lundi 4 janvier 2021

La conduite réciproque de Ruth et de Noémi figure celle de Marie et de l'Église des Gentils



Nous avons vu sur quel principe est fondé, et de quelle manière est exercé, de la part de Marie, le précieux ministère d'attirer les Gentils à la foi et à la grâce de Jésus-Christ. La belle et touchante histoire de la vertueuse Noémi nous offre une belle figure de ce ministère de la Mère de Dieu. Elle nous fera mieux comprendre tout ce que nous lui devons et avec quelle confiance nous pouvons nous reposer sur sa sollicitude maternelle.
Veuve et privée de ses deux fils, la belle et vertueuse Noémi voulut retourner du pays de Moab dans son pays natal à Bethléem de Juda. Ses deux belles-filles, d'origine moabite, veuves aussi par la mort des fils de Noémi, voulurent l'accompagner ; mais Noémi, les serrant contre son sein et les embrassant tendrement, leur dit : « Retournez, mes chères filles, retournez, de grâce, dans vos demeures. Je n'ai plus de fils à vous donner, et ne puis espérer d'en avoir dans ma vieillesse (Ruth., I, 12). »
« Pourquoi voulez-vous venir avec moi habiter une maison où vous ne trouverez, pour compensation de votre tendresse, que la misère, l'abandon et les pleurs ? La vue de vos peines et de vos angoisses ne pourra qu'accroître les miennes. Ah ! laissez-moi seule porter le poids de la tribulation à laquelle il plaît à Dieu de me destiner » (ib., 13). À ces tendres paroles elles éclatèrent en sanglots (ib., 14). L'une, nommée Orpha, embrassant pour la dernière fois sa belle-mère, lui fit ses adieux et retourna à la maison paternelle. (ibid.). Mais la tendre Ruth ne voulut pas se séparer de la bonne Noémi, qu'elle considérait comme la plus tendre des mères (ibid.).
« Vous voyez, ma fille, lui dit Noémi, que votre sœur est partie ; suivez son exemple, retournez avec elle » (Ruth, I, 15). Ruth demeure inébranlable dans la résolution qu'elle avait prise de suivre partout sa mère d'adoption et de vivre avec elle ; et elle lui dit avec les accents les plus tendres et les plus délicieux qui se trouvent dans l'Ancien Testament : « Oh ! ma mère, vous me voulez donc beaucoup de mal, puisque vous voulez que je vous quitte (ib., 16). Je ne le ferai jamais, non, je ne le ferai jamais. Partout où vous irez. J'irai avec vous ; là où vous fixerez votre demeure, j'y fixerai aussi la mienne. Votre peuple sera mon peuple, et votre Dieu sera toujours mon Dieu. Je mourrai sur la terre où vous mourrez ; le même tombeau renfermera nos ossements, comme une même habitation nous avait réunies pendant la vie. Que Dieu me punisse, si jamais autre chose que la mort me sépare de vous » (Ruth, I, 16-17).

