Depuis quatre mille ans, le monde entier soupirait après la venue du Messie, et tous les signes qui la devaient précéder avaient paru : le sceptre de la Judée, comme l'avait annoncé Jacob, avait passé des mains des descendants de David dans celle d'Hérode, prince étranger ; les années prédites par Daniel touchaient à leur terme, et la paix qui régnait dans tout l'univers était l'accomplissement de la prophétie d'Isaïe, dans laquelle il était dit qu'à la naissance du prince de la paix les lances seraient changées en faux, et les épées en socs de charrue. C'est alors que dans le profond silence de toute la nature, au milieu d'une nuit paisible, à l'extrémité de la ville de Bethléem, lieu désigné par un prophète, au fond d'une étable en ruine où sa pauvreté l'avait réduite à chercher un refuge, Marie enfanta sans douleurs et en demeurant toujours vierge, le Fils unique de Dieu. C'est alors que le Dieu de l'univers fut enveloppé de pauvres langes et couché dans une crèche sur un peu de paille, entre deux vils animaux ; c'est alors que le Tout-Puissant parut environné de nos faiblesses ; celui qui est l'immortalité même, revêtu de notre chair mortelle ; celui qui répand ses bienfaits sur toute la nature, livré à la plus extrême indigence. Ainsi, dès son entrée dans la vie, il commença à expier les excès de notre orgueil par ses profonds abaissements ; notre attache désordonnée aux biens de ce monde par le dénuement le plus entier ; enfin, notre amour effréné du plaisir par les privations et la souffrance.
(Manuel des petits séminaires)