samedi 22 février 2020

Des moyens intérieurs qui aident à la perfection, par le R.-P. Jean-Joseph Surin


Extrait du CATÉCHISME SPIRITUEL DE LA PERFECTION CHRÉTIENNE, TOME I, Composé par le R. P. J. J. SURIN, de la Compagnie de Jésus :




Des moyens intérieurs qui aident à la perfection



Quels sont ces moyens ?

Il y en a trois principaux ; le courage, la soumission, et la discrétion.


Quelles sont les occasions où le courage est nécessaire ?

Particulièrement ces trois. 1. Lorsqu'il s'agit de se résoudre à la perfection. Alors les obstacles se présentent en grand nombre, soit du côté des hommes, qui blâment ordinairement un tel dessein, qui raillent, et même qui persécutent ceux qui osent l'entreprendre ; soit du côté de la nature, qui oppose de grandes répugnances ; soit du côté du démon, qui met en œuvre tous ses artifices pour faire naître des difficultés, et pour susciter des contradictions à ceux qui veulent être à Dieu.
2. Quelque sincère, et quelque généreuse que soit la résolution qu'on a formée, il faut du courage pour surmonter les difficultés qui se rencontrent dans l'exécution, pour ne pas se laisser entraîner aux inclinations de la nature ; pour se faire constamment violence, et persévérer dans le travail sans se rebuter, jusqu'à ce qu'on ait acquis l'habitude de dompter ses passions, de marcher en la présence de Dieu, et de s'unir intérieurement à lui.
3. Comme il ne suffit pas d'être fervent pendant quelque mois, et que la perfection demande un long et pénible travail ; cette persévérance coûte, et on a besoin d'un grand courage pour se rendre supérieur à soi-même.


Qu'est-ce que se rendre supérieur à soi-même ?

C'est se fixer dans la pratique du bien, en donnant toute son estime et tout son attachement aux objets surnaturels. C'est acquérir par un long exercice la facilité à se vaincre et à résister à tous les mouvements qui s'opposent à la vertu. Ces deux dispositions sont absolument nécessaires pour établir la paix intérieure, qui est le fondement de la perfection.


D'où vient que la plupart des hommes manquent de courage dans les occasions dont nous venons de parler ?

C'est qu'ils autorisent leur lâcheté, en se persuadant faussement qu'on a besoin d'une grâce extraordinaire, qui tienne du miracle, pour se surmonter soi-même dans les rencontres difficiles ; et lorsque pour les confondre, on leur expose l'exemple des Saints, ils attribuent à des inspirations particulières tout ce que les Saints ont fait de grand. Au lieu qu'il faudrait dire : Si je ne fais pas ce qu'ont fait les Saints, ce n'est point que la grâce me manque ; mais c'est que les Saints ont eu plus de courage et plus de fidélité que moi. Voilà le principe par lequel il faudrait se conduire. En prenant le parti contraire, on met une distance presque infinie entre les Saints et soi ; on se prive de la communication qu'on pourrait avoir avec eux par l'imitation de leurs vertus ; et on s'accoutume à ne consulter que la raison naturelle, et une prudence charnelle, qui sont les deux plus grands ennemis du véritable courage.


En quoi consiste la soumission, qui est le second des moyens intérieurs pour arriver à la perfection ?

Elle consiste dans une entière dépendance de celui qu'on a pris pour guide. Il est vrai que dans le choix d'un directeur, il faut invoquer les lumières du Saint-Esprit, et consulter les règles de la prudence ; mais après l'avoir choisi, il faut s'abandonner à sa conduite. S’il y a un chemin abrégé pour arriver à la perfection, on peut dire avec saint Vincent Ferrier, que c'est l'obéissance. C'est elle qui nous affranchit des peines d'esprit, et des cruelles incertitudes auxquelles sont sujets ceux qui se conduisent par leurs propres lumières. C'est pour cela que saint Jean Climaque dit, qu'obéir, c'est n'avoir autre chose à faire, qu'à suivre aveuglément un mouvement étranger, sans examen et sans discussion ; que c'est subir une espèce de mort volontaire ; que c'est vivre sans curiosité et sans souci ; que c'est renoncer à sa propre sagesse, pour posséder les richesses immenses de la sagesse la plus sublime ; que c'est regarder avec des yeux indifférents, la vie et la mort ; que c'est naviguer sur une mer où l'on ne craint aucun péril ; que c'est voyager sans fatigue, et dans la douceur du sommeil.


Jusqu'où doit s'étendre la soumission ?

Elle ne doit point avoir de bornes. On peut dire en particulier qu'elle doit renfermer non seulement l'exécution, mais encore la volonté et le jugement propre : de sorte qu'on fasse ce qui est commandé avec une docilité d'enfant ; qu'on le fasse volontiers et qu'on l'approuve ; c'est-à-dire, que nous devons obéir à ceux que Dieu nous a donnés pour Supérieurs, ou que nous avons choisis nous-mêmes, comme nous obéirons à Dieu, les consultant dans nos doutes, et nous déterminant par leurs avis.


N'est-il jamais permis de changer de Directeur ?

