lundi 5 août 2019

Catéchisme du Saint Curé d'Ars : Sur la communion



Extrait de "Esprit du Curé d'Ars, M. Vianney dans ses catéchismes, ses homélies et sa conversation" (1864) :


Lorsque Dieu voulut donner une nourriture à notre âme pour la soutenir dans le pèlerinage de la vie, il promena ses regards sur la création et ne trouva rien qui fût digne d'elle. Alors il se replia sur lui-même et résolut de se donner... Ô mon âme ! que tu es grande, puisqu'il n'y a que Dieu qui puisse te contenter !... La nourriture de l'âme, c'est le corps et le sang d'un Dieu ! Ô belle nourriture ! Il y a de quoi, si l'on y pensait, se perdre pour l'éternité dans cet abîme d'amour !...

Qu'heureuses sont les âmes pures qui ont le bonheur de s'unir à Notre-Seigneur par la communion ! Dans le ciel, elles brilleront comme de beaux diamants, parce que Dieu se verra en elles (Gloria ejus in te videbitur, a dit le Saint-Esprit — Is., LX, 2).

Notre-Seigneur a dit : « Tout ce que vous demanderez à mon Père en mon nom, il vous l'accordera. » Jamais nous n'aurions pensé à demander à Dieu son propre Fils. Mais ce que l'homme n'aurait pu imaginer, Dieu l'a fait. Ce que l'homme ne peut pas dire ou ne peut pas concevoir, et qu'il n'eût jamais osé désirer, Dieu, dans son amour, l'a dit, l'a conçu et l'a exécuté. Eussions-nous jamais osé dire à Dieu de faire mourir son fils pour nous, de nous donner sa chair à manger et son sang à boire ? Si tout cela n'était pas vrai, l'homme aurait donc pu imaginer des choses que Dieu ne peut pas faire ; il serait allé plus loin que Dieu dans les inventions de l'amour ?... Ce n'est pas possible.

Sans la divine Eucharistie, il n'y aurait point de bonheur en ce monde, la vie ne serait pas supportable. Quand nous recevons la sainte communion, nous recevons notre joie et notre bonheur.

Le bon Dieu voulant se donner à nous, dans le sacrement de son amour, nous a donné un désir vaste et grand que LUI SEUL peut satisfaire... À côté de ce beau sacrement, nous sommes comme une personne qui meurt de soif à côté d'une rivière ; elle n'aurait cependant qu'à courber la tête !... comme une personne qui reste pauvre à côté d'un trésor ; elle n'aurait qu'à tendre la main !

Celui qui communie se perd en Dieu comme une goutte d'eau dans l'océan. On ne peut plus les séparer.

Au jour du jugement, on verra briller la chair de Notre-Seigneur à travers le corps glorifié de ceux qui l'auront reçue dignement sur la terre, comme on voit briller de l'or dans du cuivre ou de l'argent dans du plomb.

Quand nous venons de communier, si quelqu'un nous disait : « Qu'emportez-vous dans votre maison ? » Nous pourrions répondre : « J'emporte le ciel. » Un saint disait que nous étions des Porte-Dieu. C'est bien vrai ; mais nous n'avons pas assez de foi. Nous ne comprenons pas notre dignité. En sortant de la table sainte, nous sommes aussi heureux que les mages, s'ils avaient pu emporter l'Enfant Jésus.

Prenez un vase plein de liqueur et bouchez-le bien, vous conserverez la liqueur tant que vous voudrez. De même, si vous gardiez bien Notre-Seigneur dans le recueillement, après la communion, vous sentiriez longtemps ce feu dévorant, qui inspirerait à votre cœur un penchant pour le bien et une répugnance pour le mal.

Quand nous avons le bon Dieu dans notre cœur, il doit être bien brûlant. Le cœur des disciples d'Emmaüs brûlait rien qu'à l'entendre.

Je n'aime pas, quand on vient de la sainte Table, qu'on se mette tout de suite à lire. Oh ! non ; à quoi bon la parole des hommes, quand c'est Dieu qui parle ?... Il faut faire comme quelqu'un qui est bien curieux et qui écoute aux portes. Il faut écouter tout ce que le bon Dieu dit à la porte de notre cœur.

Quand vous avez reçu Notre-Seigneur, vous sentez votre âme purifiée, puisqu'elle se baigne dans l'amour de Dieu.

Quand on fait la sainte communion, on sent quelque chose d'extraordinaire, un bien-être qui parcourt tout le corps et se répand jusqu'aux extrémités. Qu'est-ce que ce bien-être ? C'est Notre-Seigneur qui se communique à toutes les parties de notre corps et les fait tressaillir. Nous sommes obligés de dire, comme saint Jean : « C'est le Seigneur ! » Ceux qui ne sentent tout à fait rien sont bien à plaindre !

***

Mes frères, tous les êtres de la création ont besoin de se nourrir pour vivre : c'est pour cela que le bon Dieu a fait croître les arbres et les plantes : c'est une table bien servie où tous les animaux viennent prendre chacun la nourriture qui lui convient. Mais il faut que l'âme aussi se nourrisse. Où est donc sa nourriture ? Mes Frères, la nourriture de l'âme, c'est Dieu. Ô la belle pensée !... L'âme ne peut se nourrir que de Dieu ! il n'y a que Dieu qui lui suffise ! Il n'y a que Dieu qui puisse la remplir ! il n'y a que Dieu qui pusse rassasier sa faim ! il lui faut absolument son Dieu !... Il y a dans toutes les maisons un endroit où l'on conserve les provisions de la famille : c'est l'office. L'Église est la maison des âmes : c'est notre maison à nous, qui sommes chrétiens. Eh bien ! dans cette maison, il y a un office. Voyez-vous le tabernacle ? si l'on demandait aux âmes des chrétiens : Qu'est-ce que cela ? vos âmes répondraient : C'est l'office...

