mercredi 23 décembre 2020

LA SAINTE GROTTE




CE QU’ELLE ÉTAIT AUTREFOIS, CE QU’ELLE EST DEVENUE


Si Bethléem, autrefois si peu connue entre les cités, doit toute sa gloire à la naissance du Sauveur Jésus, il va sans dire que le lieu le plus sacré de cette ville célèbre est l'étable où naquit le Fils de Dieu : et de fait, ce n'est qu'afin de pouvoir s'agenouiller et prier dans cet humble réduit de la misère et des grandeurs d'un Dieu, que tous les pèlerins des siècles passés sont venus à Bethléem, et que tous ceux qui s'y donnent rendez-vous de nos jours, et que tous ceux que l'on y verra encore dans les âges à venir, y seront conduits.

D 'après ce que nous offrent de plus certain les traditions, l'étable où le Sauveur prit naissance était une espèce de grotte, ou caverne creusée dans le roc, à deux cents pas environ du bourg, et destinée à servir, soit de refuge aux voyageurs égarés, soit d'abri aux animaux durant la nuit.

On n'en saurait douter, cette grotte sacrée est un des monuments les plus précieux du christianisme, et probablement le plus ancien qui ait été aussi intégralement conservé.
Les premiers fidèles, jaloux de posséder un lieu si auguste, se l'approprièrent et y élevèrent un oratoire, qui fut bientôt en vénération, et, qui malgré les persécutions, continua d'être visité par les chrétiens.
Il est vrai qu'au milieu du second siècle, l'empereur Adrien, qui prétendait anéantir jusqu'aux traces du nom de Jésus-Christ, fit abolir l'oratoire, et élever sur son emplacement, un temple qu'il dédia au dieu Adonis ; mais tous ces efforts du paganisme furent inutiles, et le temple d'Adonis n'empêchait pas les païens eux-mêmes, au rapport des anciens écrivains, de montrer avec un respect mêlé de crainte l'endroit du sanctuaire où s'élevait la statue de leur divinité, et de dire : Voilà le lieu où le Dieu des chrétiens a voulu naître.
Au commencement du IVe siècle, les persécutions contre l'Église ayant cessé, et Dieu, dans sa miséricorde, ayant appelé les Césars eux-mêmes dans le sein du christianisme, on vit la pieuse Hélène, mère du grand Constantin, se charger de réparer l'œuvre de l'empereur Adrien. Elle fit abattre le temple d'Adonis, et après avoir retrouvé, par des fouilles heureusement conduites, la sainte grotte de la naissance de Jésus, elle en fit revêtir la voûte et les parois des marbres les plus précieux et des plus riches ornements, et éleva au-dessus une église dont la magnificence attestait les pieuses prodigalités de l'impératrice (Dans le même siècle, et probablement peu après, l'Église fut environnée de monastères et d'hôpitaux destinés à recevoir les pèlerins. Saint Jérôme fut un des premiers qui s'attachèrent
d'une manière permanente à ce saint lieu, et un des plus zélés pour le soutien de ses pieux établissements. Il invitait les personnes les plus distinguées non-seulement à y faire des pèlerinages, mais encore à y fixer leur demeure. C'est ainsi qu'il y attira Paule et Eustochie, deux illustres dames romaines qui sous sa conduite s'élevèrent à une sainteté consommée).
Cette église, que les libéralités des princes chrétiens et les offrandes des ses pieux visiteurs firent agrandir dans la suite, puis réparer et reconstruire, lorsque les dégradations qu’elle avait subies avec le temps menaçaient de ne plus laisser que des ruines, est encore le rendez- vous des pèlerins catholiques : on la nomme Sainte-Marie de la Crèche. (Sancta Maria de Præsepio)
Voici la description que nous en a laissée le R. P. Laorty-Hadji, dans son ouvrage intitulé la Syrie, la Palestine et la Judée :
...Après que l'on a traversé une cour carrée ou atrium, dont il ne reste plus que les murs à fleur du sol, et au centre de laquelle sont trois citernes qui servaient autrefois au baptême par immersion, on pénètre dans un vestibule très-simple où se trouve la seule porte qui donne entrée dans l'église. Cette porte de bois, tombant de vétusté, est du plus grand intérêt par son ancienneté et ses ornements qui représentent des croix entourées d'arabesques. Sur ses battants sont sculptées deux inscriptions, l'une arabe, l'autre arménienne...