Quelle tendresse de cœur ! quelle constance d'affection ! quelle douceur et quelle force d'expression ! Ces sentiments admirables de la piété filiale de la jeune veuve pour sa mère adoptive ne restèrent pas sans effets. Telle fut toujours la déférence de Ruth pour sa chère Noémi, qu'elle ne voulait faire un pas, même aller chercher de quoi vivre, sans avoir obtenu la permission et la bénédiction de sa mère.
« Voulez-vous, disait-elle, ma mère, que j'aille glaner quelques épis pour notre nourriture ? » Et elle ne part point que Noémi lui ait répondu : « Allez, ma fille » (Ruth, II, 2). Bien plus, les moindres désirs de Noémi sont des ordres pour cette fille, modèle de l'obéissance ; elle les exécute à la lettre et sans différer d'un seul instant (ibid., III, 5-6).
Mais son amour pour Noémi n'est pas moins parfait que son obéissance. Pour avoir de quoi nourrir sa mère, elle ne rougit point d'aller demander la permission de ramasser quelques maigres épis échappés à la faux des moissonneurs, et de se tenir derrière eux comme une pauvre mendiante. Elle ne craint pas de passer le jour entier sous un soleil brûlant, dans un travail si ingrat, si humiliant, sans rien prendre qui puisse ranimer ses forces, ne s'accordant pas même un instant de repos (Ruth, II, 7).
Booz, le bienfaisant Booz, admirant son maintien et sa piété filiale, non-seulement lui permet de glaner dans ses champs, mais encore de prendre ce qu'elle voudrait de la moisson ; et afin de lui en épargner la honte, cet homme généreux poussa la délicatesse jusqu'à ordonner à ses moissonneurs de laisser tomber exprès des épis de leurs gerbes, de la laisser glaner sans porter les yeux sur elle (Ibid., 15-16). Cet excellent maître étendit sa charité plus loin encore ; il traita cette étrangère comme une personne de sa maison, et il voulut qu'elle fût admise à la table de ses servantes ; mais Ruth, la bonne et tendre Ruth, ne peut prendre de nourriture sans penser à Noémi. Aussi, non contente de lui apporter le grain qu'elle a recueilli, elle lui réserve encore la meilleure partie de la nourriture qu'on lui avait donnée, en s'en privant elle-même (Ruth, II, 18).

Fut-il jamais fille aussi tendre et aussi affectueuse pour sa mère naturelle que Ruth le fut pour sa mère adoptive ! Jamais piété filiale ne fut plus généreuse dans ses transports, plus heureuse et plus riche dans ses récompenses. Noémi chérit Ruth avec toute la tendresse d'une vraie mère, la guide de ses conseils, la dirige par son exemple, l'anime par ses promesses, et lui montre, après toutes ses actions, que son unique pensée, son unique souhait est de la voir heureuse, et qu'elle met tout en œuvre pour y réussi, comme elle nous l'apprend elle-même par ces paroles : « Oh ! ma fille, c'est à moi de chercher ton vrai repos, ton établissement et ton bonheur » (Ruth, III, 1).
C'est en effet sa sagesse qui imagine le mariage de sa fille bien-aimée avec le riche Booz ; ce sont ses conseils qui le facilitent, et c'est son zèle qui le fait accomplir. L'amour qu'elle a pour elle fait qu'elle regarde comme son propre fils l'enfant qui naît d'une union si sainte et si pure. À peine est-il né que Noémi l'accueille dans son sein, le presse sur sa poitrine, et lui prodigue tour à tour et les offices obligeants d'une nourrice, et les tendres caresses d'une mère (ib., IV, 16).
Ruth aime tendrement Noémi ; mais elle en est encore plus tendrement aimée. Noémi ne pourrait pas l'aimer davantage si elle était réellement sa fille. Elle en fait sa gloire, elle s'estime la plus riche et la plus heureuse des enfants de Ruth (Ruth, IV, 15).
Cet enfant, né d'une alliance formée par les soins de Noémi et élevé par son amour maternel, fut Obed, père d'Isaïe et aïeul de David, de la race duquel Jésus-Christ est descendu ; et ce fut ainsi que Ruth eut la grâce singulière dont elle fut redevable à Noémi, d'avoir participé à la naissance temporelle du Messie et la gloire d'être inscrite dans sa généalogie. On ne sait en vérité ce qu'il faut le plus admirer dans cette intéressante histoire, ou la religion, la charité, la justice des saints personnages, ou l'abondance et l'excellence des bénédictions divines qui furent leurs récompenses.