Il arrive quelquefois que Dieu voulant porter une âme à une plus grande perfection, lui inspire la pensée de quitter son directeur, pour s'adresser à un autre plus propre à seconder les desseins que Dieu a sur elle. C'est agir contre ses véritables intérêts, que de s'attacher pour toujours à quelqu'un, par vœu, ou en quelque autre manière. Pourquoi ne passe conserver dans une entière liberté d'aller à celui que Dieu nous fera connaître devoir nous être plus utile ; parce qu'il a plus de lumière, plus d'expérience, plus de talent pour mener les aines à la perfection ?
Cependant, Dieu qui est le maitre, manifeste quelquefois sa volonté si clairement à certaines personnes, qu'elles n'ont aucun lieu de douter, qu'il ne veuille les fixer à la conduite d'un tel Directeur. Nous en avons un exemple en Madame de Chantal, il est évident que Dieu voulait la sanctifier par le ministère de saint François de Sales. Hors ce cas, il est permis de changer, pourvu que ce soit par un désir sincère de son profit spirituel, et après avoir consulté Notre-Seigneur. Car il faut surtout prendre garde que ce ne soit par curiosité ou par inconstance qu'on fasse le changement.


Que dites-vous de la discrétion qui est le troisième moyen intérieur de perfection ?

C'est une sainte prudence qui éloigne les obstacles à la perfection, en trouvant des tempéraments pour éviter les excès où l'on peut donner dans la vie spirituelle, quand on manque de modération.


Quel est le premier excès qu'il faut éviter ?

Ce sont des efforts que l'on fait pour se tenir dans le recueillement, et pour être attentif à la présence de Dieu au-delà de ses forces et de la portée de la grâce. On tombe dans cet excès par un esprit de propriété, qui fait qu'on compte trop sur ses soins, et qu'on regarda sa perfection comme son propre ouvrage. La tête ne manque point de sa ressentir de ses efforts ; on se lasse, on s'épuise, et on se rend incapable de faire oraison.


Quelles sont les suites de cette indiscrétion, et quel en est le remède ?

Comme tout ce qui est excessif est sujet à se démentir, et que faute de modération, on passe aisément d'une extrémité à l'autre, sous prétexte de se relâcher l'esprit, on tombe dans une dissipation si étrange, qu'on ne sait plus s'occuper que des objets extérieurs. Il est plus aisé de prévenir ce mal que de le guérir ; et on le prévient par la discrétion, qui proportionne attention à la présence divine, aux dispositions naturelles, et au pouvoir que la grâce donne.


Quel est le second excès ?

Il regarde la mortification des passions et des facultés de l'âme, quand on la pousse au-delà des bornes de la prudence. Quoiqu'il ne semble pas qu'on puisse pécher par excès, en s'opposant au mal, et en faisant la guerre au vice ; on peut néanmoins par une ferveur indiscrète accabler la nature, jusqu'à la rendre incapable de fournir aux fonctions de la vie spirituelle, et à se fermer par là le chemin de la perfection. Il appartient encore à la discrétion de corriger cet excès, en nous apprenant à distinguer les mouvements de la grâce, des saillies impétueuses de l'humeur et de l'amour-propre.


Quel est le troisième excès ?

C'est celui dans lequel on tombe en matière de pénitence. Les macérations, les jeûnes, et les autres austérités pratiquées immodérément, détruisent les forces, ruinent la santé, et mettent le corps hors d'état de suivre la ferveur de l'esprit, d'où il arrive que se voyant infirme, on abandonne tout, et que d'un excès de ferveur, on passe à un entier relâchement, jusqu'à être continuellement et servilement occupé du soin de son corps. Tout cela prouve combien la discrétion est nécessaire dans la vie spirituelle. S. Antoine en comprenait la nécessité, lui qui avait coutume de l'appeler la première des vertus, sans laquelle il n'y a ni règle ni ordre dans la conduite de l'homme.


N'y a-t-il point d'autre moyen intérieur pour nous aider à acquérir la perfection ?

Il y en a encore un très-efficace ; c'est une sainte familiarité avec J. C., qui s'appelle lui-même la voie pour arriver à tout bien. Cette familiarité est d'un si grand prix, qu'on ne saurait l'acheter trop cher. Rien ne contribue tant à l'acquérir, que la considération des mystères, des paroles et des actions de N. Sauveur ; il faut se les proposer selon l'ordre que nous avons prescrit dans le Chapitre 3. de la seconde partie, et s'entretenir avec J. C. dans les différents états de sa vie. Ces états sont, par exemple,

Jésus dans les sacrés flancs de la sainte Vierge.
Jésus dans la Crèche.
Jésus Enfant.
Jésus fuyant en Égypte.
Jésus dans le Temple.
Jésus à Nazareth.
Jésus au Désert.
Jésus prêchant.
Jésus faisant des Miracles.
Jésus aux prises avec les Pharisiens.
Jésus dans le Cénacle.
Jésus au Jardin des Oliviers.
Jésus chez Caïphe, chez Hérode, et chez Pilate.
Jésus sur le Calvaire.
Jésus dans le Sépulcre.
Jésus dans sa vie glorieuse ; ce qui comprend son séjour sur la terre après sa Résurrection.



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