Quand on a franchi cette porte, le regard est frappé de la majesté intérieure de l'édifice. Quarante-huit colonnes, disposées sur quatre rangs, le divisent en cinq nefs, dont la largeur est de quatre-vingts pieds et la longueur de quatre-vingt-sept. Le bras de la croix ou transsept, se termine circulairement par deux absides de dimensions semblables à celles de l'abside principale ou chevet de l'église. Depuis la nef jusqu'à l'extrémité du chevet, l'on compte quatre-vingt-cinq pieds, ce qui donne à l'édifice cent soixante-douze pieds de longueur totale (Cinquante-sept mètres).
Comme toutes les anciennes basiliques, l'église de Bethléem n'a pas de voûte : les colonnes ne portent qu'une frise de bois qui remplace l'architrave, et au lieu de dôme l'on voit se développer une charpente (On prétend que cette charpente est de bois de cèdre du Liban) qui ressemble à une forêt.
Les murs, percés de fenêtres, étaient autrefois ornés de mosaïques, dont la conservation complète eût été essentielle pour l'histoire de l'art (Ces mosaïques ont été exécutées, dit-on, en 1278, par l'artiste Éphrem). Il subsiste heureusement des parties assez considérables de ces mosaïques ; le fragment le plus intéressant est dans la nef, à droite, en entrant.
Au-dessus de l'architrave qui porte sur les chapiteaux des colonnes, règne une série de personnages qui représentent les ancêtres de Jésus-Christ. Leur nom, en caractères latins du douzième siècle, est écrit à côté de chacun d'eux.
Au-dessous et au milieu de dessins d'arcades en plein cintre et géminées, on lit une longue inscription en caractères grecs, contenant le résumé des décisions du second concile de Constantinople ; dans d'autres parties de l'église, des inscriptions semblables (Quaresmius a relevé, en 1626, toutes les inscriptions qui subsistaient de son temps ; malheureusement un grand nombre ont disparu depuis cette époque) étaient consacrées aux autres grands conciles. Le côté nord contenait les suivants, ainsi disposés en partant du chœur de l'église : Ancyre, Antioche, Sardique, Gangres, Laodicée, Carthage. Les conciles inscrits du côté du midi étaient : Nicée, Constantinople, Éphèse, Chalcédoine.
Sur les colonnes sont peintes des figures représentant des Saints vus de face ; ces figures sont droites et sans ombres.
L'aspect de ce monument dévasté inspire la tristesse ; on y cherche en vain ce qui caractérise tous les temples chrétiens, l'autel et la chaire. Les dévastations en ont particulièrement détruit la régularité intérieure. Une muraille grossièrement faite le partage à la naissance de la croix, et sert de ligne de démarcation entre les divers cultes, qui se disputent la possession des moindres parties des lieux saints (Les Arméniens sont en possession de la nef ; les Grecs occupent le sanctuaire ainsi que les transsepts formés par les
bras de la croix).
Quand on a passé la muraille, on se trouve dans le sanctuaire ou le chœur, qui occupe le haut de la croix, et qui est exhaussé de trois degrés au-dessus de la nef.
Dans le sanctuaire s'élève un magnifique autel dédié aux Mages... Au bas de cet autel, sur le pavé, une étoile de marbre indique la place, qui, d'après la tradition, correspond au point du ciel où s'arrêta l'étoile conductrice des rois. Perpendiculairement au-dessous est le lieu à jamais auguste où naquit le Sauveur, dans l'église souterraine, connue sous le nom de grotte de la Nativité. Deux escaliers tournants, composés chacun de quinze degrés, y conduisent.
Mais quittons ici notre premier narrateur ; c'est l'immortel auteur du Pèlerinage à Jérusalem, qui va nous décrire ce sanctuaire, d'où vient la gloire et toute la splendeur de la basilique.
...Avant d'y entrer, le Supérieur me mit un cierge à la main et me fit une courte exhortation.
Cette sainte grotte est irrégulière, parce qu'elle occupe l'emplacement irrégulier de l'étable et de la crèche ; elle a 37 pieds 1/2 de long, 11 pieds 3 pouces de large et 9 pieds de haut (Environ 12 mètres de longueur, 4 de largeur et 3 de hauteur) ; elle est taillée dans le roc ; les parois de ce roc sont revêtues de marbre et le pavé de la grotte est également d'un marbre précieux. Ces embellissements sont attribués à sainte Hélène.
La grotte ne tire aucun jour du dehors et n'est éclairée que par la lumière de trente-deux lampes envoyées par différents princes chrétiens. Tout au fond, du côté de l'Orient, est la place où la Vierge enfanta le Rédempteur des hommes ; cette place est marquée par un marbre blanc incrusté de jaspe et entouré d'un cercle d'argent radié en forme de soleil. On lit ces mots à l'entour :