Parmi ces bénédictions, on doit remarquer, avec saint Ambroise, la gloire qu'ont eue ces saints personnages, d'avoir figuré dans la simplicité de leurs actions les plus grands et les plus sublimes mystères de la religion. Booz est le type de Jésus-Christ, et Ruth celui de l'Église. Jésus-Christ, en effet, est cet époux généreux auquel s'unit mystérieusement l'Église gentille, l'Église qui vient de loin, l'Église d'abord pauvre et affamée, et ensuite enrichie et rassasiée à la table de son divin Époux (De Fid., III). Saint Jean Chrysostôme enseigne la même doctrine. Considérez bien, dit-il, comme l'abaissement de Ruth figure parfaitement nos misères (Homil., III in Matth.). Ruth était étrangère, tombée dans la plus grande misère ; mais le bon et miséricordieux Booz fut touché de sa pauvreté, et ne dédaigna pas la bassesse de son origine. Ainsi J2sus-Christ dans l'Église des Gentils a accueilli et uni à lui par des liens mystérieux, une épouse étrangère et plongée dans la pauvreté (Ibid.).
Mais si Booz est le type de Jésus-Christ, Ruth celui de l'Église, il est évident que Noémi est la figure de Marie. Ruth ne retrouve son époux qu'avec Noémi et par Noémi ; de même le paganisme, dans la personne des Mages, ne trouve Jésus-Christ qu'avec Marie et par Marie (Matth., II). Et comme l'heureux mariage de Ruth avec Booz ne se célèbre que dans la cité de Bethléem et sous les yeux de Noémi ; de même, c'est dans l'étable de Bethléem et sous les yeux de Marie qu'a été contractée l'union de l'Église des Gentils avec Jésus-Christ, dans la personne des Mages.

Orpha, qui se sépare de Noémi, l'abandonne dans sa tristesse et sa viduité pour retourner à son peuple, à sa religion primitive (Ruth, I, 15). Orpha est la figure des Juifs, qui s'associèrent d'abord à Jésus et à Marie, et qui l'accompagnèrent durant sa vie ; mais qui, après l'avoir vu mourir sur la croix, se scandalisèrent de cette mort : Judoeis quidem scandalum, et retournèrent en arrière, retombèrent dans leur ancien judaïsme, abandonnèrent les doctrines du Fils et la société de la Mère.
On peut dire encore que cette femme lâche est la figure de ces chrétiens qui, aux temps de la persécution contre le Christianisme, abandonnèrent la religion de Jésus-Christ et le culte de Marie pour retourner à leur religion, c'est-à-dire à leurs anciennes erreurs, ou pour en embrasser de nouvelles : ce qui d'abord est arrivé dans les pays de l'Orient, et plus tard dans diverses parties de l'Europe, où la religion de Jésus-Christ et le culte de sa divine Mère, d'abord si florissants, ont été remplacés par le culte des idoles, par le mahométisme et l'hérésie : Orpha reversa est ad deos suos (Ruth, I, 15).
Mais la pieuse, la tendre, la fidèle Ruth, qui s'attache si étroitement à Noémi pour partager ses périls, ses misères, ses douleurs et ses peines ; qui jamais ne l'abandonne : Ruth adhoesit socrui suoe (I, 14), qui l'aime plus encore lorsqu'elle est plus privée de secours et de consolations ; qui lui témoigne enfin un amour si tendre, si constant, si généreux : Ruth est la figure des Mages, qui, loin de se scandaliser de la pauvreté, de la misère, de l'obscurité de Marie, laquelle n'a pas même de quoi défendre contre les rigueurs du froid son fils nouveau-né, s'estiment heureux d'être admis auprès de cette tendre Mère et de son Fils chéri ; qui ne cessent de le caresser, de l'aimer et de se glorifier du bonheur de l'avoir trouvé : Invenerunt Puerum cum Maria matre ejus (Matth., II), et qui enfin, loin d'abandonner la foi du Fils et le culte de la Mère, se font une gloire de les propager parmi leurs peuples et de les sceller par le sacrifice de leur vie et de leur sang.
Figure des Mages, Ruth l'est encore de leurs descendants ; c'est-à-dire des Juifs et des Gentils surtout qui, loin de se scandaliser du spectacle de la pauvreté et des opprobres de Jésus-Christ, admirent dans cette apparente folie : Gentibus stultitiam, ce chef-d'œuvre de la puissance et de la sagesse de Dieu : Dei virtus et Dei sapientia ; qui s'associent à Marie, et par elle et avec elle forment un même peuple associé à lui-même. Ils partagent les humiliations et les peines de cette mère devenue veuve ; ils se renferment avec elle dans le cénacle ; et ni la crainte des Juifs persécuteurs, ni l'aspect de toutes les privations et de toutes les disgrâces, ne peuvent leur faire abandonner leur mère adoptive, le Dieu qui est son fils, et les séparer de leur précieuse société.

