourons en peu de mots ces différents degrés de mort.
Mort aux péchés les plus légers et aux moindres imperfections. La première résolution que doit former une âme qui veut être tout à fait à Dieu, est de ne jamais commettre aucune faute avec vue et de propos délibéré ; de ne jamais agir en quoi que ce soit contre sa conscience ; de ne jamais rien refuser à Dieu de ce qu'il lui demande ; de ne jamais dire : C'est peu de chose, Dieu me passera cette bagatelle. Cette résolution est essentielle, et il faut s'y maintenir avec une fidélité inviolable. Ce n'est pas qu'il n'échappe des fautes de premier mouvement, d'inadvertance, de fragilité ; mais ces fautes ne nous arrêtent point dans la voie de la perfection, parce qu'elles ne sont ni prévues, ni réfléchies.
Mort au monde et à toutes les choses extérieures, c'est-à-dire, qu'il ne faut plus aimer le monde, ni le chercher ; mais ne lui accorder que ce qu'on ne peut lui refuser selon son état, et ce que Dieu même veut qu'on lui accorde, et qu'il faut aller jusqu'à souffrir et gémir dans son cœur du commerce indispensable qu'on a avec lui ; c'est-à-dire qu'il ne faut plus respecter le monde, ni avoir égard à ses jugements, ni craindre ses mépris, ses railleries, ses persécutions, ni avoir honte devant lui de ses devoirs et de la pratique de l'Évangile, ni se détourner en rien de ce que nous dictent Dieu et la conscience, dans l'appréhension de ce que le monde en pourra dire et penser. Dans un siècle aussi corrompu que le nôtre, il y a bien des combats à soutenir, bien des obstacles à vaincre, bien des usages à mépriser, bien des préjugés à fouler aux pieds, pour triompher pleinement du respect humain. C'est un des articles sur lesquels il faut s'examiner avec le plus de rigueur, et ne se faire aucune grâce.
Mort aux sens et aux soins immodérés du corps. Être en garde contre la mollesse, l'amour des aises, la sensualité ; ne donner au corps que ce qui lui est nécessaire pour la nourriture, le sommeil, les vêtements ; le mortifier de temps en temps par des privations ; et, si la santé le permet, si Dieu l'inspire, si le confesseur le trouve bon, lui imposer quelques peines afflictives. Ne rien donner surtout aux yeux et aux oreilles, et éviter tout ce qui peut vivement affecter l'âme.
Mort au caractère et aux défauts naturels. Ce n'est pas une petite chose de réformer tellement son caractère, qu'on ne conserve que ce qu'il a de bon, et qu'on corrige ce qu'il a de défectueux. Bien des Saints que l'Église révère, n'étaient pas morts entièrement sur cet article. Tous n'ont pas été des Augustin et des François de Sales, en qui le caractère était parfaitement dompté et soumis à la grâce. Le grand moyen d'y parvenir, sans tant d'étude ni de réflexion, est de veiller à la garde de son cœur, d'arrêter les premiers mouvements, de ne point agir et de ne point parler par humeur, par saillie, par impétuosité, de se maintenir toujours en paix et dans la possession de soi-même. Pourquoi ne ferait-on pas pour Dieu et avec le secours de sa grâce, ce que tant de gens font dans le monde pour l'intérêt de leur fortune ?
Mort à la volonté propre et au propre esprit. Ce point est d'une grande étendue et d'une pratique difficile. D'abord, dans les choses ordinaires, il faut s'étudier à soumettre son esprit et sa volonté à la raison, à ne point se laisser aller aux caprices, aux fantaisies ; à ne point s'aheurter à son sentiment, à écouter les raisons des autres et à y déférer, si elles nous paraissent bonnes ; à céder volontiers à l'avis et au désir des autres dans les choses indifférentes ; en ce qui regarde notre conduite spirituelle, à recevoir simplement ce que Dieu nous donne, et à rester comme il nous met, sans désirer autre chose ; à ne point juger ni de son état, ni des opérations de la grâce, à pratiquer, à l'égard du directeur, l'obéissance du jugement et de la volonté ; à réprimer l'activité de l'esprit, et à le tenir toujours dans la dépendance de Dieu, ainsi que la volonté ; à ne point réfléchir sur soi, à ne point raisonner, et à se conduire par l'instinct divin, bien supérieur à nos raisonnements et à nos lumières ; à ne rien donner dans ses lectures à la curiosité de l'esprit, cherchant simplement à nourrir le cœur, et ne faisant point d'efforts pour tout approfondir et tout entendre dans les livres spirituels ; chose dangereuse qui aboutirait à nous remplir de fausses idées, à nous rendre présomptueux, et à nous exposer aux illusions. Croyons que Dieu nous donnera à mesure les lumières qui nous sont nécessaires, et ne cherchons point à aller au delà, mais recevons-les humblement et appliquons-les à la pratique. En général, tenons toujours notre esprit et notre cœur dans un certain vide, afin que Dieu puisse y mettre à son gré ce qu'il voudra.