Hic de Virgine Maria
Jesus Christus natus est
.

Une table de marbre, qui sert d'autel, est appuyée contre le rocher et s'élève au-dessus de l'endroit où le Messie vint à la lumière ; cet autel est éclairé par trois lampes, dont la plus belle a été donnée par Louis XIII.
À sept pas delà, vers le midi, après avoir passé l'entrée d'un des escaliers qui montent à l'église supérieure, vous trouvez la Crèche. On y descend par deux degrés : car elle n'est pas de niveau avec le reste de la grotte ; c'est une voûte peu élevée, enfoncée dans le rocher. Un bloc de marbre blanc (Il a été dit ailleurs que la portion de la crèche qui est restée
à Bethléem a été recouverte de marbres précieux, qui l'enferment comme dans un vaste reliquaire), exhaussé d'un pied au-dessus du sol, et creusé en forme de berceau, indique l'endroit où le Souverain du ciel fut couché sur la paille,
...ainsi que nous l'apprend le récit inspiré des évangélistes :
« Joseph partit de la ville de Nazareth, qui est en Galilée, et vint en Judée à la ville de David appelée Bethléem, parce qu'il était de la maison et de la famille de David, pour se faire enregistrer avec Marie son épouse.
Pendant qu'ils étaient en ce lieu, il arriva que le temps auquel Marie devait devenir mère s'accomplit.
Et elle mit au monde son fils premier-né, et l'ayant emmailloté elle le coucha dans une crèche, parce qu'il n'y avait pas de place pour eux dans l'hôtellerie. » (S. Luc)
À deux pas, vis-à-vis la Crèche, est un autel qui occupe la place où Marie était assise lorsqu'elle présenta l'enfant des douleurs aux adorations des Mages.
Rien n'est plus agréable et plus dévot que cette église souterraine ; elle est enrichie de tableaux des écoles italienne et espagnole. Ces tableaux représentent les mystères de ces lieux : des vierges et des enfants, d'après Raphaël, des annonciations, l'adoration des mages, la venue des pasteurs, et tous ces miracles mêlés de grandeur et d'innocence.
Les ornements ordinaires de la Crèche sont de satin bleu brodé en argent ; l'encens fume sans cesse devant le berceau du Sauveur.
J'ai entendu un orgue, fort bien touché, jouer à la messe les airs les plus doux et les plus tendres, des meilleurs compositeurs d'Italie. Ces concerts charment l'Arabe chrétien, qui, laissant paître ses chameaux, vient, comme les antiques bergers de Bethléem, adorer le Roi des rois dans sa Crèche. J'ai vu ces habitants du désert communier à l'autel des Mages avec une ferveur, une piété, une religion inconnues des chrétiens de l'Occident.