Mais Ruth, entraînée par les qualités et les vertus de Noémi, abandonne sa maison, sa patrie, son peuple, pour la suivre, et pour lui être plus étroitement unie ; elle proteste et jure de vouloir, non-seulement habiter avec Noémi, mais encore s'incorporer à son peuple et adorer le même Dieu : Populus tuus populus meus, et Deus tuus Deus meus (Ruth, I, 16). Rien ne peut la détourner de cette résolution. La nécessité où elle était réduite d'aller glaner ou plutôt mendier quelques épis dans la campagne, la honte d'être obligée de se nourrir d'un pain de larmes et de douleurs, obtenu à force de prières humiliantes, lors même qu'elles sont exaucées : rien ne peut lui faire regretter le passé et les richesses de sa maison paternelle. Un morceau de pain partagé avec Noémi, quoique acheté au prix de tant de peines et de honte, est plus doux pour elle que les mets les plus exquis qu'on pourrait lui offrir, si elle était séparée de Noémi.
A ces traits, qui peut ne pas reconnaître la générosité, la constance, la foi, l'amour des Gentils nos pères ? Séduits eux aussi par les douceurs, les charmes de la foi et du culte divin d'une Vierge, mère d'un Dieu, d'une créature comblée de sainteté et pleine d'amour, qui serre dans ses bras le Créateur de l'univers, l'offrant comme sauveur à qui le demande ; nos pères ont tout abandonné pour suivre l'odeur mystérieuse de ses vertus et de ses privilèges, l'ont aimée de l'amour le plus tendre et l'ont reconnu pour leur maîtresse souveraine : In odorem unguentorum tuorum curremus... adolescentuloe tuoe dilexerunt te nimis.
Ils ont voulu habiter dans la maison qu'habite Marie, faire partie de son peuple, suivre et adorer son Dieu ; c'est-à-dire, entrer dans l'Église qui, comme nous l'avons dit, est la maison de Marie ; s'incorporer aux chrétiens qui sont le peuple de Marie, se donner à Jésus-Christ qui est le vrai Dieu de Marie, puisqu'elle en est tout à la fois l'adoratrice la plus fidèle et la mère véritable ; et ceux qui veulent avoir part à ses mérites doivent recourir à lui et le chercher dans les bras de Marie : Populus tuus populus meus, et Deus tuus Deus meus (Ruth, I, 16).
Et qui pourra arrêter le courage, la dévotion, la générosité de nos pères dans cette résolution ? « Pour y rester fidèles, non-seulement, dit saint Paul, ils ont sacrifié tous leurs biens temporels, mais encore se sont exposés à tous les tourments et à la mort la plus cruelle ; jamais ils ne se sont lassés de souffrir, mais ils ont lassé la rage de leurs tyrans et leurs persécuteurs, et rien n'a pu les séparer ni de la Mère ni du Fils. »