Il n'y a rien de si grand, mes enfants, que l'Eucharistie ! Mettez toutes les bonnes œuvres du monde contre une communion bien faite : ce sera comme un grain de poussière devant une montagne. Faites une prière quand vous aurez le bon Dieu dans votre cœur ; le bon Dieu ne pourra rien vous refuser si vous lui offrez son Fils et les mérites de sa sainte mort et passion.

Mes enfants, si on comprenait le prix de la sainte communion, on éviterait les moindres fautes pour avoir le bonheur de la faire plus souvent. On conserverait son âme toujours pure aux yeux de Dieu. Tenez, mes enfants, je suppose que vous vous soyez confessés aujourd'hui, vous veillerez sur vous-mêmes ; vous serez contentes dans la pensée que demain vous aurez le bonheur de recevoir le bon Dieu dans votre cœur... Demain vous ne pourrez pas non plus offenser le bon Dieu ; votre âme sera tout embaumée du sang précieux de Notre-Seigneur... Ô belle vie !!!

Ô mes enfants, qu'une âme qui aura reçu souvent et dignement le bon Dieu sera belle dans l'éternité ! Le corps de Notre-Seigneur brillera à travers notre corps, son sang adorable à travers notre sang ; notre âme sera unie à l'âme de Notre-Seigneur pendant toute l'éternité... C'est là qu'elle jouira d'un bonheur pur et parfait !... Mes enfants, quand l'âme d'un chrétien qui a reçu Notre-Seigneur entre en paradis, elle augmente la joie du ciel. Les anges et la Reine des anges viennent au-devant d'elle, parce qu'ils reconnaissent le Fils de Dieu dans cette âme. C'est alors que cette âme se dédommage des peines et des sacrifices qu'elle aura endurés pendant sa vie.

Mes enfants, on sait quand une âme a reçu dignement le sacrement de l'Eucharistie. Elle est tellement noyée dans l'amour, pénétrée et changée, qu'on ne la reconnaît plus dans ses actions, dans ses paroles... Elle est humble, elle est douce, elle est mortifiée, charitable et modeste, elle s'accorde avec tout le monde. C'est une âme capable des plus grands sacrifices ; enfin, elle n'est plus reconnaissable.

Allez donc à la communion, mes enfants, allez à Jésus avec amour et confiance ! allez vivre de lui, afin de vivre pour lui ! Ne dites pas que vous avez trop à faire. Le divin Sauveur n'a-t-il pas dit : « Venez à moi, vous qui travaillez et qui n'en pouvez plus ; venez à moi et je vous soulagerai. » Pourriez-vous résister à une invitation si pleine de tendresse et d'amitié ? — Ne dites pas que vous n'en êtes pas dignes. C'est vrai, vous n'en êtes pas dignes ; mais vous en avez besoin. Si Notre-Seigneur avait eu en vue notre dignité, il n'aurait jamais institué son beau sacrement d'amour ; car personne au monde n'en est digne, ni les saints, ni les anges, ni les archanges, ni la sainte Vierge... mais il a eu en vue nos besoins, et nous en avons tous besoin. — Ne dites pas que vous êtes pécheurs, que vous avez trop de misères et que c'est pour cela que vous n'osez pas en approcher. J'aimerais autant vous entendre dire que vous êtes trop malades, et que c'est pour cela que vous ne voulez point faire de remède, que vous ne voulez pas appeler le médecin.

Toutes les prières de la messe sont une préparation à la communion ; et toute la vie d'un chrétien doit être une préparation à cette grande action.

Nous devons travailler à mériter de recevoir Notre-Seigneur tous les jours. Combien nous devrions être humiliés, lorsque nous voyons les autres aller à la sainte table, et nous rester immobiles à notre place ! Qu'un ange gardien qui conduit une belle âme à la sainte table est heureux ! Dans la primitive Église, on communiait tous les jours. Lorsque les chrétiens se sont refroidis, on a substitué le pain bénit au corps de Notre-Seigneur ; c'est tout à la fois une consolation et une humiliation ; c'est du pain bénit à la vérité ; mais ce n'est pas le corps et le sang de Notre-Seigneur !

Il y en a qui font tous les jours la communion spirituelle avec du pain bénit. Si nous sommes privés de la communion sacramentelle, remplaçons-la, autant qu'il se peut, par la communion spirituelle que nous pouvons faire à chaque instant ; car nous devons toujours être dans un désir brûlant de recevoir le bon Dieu. La communion fait à l'âme comme un coup de soufflet à un feu qui commence à s'éteindre, mais où il y a encore beaucoup de braise : on souffle, et le foyer se rallume. Après la réception des sacrements, lorsque nous sentons l'amour de Dieu se ralentir, vite la communion spirituelle !... Lorsque nous ne pouvons venir à l'église, tournons-nous du côté du tabernacle ; le bon Dieu n'a pas de mur qui l'arrête ; disons cinq Pater, cinq Ave, pour faire la communion spirituelle... Nous ne pouvons recevoir le bon Dieu qu'une fois le jour ; une âme embrasée d'amour supplée à cela par le désir de le recevoir à chaque instant.

Ô homme, que tu es grand !... nourri et abreuvé du corps et du sang d'un Dieu ! oh ! quelle douce vie que cette vie d'union avec le bon Dieu ! C'est le ciel sur la terre : il n'y a plus de peines, plus de croix ! Lorsque vous avez le bonheur d'avoir reçu le bon Dieu, vous sentez dans votre cœur une jouissance, un baume, pendant quelques instants !... Les âmes pures sont toujours comme cela ; aussi cette union fait leur force et leur bonheur.



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