Terminons cette description de la sainte Grotte par une parole d'un autre voyageur : « Nul endroit dans l'univers, dit le Père Neret, n'inspire plus de dévotion... L'abord continuel des caravanes de toutes les nations chrétiennes, les prières publiques, les prosternations, la richesse même des présents que les princes chrétiens y ont envoyés..., tout cela excite en votre âme des émotions qui se font sentir beaucoup mieux qu'on ne peut les exprimer. »

(Extrait de Les Fêtes de Noël à Rome, correspondance d'un pèlerin suivie de récits, de descriptions et d'anecdotes sur les fêtes de Noël à Bethléem et dans plusieurs autres villes du monde catholique, par M. l'Abbé V. Dumax, 1859)


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puis ayant ouvert leurs trésors, ils lui offrirent en présent de l'or, de l'encens et de la myrrhe, Discours aux jeunes époux, du Pape Pie XII, durant l'Octave de l’Épiphanie, le 10 janvier 1940, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 18e Méditation : Voici que l'étoile qu'ils avaient vue en Orient parut, allant devant eux, jusqu'à ce qu'elle vint s'arrêter sur le lieu où était l'enfant, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 17e Méditation : À la nouvelle de la naissance du saint Enfant, le roi Hérode fut troublé, et tout Jérusalem avec lui, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 16e Méditation : Nous avons vu son étoile en Orient, et nous sommes venus pour l'adorer, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 15e Méditation : Voici que les Mages vinrent de l'Orient à Jérusalem, Méditation pour le Jour des Rois : Que votre Règne arrive, Instruction sur la Fête des Rois, Méditation sur l’Épiphanie : Les Mages confessent Jésus-Christ devant les hommes, Méditation sur l’Épiphanie : Les Mages à Jérusalem, Méditation pour l’Épiphanie : La vocation des mages prédite et figurée, notre vocation à la foi de Jésus-Christ, Méditation sur l’Épiphanie : Les Rois-Mages, Méditation sur l’Épiphanie : Du ministère de Marie dans la vocation des Gentils à la Foi, Remerciement, offrande et prière au Verbe de Dieu incarné, pour l'Octave de l'Épiphanie, Méditation sur l’Épiphanie, Méditation sur la Nativité, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 14e Méditation : On lui donna le nom de Jésus, Litanies du Saint Nom de Jésus, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 13e Méditation : On lui donna le nom de Jésus, nom qui lui avait été donné par l'ange, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 12e Méditation : Après huit jours, le saint Enfant fut circoncis, Instruction sur la Circoncision, Méditation sur la Circoncision, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 11e Méditation : Les bergers revinrent en glorifiant et en louant Dieu de tout ce qu'ils avaient vu et entendu, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 10e Méditation : Les bergers se disaient les uns aux autres : Allons jusqu'à Bethléem, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 9e Méditation : Gloire à Dieu au plus haut des Cieux, et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 7e Méditation : Tout à coup l'Ange du Seigneur parut auprès d'eux, Salutation à Marie et à Jésus naissant, Litanies du Saint Enfant-Jésus, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 1re Méditation : Marie s'étant rendue avec Joseph à Bethléem, le temps de son divin enfantement arriva, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 2e Méditation : Je vous annonce un grand sujet de Joie, il vous est né aujourd'hui un Sauveur, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 3e Méditation : Marie mit au monde son fils premier-né, et l'enveloppa de langes, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 4e Méditation : Marie, après avoir enveloppé de langes le saint Enfant, le coucha dans la crèche, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 5e Méditation : Voici le signe qui vous est donné : vous trouverez un enfant enveloppé de langes et couché dans une crèche, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 6e Méditation : Il y avait là aux environs des bergers qui veillaient et se relevaient les uns les autres pendant la nuit, pour la garde de leurs troupeaux, Litanies du Saint Enfant-Jésus, et Dévotion au Saint Enfant-Jésus : Prière d'amour et Consécration.