Ruth reçoit la plus belle récompense de son amour pour Noémi, et de sa générosité qui lui avait fait changer sa nation pour la nation juive, l'Église des gentils pour le Dieu d'Israël. Booz, la première fois qu'il la rencontre, lui prédit la félicité et la récompense qui l'attendaient pour prix de ses vertus. « Je connais, lui dit-il, quelle vénération et quel amour vous avez témoignés à Noémi, après la mort de son époux ; je sais le sacrifice que vous avez fait en abandonnant votre maison, vos parents, votre patrie, pour venir dans une terre étrangère, au milieu d'un peuple inconnu » (Ruth, II, 11). Le Dieu d'Israël, le seul vrai Dieu, que vous êtes venue chercher sur les traces de Noémi, vous récompensera magnifiquement pour cet acte de religion et de charité (Ib., 12). Cet augure d'un cœur si tendre, cette prophétie d'un patriarche si religieux, reçoit bientôt son accomplissement, et, chose singulière, celui qui fait cette prophétie est celui-là même qui l'accomplit. Booz, personnage d'un grand nom dans Israël, homme riche et pieux, ne rougit point de cette étrangère, de cette mendiante qui n'a pas même un morceau de pain, qui n'a d'autre dot que son cœur et ses vertus. Booz lui procure des secours, la fait asseoir à sa table, la dote lui-même, et de la condition la plus humiliante l'élève aux plus grands honneurs, en la prenant pour épouse, la reconnaissant comme la maîtresse de sa maison et de ses biens.
L'humble foi, la tendre piété de l'épouse et l'extrême bonté de l'époux attirent les regards de tous ; les grands d'Israël applaudissent à cette heureuse union, le peuple y joint aussi ses vœux ; Dieu la confirme par ses bénédictions, et accorde à ce couple fortuné un fils, père d'une série de rois, dont descendit le Messie tant désiré (Ruth, IV, 13-17).
Cette récompense de Ruth, aussi grande qu'inattendue, est encore la figure de la récompense que les Gentils, nos pères, ont obtenue pour avoir voulu, dociles aux instructions et aux conseils de Marie, suivre cette tendre Mère, s'incorporer avec elle au peuple chrétien, et se mettre sous les ailes de Jésus-Christ a accompli à leur égard cette prophétie qu'il avait faite lui-même, en disant que les plus grands biens seraient le partage de ceux qui feraient de grands sacrifices pour le suivre. Les Gentils étaient pauvres et mendiants, affamés de la vérité, de la parole de Dieu, qui est le pain, la nourriture de l'intelligence. Ils n'avaient pas une seule miette de ce pain divin, ils n'avaient pas la connaissance du vrai Dieu, qui renferme toute vérité, qui est la première nourriture de l'homme ; ils étaient sans Dieu dans ce monde : Sine Deo in hoc mundo (Ephes., II, 12). Ils étaient forcés de glaner quelques épis dans les champs de Booz ; c'est-à-dire, à mendier à la synagogue quelques notions de ce Dieu, qu'elle répandait dans le monde par ses livres divins. Mais ces pauvres mendiants, privés de tout, excepté du désir de connaître la vérité, et des plus belles dispositions à l'embrasser, à peine sont-ils arrivés à Jésus-Christ, en marchant sur les traces de Marie, que celui-ci leur dispense en abondance ces vérités qu'ils cherchaient depuis si longtemps, les en rassasie et les enrichit dans leurs misères. Bien plus, c'est de ces mêmes Gentils qu'il forme son Église, cette Église qu'il élève à la dignité de son épouse, et qu'il rend la maîtresse et la dispensatrice de tous ses biens. En effet, la sainte Église romaine, composée des Gentils, est la véritable Église, l'épouse visible du Sauveur, son tabernacle parmi les hommes, tabernacle sur lequel sont tournés  tous ses regards, sur lequel repose le Saint-Esprit plein de grâce et de vérité, et dans lequel seul on peut espérer le salut.