Mort à l'estime et à l'amour de nous-mêmes. Cette mort, comme on le voit, devient toujours de plus en plus intime ; car, s'il est quelque chose de profondément enraciné en nous, c'est l'orgueil, c'est l'amour-propre. Ce sont là les deux grands ennemis de Dieu, et par conséquent les nôtres. Dieu les attaque et les poursuit sans relâche dans une âme qui s'est donnée à lui. Elle n'a qu'à le laisser faire, et à le seconder dans l'occasion.
Mort aux consolations spirituelles. Un temps vient où Dieu en sèvre l'âme. Plus de goût à rien : tout lui pèse, tout l'ennuie, tout la fatigue ; elle ne sent plus la présence de Dieu en elle ; elle a la paix, mais elle ne s'en aperçoit pas ; elle ne croit pas même l'avoir, et le reste que j'ai exposé ailleurs. Il faut que l'âme soit généreuse, qu'elle consente à ces privations, qu'elle s'accoutume à ne se rechercher en rien, à aimer Dieu purement, et à le servir pour lui-même et à ses dépens. Alors, comme de raison, le service de Dieu coûte beaucoup à la nature : elle crie, elle se plaint, elle enrage, elle se désespère ; il faut la laisser crier, et être plus fidèle que jamais ; il faut traîner la victime au sacrifice, et n'avoir aucun égard à ses répugnances.
Mort aux appuis et aux assurances par rapport à l'état de notre âme. Tant que l'âme, au milieu des tentations et des épreuves, trouve encore quelque appui au fond de sa conscience, quelque soutien dans son directeur, et qu'elle ne se croit pas abandonnée de Dieu, il lui est aisé de porter les plus grandes peines ; mais quand elle se voit suspendue, qu'elle voit l'enfer sous ses pieds, que rien ne la soutient et qu'à chaque instant, elle se croit prête à y tomber ; en un mot, quand elle se persuade que Dieu l'a délaissée, qu'elle est perdue sans ressource, que rien ne la détrompe, et qu'au contraire tout concourt à l'enfoncer dans cette persuasion, c'est alors que ses angoisses sont extrêmes, et qu'elle a besoin d'un courage héroïque pour persévérer, et pour se soumettre à tout ce qu'il plaira à Dieu d'ordonner d'elle pour l'éternité.
Mort à toute propriété en ce qui concerne la sainteté. L'âme s'était approprié les dons de Dieu, les vertus dont il l'avait enrichie, et elle avait une certaine complaisance en sa pureté. Dieu la dépouille de tout, non quant à la réalité, mais quant à l'apparence, et la réduit en une entière nudité : elle ne voit plus en soi ni dons, ni vertus, ni rien de surnaturel. Elle ne sait ni ce qu'elle est, ni ce qu'elle a été, ni ce qu'elle deviendra. Ses péchés, son néant, sa réprobation : voilà tout ce qu'elle aperçoit en elle et dont elle se juge digne. Voilà la consommation de la mort mystique. La résurrection et l'état glorieux viennent après. Laissons à Dieu ses secrets, et n'en disons pas davantage.
(Extrait du Manuel des âmes intérieures)
Reportez-vous à De la violence qu'il faut se faire à soi-même, Sur la sainteté, De la paix du cœur, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Du renouvellement de l'esprit, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De l'activité naturelle, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De la vie parfaite, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, De la Mortification, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Remèdes à l'amour-propre, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Des tentations et des illusions, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Sur la vaine curiosité, De la nourriture du corps, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Des Habits, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Des moyens de parvenir à la vraie et solide vertu, Idée de la vraie Vertu, De la vraie et solide dévotion, Degrés des vertus qu'on se propose d'acquérir, Pour bien faire l'oraison et pour en tirer le fruit qu'on a lieu d'en attendre, En quelque état que vous soyez, rendez respectable, par vos sentiments et votre conduite, votre titre de Chrétienne, Qu'il est très-utile d'ajouter quelques pénitences à l'examen particulier, Conseils pour la lecture spirituelle, En quoi consiste l'exercice de la présence de Dieu, De la doctrine de Jésus-Christ, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Instruction sur la Grâce, Des Conseils Évangéliques, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Le Paradis de la Terre, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, Ordre de la vie spirituelle pour les Directeurs, par le R.-P. Jean-Joseph Surin, et Des maladies de l'âme, par le R.-P. Jean-Joseph Surin.