samedi 2 mai 2020

Du vrai Progrès, par le R.-P. Jean-Joseph Surin


Extrait du CATÉCHISME SPIRITUEL DE LA PERFECTION CHRÉTIENNE, TOME I, Composé par le R. P. J. J. SURIN, de la Compagnie de Jésus :




Du vrai Progrès



De quoi dépend le progrès d'une âme ?

Du dessein qu'elle se propose ; de l'ordre qu'elle met dans ce dessein, et de sa fermeté à l'exécuter.


Comment le progrès dépend-il du dessein ?

Parce que tout avancement dans la vertu suppose un dessein formé, et ce dessein qui doit influer dans tout l'ouvrage, comprend trois choses. Premièrement une volonté entièrement déterminée à entreprendre, et occupée des moyens qui peuvent la conduire à sa fin. C'est ce que Notre-Seigneur nous représente dans la conduite d'un homme qui, ayant dessein de bâtir, suppute la dépense qu'il faudra faire ; et dans la sagesse d'un Prince qui, entreprenant une guerre, se met à en faire les préparatifs.
En second lieu, le dessein demande qu'on ait une idée nette et distincte de ce qu'on doit faire. Nous ne saurions l'ignorer, après que Notre-Seigneur l'a déclaré en termes formels : en matière de perfection, il ne s'agit de rien moins que de renoncer à tout. Les hommes se proposent différentes vues ; par exemple, de se pousser dans les sciences, de se rendre habiles dans l'art de parler, de faire fortune dans le monde ; mais celui qui veut être mon disciple, dit Jésus-Christ, doit au moins d'esprit et de cœur renoncer à tous ces desseins, pour n'en avoir point d'autre que celui de servir Dieu. Il doit mettre pour base et pour fondement de sa perfection, la parfaite abnégation de toutes choses et de soi-même : et ce dessein doit être le principe et comme le premier mobile de son avancement dans la vertu.
Il faut en troisième lieu que le dessein embrasse tout, et que celui qui commence à travailler à sa perfection, étende ses vues jusqu'à la consommation de l'ouvrage, pour ne pas s'exposer aux reproches que fait l'Évangile à celui qui commence à bâtir, et qui ne peut achever. Mais cette prévoyance serait inutile, si elle n'était accompagnée d'une généreuse résolution de persévérer dans le travail jusqu'à la fin, quelque difficulté qu'on rencontre, et dans quelque disposition qu'on se trouve. On ne doit point compter sur les consolations sensibles, ni sur la facilité qu'on peut trouver dans la pratique de ]a vertu ; un dessein aussi grand que celui de la perfection ne peut réussir que par un véritable amour de Dieu, et par une volonté déterminée à ne se rebuter jamais.


Comment est-ce que le progrès dépend de l'ordre ?

