Extrait de "Les gloires de Marie" (Tome II) de Saint Alphonse de Liguori :
La Vierge et l'Enfant (Murillo) |
§ II. De l'Amour de Marie envers Dieu
S. Anselme dit que « plus un cœur est pur et vide de soi-même, plus il est rempli d'amour envers Dieu. » Comme Marie était humble et toute vide d'elle-même, le Seigneur la remplit de son amour ; « (S. Bernardin) elle surpassa en amour tous les hommes et tous les Anges. » S. François de Sales la nomme aussi la Reine de l'amour. L'homme a reçu de Dieu le précepte de l'aimer de tout son cœur ; mais « (S. Thom. 2. 2. q. 24. a. 6. 8) il ne pourra l'accomplir pleinement ce précepte que dans le ciel. » Il ne convenait pas que Dieu donnât un précepte qui n'aurait été pleinement rempli par personne, si sa divine Mère ne l'eût parfaitement accompli (B. Albert). « (S. Bern. Serm. 29. in Cant.) L'amour divin fit une si profonde blessure au cœur de Marie, qu'il n'y resta aucun lieu qui ne fût blessé d'amour ; ainsi elle remplit entièrement ce premier précepte ; » de sorte qu'elle pouvait bien dire : Mon bien-aimé s'est livré tout entier à moi ; et je me suis livrée tout entière à lui. (Cant. 2. 16) « (Ricc. de S. Laur.) Les Séraphins pouvaient descendre du ciel pour apprendre dans le cœur de Marie la manière d'aimer Dieu. »
Dieu, qui est l'amour par essence, vint sur la terre pour embraser tous les cœurs du feu de son divin amour ; mais aucun cœur ne fut aussi enflammé que celui de sa Mère, « (S. Hier. aut. Sephr. de Ass.) qui, étant tout pur et dégagé des affections terrestres, était tout disposé à brûler de ce feu précieux. » Ainsi le cœur de Marie fut transformé en une flamme d'amour, comme il est dit dans les saints Cantiques (Cant. 8. 6). Ce cœur brûlait intérieurement d'amour, et brillait à tous les yeux par l'exercice des vertus. Quand Marie portait Jésus, on pouvait dire que « le feu portait le feu. » Le cœur de Marie fut figuré par le buisson que Moïse vit brûler sans se consumer.
« (S. Bern. S. in Sign. magn.) C'est avec raison qu'elle se montra à S. Jean revêtue du soleil (Apoc. 12, 11), puisqu'elle fut si unie à Dieu par l'amour, qu'il semble qu'une créature ne puisse s'unir davantage à son Créateur. »
Marie ne fut jamais tentée par l'enfer ; car « (S. Bonav. t. 2. s. 51. a. 3) de même que les mouches s'éloignent d'un grand feu, ainsi le cœur de Marie n'étant qu'une flamme de charité, les démons étaient mis en fuite et n'osaient pas même s'approcher d'elle. »
Son âme bienheureuse ne faisant autre chose que contempler Dieu, les actes d'amour qu'elle produisait étaient sans nombre. Marie, dit S. Bernardin de Buste, sans répéter les actes d'amour de Dieu l'un après l'autre, comme le font les autres Saints, eut le privilège tout à fait singulier d'aimer toujours actuellement Dieu par un seul et continuel acte d'amour. « Semblable à l'aigle royal, comme le dit S. Pierre Damien, elle tenait toujours les jeux levés vers le Soleil divin, de manière que les actions journalières ne l'empêchaient point de l'aimer, et l'amour ne l'empêchait point de vaquer à ses occupations. » Marie ; dit S. Germain, fut figurée par l'autel de propitiation, ou le feu ne s'éteignait jamais ni jour ni nuit.
Le sommeil même n'empêchait pas Marie d'aimer son Dieu. Si ce privilège fut accordé à nos premiers parents dans l'état d'innocence, on ne doit point douter qu'il n'ait aussi été départi à la Mère de Dieu, comme le pensent Suarez, Rupert, S. Bernardin et S. Ambroise. Marie, tant qu'elle vécut sur la terre, ne cessa jamais d'aimer Dieu : elle ne fit jamais que ce qu'elle connut être agréable à Dieu, et elle l'aima autant qu'elle crut le devoir aimer. Marie fut remplie de tant de charité, qu'il eût été impossible à une pure créature d'en recevoir davantage sur la terre.
Marie par son ardente charité se rendit si belle aux yeux de son Dieu, lui inspira tant d'amour, qu'épris de sa beauté, il voulut bien descendre dans son sein pour s'incarner. C'est ainsi que s'expriment S. Bernard, le bienheureux Albert, et S. Thomas de Villeneuve.
Mais, puisque Marie aime tant son Dieu, il est certain qu'elle ne désire aussi rien tant de ses serviteurs que de les voir aimer Dieu de toutes leurs forces.
Ah ! Reine de l'amour, Marie, la plus aimable, la plus aimée et la plus aimante de toutes les créatures, vous disait S. François de Sales, ah ! ma Mère, vous brûlâtes toujours tout entière d'amour pour Dieu ; hélas! daignez m'en donner du moins une étincelle. Vous priâtes votre Fils pour les époux qui manquaient de vin ; et vous ne prieriez pas pour nous qui manquons d'amour pour Dieu et qui sommes si obligés de l'aimer ? Dites-lui donc que nous n'avons pas d'amour, et obtenez-nous cet amour. C'est la seule grâce que nous vous demandons, ô notre Mère ! Par le grand amour que vous portez à Jésus, exaucez-nous, et priez pour nous. Ainsi soit-il.
Lire "Les gloires de Marie" (Tome 1, Tome II).
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