De même que Ruth, pleine de reconnaissance envers Noémi, à laquelle elle doit l'époux qui l'a comblée de bienfaits, aime cette tendre mère avec plus de tendresse encore qu'auparavant, demeure sans cesse auprès d'elle, lui présente et lui recommande son propre fils ; de même l'Église, pénétrée de la plus vive reconnaissance envers Marie, des mains de laquelle elle a reçu Jésus-Christ, son époux, ne la perd pas un instant de vue, l'aime tendrement, la salue, la bénit, l'invoque à chaque instant, conserve et propage son culte, sa gloire, sa dévotion, la recommande sans cesse à nous fidèles, fils de cette Église, nous associe à ses sollicitudes et à sa tendresse maternelle. Et Marie, que fait-elle ? comment correspond-elle à cette piété filiale de l'Église ? Voyez-la encore dans Noémi. Le fils qui est né à Ruth la rend plus heureuse que ceux dont elle serait mère (Ruth, IV, 15). Ce fils n'est pas né de son sein, mais il est né de son amour, il est né pour sa consolation et pour sa gloire (ib., 16). Ainsi des fils qui naissent à l'Église, rendent Marie plus heureuse que si elle les eût elle-même enfantés. Il est vrai que nous ne sommes pas nés de son sein, mais nous sommes nés de son amour et de ses peines, nous sommes nés de Jésus-Christ, mais pour Marie, pour la joie de son cœur, pour l'honneur de sa mystérieuse fécondité.
À peine le fils de Ruth est-il né, que Noémi, transportée par un élan d'amour, le prend dans ses bras, et, selon l'expression de l'Écriture, le porte sur son sein, le couvre de caresses et l'élève comme son propre fils (Ruth, IV, 16). De même Marie, lorsque de nouveaux fils naissent à l'Église, les reçoit dans son sein, les caresse, les regarde comme ses propres fils. Heureux si, après avoir acquis la qualité de fils par le baptême, nous continuons de mériter ce titre par la sincérité de notre foi et la sainteté de notre conduite ! Heureux si, à l'imitation de Ruth, vainqueurs du respect humain et méprisant les moqueries des hérétiques et les sarcasmes des impies, nous ne cessions de demeurer attachés à Marie, de l'honorer et de l'aimer ! Nous serions le vrai peuple de Marie ou du nombre des élus, le peuple du vrai Dieu de Marie ou de Jésus-Christ ; et Marie nous regarderait et nous aimerait comme Jésus-Christ lui-même, auquel nous serions spirituellement unis : c'est-à-dire que Marie nous accueillerait dans son sein maternel, nous garderait, nous nourrirait, nous élèverait et nous bénirait comme ses propres enfants : Susceptum puerum posuit in sinu suo, et nutricis fungebatur officio.

Ô heureux enfants, ô enfants nouveau-nés d'une mère nouvelle, appelés à une nouvelle vie, louez le Seigneur, louez principalement son doux et puissant nom : Laudate, pueri, Dominum, laudate nomen Domini (Psalm. CXII, 1). Que ce saint et auguste nom, dans lequel seuls les hommes peuvent espérer le salut, soit loué dans le temps et dans l'éternité (Psalm. CXII, 2). Qu'il soit loué non-seulement dans tous les temps, mais encore dans tous les lieux et par tous les hommes ; qu'il soit loué non-seulement des justes, sur lesquels brille le soleil de la grâce, mais encore des pécheurs, sur lesquels s'élève le soleil divin : ceux-là lui doivent la possession de la grâce, les autres l'espérance de l'obtenir : A solis ortu usque ad occasum laudabile nomen Domini (-3). Ah ! qui est tout à la fois et plus puissant et plus miséricordieux que celui qui, habitant les hauteurs inaccessibles d'une gloire infinie, n'a cependant pas dédaigné d'abaisser des regards de compassion sur notre misère (-, 5-6) ? Nous étions pauvres, dénués de tout, délaissés, plongés dans un abîme de ténèbres, et sa main miséricordieuse est descendue jusqu'à nous pour nous tirer de cet abîme d'abjection (Psalm. CXII, 7). Et non-seulement il nous a relevés, mais il a même daigné nous introduire dans son habitation, nous faire asseoir à sa table, nous placer à côté des anges et de ses apôtres, princes et pasteurs de son peuple (-, 8). Ce n'est point encore assez : à la tête de cette sainte maison, de cette sainte et auguste famille, il a placé une femme stérile par la nature, mais féconde par la grâce. Il l'enrichit d'une nombreuse famille, et comme elle se réjouit des nombreux enfants qui l'environnent, de même ses nouveaux fils sont heureux autour d'une telle mère (-, 9).
Ô Marie, c'est vous qui êtes cette mère, et nous qui sommes ces enfants fortunés ! Qu'il soit mille fois loué maintenant et à jamais le nom du Dieu bienfaisant qui nous a prévenus par tant de miséricorde et de bonté ! (Psalm. CXII, 2).