En ce qu'il ne suffit pas de former en général le dessein de la perfection ; comme font la plupart des hommes, qui n'ont que des idées confuses du bien qu'ils veulent pratiquer, se contentant de rouler dans un cercle d'actions ordinaires, d'entendre la sainte Messe, ou de la célébrer, de vaquer ensuite à leurs emplois, de se préserver des grands péchés, et suivant en bien des choses le penchant de la nature, au lieu de ne se conduire que par les mouvements de la grâce : ce qui es expose à une vicissitude éternelle de bien et de mal, de ferveur et de lâcheté. L'ordre demande qu'outre cet avancement, qui consiste à ajouter une bonne œuvre à l'autre, on se propose d'aller de bien en mieux, de monter de degré en degré, de vertu en vertu jusqu'au sommet de la perfection.
Il est aussi de l'ordre qu'on mette une certaine suite et un certain arrangement dans les pratiques de vertu, et dans les moyens de perfection ; qu'on fasse au commencement ce qui est propre des commençants ; qu'on entre d'abord dans ce qu'on appelle la vie purgative, pour se corriger de ses vices ; qu'ensuite on s'adonne à la pratique des vertus, enfin aux exercices de l'amour et de l'union avec Dieu. Faute de garder cette suite et de distinguer ces différents états, on voit une infinité de gens qui travaillent au hasard, et en confondant toutes choses ils vont d'une extrémité à l'autre, sans passer par le milieu ; avant que de s'être purifiés par les exercices de la pénitence et de l'humilité, ils donnent l'essora leur esprit, se remplissent de hautes idées, et s'attachent aux pratiques les plus sublimes, qui ne conviennent qu'aux parfaits. Ou bien, après avoir travaillé quelque temps à l'amendement de leur vie, ils quittent trop tôt les exercices pénibles de la mortification, de l'examen de conscience, et de la victoire de soi-même ; d'où il arrive que n'ayant pas jeté de solides fondements, ils travaillent beaucoup, et ne font aucun progrès. Et comme il est ordinaire qu'après des commencements très-fervents on tombe dans l'aridité, Dieu le permettant ainsi pour éprouver ceux qui veulent être à lui ; bien des gens qui ne sont pas instruits de cette conduite que le Saint-Esprit tient sur les âmes, au lieu de soutenir cette épreuve avec patience, se laissent aller au relâchement, et retournent aux consolations de la terre, auxquelles ils avaient renoncé.
Enfin, comme la plupart ignorent cette économie de la grâce, et qu'ils ne savent pas quel chemin il faut tenir pour aller à Dieu ; rien n'est plus important que d'avoir recours à un Directeur sage, intelligent et expérimenté, pour apprendre de lui l'ordre de la vie spirituelle, et surtout pour distinguer les temps où il faut agir et s'aider soi-même, de ceux où il faut se tenir en repos, pour laisser agir le Seigneur. Au reste, il ne suffit pas de conférer quelquefois avec un Directeur, et d'une manière superficielle ; il faut être assidu à recevoir ses instructions, si on veut avancer dans a vertu ; car c'est faute d'un tel secours que plusieurs ne font aucun progrès.


Pourquoi la fermeté est-elle nécessaire à l'avancement spirituel ?

Parce que dans les voies de la perfection, on rencontre tant de difficultés, on est exposé à tant de tentations, on éprouve tant de dégoûts, on est sujet à passer par tant de dispositions différentes, que sans un grand courage et beaucoup de fermeté, on ne saurait persévérer jusqu'au bout.


En quoi la fermeté est-elle particulièrement nécessaire ?

On en a besoin pour acquérir l'habitude du recueillement ; il s'agit de tourner toute son attention sur soi-même, et de fixer son esprit à la considération de deux ou trois objets, qui sont la présence de Dieu, le souvenir de J. C. et les fonctions de son emploi, sans lui permettre de s'occuper d'autre chose. Cette entreprise est difficile : le démon n'oublie rien pour en empêcher le succès ; et notre faiblesse est si grande, que nous n'en saurions venir à bout sans une étude pénible et continuée pendant longtemps. Mais quiconque tiendra ferme dans cette pratique, ne donnant aucune entrée aux inutilités de l'esprit et aux amusements du cœur, se fera à la longue une douce habitude de se recueillir, d'où il tirera de merveilleux avantages.
La fermeté n'est pas moins nécessaire pour se soutenir dans la pratique de la mortification, qui est le fondement de tout l'avancement spirituel. La plupart des hommes, après s'être mortifiés pendant quelque temps en ce qui leur paraît essentiel, se laissent ensuite aller à leurs penchants naturels, et cherchent ce qui leur fait plaisir, partout où ils ne voient point de péché. Mais ceux qui veulent profiter en vertu, vont toujours contre leurs inclinations, et veillent du matin au soir à en arrêter les saillies ; et plus ils sont fermes et constants dans cette guerre, plus ils avancent dans la perfection.
En quoi il faut être encore ferme, c'est à persévérer dans les saints exercices de l'Oraison, de la pénitence, de la visite du saint Sacrement, de l'invocation de la sainte Vierge et des Saints, et dans les autres pratiques, qui contribuent à la ferveur, et qu'on ne saurait abandonner sans donner dans quelque relâchement, et sans perdre le goût de la piété. Que celui donc qui fait état de travailler à sa perfection, forme une résolution généreuse de persévérer dans ces exercices, malgré toute sorte de disposition de dégoût et d'inconstance où il pourra se trouver ; de ne les jamais omettre, si ce n'est pour un plus grand bien, ou par nécessité ; et qu'il ait soin de réparer les moindres pertes qu'il aurait faites par sa négligence, afin que ce soin lui rende témoignage de sa fidélité et de son exactitude dans le service de Dieu.



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