MANIFESTATION DE NOTRE FOI

INTÉRIEURE PAR DES ŒUVRES EXTÉRIEURES


Puis ayant ouvert leurs trésors, ils lui offrirent en présent de l'or, de l'encens et de la myrrhe. (Matth., II, 11)


PRIÈRE

Ô saints rois Mages, qui, non contents d'avoir rendu hommage au Sauveur par vos humbles et ferventes adorations, avez encore voulu manifester votre foi par des signes extérieurs et visibles, en lui offrant de l'or, comme à un vrai roi ; de la myrrhe, comme à un vrai homme ; et de l'encens, comme à un vrai Dieu : nous vous remercions de ce bel exemple que vous nous donnez de la nécessité de manifester à Dieu et aux hommes la vérité de la foi par la sainteté des œuvres. Ah ! obtenez-nous aussi la grâce de comprendre que la véritable foi sans actions est morte, et est nulle pour notre salut ; afin que, comme nous avons déjà le bonheur de la posséder par la divine miséricorde, nous ayons aussi le courage et la force de bien agir ; et que, nous montrant vrais chrétiens non-seulement par les paroles, mais encore par les faits, nous puissions gagner la récompense éternelle que Dieu réserve à ceux qui non-seulement croient à ses mystères, mais encore observent fidèlement ses saintes lois. Ainsi soit-il.
Pater, Ave, Gloria...

Extrait de L’Épiphanie par le R.P. D. Joachim Ventura.


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puis ayant ouvert leurs trésors, ils lui offrirent en présent de l'or, de l'encens et de la myrrhe, Méditation sur la Nativité, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 14e Méditation : On lui donna le nom de Jésus, Litanies du Saint Nom de Jésus, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 13e Méditation : On lui donna le nom de Jésus, nom qui lui avait été donné par l'ange, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 12e Méditation : Après huit jours, le saint Enfant fut circoncis, Instruction sur la Circoncision, Méditation sur la Circoncision, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 11e Méditation : Les bergers revinrent en glorifiant et en louant Dieu de tout ce qu'ils avaient vu et entendu, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 10e Méditation : Les bergers se disaient les uns aux autres : Allons jusqu'à Bethléem, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 9e Méditation : Gloire à Dieu au plus haut des Cieux, et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 7e Méditation : Tout à coup l'Ange du Seigneur parut auprès d'eux, Salutation à Marie et à Jésus naissant, Litanies du Saint Enfant-Jésus, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 1re Méditation : Marie s'étant rendue avec Joseph à Bethléem, le temps de son divin enfantement arriva, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 2e Méditation : Je vous annonce un grand sujet de Joie, il vous est né aujourd'hui un Sauveur, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 3e Méditation : Marie mit au monde son fils premier-né, et l'enveloppa de langes, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 4e Méditation : Marie, après avoir enveloppé de langes le saint Enfant, le coucha dans la crèche, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 5e Méditation : Voici le signe qui vous est donné : vous trouverez un enfant enveloppé de langes et couché dans une crèche, Dévotion à la Sainte Enfance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, 6e Méditation : Il y avait là aux environs des bergers qui veillaient et se relevaient les uns les autres pendant la nuit, pour la garde de leurs troupeaux, Litanies du Saint Enfant-Jésus, et Dévotion au Saint Enfant-Jésus : Prière d'amour et Consécration.